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22/10/2018 | FRANCE | N°17/011201

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, 04, 22 octobre 2018, 17/011201


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 373 DU VINGT DEUX OCTOBRE DEUX MILLE DIX HUIT

AFFAIRE No : 17/01120

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes BASSE-TERRE du 6 juin 2013-Section Commerce.

APPELANTE

SA LA POSTE
[...]
Représentée par Maître André X... (Toque 60), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

INTIMÉ

Monsieur A... Y...

[...]
Représentée par Maître Johann Z... (Toque 90), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

COMPOSITION DE LA COUR :


En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 septembre 2018, en...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 373 DU VINGT DEUX OCTOBRE DEUX MILLE DIX HUIT

AFFAIRE No : 17/01120

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes BASSE-TERRE du 6 juin 2013-Section Commerce.

APPELANTE

SA LA POSTE
[...]
Représentée par Maître André X... (Toque 60), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

INTIMÉ

Monsieur A... Y...

[...]
Représentée par Maître Johann Z... (Toque 90), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 septembre 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Gaëlle Buseine, conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Rozenn-Le-Goff, conseiller, présidente,
Mme Valérie Marie-Gabrielle, conseiller,
Mme Gaëlle Buseine, conseiller,

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 22 octobre 2018.

GREFFIER Lors des débats : Mme Lucile Pommier, greffier principal.

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par Mme Rozenn Le-Goff, conseiller, présidente et par Mme Valérie Souriant, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure

Il résulte des explications et pièces fournies par les parties, les éléments suivants.

Mme A... Y... a été embauchée en qualité d'agent des services tri et manutention, par LA POSTE, dans le cadre d'un contrat à durée déterminée, ayant pour motif l'accroissement temporaire de l'activité, et produisant ses effets du 25 novembre 2010 au 31 mars 2011.
A compter du 1er avril 2011, elle était embauchée par la société MANPOWER, et mise à disposition de LA POSTE, selon plusieurs contrats de travail temporaires successifs, en qualité de factrice.
Son dernier contrat a pris terme le 7 septembre 2012.

Mme Y... saisissait le conseil de prud'hommes de Basse-Terre le 28 juin 2012, afin de solliciter la requalification de ses contrats en un contrat à durée indéterminée, et de faire analyser la rupture de la relation de travail en un licenciement nul, sollicitant en conséquence sa réintégration au sein de LA POSTE.

Par jugement du 6 juin 2013, le conseil de prud'hommes a :
- ordonné la requalification de l'ensemble des contrats de travail en un seul contrat, à durée indéterminée,
- constaté la nullité du licenciement,
- ordonné la réintégration de Mme Y... au sein de LA POSTE,
- condamné LA POSTE à payer la somme de 2 000€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

LA POSTE interjetait régulièrement appel du jugement le 5 aout 2013, sollicitant l'infirmation du jugement entrepris, que Mme Y... soit déboutée de l'ensemble de ses demandes, et condamnée au paiement de la somme de 5 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Mme Y... sollicitait quant à elle :
- la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a requalifié les contrats de travail en un contrat à durée indéterminée, prononcé la nullité du licenciement, et ordonné la réintégration de la salariée au sein de LA POSTE,
- la réformation pour le surplus, et statuant à nouveau, que LA POSTE soit condamnée à réintégrer la salariée dans les 15 jours suivant la notification de l'arrêt, et passé ce délai, que LA POSTE soit condamnée à payer le salaire qu'aurait dû percevoir Mme Y... depuis le mois de septembre 2012, sous astreinte de 250€ par jour, ainsi que le paiement de la somme de 5 000€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par arrêt du 17 novembre 2014, la cour d'appel de Basse-Terre a déclaré irrecevables les conclusions déposées par l'intimée le 6 octobre 2014, infirmé le jugement déféré, et statuant à nouveau, a débouté Mme Y... de l'ensemble de ses demandes, et l'a condamnée aux entiers dépens.

Mme Y... formait un pourvoi en cassation.
Par arrêt du 21 juin 2017, la Cour de cassation a cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Basse-Terre le 17 novembre 2014, et remis en conséquence les parties dans l'état où elles se trouvaient avant le dit arrêt, les renvoyant devant la même Cour d'appel, autrement composée, et condamnant LA POSTE aux dépens.

LA POSTE saisissait la Cour d'appel de Basse-Terre le 26 juillet 2017.

L'affaire étant en état d'être jugée, l'ordonnance de clôture est intervenue le 1er février 2018, la renvoyant à l'audience des débats du 17 septembre 2018.

*************************

Par conclusions notifiées le 9 octobre 2017, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé exhaustif des moyens de LA POSTE, celle-ci sollicite l'infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau :
- qu'il soit constaté que la durée des contrats de mission n'excède pas 18 mois,
- qu'il soit dit qu'il n'y a pas lieu à requalification,
- que Mme Y... soit déboutée de l'ensemble de ses demandes et condamnée au paiement de la somme de 5 000€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Par conclusions notifiées le 23 janvier 2018, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé exhaustif des moyens de Mme Y..., celle-ci sollicite :
- que soit ordonnée la requalification de l'ensemble des contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée,
- que soit constatée la nullité de licenciement,
- qu'il soit ordonné à LA POSTE de réintégrer la salariée dans un délai de 15 jours suivant notification de l'arrêt à intervenir, ce sous astreinte de 250€ par jour de retard,
- que LA POSTE soit condamnée à verser les salaires que Mme Y... aurait dû percevoir depuis le mois de septembre 2012, soit la somme de 105 120€, ainsi que la somme de 2 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

*******************

Motifs de la décision

Sur la requalification

Mme Y... expose avoir été en fonction au sein de LA POSTE depuis le 25 novembre 2010, sans aucune interruption.

L'article L1242-2 du code du travail énonce les cas limitatifs de recours au contrat à durée déterminée. Quel que soit son motif, le CDD ne doit avoir ni pour objet, ni pour effet de pourvoir un emploi stable et permanent lié à l'activité normale de l'entreprise.

Il apparait à l'analyse des pièces produites aux débats, que Mme Y... a d'abord été embauchée par LA POSTE en qualité d'agent des services tri et manutention, dans le cadre d'un contrat à durée déterminée pour accroissement d'activité, produisant effet du 25 novembre 2010 au 31 mars 2011, puis qu'elle a signé onze contrats avec la société d'intérim MANPOWER, pour travailler comme facteur au sein de LA POSTE. Ces onze contrats se succèdent sans interruption, produisant effet entre le 1er avril 2011 et le 1er septembre 2012.
Les deux premiers contrats sont conclus au motif d'un accroissement temporaire d'activité, les quatre suivants ont pour motif le remplacement de quatre salariés différents, et les cinq derniers contrats ont pour motif l'accroissement temporaire d'activité.

Il convient de relever que Mme Y... a travaillé au sein de LA POSTE pour une période ininterrompue de plus de 22 mois, dans le cadre de contrats successifs, pour des motifs différents, dont à neuf reprises un accroissement temporaire d'activité, la plus longue période au même motif allant du 5 octobre 2010 au 1er septembre 2012, dans le cadre de cinq contrats d'intérim successifs, sans interruption.
Il convient de constater, au vu de cette longue période de plus de 24 mois durant laquelle Mme Y... a travaillé au sein de LA POSTE, au même poste, avec le même motif de recours à un contrat à durée déterminée, que le véritable objet de cette succession de contrat était de pourvoir durablement à un emploi lié à l'activité normale et permanente de LA POSTE.

L'article L1244-3 du code du travail, dans sa version alors en vigueur, dispose :
« A l'expiration d'un contrat de travail à durée déterminée, il ne peut être recouru, pour pourvoir le poste du salarié dont le contrat a pris fin, ni à un contrat à durée déterminée ni à un contrat de travail temporaire, avant l'expiration d'un délai de carence calculé en fonction de la durée du contrat, renouvellement inclus. Ce délai de carence est égal :
1o Au tiers de la durée du contrat venu à expiration si la durée du contrat, renouvellement inclus, est de quatorze jours ou plus ;
2o A la moitié de la durée du contrat venu à expiration si la durée du contrat, renouvellement inclus, est inférieure à quatorze jours.
Les jours pris en compte pour apprécier le délai devant séparer les deux contrats sont les jours d'ouverture de l'entreprise ou de l'établissement concerné ».

L'article L1242-3 du code du travail dispose : « est réputé à durée indéterminée tout contrat de travail conclu en méconnaissance des dispositions des articles L. 1242-1 à L. 1242-4, L. 1242-6 à L. 1242-8, L. 1242-12, alinéa premier, L. 1243-11, alinéa premier, L. 1243-13, L. 1244-3 et L. 1244-4 ».

Au vu des différents contrats conclus entre MANPOWER et Mme Y..., il apparait que la société MANPOWER n'a pas respecté les délais de carence entre plusieurs missions au sein de la même entreprise utilisatrice et sur le même poste.

Il appert que tant la société MANPOWER, entreprise de travail temporaire, que LA POSTE, entreprise utilisatrice, ont chacune manqué à leurs obligations respectives concernant les contrats de travail conclus par Mme Y..., ce qui emporte requalification du contrat de travail.

Il convient de sursoir à statuer sur les autres demandes, afin de rouvrir les débats et d'appeler en la cause la société MANPOWER, les deux entreprises devant supporter in solidum les conséquences de leurs manquements.

Par ces motifs

La Cour, statuant publiquement par arrêt mixte contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a requalifié les contrat à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée,

L'infirme pour le surplus,

Et statuant à nouveau,

Sursoit à statuer pour le surplus,

Rabat l'ordonnance de clôture en date du 1er février 2018,

Ordonne la réouverture des débats,

Dit que la société MANPOWER doit être appelée en la cause,

Renvoie l'affaire à la conférence de mise en état du l'audience du 25 mars 2019 à 14h30,

Réserve tout autre moyen et toute autre prétention des parties, ainsi que les dépens.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 17/011201
Date de la décision : 22/10/2018
Sens de l'arrêt : Réouverture des débats

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2018-10-22;17.011201 ?
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