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06/08/2018 | FRANCE | N°17/006381

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, 04, 06 août 2018, 17/006381


VS-BR

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 299 DU SIX AOUT DEUX MILLE DIX HUIT

AFFAIRE No : No RG 17/00638

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 26 avril 2017-Section Activités Diverses

APPELANTE

Association KARUKERA LOGEMENT
[...]
Représentée par Maître Florence D... X... (Toque 1), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

INTIMÉE

Madame E..., Mathilde Y...
[...]
Représentée par Maître Jérôme Z... de la SCP MORTON etamp; ASSOCIES (Toque

104), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 4 juin 2018, e...

VS-BR

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 299 DU SIX AOUT DEUX MILLE DIX HUIT

AFFAIRE No : No RG 17/00638

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 26 avril 2017-Section Activités Diverses

APPELANTE

Association KARUKERA LOGEMENT
[...]
Représentée par Maître Florence D... X... (Toque 1), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

INTIMÉE

Madame E..., Mathilde Y...
[...]
Représentée par Maître Jérôme Z... de la SCP MORTON etamp; ASSOCIES (Toque 104), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 4 juin 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Bernard Rousseau, président de chambre, président,
Mme Marie-Josée Bolnet, conseillère,
Madame Gaëlle Buseine, conseillère,

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 6 août 2018

GREFFIER Lors des débats Mme Lucile POMMIER, greffier principal

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Mme Valérie Souriant, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

******

Vu le jugement du 26 avril 2017, par lequel le conseil de prud'hommes de Pointe à Pitre a dit que la rupture du contrat de travail de Mme Y... s'analysait en un licenciement abusif et condamnait l'Association KARUKERA LOGEMENT à payer à Mme Y... les sommes suivantes :
-14 144,21 euros à titre de rappel de salaire, de prime de 15 % de vie chère, et de prime d'ancienneté, et d'indemnité de congés payés afférente,
-1482,95 euros à titre d'indemnité de préavis,
-148,25 euros à titre de congés payés sur préavis,
-16 800 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,
-1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
l'exécution provisoire de la décision étant ordonnée,

Vu l'appel interjeté le 3 mai 2017 par l'Association KARUKERA LOGEMENT,

Vu les conclusions en date du 27 octobre 2017 de l'Association KARUKERA LOGEMENT,

Vu les conclusions en date du 29 août 2017 de Mme Y...,

Motifs de la décision :

Après avoir été employée à compter du 17 novembre 1990 par l'Association P.A.C.T., Mme Y..., suite au redressement judiciaire de ladite association dans le cadre duquel celle-ci était cédée à l'Association KARUKERA LOGEMENT, entrait au service de cette dernière, les contrats de travail des salariés devant être poursuivis par le cessionnaire.

Suite à un entretien préalable fixé au 12 janvier 2015, Mme Y... acceptait le 28 janvier 2015 la proposition de contrat de sécurisation professionnelle et l'employeur lui notifiait par courrier du 2 février 2015 son licenciement pour motif économique.

Sur la demande de rappel de rémunération :

Après avoir été recrutée en qualité de secrétaire dans le cadre de deux contrats à durée déterminée successifs, Mme Y... était engagée en qualité de secrétaire de direction à compter du 17 novembre 1990 par un contrat de travail à durée indéterminée.

Il y était stipulé que le salaire de base de Mme Y... était constitué par une partie fixe calculée sur la base de 600 points selon la classification nationale des employés P.A.C.T. ARIM. Il était précisé que la partie fixe et la valeur du point étaient ceux de l'accord salarial annuel de la Fédération Nationale des P.A.C.T. Il était prévu que le salaire de base soit majoré de 15 % et qu'une prime de 13 ème mois calculée suivant les valeurs du point et de la partie fixe au 31 décembre, était versée chaque fin d'année.

Un avenant en date du 23 septembre 1992, portait modification à compter du 1er septembre 1992 du contrat de travail concernant les fonctions de Mme Y... qui allait exercer dorénavant celles de responsable de cellule dont les tâches étaient définies dans le plan d'entreprise adopté par le conseil d'administration du 2 avril 1992.

L'examen des bulletins de salaire de Mme Y... montre que ceux-ci précisaient alors un emploi de responsable de cellule, sans précision de coefficient jusqu'en 2002, et qu'ensuite il était indiqué un coefficient 800.

Par courrier du 22 juin 2007, Mme Y... se portait candidate au poste de "conseiller habitat". Cette emploi figure sur ses bulletins de salaire à partir de 2008, tout d'abord sans mention de coefficient ; à compter de janvier 2014 figurait le coefficient 923, puis à compter du janvier 2015 le coefficient 800.

Il résulte des tableaux versés au débat par Mme Y... qu'elle revendique pour la période de janvier à juin 2009, un salaire de base d'un montant de 2007,99 euros calculé à partir d'une partie fixe de 647,5820 euros (valeur conventionnelle), en y ajoutant le produit de la valeur du point de 1,7005 euros (valeur conventionnelle) par le coefficient 800, le montant total ainsi obtenu, à savoir 2007,9820 euros constituant le salaire de base conventionnel devant être majoré de 15 % au titre de la prime de vie chère, ce dont il résulte un salaire total conventionnel de 2309,19 euros, auquel s'ajoute la prime d'ancienneté de 20 %.

Toutefois il ressort des tableaux produits au débat que l'association a versé à Mme Y... un salaire mensuel supérieur au salaire de base conventionnel, ce qui confirme que l'employeur a entendu intégrer la prime de vie chère dans le salaire mensuel versé à la salariée, sans mentionner séparément ladite prime sur la fiche de paie, ce qui est conforme aux dispositions de l'accord de classification du 25 octobre 1985, complétant la convention collective nationale des personnels PACT-ARIM en date du 21 octobre 1983, lequel dans son article 7 dernier alinéa rappelle l'intérêt de "faire figurer sur la feuille de paie, le salaire réel, en une seule rubrique".

Ainsi pour janvier 2009, le salaire de base conventionnel augmenté de la prime de vie chère s'établissait à la somme de 2309,19 euros, alors que l'association a versé un salaire de 2231,98 euros. Il en résulte un écart de 77,21 euros. Sur cet écart dont la régularisation était à la charge de l'employeur, s'ajoutait une régularisation du montant de la prime d'ancienneté de 20 % calculé sur ce montant, soit la somme de 15,44 euros, étant relevé que l'employeur avait versé ladite prime d'ancienneté de 20 % sur le salaire qu'il avait alors réglé à la salariée.

La Cour constate donc que si l'employeur a entendu intégrer la prime de vie chère dans le salaire de base, il n'a pas complètement respecté les minima conventionnels.

La prise en compte de l'évolution des minima conventionnels en comparaison des salaires réellement versés chaque mois par l'association, montre les écarts suivants à régulariser par l'employeur :
-de février à juin 2009, la somme de 128,40 euros,
-de juillet 2009 à décembre 2010, la somme de 647,18 euros,
-de janvier à juin 2011, la somme de 258,42 euros,
-de juillet à décembre 2011, la somme de 221,25 euros,
-de janvier à juillet 2012, la somme de 544,22 euros,
-de juillet 2012 à décembre 2012, la somme de 739,49 euros,
-de janvier 2013 à décembre 2013, la somme de 1558,62 euros,
-de janvier 2014 à décembre 2014, la somme de 1566,62 euros,
-pour janvier 2015, la somme de 120,91 euros.

Les écarts ainsi calculés tiennent compte des sommes qui auraient dû être versées au titre du 13 ème mois, et des sommes réellement versées à ce titre.

Au total l'employeur restait redevable de la somme 5877,76 euros représentant l'écart entre d'une part le montant des salaires conventionnels, y compris prime de vie chère, prime d'ancienneté et 13 ème mois, qui auraient dû être versés à Mme Y... pendant la période de janvier 2009 à janvier 2015, et d'autre part les salaires qui lui ont été réellement versés, ce qui représente un écart moyen mensuel de 80,51 euros.

Les sommes ainsi restant dues à Mme Y..., ont été réglées à celle-ci lors de l'établissement du solde de tout compte en date du 10 mars 2015 (pièce 17-e de l'appelante).

Il ne reste donc aucune somme à payer à Mme Y... au titre d'un rappel de rémunération.

L'employeur ayant mentionné sur le bulletin de salaire délivré au titre du mois de février 2015, le rappel de salaire de 5877,76 euros, il n'y a pas lieu d'ordonner la délivrance de bulletins de salaire rectifiés.

Sur l'omission d'affiliation à la caisse de retraite des cadres :

Mme Y... invoque l'accord du 30 novembre 2006 relatif à la modification de l'accord de classification du 25 novembre 2003, selon lequel sont affiliés, depuis le 01/07/2000, à l'article 4 bis de la convention collective nationale du 14 mars 1947 correspondant aux salariés assimilés cadres, notamment les conseillers habitat 4 ème échelon.

Selon la classification visée par l'article 1er de l'accord du 25 octobre 1985 intitulé "classification et salaires", le conseiller habitat 4 ème échelon est titulaire de la licence ou d'un diplôme supérieur reconnu et en plus des tâches définies au 3 ème échelon est capable de rédiger des documents ou synthèse pour le public, les administrateurs, le personnel et de participer aux études de portée générale, étant précisé que le 3 ème échelon implique notamment la capacité d'assurer le montage d'opérations complexes et la gestion des comptes clients, de préparer les négociations de l'association avec les partenaires, et d'assurer la coordination de plusieurs agents.

Dans ses écritures, Mme Y... se borne à revendiquer l'emploi de conseiller habitat 4 ème échelon, sans démontrer qu'elle est titulaire d'un des diplômes requis, ni qu'elle assure les tâches sus-énumérées. Dès lors il ne peut être considéré qu'elle puisse être classée au 4 ème échelon, et prétendre être assimilée cadre au titre de l'article 4 bis de la convention collective nationale sus-citée.

Elle sera donc déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour non-affiliation à l'AGIRC.

Sur le travail dissimulé :

Mme Y... fonde sa demande d'indemnisation pour travail dissimulé, sur le fait qu'en ne procédant pas à son affiliation à la caisse de retraite des cadres, l'employeur se serait soustrait intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement desdites cotisations ou contributions.

Toutefois Mme Y... ne bénéficiant pas d'une classification lui ouvrant droit au statut de cadre ou assimilé cadre, l'employeur n'avait pas à l'affilier à la caisse de retraite des cadres.

Mme Y... sera donc déboutée de sa demande d'indemnisation pour travail dissimulé.

Sur le harcèlement moral :

Pour Mme Y..., il ne fait aucun doute que ses conditions de travail ont connu une constante dégradation portant atteinte à ses droits et ont compromis son avenir professionnel, son état de santé s'en étant trouvé altéré.

Mme Y... ne caractérise nullement dans ses écritures du 29 août 2017 l'existence d'une dégradation de ses conditions de travail, étant observé qu'il résulte des notes et correspondances versées au débat que Mme Y..., comme les autres conseillers habitat, s'est constamment opposée aux mesures de réorganisation nécessaires à l'association pour assurer sa survie, Mme Y... considérant que les projets de réorganisation seraient source de dégradation de ses conditions de travail, ce qui n'est nullement démontré.

Par ailleurs le fait que l'employeur ait minoré, en moyenne de 80,51 euros par mois, le salaire qu'il devait verser à Mme Y... en application des dispositions conventionnelles et contractuelles relatives au salaire de base, de la prime de vie chère et de la prime d'ancienneté, ne saurait caractériser des agissements de harcèlement moral, ces manquements de l'employeur procédant d'une application imparfaite des dispositions conventionnelles, qu'il a déjà régularisée.

Mme Y... doit donc être débouté de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral.

Sur le licenciement :

Dans sa lettre de licenciement du 2 février 2015, l'employeur justifiait le licenciement économique de Mme Y... en invoquant un ralentissement très important de l'activité essentielle de l'association, s'inscrivant dans le Dispositif Partenarial d'Amélioration de l'Habitat (DPAH), le nombre des dossiers traités dans le cadre de ce dispositif, source exclusive des produits d'exploitation de l'association, ayant chuté continuellement au cours des dernières années précédant le licenciement, passant de 329 en 2011, à 91 en 2014.

Dans son courrier l'employeur indiquait que les produits d'exploitation provenant essentiellement du financement public des dossiers DPAH traités, d'un montant de 1460 578 euros en 2012, n'atteignaient plus que 1 030 784 euros en 2013, soit une baisse de 29,43 %, lesdits produits ne s'élevant qu'à 331 805 euros au 30 juin 2014, avec une prévision de 900 000 euros pour le 31 décembre 2014, soit une nouvelle baisse de 22,69 % par rapport à 2013, alors que les charges d'exploitation restaient relativement stables, s'élevant à 1 483 611 euros pour l'année 2012, à 1 434 795 euros pour l'année 2013 et à 664 732 au 30 juin 2014, avec une prévision de 1 350 000 euros au 31 décembre 2014, ce qui générait un accroissement continue du déficit d'exploitation, passant de -23 033 euros en 2012, à
-404 011 euros en 2013, puis à -332 927 euros au 30 juin 2014 avec une prévision à - 450 000 euros au 31 décembre 2014.

L'employeur expliquait qu'au vu de ces difficultés économiques significatives et persistantes, il était apparue l'impérieuse nécessité pour l'association d'adapter sa structure et son organisation au niveau d'activité afin d'assurer sa pérennité, l'association étant amenée dans ce contexte à envisager la suppression de trois emplois de conseiller habitat. Il précisait que compte tenu de la dimension très réduite de l'association et de sa non-appartenance à un groupe de sociétés, aucune solution de reclassement n'avait pu être identifiée au sein de l'association.

Il ajoutait qu'il était contraint, après application des critères d'ordre des licenciements, de notifier à Mme Y... la rupture de son contrat de travail.

Les explications ainsi fournies par l'employeur sont corroborés par les documents qu'il produit.

Dans sa lettre du 16 juillet 2014, s'inscrivant dans une procédure d'alerte, le cabinet KPMG AUDIT DFA, commissaire aux compte de l'Association KARUKERA LOGEMENT, expose que des facteurs externes liés d'une part à la concurrence accrue des autres opérateurs et d'autre part à la baisse des financements publiques, contribuaient fortement à la diminution du volume des dossiers pouvant être traités par KARUKERA LOGEMENT, les honoraires perçus étant moindres.

Le commissaire aux comptes relevait que les charges de structure semblaient alors en inadéquation avec le volume d'activité. Il en concluait que les faits qu'il mentionnait ainsi étaient de nature à compromettre la continuité d'exploitation de l'Association KARUKERA LOGEMENT.

Le commissaire aux comptes terminait son courrier en demandant au président de l'association, de lui donner, conformément aux dispositions légales et réglementaires, par lettre recommandée avec avis de réception, dans le délai de 15 jours, son analyse de la situation et le cas échéant les mesures envisagées.

Par courrier du 1er août 2014, le président de l'association exposait une analyse de la situation au cours des périodes antérieures, rappelant qu'en 2012, au vu des résultats d'activité, il avait été décidé une nouvelle organisation qui avait été refusée par les conseillères habitat, ce qui avait malheureusement fragilisé davantage la structure. Il indiquait qu'au cours du deuxième semestre 2013, il avait été engagé des négociations avec le personnel pour aboutir à des départs négociés se traduisant par trois ruptures conventionnelles., mais que devant l'absence de recettes nouvelles d'ici la fin de l'année, 2014, voire 2015, compte tenu de la baisse des recettes et afin d'éviter une situation irrémédiable, il était envisagée pour le quatrième trimestre 2014 le licenciement économique de trois agents.

La dégradation du montant des produits d'exploitation et des résultats d'exploitation au cours des années 2012 et 2013 et du premier semestre 2014, mentionnée dans la lettre de licenciement, est corroborée par les états financiers produits au débat établis par le Cabinet d'expertise comptable Maurice CLAIRE.

Les documents comptables établis par le cabinet FIDUCIAL EXPERTISE pour l'exercice 2014, confirment la dégradation de la situation financière de l'entreprise avec des produits d'exploitation n'atteignant que 957 678 euros et des charges atteignant 1 394 996 euros.

Ainsi les difficultés économiques de l'association sont avérées.

Dans sa note remise aux délégués du personnel le 15 décembre 2014, l'employeur explique qu'en raison de la diminution des dossiers DPAH à traiter, et afin d'ajuster les charges de l'association à la baisse des financements publics, elle devait procéder au licenciement économique de 3 personnes exerçant l'emploi de conseiller habitat.

Dans cette note l'employeur s'explique sur les difficultés d'aboutir à un reclassement interne des salariés visés par le projet de licenciement économique en faisant état de l'effectif réduit à 16 salariés de la structure, de la non-appartenance de l'association à un groupe, et de l'absence de poste disponible compatible avec les compétences et qualifications des salariées concernées.

Il est bien certain qu'ayant déjà, au cours des mois précédents, réduit de façon significative les effectifs de la structure au moyen de départs négociés sous la forme de ruptures conventionnelles, il était impossible de procéder au reclassement interne de Mme Y... puisque le personnel de l'association allait être réduit au niveau strictement minimal pour assurer la continuité de l'entreprise, aucun poste n'étant dès lors disponible quelque soit la qualification de la salariée licenciée.

L'impossibilité de reclassement interne est confirmée par la décision de l'inspectrice du travail dont l'autorisation a été sollicitée pour le licenciement économique de Mme A..., salariée protégée, occupant un emploi de conseiller habitat comme Mme Y..., et faisant l'objet d'un licenciement pour motif économique en même temps que cette dernière.

En effet l'inspectrice du travail relève dans les motifs de sa décision portant autorisation de licenciement, que "l'enquête conduite n'a pas permis de mettre en évidence l'existence d'une solution de reclassement qui aurait pu être proposée à la salariée".

Dans ses conditions le licenciement de Mme Y... doit être considéré comme reposant sur une cause réelle et sérieuse et il ne peut être fait droit à sa demande de paiement de dommages et intérêt pour licenciement abusif.

La Cour constate par ailleurs que l'employeur s'est parfaitement expliqué sur la mise en oeuvre de l'application des critères retenus pour déterminer l'ordre des licenciements, en détaillant le nombre de points attribués à chacune des salariés occupant un emploi de conseiller habitat, seule catégorie de personnel visée par la mesure de licenciements économiques, en prenant en compte la situation de famille, l'ancienneté, le handicap, les qualités professionnelles et l'âge de chaque personne concernée, l'analyse de ces critères faisant ressortir que Mmes A..., Y... et B... devaient être classées à une position telle qu'elles ne pouvaient bénéficier d'un maintien dans l'entreprise, contrairement à Mme C..., quatrième conseiller habitat dont le poste était conservé.

Mme Y... ayant adhéré à un contrat de sécurisation professionnelle, l'employeur a dû verser à Pôle Emploi, en conformité avec la réglementation en vigueur, le montant de l'indemnité conventionnelle de préavis, équivalente à 2,5 mois de salaire, étant observé que Mme Y... n'ayant pas le statut de cadre ne pouvait prétendre à une indemnité compensatrice de préavis équivalente à 3 mois de salaire.

L'équité n'implique pas qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs,

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme le jugement en ce qu'il a dit que le licenciement de Mme Y... s'analysait en un licenciement abusif et en ce qu'il a condamné l'Association KARUKERA LOGEMENT au paiement d'un rappel de salaire, d'une indemnité de préavis, de congés payés sur préavis, de dommages et intérêts pour rupture abusive et d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Et statuant à nouveau sur ces chefs de demandes,

Déboute Mme Y... de ses demandes tendant à obtenir condamnation de l'Association KARUKERA LOGEMENT à lui payer un rappel de salaire, d'une indemnité de préavis, de congés payés sur préavis, de dommages et intérêts pour rupture abusive et d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que les dépens sont à la charge de Mme Y...,

Déboute les parties de toutes conclusions plus amples ou contraires.

le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 17/006381
Date de la décision : 06/08/2018
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2018-08-06;17.006381 ?
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