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06/08/2018 | FRANCE | N°17/002931

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, 04, 06 août 2018, 17/002931


GB-LP

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 291 DU SIX AOÛT DEUX MILLE DIX HUIT

AFFAIRE No : No RG 17/00293

Décision déférée à la Cour : Jugement du conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre du 2 Février 2017. Section Commerce

APPELANTE

SARL CGTS (COMPAGNIE GUADELOUPÉENNE DE TRANSPORT SCOLAIRE)
[...]
Représentée par Me Isabelle D..., avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BARTH

INTIMÉ

Monsieur Jean-Pierre Y...

[...]
Représenté par Me Z... A... (SELARL JUDEXIS), avocat au barreau de GUA

DELOUPE/ST MARTIN/ST BARTH

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 4 Juin 2018 , en audience publique, devant la ...

GB-LP

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 291 DU SIX AOÛT DEUX MILLE DIX HUIT

AFFAIRE No : No RG 17/00293

Décision déférée à la Cour : Jugement du conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre du 2 Février 2017. Section Commerce

APPELANTE

SARL CGTS (COMPAGNIE GUADELOUPÉENNE DE TRANSPORT SCOLAIRE)
[...]
Représentée par Me Isabelle D..., avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BARTH

INTIMÉ

Monsieur Jean-Pierre Y...

[...]
Représenté par Me Z... A... (SELARL JUDEXIS), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BARTH

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 4 Juin 2018 , en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président,,
Mme Marie-Josée BOLNET, conseillère,
Madame Gaëlle BUSEINE, conseillère,

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 06 août 2018

GREFFIER Lors des débats Mme Lucile POMMIER, greffier,

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Valérie SOURIANT, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

M. B... a été embauché par la SARL COMPAGNIE GUADELOUPEENNE DE TRANSPORT SCOLAIRE (CGTS) à compter du 2 mars 1994, en qualité de conducteur.

Du 12 mai 2015 au 20 mai 2015, les salariés ont initié un mouvement de grève.

Par lettre du 1er juillet 2015, l'employeur convoquait M. B... à un entretien préalable à son éventuel licenciement, fixé le 10 juillet 2015.

Par lettre du 5 août 2015, l'employeur notifiait à M. B... son licenciement pour faute grave.

Estimant son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, M. B... saisissait le 28 octobre 2015 le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre aux fins de versement de diverses indemnités liées à la rupture de son contrat de travail.

Par jugement rendu contradictoirement le 2 février 2017, le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre a :
- condamné la SARL COMPAGNIE GUADELOUPEENNE DE TRANSPORT SCOLAIRE (CGTS), en la personne de son représentant légal, à payer à Monsieur Jean-Pierre B... les sommes suivantes :
* 17319,32 euros au titre de l'indemnité de licenciement,
* 3121,20 euros au titre du préavis,
* 312,12 euros au titre des congés payés sur préavis,
* 9363,60 euros au titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait du licenciement nul,
- dit que les rémunérations et indemnités mentionnées à l'article R 1454-14 du code du travail, dans la limite de 9 mois de salaires calculés sur la moyenne des 3 derniers mois de salaire sont de droit exécutoire en application de l'article R 1454-28 du code du travail, la moyenne des 3 derniers mois de salaires s'élevant à 1560,60 euros,
- condamné la société SARL COMPAGNIE GUADELOUPEENNE DE TRANSPORT SCOLAIRE (CGTS), en la personne de son représentant légal, à payer à Monsieur Jean-Pierre B... la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société SARL COMPAGNIE GUADELOUPEENNE DE TRANSPORTS SCOLAIRES (CGTS) aux entiers dépens.

Selon déclaration reçue au greffe de la cour le 2 mars 2017, la SARL CGTS a formé appel dudit jugement, qui lui a été notifié le 6 février 2017.

Par conclusions notifiées à l'intimé le 15 juillet 2017, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, la SARL CGTS demande à la cour de :
- infirmer le jugement en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
- juger que le licenciement pour faute grave de M. B... est fondé,
- juger que la SARL CGTS n'a pas commis de faute grave à l'égard de M. B... concernant le non-paiement des salaires,
- débouter M. B... de l'intégralité de ses demandes d'indemnités,
- condamner M. B... à payer la somme de 1500 euros au titre de l'article 70 du CPC, ainsi qu'aux entiers dépens,
- débouter M. B... pour le surplus.

La SARL CGTS soutient que :
- le salarié, qui n'a pas averti son employeur qu'il savait être en difficultés, de son intention de faire grève, a commis une faute grave justifiant son licenciement,
- les délais afférents à la procédure de licenciement ont été respectés,
- aucune faute grave ne saurait être reprochée à la société,
- les demandes indemnitaires du salarié sont infondées.

Par conclusions notifiées à l'appelante le 28 juin 2017, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, M. B... demande à la cour de :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement,
- condamner la SARL CGTS à lui payer la somme de 3500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens d'instance.

Il expose que :
- l'employeur, en ne lui réglant pas ses salaires, a commis une faute grave, à l'origine du mouvement de grève, qui présentait un caractère licite,
- les délais dans lesquels se sont tenus la procédure de licenciement mettent en évidence l'absence de justification d'une rupture immédiate du contrat de travail,
- il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir prévenu l'employeur de l'exercice du droit de grève, alors que celui-ci n'a nullement informé les salariés du nécessaire respect d'un préavis,
- en l'absence de faute lourde, l'employeur ne peut licencier le salarié pour faits de grève,
- il est fondé à solliciter le versement d'indemnités liées à la rupture de son contrat de travail.

MOTIFS :

Sur le licenciement :

En ce qui concerne le bien fondé du licenciement :

Aux termes de l'article L. 2511-1 du code du travail, l'exercice du droit de grève ne peut justifier la rupture du contrat de travail, sauf faute lourde imputable au salarié et tout licenciement prononcé en l'absence de faute lourde est nul de plein droit.

Aux termes de l'article L2512-2 du même code, lorsque les personnels mentionnés à l'article L. 2512-1 exercent le droit de grève, la cessation concertée du travail est précédée d'un préavis. Le préavis émane d'une organisation syndicale représentative au niveau national, dans la catégorie professionnelle ou dans l'entreprise, l'organisme ou le service intéressé. Il précise les motifs du recours à la grève. Le préavis doit parvenir cinq jours francs avant le déclenchement de la grève à l'autorité hiérarchique ou à la direction de l'établissement, de l'entreprise ou de l'organisme intéressé. Il mentionne le champ géographique et l'heure du début ainsi que la durée limitée ou non, de la grève envisagée. Pendant la durée du préavis, les parties intéressées sont tenues de négocier.

En l'espèce, la lettre de licenciement du 5 août 2015, qui fixe les limite du litige, précise "Refus d'assurer le ramassage scolaire sur une ligne de transport régi par une délégation de service public dont la continuité du service est un principe essentiel garanti par la Constitution. Avoir cessé le travail du 12 au 20 mai inclus sans aucune information préalable (sans négociation, sans préavis, sans indication de l'intention de cesser le travail). Avoir sciemment laissé courir le risque à l'entreprise de se voir amputé, sur la facture du mois, du montant de ces journées non travaillées plus des pénalités.(...) En conséquence, nous avons le regret de vous informer que nous prenons la décision de vous licencier pour les motifs ci-dessus qui correspondent à une faute grave."

Il ressort des pièces du dossier que M. B... a participé, du 12 mai 2015 au 20 mai 2015 à une grève, pour laquelle l'employeur lui reproche l'absence de respect d'un délai de préavis prévu par l'article L 2512-2 du code du travail, alors que l'entreprise assurait la gestion d'un service public.

Toutefois, l'employeur ne peut invoquer la participation du salarié à un mouvement de grève illicite à défaut de respect d'un préavis, dès lors qu'il n'est pas établi, comme l'ont relevé les premiers juges, que le salarié ait été informé du caractère irrégulier de ce mouvement.

Cette participation à un mouvement de grève ne peut donc être sanctionnée disciplinairement et justifier, en l'absence de faute lourde, le licenciement du salarié.

Il convient de juger le licenciement de M. B..., non pas dépourvu de cause réelle et sérieuse, mais nul.

En ce qui concerne l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents :

En application de l'article 29.2 de la convention collective régionale des transports routiers et activités auxiliaires du transport de la Guadeloupe, ainsi que des articles L 1234-1 et L 1234-5 du code du travail il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a accordé à M. B... une indemnité de préavis équivalente à deux mois de salaire pour un montant de 3121,20 euros.

Il y a lieu également de confirmer la somme de 312,12 euros allouée au titre des congés payés sur préavis.

En ce qui concerne l'indemnité de licenciement :

En application de l'article 29.3 de la convention collective régionale des transports routiers et activités auxiliaires du transport de la Guadeloupe, M. B..., qui comptait une ancienneté de 21 ans et 8 mois, incluant le préavis, a droit à une indemnité de licenciement de 1/5ème de mois de salaire par année d'ancienneté dans l'entreprise, pour les dix premières années et de 1/3 de mois de salaire par année d'ancienneté dans l'entreprise au-delà de la 10ème année.

Compte tenu du salaire mensuel brut de M. B... de 2141,12 euros, il convient de ramener l'indemnité de licenciement à 12608,81 euros (4282,24 euros pour les dix premières années, 7850,77 euros de 10 ans à 21 ans d'ancienneté et 475,8 euros pour la dernière année).

Le jugement est réformé sur ce point.

En ce qui concerne à l'indemnité relative au préjudice subi :

Le salarié dont le licenciement est nul, et qui ne demande pas sa réintégration, comme en l'espèce, a droit, en toute hypothèse, en plus des indemnités de rupture, à une indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et au moins égale à six mois de salaire, quels que soient son ancienneté et l'effectif de l'entreprise.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a alloué au salarié une indemnité de 9363,60 euros nets à ce titre, dans la limite des conclusions de M. B....

Sur les demandes accessoires :

Comme il paraît inéquitable de laisser à la charge de M. B... les frais irrépétibles qu'il a exposés, il lui sera alloué la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les dépens seront à la charge de la SARL CGTS.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Dit le licenciement de M. B... Jean-Pierre nul,

Confirme le jugement rendu la 2 février 2017 par le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre en ce qu'il a condamné la SARL COMPAGNIE GUADELOUPEENNE DE TRANSPORT SCOLAIRE (CGTS) à payer à M. B... Jean-Pierre les indemnités suivantes :
- 3121,20 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
- 312,12 euros au titre des congés payés sur préavis,
- 9363,60 au titre des dommages et intérêts pour licenciement nul,

Le réforme pour le surplus et statuant à nouveau,

Condamne la SARL COMPAGNIE GUADELOUPEENNE DE TRANSPORT SCOLAIRE (CGTS) à verser à M. B... Jean-Pierre une somme de 12608,81 euros à titre d'indemnité de licenciement,

Condamne la SARL COMPAGNIE GUADELOUPEENNE DE TRANSPORT SCOLAIRE (CGTS) à verser à M. B... Jean-Pierre une somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que les dépens seront à la charge de la SARL COMPAGNIE GUADELOUPEENNE DE TRANSPORT SCOLAIRE (CGTS),

Déboute les parties de toutes conclusions plus amples ou contraires.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 17/002931
Date de la décision : 06/08/2018
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2018-08-06;17.002931 ?
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