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06/08/2018 | FRANCE | N°16/016421

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, 04, 06 août 2018, 16/016421


GB-LP

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 289 DU SIX AOÛT DEUX MILLE DIX HUIT

AFFAIRE No : No RG 16/01642

Décision déférée à la Cour : Ordonnance de référé du Conseil de Prud'hommes de Pointe-à-Pitre du 31 Octobre 2016.

APPELANT

Monsieur C... X...
Y...
[...]
Représenté par Me Nicolas Z... ( toque 29), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BARTH

INTIMÉE

SARL SECURITEG
[...]
Représentée par Me Eddy A..., avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a é

té débattue le 4 Juin 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président,,
Mme Mar...

GB-LP

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 289 DU SIX AOÛT DEUX MILLE DIX HUIT

AFFAIRE No : No RG 16/01642

Décision déférée à la Cour : Ordonnance de référé du Conseil de Prud'hommes de Pointe-à-Pitre du 31 Octobre 2016.

APPELANT

Monsieur C... X...
Y...
[...]
Représenté par Me Nicolas Z... ( toque 29), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BARTH

INTIMÉE

SARL SECURITEG
[...]
Représentée par Me Eddy A..., avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 4 Juin 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président,,
Mme Marie-Josée BOLNET, conseillère,
Madame Gaëlle BUSEINE, conseillère,

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 06 août 2018

GREFFIER Lors des débats Mme Lucile POMMIER, greffier.

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC.
Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Valérie SOURIANT, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

******

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par arrêt avant dire-droit en date du 23 avril 2018 auquel il convient de se référer pour l'exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, la chambre sociale de la cour d'appel de Basse-Terre a :
- rejeté la demande de dépaysement et de sursis à statuer,
- rejeté l'exception de litispendance,
- débouté la société de sa demande d'irrecevabilité,
- révoqué l'ordonnance de clôture du 2 octobre 2017,
- ordonné la réouverture des débats,
- enjoint aux parties de communiquer à la cour les extraits Kbis de la société SECURITEG et de la société ANTILLES SURETÉ GUADELOUPE, ainsi que leurs observations dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt,
- sursis à statuer sur l'ensemble des demandes,
- renvoyé l'affaire à l'audience du 4 juin 2018 à 14 heures 30,
- dit que la notification de l'arrêt valait convocation à ladite audience.

Par conclusions notifiées le 23 mai 2018 à l'intimée, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, M. X... demande à la cour de:
- infirmer l'ordonnance de référé rendue le 31 octobre 2016 par le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre,
Statuant à nouveau :
- constater le caractère manifestement illicite du licenciement de M. X... effectué le 5 septembre 2016 par la SARL SECURITEG sans consultation de l'inspecteur du travail, en violation de son statut de salarié protégé,
- condamner en conséquence la SARL SECURITEG à verser à M. X... les sommes suivantes depuis son éviction de l'entreprise :
* 3565,22 euros pour le salaire du mois de septembre 2016,
* 4956,37 euros à titre provisionnel sur l'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement,
* 44607,33 euros à titre provisionnel sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 9912,74 euros à titre provisionnel sur l'indemnité compensatrice de préavis,
* 29730,22 euros à titre provisionnel sur les dommages et intérêts pou rupture abusive,
* 17842,39 euros à titre provisionnel sur l'indemnité légale de licenciement,
- condamner en conséquence la SARL SECURITEG à payer la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SARL SECURITEG aux entiers dépens.

Il soutient que :
- l'exception de litispendance soulevée par la société est infondée,
- la formation de référé du conseil de prud'hommes était compétente pour constater le caractère manifestement illicite de son licenciement en violation de son statut de salarié protégé,
- l'employeur n'a pas sollicité l'autorisation de l'inspecteur du travail préalablement à son licenciement, alors qu'il avait connaissance de son statut de salarié protégé,
- son licenciement est nécessairement nul,
- il est fondé à solliciter le versement de diverses sommes liées à la rupture de son contrat de travail.

Par conclusions notifiées à l'appelant le 31 mai 2018, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, la SARL SECURITEG demande à la cour de :

- juger que seule la SARL SECURITEG avait qualité d'employeur à l'égard de M. X...,
- constater qu'il est établi que le jour de la rupture du contrat de travail, l'employeur ne connaissait pas la protection attachée à la fonction de conseiller du salarié de M. X...,
- constater l'inapplicabilité des dispositions relatives au statut protecteur,
- constater l'absence de violation du statut protecteur de M. X...,
- juger que M. X... n'est pas fondé à revendiquer une qualité de salarié protégé pour soutenir la nullité de son licenciement et prétendre aux indemnités de rupture attachées au licenciement nul d'un salarié protégé,
- constater l'absence de trouble manifestement illicite,
- confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 31 octobre 2016 par le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre,

Subsidiairement,
- dire que le transfert du contrat de travail de M. X... au sien de la SARL KOBRA SECURITE a été observé par la SARL SECURITEG,
- constater que la SARL KOBRA a méconnu ses obligations découlant de l'accord du 5 mars 2002 applicable en l'espèce,
- dire en conséquence qu'il n'y a lieu à requalification de la rupture du contrat de travail litigieux en licenciement nul,
En tout état de cause,
- faire injonction à M. X... de justifier de ses revenus actuels et ce par tous moyens,
- débouter M. X... de l'ensemble de ses demandes,
- le condamner au paiement de la somme de 1500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- le condamner aux entiers dépens.

La SARL SECURITEG expose que :
- l'existence d'un trouble manifestement illicite n'est pas démontrée, la preuve de l'information de la société sur la connaissance du mandat de conseiller du salarié de M. X... étant sérieusement contestable,
- seule la SARL SECURITEG ayant la qualité d'employeur de M. X..., le pli adressé à une autre société, qui a le même siège social, informant de sa nomination en qualité de conseiller du salarié ne saurait suffire à lui conférer le statut protecteur y afférent,
- la société n'a nullement été valablement informée de la nomination de M. X... en qualité de conseiller du salarié,
- le salarié, qui a laissé se poursuivre une procédure de transfert de son contrat de travail sans avoir informé l'employeur de l'existence de son mandat de conseiller du salarié, a eu un comportement caractérisant une fraude et doit se voir refuser l'application des dispositions du statut protecteur,
- il s'en déduit l'existence d'une contestation sérieuse sur l'application du statut protecteur, qui ne peut relever de la compétence du juge des référés,
- le caractère discriminatoire du licenciement du salarié n'est pas établi,
- le désaccord entre la SARL SECURITEG et la SARL KOBRA fait obstacle à ce que la nullité du licenciement de M. X... soit jugée par le juge des référés,
- A titre subsidiaire, le transfert du salarié ayant été refusé par la société KOBRA, la créance salariale invoquée par M. X... à l'encontre de la SARL SECURITEG est inexistante.

MOTIFS :

Sur le trouble manifestement illicite :

Aux termes de l'article R 1455-5 du code du travail, dans tous les cas d'urgence, la formation de référé peut, dans la limite de la compétence des conseils de prud'hommes, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

Selon l'article R 1455-6 du même code, la formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Aux termes de l'article R 1455-7 du code du travail, dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.
En premier lieu, pour se prévaloir de la protection attachée à son mandat de conseiller du salarié mentionné par l'article L. 2411-1 16o du code du travail, le salarié doit, au plus tard lors de l'entretien préalable au licenciement, ou, s'il s'agit d'une rupture ne nécessitant pas un entretien préalable, au plus tard avant la notification de l'acte de rupture, avoir informé l'employeur de l'existence de ce mandat ou rapporter la preuve que l'employeur en avait alors connaissance.

Il ressort des pièces du dossier que par lettre du 27 octobre 2014 adressée en courrier recommandé à la gérante de la société SECURITEG, le syndicat UGTG a informé l'employeur de la nomination de M. X... en qualité de conseiller du salarié par arrêté préfectoral du 27 juin 2014.

La circonstance que ce courrier ait été adressé à Mme B... Lydie, qui n'était pas gérante de ladite société, est sans incidence, dès lors que le pli mentionnait la qualité de gérant du destinataire et que le nom, ainsi que l'adresse de la société étaient également mentionnés, de sorte qu'aucune erreur ne pouvait être commise sur la personne de l'employeur à laquelle le pli était destiné. La cour observe d'ailleurs que, nonobstant la réception du pli litigieux par la SARL ANTILLES SECURITE, au lieu de la SARL SECURITEG, les deux sociétés comportent le même gérant et le même siège social.

Par suite, la société ne peut se prévaloir d'une erreur de réception du courrier entre deux sociétés situées à la même adresse, qui lui est imputable, pour alléguer un défaut d'information de la qualité de salarié protégé de M. X....

En deuxième lieu, l'employeur ne peut davantage invoquer la mauvaise foi du salarié ou son comportement de fraude consistant à avoir laissé la procédure de licenciement se dérouler de manière irrégulière, à défaut de l'avoir informé durant celle-ci de sa protection en qualité de conseiller du salarié, alors, ainsi qu'il vient d'être précisé, qu'il était informé de cette qualité depuis le mois d'octobre 2014.

En troisième lieu, l'employeur ne saurait valablement se prévaloir de la validité du transfert de M. X... à l'entreprise KOBRA, alors qu'en application de l'article 4 de l'avenant du 28 janvier 2011 à l'accord du 5 mars 2002 relatif à la reprise du personnel de la convention collective nationale des entreprise de prévention et de sécurité du 15 février 1985 étendue par arrêté du 25 juillet 1985, une autorisation de l'inspection du travail relative aux transferts est requise et que, dans l'attente de celle-ci, les salariés demeurent salariés de l'entreprise sortante.

Par suite, M. X... est fondé à ce prévaloir d'un trouble manifestement illicite, qui est de la compétence de la formation de référé, et résultant de la violation par la SARL SECURITEG de son statut protecteur lors de son licenciement intervenu le 5 septembre 2016, qui est nul, en l'absence d'autorisation de l'inspecteur du travail.

Sur les demandes du salarié :

M. X... ne demandant pas sa réintégration, alors même que son licenciement est nul, il est en droit de prétendre à une provision à valoir sur les indemnités qui lui sont dues, soit notamment les indemnités de rupture et une indemnité prévue à l'article L. 1235-3 du code du travail.

Par suite, il y a lieu d'accorder à M. X... les sommes suivantes :
- 10000 euros à titre de provision sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 3000 euros à titre de provision sur l'indemnité compensatrice de préavis,
- 1500 euros à titre de provision sur l'indemnité légale de licenciement.

En application de l'article 1235-2 du code du travail, l'indemnité pour inobservation de la procédure de licenciement ne se cumulant pas avec l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, le salarié doit être débouté de sa demande de provision au titre du non respect de la procédure de licenciement.

Si le salarié excipe d'un préjudice né des circonstances ayant entouré le licenciement et distinct de celui de la rupture de son contrat de travail, cette demande tendant à apprécier au fond les motifs et circonstances du licenciement de M. X..., excède les pouvoirs du juge des référés et ladite demande sera rejetée.

Enfin, la rupture du contrat de travail étant intervenue le 5 septembre 2016, M. X..., qui n'allègue pas le défaut de paiement de son salaire jusqu'à cette date, devra être débouté de sa demande de provision pour le salaire de l'ensemble du mois de septembre 2016.

Sur les autres demandes :

Comme il paraît inéquitable de laisser à la charge de M. X... les frais irrépétibles qu'il a exposés, il lui sera alloué la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les dépens sont à la charge de la SARL SECURITEG.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Infirme en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 31 octobre 2016 par le juge des référés du conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre entre M. X... C... et la SARL SECURITEG,

Statuant à nouveau,

Condamne la SARL SECURITEG à verser à M. X... C... les sommes suivantes :
- 10000 euros à titre de provision sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 3000 euros à titre de provision sur l'indemnité compensatrice de préavis,
- 1000 euros à titre de provision sur l'indemnité légale de licenciement,
- 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Dit que les dépens sont à la charge de la SARL SECURITEG,

Déboute les parties de toutes conclusions plus amples ou contraires.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 16/016421
Date de la décision : 06/08/2018
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2018-08-06;16.016421 ?
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