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06/08/2018 | FRANCE | N°16/008981

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, 04, 06 août 2018, 16/008981


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 288 DU SIX AOÛT DEUX MILLE DIX HUIT

AFFAIRE No : No RG 16/00898

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de Basse-Terre - section commerce - du 24 Avril 2015.

APPELANTE

SAS DISTRIMART
208. [...]
Représentée par Me Dinah P... (X... ), avocat au barreau de la MARTINIQUE et par Me Jeanne-Hortense Y..., avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BARTH, substituée par Me Z...

INTIMÉE

Madame Marie-Claire A...
O...
[...]
Non Comparante, ni repré

sentée

ayant pour conseil, Me Serge B... (toque 6), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BARTH
(bénéficie d'un...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 288 DU SIX AOÛT DEUX MILLE DIX HUIT

AFFAIRE No : No RG 16/00898

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de Basse-Terre - section commerce - du 24 Avril 2015.

APPELANTE

SAS DISTRIMART
208. [...]
Représentée par Me Dinah P... (X... ), avocat au barreau de la MARTINIQUE et par Me Jeanne-Hortense Y..., avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BARTH, substituée par Me Z...

INTIMÉE

Madame Marie-Claire A...
O...
[...]
Non Comparante, ni représentée

ayant pour conseil, Me Serge B... (toque 6), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BARTH
(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2015/001354 du 17/10/2016 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASSE-TERRE)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 4 Juin 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président,
Mme Marie-Josée BOLNET, conseillère,
Madame Gaëlle BUSEINE, conseillère,

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 06 août 2018

GREFFIER Lors des débats Mme Lucile POMMIER, greffier.

ARRÊT :

Réputé contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC.
Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Valérie SOURIANT, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

******

Faits et procédure

Il résulte des explications et pièces fournies par les parties, les éléments suivants.

Mme Marie-Claire C... a été embauchée en qualité de secrétaire comptable par la SAS DISTRIMART, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée, prenant effet le 23 juillet 2007.

Mme C... était convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement, par courrier du 31 janvier 2009, dont elle sollicitait le report.
Par courrier du 3 février 2009, Mme C... était à nouveau convoquée à un entretien préalable, dont elle sollicitait à nouveau le report.
Par courrier du 2 mars 2009, Mme C... était à nouveau convoquée à un entretien préalable, fixé au 9 mars 2009, auquel elle assistait.

Par courrier en date du 12 mars 2009, distribué le 16 suivant, Mme C... se voyait notifier son licenciement pour insuffisance professionnelle, étant précisé qu'elle était dispensée de l'exécution de son préavis, d'une durée d'un mois, lequel lui serait rémunéré.

Mme C... saisissait le conseil de prud'hommes de Basse-Terre le 26 avril 2011, afin de contester son licenciement, et de solliciter la condamnation de la SAS DISTRIMART au paiement des sommes suivantes :
- 449,19€ au titre des indemnités journalières pour absence maladie du 14 au 21 janvier 2009,
- 1 423,35€ au titre du complément de salaire de février 2009, relatif à l'accident du travail du 6 février 2009,
- 170€ au titre de la prime complémentaire convention collective accident du travail,
- 445,56€ au titre de la prime de fin d'année, au prorata,
- 1 909,86€ au titre du non respect de la procédure de déclaration d'accident du travail,
- 865,15€ au titre des frais médicaux avancés et restant dûs,
- 1 909,86€ au titre de la non remise des feuilles d'accident,
- 3 262,81€ au titre des heures supplémentaires,
- 11 459,16€ à titre d'indemnité pour licenciement abusif,
- 10 000€ au titre du harcèlement moral,
- 2 000€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- les dépens.
Elle sollicitait également la remise des documents dûment complétés relatifs à l'accident du travail, dont la déclaration et l'attestation de salaire, ainsi que les bulletins de salaire, l'attestation Assedic, et le solde de tous comptes rectifiés, ce sous astreinte de 100€ par jour de retard à compter du jugement.

Par jugement de départage prononcé le 24 avril 2015, le conseil de prud'hommes de Basse-Terre a fixé le salaire mensuel brut moyen à la somme de 1 909,86€, débouté Mme C... de sa demande au titre des heures supplémentaires, dit que son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, et condamné la SAS DISTRIMART au paiement des sommes suivantes :

- 4 684,87€ en réparation du préjudice résultant du non respect de la procédure de déclaration d'accident du travail, de la non remise des feuilles d'accident, et des frais médicaux avancés et restés à sa charge,
- 1 593,35€ au titre du salaire et de la prime complémentaire prévus par la convention collective,
- 449,19€ en réparation du préjudice résultant de la non remise de l'attestation de salaire lors de son absence maladie du 14 au 21 janvier 2009,
- 10 000€ au titre du harcèlement moral,
- 11 459,16€ à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- le remboursement des indemnités chômage,
- 1 500€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- les entiers dépens.
Il était également ordonné à la SAS DISTRIMART de remettre à Mme C... les documents dûment complétés concernant l'accident du travail du 6 février 2009, ainsi que les bulletins de salaire, l'attestation Pôle emploi, et le solde de tout compte rectifiés.

La SAS DISTRIMART interjetait régulièrement appel du jugement le 26 mai 2015.

Par ordonnance du magistrat chargé d'instruire l'affaire en date du 9 mai 2016, l'affaire était radiée.

L'affaire était réinscrite au rôle de la Cour et fixée à l'audience de mise en état du 22 mai 2017. Par ordonnance du jour même, le magistrat chargé d'instruire l'affaire fixait un calendrier de procédure, laissant trois mois à l'appelant pour notifier ses pièces et conclusions, et à l'issue un délai de même durée pour que la partie adverse notifie en réponse ses pièces et conclusions.
L'affaire était renvoyée à l'audience de mise en état du 11 décembre 2017.
La SAS DISTRIMART sollicitait un renvoi de l'affaire, auquel le conseil de Mme C... indiquait par RPVA ne pas s'opposer.

Mme C... a été avisée, conformément aux dispositions de l'article 947 du code de procédure civile, par lettre simple, de l'audience de renvoi fixée au 4 juin 2018 à 14h30, audience à laquelle elle n'a pas comparu. Le présent arrêt sera donc réputé contradictoire à son égard.

******

Par conclusions notifiées le 3 mai 2016, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé exhaustif des moyens de la SAS DISTRIMART, celle-ci sollicite l'infirmation du jugement entrepris, et statuant à nouveau, qu'il soit dit que le licenciement est bien fondé, que Mme C... soit déboutée de l'ensemble de ses demandes et condamnée au paiement de la somme de 2 500€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme C... n'a pas conclu.

******

Motifs de la décision

Sur les demandes liées aux formalités de déclaration d'accident du travail

L'article L411-1 du code du travail définit l'accident du travail comme suit : « quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise ».

En cas de survenance d'un accident du travail, l'article R441-2 du code de la sécurité sociale, dispose que « la déclaration à laquelle la victime d'un accident du travail est tenue conformément à l'article L. 441-1 doit être effectuée dans la journée où l'accident s'est produit ou au plus tard dans les vingt-quatre heures. Elle doit être envoyée, par lettre recommandée, si elle n'est pas faite à l'employeur ou à son préposé sur le lieu de l'accident ».
Conformément aux dispositions des articles L441-2 et R441-3 du code de la sécurité sociale, l'employeur doit faire la déclaration de l'accident du travail auprès de la caisse primaire d'assurance maladie dont relève la victime, par lettre recommandée, avec demande d'avis de réception, dans les quarante-huit heures, non compris les dimanches et jours fériés.

Dans un courrier recommandé en date du 9 février 2009, dont copie est produite par l'appelant, Mme C... déclarait à l'employeur avoir été victime d'un accident du travail le vendredi 6 février 2009. Elle exposait alors avoir heurté violemment un montant de porte avec son coude droit, ce qui a engendré de vives douleurs et l'a poussée à se rendre le jour même chez le médecin, lequel lui a indiqué que, sans amélioration, elle devrait passer une radiographie le lendemain.
L'intimée indique dans son courrier s'être rendue le samedi 7 février 2009 au centre hospitalier, et joint le certificat médical établi le jour même, prescrivant un arrêt de travail jusqu'au 14 février 2009 et mentionnant des « contractures musculaires para vertébrales prédominant au grand dorsal droit ».

La SAS DISTRIMART soutient avoir suivi la procédure de déclaration d'accident du travail, bien que mettant en doute le fait que la blessure constatée par certificat du 7 février 2009 se soit produite à l'occasion de l'activité professionnelle de Mme C....
L'appelante produit un courrier, en date du 12 février 2009, adressé par lettre simple à la caisse générale de la sécurité sociale, dans lequel elle conteste la nature professionnelle de l'accident.
La pièce numéro 11 produite aux débats par la SAS DISTRIMART est composée des éléments suivants :
· le courrier adressé par l'employeur à la caisse générale de la sécurité sociale,
· un formulaire de déclaration d'accident du travail daté du 8 février 2009, mentionnant Mme Nathalie D... comme témoin, conformément aux indications données par Mme C... dans son courrier,
· une attestation non datée, rédigée par Mme Nathalie D..., qui indique que Mme C... a, le 6 février 2009 « heurté avec son pied une boîte vide posée au sol, puis s'est exclamée : aïe, aïe, mon bras, mon bras, puis elle a repris sa place à son bureau »,
· deux feuillets d'un même avis de courrier recommandé, la partie expéditeur faisant état d'une date d'envoi au 13 février 2009 selon cachet de La Poste, et l'avis de réception ayant été tamponné par le service courrier de la caisse générale de la sécurité sociale le 30 mars 2009.

Il convient de relever que l'employeur, qui indique dans ses écritures avoir été informé de l'accident par courrier de Mme C... du 9 février 2009, a pourtant daté la déclaration d'accident du travail du 8 février 2009, soit la veille, et n'apporte par la preuve de ce que les feuillets du recommandé soient rattachés au courrier daté du 12 février 2009.
En outre, par courrier du 30 avril 2009, la caisse générale de sécurité sociale indiquait à la SAS DISTRIMART : « en date du 6 avril 2009, j'ai reçu la déclaration d'accident du travail concernant Mme Marie-Claire C... ».
Il apparaît que la SAS DISTRIMART n'apporte pas la preuve d'avoir respecté la procédure fixée par le code du travail concernant la déclaration d'accident du travail.

L'article R441-4 du code du travail dispose que « l'employeur est tenu d'adresser à la caisse primaire d'assurance maladie, en même temps que la déclaration d'accident ou au moment de l'arrêt du travail, si celui-ci est postérieur, une attestation indiquant la période du travail, le nombre de journées et d'heures auxquelles s'appliquent la ou les payes mentionnées à l'article R. 433-4, le montant et la date de ces payes ».
La SAS DISTRIMART n'apporte aucunement la preuve d'avoir transmis l'attestation de salaire.

Après une première décision de rejet, la caisse générale de sécurité sociale notifiait finalement à Mme C..., par courrier du 9 février 2010, que suite à la réception d'éléments favorables, l'accident serait pris en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels.

Au vu des éléments produits en première instance, le conseil de prud'hommes a condamné la SAS DISTRIMART au paiement d'une somme de 4 684,87€ à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du non respect de la procédure de déclaration d'accident du travail, de la non remise de l'attestation, et des frais médicaux avancés en conséquence et restés à sa charge. Il convient de confirmer le jugement entrepris sur ce point.

Sur le complément de salaire et la prime complémentaire

Le conseil de prud'hommes a condamné la SAS DISTRIMART au paiement des sommes de 1 423,35€ au titre du complément de salaire du mois de février 2009, et de 170€ au titre de la prime complémentaire, faisant référence à la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire, dont l'employeur ne conteste pas l'applicabilité, et qui prévoit, en cas de maladie ou d'accident du travail, le versement par l'employeur d'une indemnité complémentaire aux indemnités journalières versées.

Dans ses écritures, la SAS DISTRIMART expose qu'elle a respecté la procédure et transmis les éléments à la caisse générale de la sécurité sociale, et qu'en conséquence elle n'est pas responsable du non paiement des indemnités puisqu'elle ne pouvait qualifier elle-même l'accident de professionnel.

Il convient de relever que l'article 7.4.1 de la convention collective applicable, dans sa version alors en vigueur, ne conditionne pas le versement du complément au caractère professionnel de l'accident, mais encore que si Mme C... n'a pas perçu les indemnités journalières que la SAS DISTRIMART était tenue de compléter, c'est bien parce que cette dernière n'a pas transmis l'attestation de salaire, tel que cela a été établi.

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a condamné la SAS DISTRIMART au paiement des sommes de 1 423,35€ au titre du complément de salaire du mois de février 2009, et de 170€ au titre de la prime complémentaire.

Sur la demande au titre des indemnités journalières concernant le mois de janvier 2009

Le conseil de prud'hommes a condamné la SAS DISTRIMART au paiement de la somme de 449,19€ en réparation du préjudice résultant du non versement par la caisse générale de la sécurité sociale des indemnités journalières concernant une période d'arrêt maladie du 14 au 21 janvier 2009, faisant référence notamment à un courrier daté du 28 juillet 2010, par lequel la CGSS sollicitait la remise par l'employeur de l'attestation de salaire concernant l'arrêt maladie du mois de janvier 2009.

Le bulletin de paye du mois de janvier 2009 fait mention d'une absence pour arrêt maladie entre le 14 et le 21 janvier 2009, et la SAS DISTRIMART ne justifie pas avoir transmis l'attestation de salaire réclamée par la CGSS.
Il convient de confirmer le jugement entrepris sur ce point.

Sur le harcèlement moral

Aux termes de l'article L.1152-1 du Code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Il apparaît aux termes de l'article susvisé et de l'article L 1153-1 du Code du travail que lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Mme C... n'ayant pas conclu dans le cadre de la présente instance et n'apportant aucun élément à l'appui de cette demande, le jugement sera infirmé en ce qu'il a constaté l'existence d'une situation de harcèlement moral.

Sur le licenciement

La lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, est ainsi rédigée :

« Tel que nous vous l'avons indiqué, nous avons dû constater, depuis votre prise de poste dans notre entreprise, une succession de manquements dans la tenue de votre poste.
Malgré l'accompagnement que nous vous avons fourni et le temps que nous vous avons laissé, nous regrettons de constater l'impossibilité de vous confier des tâches relevant de votre fonction. Pour preuves, les derniers éléments suivants :
- vous avez communiqué deux fois des éléments erronés au cabinet Jock pour le mois de décembre 2008 de Melle Esther E.... Le second envoi laissait toujours apparaitre un écart de 188,18€ brut en faveur de la salariée,
- vous avez communiqué des éléments erronés pour le mois de novembre 2008 de Melle Christelle F.... Cela a eu comme conséquence un écart de 5 heures et 45 minutes payées à tort à la salariée,
- vous avez remis à M. Vincent G... une fiche de paye à son nom laissant apparaitre un montant brut de 5 784,97€. Cependant, la fiche de paye de décembre 2008 de M. Vincent G... est de 4 250€ brut,
- vous avez communiqué des informations erronées concernant la fiche de paie de décembre de Mme Karine H.... Cela a eu pour conséquence le paiement de 400€ de trop en faveur de la salariée,
- l'attestation de salaire de I... Rosalie comportait de nombreuses erreurs, telles qu'une fausse valeur des sommes perçues, ainsi qu'une erreur sur les mois de référence.
Nous ne citons que des exemples très récents, nous ne faisons pas référence aux trop nombreuses remarques verbales à propos de vos divers manquements, que nous avons eu à déplorer depuis votre arrivée chez nous.
Bien que nous soyons convaincus de votre bonne volonté, l'ensemble de ces éléments met en évidence une insuffisance professionnelle caractérisée.
L'obligation d'effectuer un contrôle permanent de l'ensemble des tâches qui vous sont confiées est insupportable. Les rares fois où vous avez agi sans contrôle de notre part, nous avons eu à en supporter les conséquences. Exemple : commande des fournitures de bureau ne répondant pas à nos besoins, etc
Cet état de fait est incompatible avec le maintien de notre collaboration. Aussi, nous vous informons que nous vous dispensons d'effectuer votre préavis d'un mois qui courra à compter de la première présentation du présent courrier ».

Il appartient à l'employeur de prouver que le motif invoqué au soutien du licenciement, à savoir l'insuffisance professionnelle, est réel et sérieux.

L'insuffisance professionnelle est l'incapacité durable du salarié à effectuer la prestation de travail que l'employeur est en droit d'attendre de lui, sans que cela ne résulte d'un comportement fautif du salarié.
L'insuffisance professionnelle ne saurait notamment résulter d'un manquement de l'employeur à ses obligations de formation et d'adaptation, du fait que le salarié se voit confier des tâches ne correspondant absolument pas à son poste, ou encore de l'absence de fourniture par l'employeur des moyens nécessaires à l'exercice des fonctions.

La SAS DISTRIMART expose que Mme C... commettait de multiples erreurs dans l'exercice de ses fonctions.
L'employeur produit la lettre de convocation à un entretien préalable à une éventuelle sanction disciplinaire, fixé au 5 mars 2008, ainsi qu'un document daté du 6 mars 2008, co-signé par les parties, et composé d'une première partie rédigée par la SAS DISTRIMART, et d'une seconde partie rédigée de manière manuscrite par Mme C..., en réponse :

- Partie rédigée par l'employeur :
« Nous constatons de nombreuses erreurs dans le traitement des salaires. Pour exemple :
Février : pour le salaire de Mme J..., il vous a été demandé par le cabinet comptable le détail des heures travaillées du 25.12 au 25/01 afin de produire la paye pour cette salariée. Vous avez commis les erreurs suivantes :
· omission des heures de la journée du 26/12
· erreur de calcul sur la semaine 1 (33h05 au lieu 34h45)

· information sur la semaine 2 portant à confusion (37h60 au lieu de 38h)
· erreur de calcul de la semaine (33h35 au lieu de 34h15)
Janvier : concernant les demandes de virement, vous avez demandé à M. K... d'effectuer les opérations suivantes :
· double paiement pour les salaires de Mme L..., M. M... et Melle Q... (mail du 02/01 à 9h44 et mail du 02/01 à 14h36)
· paiement de deux salaires différents (855,23€ le 02/01 à 9h44 et 951,83€ le 03/01 à 15h16) pour Melle R... au lieu d'indiquer un complément de salaire de 96€ le 03/01 suite au re-traitement de la paye suite à des erreurs de votre part
· complément de salaire de 500€ pour Mme L... et 600€ pour M. N... suite à des mauvaises informations que vous avez transmis au cabinet comptable.
Qu'avez-vous à répondre ? »

- Partie rédigée par la salariée :
« Je reconnais avoir fait des erreurs sur le salaire de Mme J..., n'ayant pas les bons éléments à la date de l'émission des éléments. C'est Mme K... qui a transmis les réguls au cabinet comptable en mon absence.
Concernant les doubles paiements, je ne suis pas au courant, car ne gérant par les virements et la comptabilité, personne ne m'a tenu informé. Concernant les réguls sur salaire, tous les mois il y en a. Les compléments de salaire ont été régulés le même mois ».

Par courrier du 26 mars 2008, Mme C... se voyait notifier un avertissement pour ces faits.
La SAS DISTRIMART produit des documents relatifs à des virements correspondant aux situations décrites.
Il convient de relever que ces faits fautifs ont fait l'objet d'une sanction, et qu'en vertu du principe non bis in idem, ces mêmes faits ne sauraient donner lieu à une nouvelle sanction.
En outre, l'employeur a prononcé le licenciement pour insuffisance professionnelle, ce qui ne saurait résulter d'un comportement fautif du salarié.
La SAS DISTRIMART évoque dans la lettre de licenciement plusieurs autres erreurs commises par Mme C... selon lui, sans cependant verser un quelconque élément de preuve relatif à ces erreurs récurrentes.

Il apparait que la réalité du motif invoqué par la SAS DISTRIMART au soutien du licenciement de Mme C..., à savoir l'insuffisance professionnelle de la salariée, n'est pas démontrée, aussi il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que ce licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Conformément aux dispositions de l'article L1235-3 du code du travail dans sa version alors en vigueur, applicable en l'espèce, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SAS DISTRIMART au paiement de la somme de 11 459,16€, correspondant à six mois de salaire, à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur le remboursement des indemnités chômage

Conformément aux dispositions de l'article L1235-4 du code du travail, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SAS DISTRIMART au remboursement des indemnités chômages versées à la salariée, dans la limite de six mois.

Sur la remise des documents

Au vu de ce qui précède, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné à la SAS DISTRIMART de remettre à Mme C... les documents liés à l'accident du travail survenu le 6 février 2009, ainsi que les bulletins de salaire, l'attestation Pôle emploi, et le solde de tout compte dans leur version rectifiée.

Sur les autres demandes

La SAS DISTRIMART succombant principalement en ses prétentions, supportera la charge des entiers dépens.

Il ne paraît pas équitable de laisser à la charge de Mme C... les frais irrépétibles qu'elle a exposés, le jugement entrepris sera dès lors confirmé en ce qu'il lui a alloué la somme de 1 500€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs

La Cour, statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire, et en dernier ressort,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf à l'infirmer en ce qu'il a condamné la SAS DISTRIMART au paiement à Mme Marie-Claude C... de la somme de 10 000€ à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

Et statuant à nouveau sur ce point,

Dit qu'il n'y a pas lieu à constater l'existence d'une situation de harcèlement moral,

Déboute Mme Marie-Claude C... de la demande de dommages et intérêts formée à ce titre,

Déboute les parties de toutes prétentions plus amples ou contraires.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 16/008981
Date de la décision : 06/08/2018
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2018-08-06;16.008981 ?
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