La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/06/2018 | FRANCE | N°17/005661

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, 04, 18 juin 2018, 17/005661


BR-VS

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 246 DU DIX HUIT JUIN DEUX MILLE DIX HUIT

AFFAIRE No : 17/00566

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 25 septembre 2012-Section Encadrement.

APPELANT

Monsieur Rudy X...
[...]
Représenté par Maître Ernest Y... (Toque 45), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

INTIMÉS

Maître Marie-Agnès Z... , ès qualité d'administrateur ad hoc de l'ASSOCIATION NORD SOLIDARITE TRAVAIL
[...]
Non Comparante, ni repr

ésentée

AGS-CGEA DE FORT DE FRANCE
[...] Représentée par Maître Frédéric A... de la SELARL EXCELEGIS (Toque 67), avocat au ...

BR-VS

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 246 DU DIX HUIT JUIN DEUX MILLE DIX HUIT

AFFAIRE No : 17/00566

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 25 septembre 2012-Section Encadrement.

APPELANT

Monsieur Rudy X...
[...]
Représenté par Maître Ernest Y... (Toque 45), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

INTIMÉS

Maître Marie-Agnès Z... , ès qualité d'administrateur ad hoc de l'ASSOCIATION NORD SOLIDARITE TRAVAIL
[...]
Non Comparante, ni représentée

AGS-CGEA DE FORT DE FRANCE
[...] Représentée par Maître Frédéric A... de la SELARL EXCELEGIS (Toque 67), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

SARL ABMS SARL, représentée par son gérant en exercice
[...]
Non Comparante, ni représentée

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 avril 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Bernard Rousseau, président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Bernard Rousseau, président de chambre, président,
Mme Marie-Josée Bolnet, conseiller,
Mme Gaëlle Buseine, conseiller,

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 18 juin 2018.

GREFFIER Lors des débats : Mme Valérie Souriant, greffier.

ARRÊT :

Réputé contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Mme Valérie Souriant, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

Vu le jugement du 25 septembre 2012, par lequel le conseil de prud'hommes de Pointe à Pitre a dit que la prise d'acte de rupture de son contrat de travail par M. Rudy X... produisait les effets d'une démission et l'a débouté de l'ensemble de ses demandes dirigées contre l'Association Nord Solidarité, son employeur,

Vu la déclaration d'appel de M. X..., reçue au greffe de la cour le 17 octobre 2012,

Vu les conclusions de M. X... en date du 6 décembre 2013,

Vu l'ordonnance en date du 14 septembre 2015 portant radiation de l'affaire du rôle de la Cour,

Vu le rétablissement de l'affaire au rôle de la Cour en date du 26 avril 2017 à la demande de M. X...,

Vu les conclusions de l'AGS en date du 12 février 2018,

Motifs de la décision :

Il résulte des explications et pièces fournies par les parties, les éléments suivants.

M. X..., embauché par l'Association Nord Solidarité en septembre 2006, en qualité de conseiller d'insertion sociale et professionnelle, moyennant le versement d'un salaire de 1450 euros pour 101 heures de travail par mois, a été promu, en juillet 2007, au poste de directeur de l'association moyennant le versement d'un salaire brut de 2654,23 euros brut par mois.

Du procès-verbal du conseil d'administration de l'association en date du 24 septembre 2008, il ressort que ladite association connaissait des dysfonctionnements, notamment au niveau de sa gestion, la signature d'un moratoire avec les différents créanciers étant préconisée. Par ailleurs les documents remis par le directeur, M. X..., au trésorier de l'association M. B..., étaient qualifiés d'incomplets et opaques, leur interprétation apparaissant impossible, alors qu'une mission d'accompagnement de l'association, confiée au Cabinet P+ Consultant dans le cadre du "Dispositif Local d'Accompagnement", avait été mise en oeuvre et avait donné lieu à un rapport en date du 15 mars 2008.

Par lettre recommandée en date du 24 octobre 2008, M. X... prenait acte de la rupture de son contrat de travail aux motifs que la dégradation de ses conditions de travail avait des conséquences préjudiciables pour sa santé.

Par jugement du 17 juin 2009, une procédure de liquidation judiciaire était ouverte à l'égard de l'Association Nord Solidarité, Maître Marie-Agnès Z... étant désignée en qualité de mandataire liquidateur.

Le 13 novembre 2009, M. X... saisissait le conseil de prud'hommes de Pointe à Pitre aux fins d'obtenir paiement de rappels de rémunération, ainsi que des indemnités de rupture du contrat de travail. M. X... était débouté en première instance de ses demandes par jugement du 25 septembre 2012.

La procédure de liquidation judiciaire ayant été clôturée le 13 mars 2013, Maître Z... était désignée en qualité d'administrateur ad'hoc de l'Association Nord Solidarité, par ordonnance du 24 octobre 2014 du Président du tribunal de grande instance de Pointe à Pitre.

Par courrier du 15 mai 2017, Me Z..., régulièrement convoquée, faisait savoir qu'elle ne comparaîtrait pas ni ne serait représentée à l'audience des débats. En conséquence le présent arrêt sera réputé contradictoire.

Sur les demandes de rappels de rémunération :

M. X... réclame paiement de la somme de 800 euros qui ne lui aurait pas été payée pour les mois de septembre et octobre 2006.

Le bulletin de salaire établi pour le mois d'octobre 2006 pour un montant brut de 1254,42 euros, porte mention d'un cumul de salaires de 2508,84 euros, ce qui montre que M. X... a travaillé également pendant le mois de septembre 2006.

S'il est mentionné que le salaire d'octobre est payé par chèque, il n'est pas porté de date quant au paiement qui devait être effectué. En conséquence, en l'absence de justification du paiement intégral des salaires de septembre et octobre 2006, il sera fait droit à la demande de paiement de la somme de 800 euros à titre de rappel de salaire.

M. X... réclame également des sommes de 8952 euros, 1650 euros, 7360 euros et 920 euros au titre, respectivement, d'une prime de direction, d'indemnités de déplacement pour la période de septembre 2006 à novembre 2008, d'indemnités de repas pour la période de septembre 2006 à septembre 2008, et de prime d'ancienneté. Toutefois il ne fonde ses demandes sur aucune disposition contractuelle ou conventionnelle. En conséquence il ne peut être fait droit aux dites demandes.

M. X... demande également paiement de la somme de 4136 euros au titre des congés payés 2007 et 2008. Dans la mesure où il n'est pas établi que M. X... ait été rempli de ses droits au titre des congés payés acquis au titre des années 2007 et 2008, il doit être fait droit à sa demande.

Sur la rupture du contrat de travail :

Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison des faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission.

La lettre de prise d'acte ne lie pas le débat et le salarié peut faire état d'autres griefs qu'il impute à son employeur non mentionnés dans sa lettre de prise d'acte.

Le juge saisi de la légitimité d'une telle prise d'acte de rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur, doit examiner l'ensemble des griefs formulés par le salarié, fussent-ils développés postérieurement à ladite prise d'acte.

M. X... ne produit pas devant la Cour sa lettre du 24 octobre 2008 par laquelle il aurait pris acte de la rupture de son contrat de travail. Cependant le conseil de prud'hommes a relevé que le salarié avait pris acte de cette rupture aux motifs suivants :

"Dégradation de ses conditions de travail avec des conséquences préjudiciables pour sa santé, que l'entreprise n'a fait aucune démarche pour remédier à cette situation".

Dans ses conclusions M. X... reproche en outre l'absence de contrat de travail et de bulletins de salaire, l'appelant demandant qu'en soit ordonné la délivrance.

Il n'est versé au débat que quatre bulletins de salaires, aucun contrat de travail n'étant produit. L'absence de délivrance de bulletins de salaire et l'exécution d'un contrat de travail pendant plus de deux ans, sans que l'employeur établisse de contrat de travail, constitue des manquements graves de ce dernier à ses obligations.

En conséquence il y a lieu de considérer que la prise d'acte de rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur, est justifiée et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les demandes indemnitaires de M. X... :

M. X... ne produit aucun élément justifiant de sa situation professionnelle, financière et matérielle à la suite de la rupture du contrat de travail. En conséquence, l'intéressé ayant plus de deux ans d'ancienneté, au sein d'une entreprise qui emploie plus de 10 salariés, il lui sera alloué, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un montant de 15 925,38 euros représentant 6 mois de salaire.

L'indemnité de préavis qui lui est due correspond, en application des dispositions de l'article L. 1234-1 du code du travail, à deux mois de salaire. Il sera donc fait droit à la demande de paiement d'indemnité de préavis telle que présentée par M. X..., soit la somme de 4600 euros.

Sur la délivrance des documents de fin de contrat :

Il ressort des pièces versées au débat, que seuls les bulletins de salaire correspondant aux mois d'octobre 2006, juillet, août et septembre 2007 ont été délivrés à M. X....

M. X... est en droit d'obtenir la délivrance des bulletins de salaire manquants et correspondants à la période de septembre 2006 à octobre 2008, qui devront être établis sur la base des mentions figurant sur les bulletins produits par M. X..., en tenant compte du fait qu'à compter de juillet 2007, celui-ci a perçu un salaire brut 2654,23 euros en qualité de directeur de l'association.

M. X... a également droit à la délivrance d'un certificat de travail correspondant à la période de septembre 2006 au 24 décembre 2008, date correspondant à la fin du préavis, ainsi qu'à l'établissement d'une attestation Pôle Emploi. Il est par ailleurs fondé à solliciter l'établissement et l'envoi à l'URSSAF d'une déclaration récapitulative des salaires.

La prise d'acte de rupture du contrat de travail exclut la délivrance d'une lettre de licenciement.

Quant au reçu pour solde de tout compte, il ne peut être établi et remis au salarié qu'au moment du paiement des sommes qui lui sont dues, il ne peut donc être ordonné la remise d'un tel reçu sous astreinte.

Il ressort du procès-verbal du conseil d'administration de l'Association Nord Solidarité, en date du 24 septembre 2008, l'existence des carences imputables à M. X... en sa qualité de directeur. Il ne paraît donc pas inéquitable de laisser à la charge de M. X... les frais irrépétibles qu'il a exposés. Il sera débouté de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs :

La Cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Réforme le jugement déféré,

Et statuant à nouveau,

Fixe les créances de M. X... au passif de l'Association Nord Solidarité, aux montants suivants :

-800 euros à titre de rappel de salaire,

-4136 euros d'indemnité compensatrice de congés payés,

-15 925,38 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-4600 euros d'indemnité compensatrice de préavis,

Dit que la présente décision est opposable à l'AGS, dans les conditions prévues aux articles L3253-8 et suivants du code du travail, les créances de M. X... étant nées antérieurement à la liquidation judiciaire de l'Association Nord Solidarité, étant rappelé que ne sont pas garanties les charges patronales et les charges sociales qui ne seraient pas d'origine légale ou conventionnelle imposée par la loi, et étant précisé qu'en l'espèce la garantie de l'AGS est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, à l'un des trois plafonds définis à l'article D. 3253-5 du code du travail, en l'occurrence le plafond 5,

Dit que l'Association Nord Solidarité devra délivrer à M. X... :

-ses bulletins de salaire correspondants à la période de septembre 2006 à octobre 2008, qui devront être établis sur la base des mentions figurant sur les bulletins produits par M. X..., en tenant compte du fait qu'à compter de juillet 2007, celui-ci a perçu un salaire brut 2654,23 euros en qualité de directeur de l'association, les fiches de paie des mois d'octobre 2006, juillet, août et septembre 2007, étant déjà en possession de M. X...,

-un certificat de travail correspondant à la période de septembre 2006 au 24 décembre 2008, date correspondant à la fin du préavis,

-une attestation Pôle Emploi,

Dit que l'Association Nord Solidarité devra établir et envoyer à l'URSSAF de la Guadeloupe, une déclaration récapitulative des salaires versés,

Dit que les dépens sont à la charge de l'Association Nord Solidarité,

Déboute les parties de toutes conclusions plus amples ou contraires.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 17/005661
Date de la décision : 18/06/2018
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2018-06-18;17.005661 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award