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12/03/2018 | FRANCE | N°17/001821

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, 04, 12 mars 2018, 17/001821


VS–BR

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 105 DU DOUZE MARS DEUX MILLE DIX HUIT

AFFAIRE No : 17/00182

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 24 janvier 2017-Section Encadrement

APPELANT

Monsieur Joël X...
[...]
Représenté par Maître Brice Y..., avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

INTIMÉS

Maître Marie-Agnès Z... ès qualité de liquidateur judiciaire de la société BEST WEST INDIES ALUMINIUM
[...]
Représentée par Maître Christophe

A... (Toque 101), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

AGS-CGEA DE FORT DE FRANCE
Lotissement Dillon Stade-10 rue des...

VS–BR

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 105 DU DOUZE MARS DEUX MILLE DIX HUIT

AFFAIRE No : 17/00182

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 24 janvier 2017-Section Encadrement

APPELANT

Monsieur Joël X...
[...]
Représenté par Maître Brice Y..., avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

INTIMÉS

Maître Marie-Agnès Z... ès qualité de liquidateur judiciaire de la société BEST WEST INDIES ALUMINIUM
[...]
Représentée par Maître Christophe A... (Toque 101), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

AGS-CGEA DE FORT DE FRANCE
Lotissement Dillon Stade-10 rue des arts et métiers
[...]
Représentée par Maître Frédéric B... de la SELARL EXCELEGIS, (Toque 67) avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 janvier 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Bernard Rousseau, président de chambre, chargé du rapport

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Bernard Rousseau, président de chambre, président,
Mme Marie-Josée Bolnet, conseiller,
Madame Gaëlle Buseine, conseiller,

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 12 mars 2018

GREFFIER Lors des débats : Mme Valérie Souriant, greffier.

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par Mme Marie Josée Bolnet, conseiller, pour le président Bernard Rousseau, empêché, et par Mme Valérie Souriant, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure :

Par contrat à durée indéterminée à effet du 1er juillet 2008, M. X... a été embauché par la Société BEST WEST INDIES ALUMINIUM, en qualité de responsable de production, statut assimilé cadre.

Par jugement du tribunal mixte de commerce de Pointe à Pitre, en date du 22 septembre 2011, la Société BEST WEST INDIES ALUMINIUM a été placée en liquidation judiciaire, et Maître Marie-Agnès Z... a été nommée mandataire liquidateur.

Par courrier du 4 octobre 2011, M. X... s'est vu notifier son licenciement pour motif économique avec effet au 20 octobre 2011.

Il s'ensuivait un échange de courriers avec le liquidateur judiciaire au sujet d'heures supplémentaires non rémunérées.

La question n'ayant pas trouvé de solution, M. X... saisissait le 1er juin 2016 le conseil de prud'hommes de Pointe à Pitre aux fins d'obtenir paiement des sommes suivantes :
-246 956 euros de rappel de salaire pour heures supplémentaires accomplies sans rémunération entre le 20 octobre 2008 et le 30 septembre 2011,
-24 695,68 euros à titre d'indemnité de congés payés afférente aux heures supplémentaires,
-70 209,98 euros à titre d'indemnité compensatrice des contreparties obligatoires en repos,
-23 095,50 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,
-11 547,75 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,
-3255 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 24 janvier 2017, la juridiction prud'homale fixait aux sommes suivantes la créance de M. X... au passif de la Société BEST WEST INDIES ALUMINIUM :
-2880,32 euros à titre d'indemnité d'heures supplémentaires,
-288,03 euros à titre de congés payés.

Ces créances étaient déclarées opposables à l'AGS, dans les limites de sa garantie.

Maître Z... était en outre condamnée, ès qualités de liquidateur judiciaire de la Société BEST WEST INDIES ALUMINIUM, à payer à M. X... la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 7 février 2017, M. X... interjetait appel de cette décision.

****

Par conclusions en date du 10 mars 2017, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé exhaustif des moyens de M. X..., celui-ci
sollicite :
-la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a déclaré non prescrites les demandes de rappel d'heures supplémentaires concernant la période de juin 2011 à septembre 2011, soit 77 heures, et en ce qu'il a fixé les créances sur la Société BEST WEST INDIES ALUMINIUM aux montants de 2880,32 euros au titre des 77 heures supplémentaires accomplies sans rémunération en début juin 2011 et fin septembre 2011,
-la réformation dudit jugement en ce qu'il a déclaré à tort, prescrites les demandes de rappels d'heures supplémentaires concernant les périodes du 20 octobre 2008 à fin décembre 2008 pour 343 heures, l'année 2009 pour 2387 heures, l'année 2010 pour 2328 heures, et la période du 1er janvier 2011 à la fin mai 2011 pour 549 heures.

M. X... entend voir ajouter les créances suivantes, au passif de la Société BEST WEST INDIES ALUMINIUM :
-244 076,51 euros de rappel de salaire pour heures supplémentaires accomplies sans rémunération entre le 20 octobre 2008 et la fin du mois de mai 2011,
-24 407,75 euros à titre d'indemnité de congés payés y afférents,
-70 209,98 euros à titre d'indemnité compensatrice des contreparties obligatoires en repos,
-23 095,50 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,
-11 547,75 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,
-4340 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

M. X... demande l'application des intérêts au taux légal et la capitalisation des intérêts.

****

Par conclusions communiquées le 28 avril 2017, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé exhaustif des moyens de Maître Marie-Agnès Z..., ès qualités de liquidateur judiciaire de la Société BEST WEST INDIES ALUMINIUM, celle-ci sollicite la confirmation du jugement entrepris, sauf en ce qu'il a fixé au passif de la société les sommes de 2880,32 euros au titre des heures supplémentaires et 288,03 euros au titre des congés payés, et en ce qu'il l'a condamnée au paiement de la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Maître Z..., ès qualités de liquidateur judiciaire de la Société BEST WEST INDIES ALUMINIUM, demande paiement de la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

****

Par conclusions du 10 mai 2017, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé exhaustif des moyens de l'AGS, celle-ci sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a :
-déclaré prescrite l'action portant sur les heures supplémentaires d'octobre 2008 à mai 2011,
-débouté M. X... de ses demandes relatives au repos compensateur, à une indemnité pour travail dissimulé et à des dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.

L'AGS entend voir déclarer M. X... forclos s'agissant de sa demande de rappel de salaire, et voir juger prescrites les demandes en paiement de repos compensateur et de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail. L'AGS conclut au rejet de l'ensemble des demandes de M. X....

A titre subsidiaire l'AGS entend voir rejeter les demandes de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires, comme étant infondées dans leur principe et leur quantum.

L'AGS demande qu'en tout état de cause, il soit jugé que sa garantie ne saurait excéder les limites de sa garantie légale conformément aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail, qui limitent sa garantie, toutes créances du salarié confondues, à des montants fixés en fonction du plafond retenu pour le calcul des contributions au régime d'assurance chômage apprécié au jour où la créance est due et au plus tard au jour du jugement de la liquidation judiciaire, en l'espèce le plafond retenu étant le plafond 6.

L'AGS demande qu'il soit jugé que l'obligation de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et sur justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement.

****

Motifs de la décision :

Sur la forclusion invoquée par l'AGS sur le fondement de l'article L. 625-1 du code de commerce :

Selon ce texte, le salarié, dont la créance ne figure pas en tout ou en partie sur un relevé des créances résultant d'un contrat de travail, peut saisir à peine de forclusion le conseil de prud'hommes dans un délai de deux mois à compter de l'accomplissement des mesures de publicité des relevés des créances salariales.

Toutefois il n'est pas justifié en l'espèce de la date d'accomplissement des mesures de publicité, si bien qu'il ne peut être constaté que la forclusion est acquise.

Sur la prescription :

L'article L. 3245-1 du code du travail, dans sa version en vigueur au moment du licenciement, prévoyait que l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrivait par cinq ans.

Modifié par la loi no 2013-504 du 14 juin 2013, le même article dispose maintenant que l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. Il est précisé par ce texte que la demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

Ces dispositions nouvelles s'appliquent aux prescriptions en cours à compter du 16 juin 2013, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

Il résulte de la version actuelle de l'article L. 3245-1 du code du travail, que le point de départ du délai de prescription est :
-si le contrat de travail n'est pas rompu, le jour où le salarié a pu connaître les faits lui permettant d'exercer une demande de rappel de salaire,
-si le contrat de travail est rompu, la date de la rupture du contrat.

Toutefois à la date du 1er juin 2016, à laquelle M. X... a introduit son action, le délai de prescription initial de cinq ans était expiré pour les créances de salaire échues antérieurement au 1er juin 2011.

En effet selon le régime de prescription initiale applicable aux créances de M. X..., le point de départ du délai de prescription de cinq ans était fixé à la date où le créancier devait connaître les faits lui permettant d'exercer son action, en l'occurrence l'échéance mensuelle du paiement de son salaire, étant relevé que l'application du nouveau régime de prescription édictée par la loi du 14 juin 2013, ne peut avoir pour effet d'allonger le délai de prescription initial de cinq ans.

En conséquence le conseil de prud'hommes de Pointe à Pitre a pu, à juste titre, limiter le rappel de salaire à la période postérieure au mois de mai 2011, la demande portant sur la période antérieure étant prescrite au 1er juin 2016, date d'introduction de l'instance judiciaire, et ce par l'effet de l'expiration du délai prescription initial de cinq ans.

L'exécution des heures supplémentaires telles que retenues par le conseil de prud'hommes est suffisamment établie par la production des tableaux comportant décompte quotidien des heures travaillées par les salariés.

En conséquence les montants des créances de M. X..., retenus à hauteur de 2880,32 euros pour les heures supplémentaires accomplies de juin 2011 à septembre 2011, et de 288,,03 euros pour l'indemnité compensatrice de congés payés afférente, seront confirmés.

Sur la demande d'indemnité compensatrice des contreparties obligatoires en repos :

Dans la mesure où les heures supplémentaires accomplies entre le 1er juin et le 20 octobre 2011, ne dépassent pas le contingent annuel d'heures supplémentaires, ainsi qu'il ressort des tableaux produits par M. X... faisant apparaître l'exécution de 77 heures supplémentaires postérieurement au 1er juin 2011, il ne peut être fait droit à la demande d'indemnité compensatrice des contreparties obligatoires en repos.

Sur le travail dissimulé :

Il ressort des pièces produites qu'il était tenu au sein de l'entreprise des tableaux journaliers des heures de travail des salariés de l'entreprise, y compris les propres heures de travail de M. X....

Même à supposer que ces tableaux aient été tenus par M. X...,en sa qualité de directeur de production, il ne ressort d'aucun élément des débats que celui-ci ait porté à la connaissance de son employeur, ou formulé une quelconque réclamation au sujet d'heures supplémentaires non rémunérées qu'il aurait effectuées. Dès lors l'intention de l'employeur de se soustraire à son obligation de mentionner sur les bulletins de salaires les heures supplémentaires revendiquées actuellement par M. X..., n'est pas établie.

Il ne peut donc être fait droit à la demande de paiement d'indemnité pour travail dissimulé formée par M. X....

Sur la demande d'indemnisation pour exécution déloyale du contrat de travail par l'employeur :

M. X... reproche à l'employeur d'avoir manqué à l'obligation d'assurer un décompte quotidien et hebdomadaire de la durée de son travail.

Toutefois il est versé au débat des tableaux à l'en-tête de la Société BEST WEST INDIES ALUMINIUM, comportant des décomptes quotidiens des heures travaillées par chacun des salariés, y compris M. X..., ainsi que les dates des absences et congés, pour la période d'octobre 2008 à septembre 2011.

Il en résulte qu'au sein de l'entreprise il était tenu un décompte quotidien des heures travaillées par chacun des salariés.

En conséquence la demande d'indemnisation pour défaut de tenue d'un décompte journalier des heures travaillées, doit être rejetée.

Comme il paraît inéquitable de laisser à la charge de M. X... les frais irrépétibles qu'il a exposés tant en première instance qu'en cause d'appel, il lui sera alloué la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus l'indemnité allouée par les premiers juges sur le même fondement.

Par ces motifs,

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement du 24 janvier 2017,

Y ajoutant, condamne la Société BEST WEST INDIES ALUMINIUM représentée par son liquidateur judiciaire à payer à M. X... la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que les dépens sont à la charge de la Société BEST WEST INDIES ALUMINIUM,

Déboute les parties de toutes conclusions plus amples ou contraires.

le Greffier, P/Le Président empêché,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 17/001821
Date de la décision : 12/03/2018
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2018-03-12;17.001821 ?
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