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12/03/2018 | FRANCE | N°16/016121

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, 04, 12 mars 2018, 16/016121


GB/VS

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 99 DU DOUZE MARS DEUX MILLE DIX HUIT

AFFAIRE No : 16/01612

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 23 mai 2016 - Formation de référé-

APPELANT

Monsieur X... Mickaël Y...
[...]
[...]
Comparant en personne
Assisté de Maître Z... substituant Maître Myriam A... (Toque 78), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART,

INTIMÉE

SARL ETABLISSEMENTS DE G... PUBLICS F...
ZI de Jarry
Impasse Augustin B..

. (hangar B)
[...]
Représentée par Maître Isabel H... (Toque 114), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART, substitué pa...

GB/VS

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 99 DU DOUZE MARS DEUX MILLE DIX HUIT

AFFAIRE No : 16/01612

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 23 mai 2016 - Formation de référé-

APPELANT

Monsieur X... Mickaël Y...
[...]
[...]
Comparant en personne
Assisté de Maître Z... substituant Maître Myriam A... (Toque 78), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART,

INTIMÉE

SARL ETABLISSEMENTS DE G... PUBLICS F...
ZI de Jarry
Impasse Augustin B... (hangar B)
[...]
Représentée par Maître Isabel H... (Toque 114), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART, substitué par Maître C...

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Janvier 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Gaëlle BUSEINE, conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Bernard Rousseau, président de chambre, président,
Mme Marie-Josée Bolnet, conseiller
Mme Gaëlle Buseine, conseiller.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 12 mars 2018

GREFFIER Lors des débats Mme Lucile Pommier, greffier principal.

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC.
Signé par M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Mme Valérie Souriant, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

M. D... a été embauché par contrat à durée indéterminée par l'ENTREPRISE DE G... PUBLICS F... (ETPL) à compter du 8 août 2011 en qualité de chauffeur d'engin.

Par décision du 15 juillet 2015, l'inspecteur du travail autorisait son licenciement pour motif économique, le salarié étant délégué du personnel.
Par lettre du 22 juillet 2015, l'employeur lui notifiait son licenciement pour motif économique.

Par décision du 23 décembre 2015, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social retirait la décision implicite de rejet née le6 décembre 2015
et annulait la décision de l'inspecteur du travail du 15 juillet 2015 confirmée par la décision implicite de rejet du11 octobre 2015 .

M. D... saisissait le 8 mars 2016 le juge des référés du conseil de prud'hommes aux fins de versement de diverses sommes liées à la rupture de son contrat de travail.

Par ordonnance rendue contradictoirement le 23 mai 2016, le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre a :
- dit qu'il n'y a pas lieu à référé,
- débouté Monsieur D... X... de sa demande en référé,
- renvoyé les parties à se pourvoir si elles le souhaitent devant le juge du fond,
- mis les dépens à la charge du demandeur.

Selon déclaration reçue au greffe de la cour le 30 mai 2016, M. D... formait appel de ladite ordonnance dont il n'est pas justifié qu'elle lui ait été préalablement et régulièrement notifiée.

Par ordonnance du 12 septembre 2016, l'affaire a été radiée du rôle, puis réinscrite au rôle à la suite d'une demande de M. D... du 18 octobre 2016.

Par conclusions notifiées à l'intimée le 13 juin 2017, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, M. D... demande à la cour de :
- dire son appel recevable et bien fondé,
- infirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance querellée,
Statuant à nouveau,
- dire que la formation de référé était compétence pour faire droit à sa demande de réintégration,
- dire que cette demande de réintégration était parfaitement fondée,
- condamner la société ETPL à l'indemniser de son entier préjudice par l'allocation de :
* la somme de 16684,38 euros à titre de salaires non perçus à compter de juin 2015,
* celle de 10000 euros, tous préjudices confondus,
- ordonner sous astreinte de 1000,00 euros par jour de retard la remise au salarié de fiches de paie régulières,
- condamner la société ETPL aux entiers dépens.

Il soutient que :
- ses demandes sont formulées en application des article R 1455-5 et R 1455-6 du code du travail,
- l'autorisation de licenciement ayant été annulé, il est fondé à solliciter sa réintégration.

Par conclusions notifiées à l'appelant le 18 septembre 2017, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, la société ETABLISSEMENTS DE G... PUBLICS F... (ETPL) demande à la cour de :
- dire que la réintégration de M. D... est impossible,
- constaté qu'elle a régularisé le paiement des salaires dus à M. D... et lui a remis l'ensemble des bulletins de salaire,
- constater que M. D... ne verse aucun élément permettant de justifier le bien fondé de sa demande d'allocation d'une indemnité de 10000 euros à titre de préjudice moral et de "tous préjudices confondus",
En conséquence :
- confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé du 23 mai 2016 rendue par le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre,
- débouter M. D... de l'intégralité de ses demandes,
- en cas de réintégration, condamner le salarié à rembourser les indemnités de rupture qu'il a perçues, soit la somme de 1705,53 euros à titre d'indemnité de licenciement, augmentée de l'indemnité de congés payés qu'il a perçue de la part de la caisse des congés payés,
- le condamner à payer à la société la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que :
- le salarié ne justifie pas de la condition d'urgence de sa demande,
- la réintégration du salarié est impossible du fait de la suppression de son poste et l'indisponibilité d'autres postes,
- le salarié a été rempli dans ses droits relatifs au paiement des salaires,
- M. D... ne justifie pas des préjudices dont il sollicite l'indemnisation.

MOTIFS :

Aux termes de l'article L 2422-1 du code du travail, dans sa version applicable, lorsque le ministre compétent annule, sur recours hiérarchique, la décision de l'inspecteur du travail autorisant le licenciement d'un salarié investi de l'un des mandats énumérés ci-après, ou lorsque le juge administratif annule la décision d'autorisation de l'inspecteur du travail ou du ministre compétent, le salarié concerné a le droit, s'il le demande dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision, d'être réintégré dans son emploi ou dans un emploi équivalent. Cette disposition s'applique aux salariés investis d'un des mandats suivants : 1o Délégué syndical ou ancien délégué syndical ; 2o Délégué du personnel, titulaire ou suppléant, ancien délégué du personnel ou candidat aux fonctions de délégué du personnel, salarié ayant demandé à l'employeur l'organisation des élections pour la désignation des délégués du personnel.

Selon l'article L 2422-4 du même code, lorsque l'annulation d'une décision d'autorisation est devenue définitive, le salarié investi d'un des mandats mentionnés à l'article L. 2422-1 a droit au paiement d'une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration, s'il en a formulé la demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision.
L'indemnité correspond à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et l'expiration du délai de deux mois s'il n'a pas demandé sa réintégration.
Ce paiement s'accompagne du versement des cotisations afférentes à cette indemnité qui constitue un complément de salaire.

Sur l'urgence :

Aux termes de l'article R 1455-5 du code du travail, dans tous les cas d'urgence, la formation de référé peut, dans la limite de la compétence des conseils de prud'hommes, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

Selon l'article R 1455-6 du même code, la formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Aux termes de l'article R 1455-7 du code du travail, dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Le fait qu'une partie qualifie sa contestation de sérieuse ne suffit pas à priver la formation de référé de ses pouvoirs ; aucune démonstration d'urgence n'est nécessaire si l'obligation n'est pas sérieusement contestable.

En l'espèce, M. D... sollicite le versement de salaires, sa réintégration et une indemnisation de son préjudice sur le fondement de l'annulation par le ministre du travail de l'autorisation de son licenciement pour motif économique.

Cette demande, ne présente pas de caractère sérieusement contestable, dès lors qu'il est établi que le licenciement du salarié est intervenu à l'issue d'une procédure d'autorisation administrative qui a été annulée et qui présente un caractère définitif, en l'absence de contestation devant les juridictions de l'ordre administratif.
Par suite, le caractère d'urgence de la demande du salarié, qui est intervenue dans le délai de deux mois suivant la décision du ministre du travail, n'a pas à être démontré.

Sur la demande de paiement des salaires:

M. D..., qui a sollicité sa réintégration par lettre du 11 janvier 2016, est fondé à solliciter le versement d'une indemnité en réparation du préjudice financier pour la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration, l'employeur ne démontrant pas, par la seule production de quelques bulletins de paie et d'un chèque, s'être acquitté sur paiement des salaires de l'intéressé.

Par suite, il y a lieu de lui accorder une provision d'un montant de 8000 euros à ce titre, étant observé que M. D... a bénéficié durant cette période de l'allocation de retour à l'emploi.

Sur la demande de réintégration :

L'annulation par le ministre compétent d'une décision de l'inspecteur du travail autorisant le licenciement d'un salarié emporte, pour le salarié concerné, le droit à réintégration dans son emploi. Si cet emploi n'existe plus ou n'est pas vacant, la réintégration peut avoir lieu dans un emploi équivalent comportant le même niveau de rémunération, la même qualification et les mêmes perspectives de carrière que l'emploi initial et permettant l'exercice du mandat représentatif.
S'il résulte des pièces du dossier que l'activité de transport de la société a été supprimée, ainsi que le poste du salarié, il n'est toutefois pas établi que le reclassement aurait été impossible sur un poste équivalent.

Par suite, il y a lieu d'ordonner la réintégration du salarié sur un poste équivalent à celui de chauffeur d'engin qu'il occupait avant son licenciement.

Sur l'indemnisation du préjudice du salarié :

L'indemnité prévue par l'article L. 2422-4 du code du travail doit correspondre à la totalité du préjudice, tant matériel que moral, subi au cours de la période écoulée entre le licenciement et la réintégration du salarié.
Il y a lieu d'accorder au salariée salarié une provision de 200 euros à ce titre.

Sur la demande relative à la remise de fiches de paie régulières :

La demande du salarié, qui se borne à solliciter la remise de fiches de paie régulières, doit, eu égard à son imprécision, être rejetée.

Sur la demande reconventionnelle de l'employeur :

Le salarié protégé licencié en vertu d'une autorisation administrative ensuite annulée peut prétendre, qu'il ait ou non demandé sa réintégration, au paiement des indemnités de rupture, s'il n'en a pas bénéficié au moment du licenciement et s'il remplit les conditions pour y prétendre.

Dès lors que le salarié protégé dont l'autorisation de licenciement a été annulée a demandé sa réintégration et fait toujours partie des effectifs de l'entreprise, comme c'est le cas en l'espèce, il y a lieu de faire droit à la demande de l'employeur tendant à obtenir la condamnation de l'intéressé à lui rembourser l'indemnité de licenciement qu'il lui a versée, soit la somme de 1705,33 euros.

En revanche, l'employeur ne peut solliciter le versement d'une somme au titre des congés payés versés par la caisse des congés payés, compte tenu du défaut de chiffrage de sa demande et de l'absence de démonstration d'une somme qu'il aurait réglée à ce titre.

Sur les demandes accessoires :

L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de débouter la société ETPL de sa demande formulée à ce titre.

Les dépens sont laissés à la charge de chacune des parties.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Infirme en toutes se dispositions l'ordonnance rendue le 20 mai 2016, le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre, entre M. D... X... et la société ETABLISSEMENT DE G... E... F... (ETPL),

Statuant à nouveau,

Ordonne la réintégration de M. D... X...,

Condamne la société ETABLISSEMENT DE G... E... F... (ETPL) à verser à M. D... X... les sommes suivantes:
- une provision de 8000 euros à titre d'indemnisation de son préjudice financier,
- une provision de 200 euros à titre d'indemnisation de son préjudice matériel et moral,

Condamne M. D... X... à verser à la société ETABLISSEMENT DE G... E... F... (ETPL) une somme de 1705,33 euros à titre de remboursement de l'indemnité de licenciement.

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Laisse les dépens à la charge de chacune des parties,

Déboute les parties de toutes conclusions plus amples ou contraires.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 16/016121
Date de la décision : 12/03/2018
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2018-03-12;16.016121 ?
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