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12/03/2018 | FRANCE | N°15/012741

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, 04, 12 mars 2018, 15/012741


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 92 DU DOUZE MARS DEUX MILLE DIX HUIT

AFFAIRE No : 15/01274

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 23 juillet 2015-Section Commerce

APPELANTE

Sarl STIKALOG
Impasse Socomi
ZI Place d'Armes
[...]
Représentée par Maître Isabelle X..., avocat au barreau de la MARTINIQUE

INTIMÉE

Madame B... Y... épouse Z...
[...]
[...]
Représentée par Maître Bernard A... (Toque 73), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BARTr>
COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débat...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 92 DU DOUZE MARS DEUX MILLE DIX HUIT

AFFAIRE No : 15/01274

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 23 juillet 2015-Section Commerce

APPELANTE

Sarl STIKALOG
Impasse Socomi
ZI Place d'Armes
[...]
Représentée par Maître Isabelle X..., avocat au barreau de la MARTINIQUE

INTIMÉE

Madame B... Y... épouse Z...
[...]
[...]
Représentée par Maître Bernard A... (Toque 73), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Janvier 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Bernard Rousseau, président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Bernard Rousseau, président de chambre, président,
Mme Marie-Josée Bolnet, conseiller,
Madame Gaëlle Buseine, conseiller,

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 12 mars 2018

GREFFIER Lors des débats : Mme Valérie Souriant, greffier,

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC.
Signé par M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Mme Valérie Souriant, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure

Il résulte des explications et pièces fournies par les parties, les éléments suivants.

Mme B... Y... a travaillé en qualité d'agent administratif au sein de la SARL STIKALOG depuis le 5 juin 1991, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée.

Par courrier daté du 25 juillet 2012, Mme Y... était convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 9 août 2012.

Par courrier du 4 septembre 2012, il était rappelé à Mme Y... qu'elle avait jusqu'au 11 septembre 2012 pour adhérer au contrat de sécurisation professionnelle qui lui avait été proposé le 21 août 2012, et qu'à défaut d'adhésion au 11 septembre 2012, la présente lettre constituerait la notification de son licenciement, et le point de départ de son préavis, d'une durée de deux mois.

Mme Y... saisissait le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre, le 16 avril 2013, afin de voir la SARL STIKALOG condamnée au paiement des sommes suivantes :
- 60 000€ à au titre de la contestation de son licenciement économique,
- 4 000€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement de départage du 16 juin 2015, le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre a dit que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, ordonné à la SARL STIKALOG de rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versée à Mme Y... dans la limite de six mois, et condamné l'employeur au paiement des sommes suivantes :
- 30 000€ à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 1 500€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- les dépens.

La SARL STIKALOG interjetait régulièrement appel du jugement le 5 août 2015.

*****

Par conclusions notifiées le 11 septembre 2017, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé exhaustif des moyens de la SARL STIKALOG, celle-ci sollicite l'infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions, que le licenciement économique soit dit fondé, que Mme Y... soit déboutée de l'ensemble de ses demandes et condamnée au paiement de la somme de 2 500€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées le 25 novembre 12016, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé exhaustif des moyens de Mme Y..., celle-ci sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, la réformation quant aux sommes allouées, et statuant à nouveau, que la SARL STIKALOG soit condamnée au paiement des sommes suivantes :
- 2 059,21€ à titre de prime compensatoire,
- 4 118,42€ à titre d'indemnité de préavis,
- 2 059,21€ à titre d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement,
- 1 384,03€ à titre d'indemnité de licenciement,
- 60 000€ au titre de la contestation du licenciement économique,
- 5 000€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- les entiers dépens.

*****

Motifs de la décision

Sur les demandes de Mme Y...

La SARL STIKALOG sollicite que les demandes au titre de la prime compensatoire, de l'indemnité de préavis, de l'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement et de l'indemnité de licenciement soient déclarées irrecevables en ce qu'elles constituent des prétentions nouvelles.

En matière prud'homale, le principe de l'unicité de l'instance s'applique à l'ensemble des procédures introduites avant le 1er août 2016. En effet, l'article R1452-7 du code du travail, abrogé au 1er août 2016, disposait : « les demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail sont recevables même en appel ».

L'appel ayant été interjeté avant le 1er août 2016, les demandes nouvelles formulées en cause d'appel par Mme Y..., dérivant du même contrat de travail, sont recevables.

Sur le motif économique du licenciement

Il convient de vérifier la réalité du motif économique du licenciement.

L'article L.1233-3 du code du travail dans sa version en vigueur au jour du licenciement de Mme Y... disposait que « constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ».

En vertu de l'article L 1233-16 du code du Travail, lorsque le licenciement est prononcé pour un motif économique, la lettre de licenciement doit énoncer le ou les motifs économiques invoqués par l'employeur.

Le courrier du 4 septembre 2012 est rédigé dans les termes suivants :
« Nous sommes contraints de procéder à votre licenciement pour motif économique. Celui-ci est justifié par les éléments suivants :
- les résultats déficitaires de l'entreprise au cours du premier trimestre : à fin mars, les pertes s'élèvent à 74 558€
- le poids important de la masse salariale dans les charges de l'entreprise compte tenu de l'effectif et de la structure de primes en vigueur.
Ce motif nous a conduits à supprimer votre poste.
Nous avons recherché toutes les possibilités de reclassement dans l'ensemble du Groupe HO HIO HEN auquel appartient la société STIKALOG. Cependant, aucune solution de reclassement n'a pu être trouvée.
Nous vous rappelons que vous disposiez jusqu'au 11 septembre 2012 pour adhérer au contrat de sécurisation professionnelle qui vous a été proposé le 21 août 2012 ».

La SARL STIKALOG produit des déclarations d'impôt de la société.

Les comptes de résultat de l'exercice font état, pour l'exercice clos le 31 décembre 2011, d'un résultat d'exploitation de 27 595€, et pour celui clos le 31 décembre 2012, d'un résultat d'exploitation de -286 985€.

L'employeur fait valoir que les délégués du personnel ont été consultés au moins trois fois sur le projet de licenciement collectif, la situation économique de l'entreprise ayant été expliquée et les bilans produits au cours de deux réunions dont les procès verbaux sont versés aux débats, sans que les chiffres ne soient remis en question par les représentants du personnel.

La SARL STIKALOG précise que cette entreprise fait partie du pôle logistique du groupe H DISTRIBUTION, et qu'ECOMAX GUADELOUPE, son seul client, membre du groupe H DISTRIBUTION, était lui aussi en difficulté économique, tel qu'attesté par le bilan produit aux débats, présentant pour l'exercice clos le 31 décembre 2011 un résultat d'exploitation à hauteur de -2 601 546€.

L'employeur produit l'organigramme du groupe H DISTRIBUTION attestant de ce que la SARL STIKALOG fait partie du pôle logistique, et ECOMAX GUADELOUPE du pôle hard discount, la SARL STIKALOG étant l'entrepôt des magasins ECOMAX sur la Guadeloupe.

L'appelante produit les comptes de résultat de l'exercice 2012 pour trois autres entreprises du secteur logistique du groupe, implantées en Guyane et en Martinique, lesquelles ont également un résultat d'exploitation déficitaire.

Il apparaît que les difficultés économiques dont la SARL STIKALOG fait état sont attestées, non seulement la concernant, mais également pour les autres entreprises du groupe dans le même secteur, à savoir le secteur logistique.

Sur la recherche de reclassement

L'article L1233-4 du code du travail dispose : « le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient.
Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure.
Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises ».

Mme Y... fait valoir qu'aucune proposition de reclassement écrite et précise ne lui a été faite. Elle soutient que la recherche de reclassement n'a pas été effectuée, et que les pièces versées aux débats par la SARL STIKALOG concernant cette recherche ont été fabriquées pour les besoins de la cause.

La SARL STIKALOG indique avoir écrit à chacune des enseignes du groupe HO HIO HEN auquel elle appartient. Elle produit aux débats cinq courriers, datés du 26 juin 2012, adressés dans ce cadre. Les preuves de dépôt de 16 courriers sont versées, faisant apparaitre un cachet de la Poste au 10 juillet 2012.

L'appelante produit également 17 courriers de réponses défavorables à la recherche de reclassement.

La SARL STIKALOG expose que le courrier de recherche de reclassement était précis puisqu'il indiquait qu'un poste d'agent administratif serait supprimé, que les personnes qui occupaient ces postes avaient une expérience professionnelle de plus de 20 ans, et qu'une liste de 8 tâches et de 2 compétences spécifiques acquises par les agents administratifs était dressée.

Au vu des éléments produits aux débats, il convient de constater que la SARL STIKALOG a satisfait à son obligation de recherche de reclassement.

Le licenciement pour motif économique de Mme Y... est fondé sur une cause réelle et sérieuse, et la procédure a été respectée, de telle sorte que cette dernière sera déboutée de ses demandes d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement, et de dommages et intérêts au titre de la contestation du licenciement.

Sur le solde de l'indemnité de licenciement

Mme Y... sollicite le paiement de la somme de 1 384,03€ au titre du solde de son indemnité de licenciement, arguant que le total de cette indemnité aurait dû s'élever à la somme de 13 590,72€, en vertu des dispositions de la convention collective nationale du commerce de détail et de gros.

En application des dispositions de la convention collective applicable, et au vu de l'ancienneté et de l'âge de la salarié, il s'avère que c'est à bon droit que la SARL STIKALOG a fait application des dispositions relatives à l'indemnité légale de licenciement, dont le montant est plus favorable à la salariée que celui de l'indemnité conventionnelle.

Mme Y... a été remplie de ses droits par le versement de la somme de 12 206,69€ au titre de son indemnité de licenciement.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis

Mme Y... sollicite le paiement de la somme de 4 418,42€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis, soutenant qu'elle n'a pu l'effectuer, ayant été avisée de son licenciement le 25 juillet 2012, pour une prise d'effet au 12 septembre 2012, soit moins de deux mois après.

Le courrier en date du 25 juillet 2012 n'est aucunement la lettre de licenciement, mais bien le courrier de convocation à l'entretien préalable.

Par courrier remis en main propre le 4 septembre 2012, Mme Y... était informée de ce qu'en cas d'absence de réponse ou de refus relatif à la proposition de contrat de sécurisation professionnelle, la présente lettre constituerait la notification du licenciement et le point de départ du préavis de deux mois.

Il appert, au vu du solde de tout compte établi le 11 septembre 2012, que le préavis n'a été ni effectué, ni payé.

La SARL STIKALOG est donc redevable de la somme de 4 118,42€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis.

Sur la prime compensatoire

Mme Y... expose qu'il est acquis aux salariés de l'entreprise une prime compensatoire correspondant à un mois de salaire, soit la somme de 2 059,21€ la concernant, dont le versement était fait en deux fois, la première partie entre le mois de juillet et le mois de septembre, et la seconde en fin d'année.

L'intimée expose que le versement de la première partie de cette prime apparaît sur le bulletin de salaire du mois de septembre 2012, versé aux débats, pour un montant de 1 038,98€.

Elle produit le reçu pour solde de tout compte sur lequel apparaissent les mentions « prime compensatoire : 1 038,98€ » et « reprise avance sur prime compensatoire : - 1 160€ ».

L'employeur ne conteste pas l'existence de cette prime, cependant Mme Y... n'apporte pas la preuve du montant avancé, et seul le bulletin de salaire du mois de décembre 2011 fait état du versement d'une précédente prime compensatoire, pour un montant de 1 487,17€.

L'existence de cette prime étant établi, et l'employeur ayant opéré en septembre 2012 une reprise d'avance sur prime d'un montant supérieur à la prime versée, il convient de condamner la SARL STIKALOG au paiement de la somme de 1 487,17€ à titre de prime compensatoire pour l'année 2012.

Sur les autres demandes

Chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.

L'équité ne commande pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs

La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire, et en dernier ressort,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Dit que le licenciement pour motif économique de Mme B... Y... est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

Condamne la SARL STIKALOG au paiement à Mme B... Y... de la somme de 4 118,42€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

Condamne la SARL STIKALOG au paiement à Mme B... Y... de la somme de1 487,17€ à titre de prime compensatoire pour l'année 2012,

Déboute les parties de toutes prétentions plus amples ou contraires.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 15/012741
Date de la décision : 12/03/2018
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2018-03-12;15.012741 ?
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