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22/01/2018 | FRANCE | N°16/005721

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, 04, 22 janvier 2018, 16/005721


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 10 DU VINGT DEUX JANVIER DEUX MILLE DIX HUIT

AFFAIRE No : 16/00572

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 15 mars 2016-Section Encadrement.

APPELANT

Monsieur Emmanuel X...
[...]
Représenté par Maître Hugues Y... de la SELARL JFM (Toque 34) substitué par Maître Z..., avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

INTIMÉE

GIE GIE MN
[...]
[...]
Représenté par Maître Isabelle C... (Toque 8) substituée par Maître A

..., avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'artic...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 10 DU VINGT DEUX JANVIER DEUX MILLE DIX HUIT

AFFAIRE No : 16/00572

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 15 mars 2016-Section Encadrement.

APPELANT

Monsieur Emmanuel X...
[...]
Représenté par Maître Hugues Y... de la SELARL JFM (Toque 34) substitué par Maître Z..., avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

INTIMÉE

GIE GIE MN
[...]
[...]
Représenté par Maître Isabelle C... (Toque 8) substituée par Maître A..., avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Novembre 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Bernard Rousseau, président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Bernard Rousseau, président de chambre, président,
Mme Marie-Josée Bolnet, conseiller,
Mme Gaëlle Buseine, conseiller,

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 22 janvier 2018

GREFFIER Lors des débats : Mme Lucile Pommier, greffier principal.

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC.
Signé par M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Mme Valérie Souriant, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure
Il résulte des explications et pièces fournies par les parties, les éléments suivants.

Monsieur Emmanuel X... a été embauché par le GIE MN au poste de technico-commercial, statut cadre, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée prenant effet le 17 septembre 2007.

Par courrier recommandé en date du 3 juin 2014, M. X... était convoqué à un entretien préalable au licenciement, fixé au 13 juin 2014.

Par courrier daté du 18 juin 2014, M. X... se voyait notifier son licenciement.

M. X... saisissait le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre le 3 novembre 2014 en vue de voir son licenciement déclaré abusif, et afin que le GIE MN soit condamné au paiement des sommes suivantes :
- 129 685,50€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 50 000€ à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral,
- 8 000€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Par jugement du 15 mars 2016, le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre a dit que le licenciement de M. X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse, et condamné le GIE MN à lui payer les sommes suivantes :
- 25 937,10€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 1 500€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Les entiers dépens.

M. X... interjetait régulièrement appel du jugement le 25 avril 2016.

Par arrêt avant dire droit en date du 18 septembre 2017, la cour d'appel de céans a enjoint aux parties de produire la lettre de licenciement, et ordonné le renvoi de l'affaire à l'audience du 27 novembre 2017.
La lettre de licenciement a été produite et l'affaire est en état d'être jugée.

*************************

Par conclusions notifiées le 13 avril 2017, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé exhaustif des moyens de M. X..., celui-ci sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a déclaré son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, l'infirmation pour le surplus, et statuant à nouveau, que le GIE MN soit condamné au paiement des sommes suivantes :
- 103 748,40€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 20 000€ à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral,
- 5 000€ au titre des despotisions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Les entiers dépens.

Par conclusions notifiées le 11 mai 2017, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé exhaustif des moyens du GIE MN, celui-ci sollicite l'infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions, qu'il soit constaté que le licenciement de M. X... est pourvu d'une cause réelle et sérieuse, que ce dernier soit en conséquence débouté de l'ensemble de ses demandes et condamné au paiement de la somme de 3 000€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
*******************
Motifs de la décision

Sur le licenciement

La lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, est ainsi rédigée :

« A l'issue de l'entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement auquel vous avez été dûment et régulièrement convoqué et auquel vous avez assisté, après mûre réflexion, je suis contraint de vous notifier par la présente votre licenciement pour divergences profondes quat à la politique et aux actions à mener pour assurer le redressement du chiffre d'affaires de l'entreprise, plus particulièrement du secteur sous votre entière responsabilité.
Les explications que vous avez fournies au cours de l'entretien ne m'ont pas permis de modifier mon appréciation de la situation sur laquelle vous avez été alerté à de nombreuses reprises et à l‘encontre de laquelle vous n'avez absolument rien mis en œuvre pour enrayer la baisse importante du chiffre d'affaires de manière consécutive depuis plusieurs mois.

Depuis 2012, votre chiffre d'affaires n'a cessé de décroitre alors que celui de votre collègue, M. Fabrice B..., également commercial pour le même secteur d'activité, n'a fait que progresser.
Votre CA pour 2011 était de 793 937€, en 2013 il n'était plus que de 408 305€, soit environ 50% de moins ; à titre indicatif, en 2011, le CA de M. B... était de 329 412€, en 2013 il était de 486 144€, soit une progression d'un peu plus de 47%.
Pour compenser cette perte de chiffre d'affaires et vous motiver sur un produit nouveau, notre société a investi dans l'achat de matériel DOKA, que nous avons mis à votre disposition pour développer le coffrage de plancher type DOKAFLEX. Pour ce produit, votre CA est passé de 263 346,33€ en 2012, à 82 869,27€ en 2013, soit une baisse de plus de 68%.

Vous ne pouvez ignorer que votre poste a pour but de développer et de dynamiser notre portefeuille client, afin d'entrainer une dynamique d'activité indispensable au redressement de notre société, qui est soumise à une concurrence accrue.
Or, force est de constater que les résultats que vous avez obtenus sont plus que décevants.
En premier lieu, vous ne respectez pas les grandes lignes directrices en matière commerciale, en ne prospectant pas suffisamment, ou qu'une partie de la clientèle.
De plus, en ce qui concerne le climat qui règne avec votre supérieur hiérarchique, celui-ci est devenu de plus en plus délétère au fil des mois.
Dans ces conditions, je me dois de constater votre inadaptation à votre poste de travail, et surtout votre manque total de motivation.
Cette insuffisance professionnelle vous a été exposée durant l'entretien préalable, et l'avait déjà été au cours d'un entretien informel en date du 24 avril 2014, au cours duquel vous avez simplement indiqué que vous n'étiez plus motivé à travailler pour d'autres personnes que vous-même.

Aujourd'hui je ne peux qu'en tirer toutes les conséquences car vous n'avez nullement modifié votre comportement entre la fin du mois d'avril et le jour de l'entretien préalable. Je considère que ces faits constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement ».

Il appartient à l'employeur de prouver que le motif invoqué au soutien du licenciement, à savoir l'insuffisance professionnelle, est réel et sérieux.

L'insuffisance professionnelle est l'incapacité durable du salarié à effectuer la prestation de travail que l'employeur est en droit d'attendre de lui, sans que cela ne résulte d'un comportement fautif du salarié. Il s'agit d'un manque de compétences de ce dernier, sans que cela ne résulte d'un manquement de l'employeur à son obligation de formation et d'adaptation.

Le GIE MN expose que les objectifs fixés concernant M. X... étaient clairs et précis, faisant référence à l'annexe au contrat de travail, signée le 8 août 2007, et dans laquelle apparait la clause suivante : « prime semestrielle de 1 500€ brut si l'objectif de chiffre d'affaire est atteint. Pour l'année 2008, l'objectif à atteindre est de +10% sur le chiffre d'affaire Location de matériel, par période semestrielle et comparativement à N-1 ».

Si cet objectif permet d'obtenir le versement d'une prime en cas d'accomplissement, l'insuffisance de résultats résidant en ce que ce +10% ne soit pas atteint ne saurait à elle seule justifier un licenciement pour insuffisance professionnelle.

Le GIE MN établit également une comparaison entre le chiffre d'affaires de M. X..., ayant un statut de cadre, et celui de M. B..., commercial non cadre. Les chiffres d'affaire des deux salariés sont, par année, les suivants :
- 2011 : M. X... 793 937€, M. B... 329 412€
- 2012 : M. X... 736 742€, M. B... 385 621€
- 2013 : M. X... 408 305€, M. B... 486 144€ (soit une baisse de 44,5 %)
- 2014 : M. X... 126 0648€ sur 5 mois, M. B... 55 031€ sur 3 mois.

M. X... expose que si le GIE MN fait valoir une insuffisance professionnelle dans la lettre de licenciement, c'est en réalité une insuffisance de résultats qui lui est reprochée, mais encore que celle-ci n'est pas démontrée puisque les objectifs annuels chiffrés ne sont pas établis. En outre, il fait valoir que la comparaison des chiffres d'affaire ne laisse apparaître une grosse chute du sien contre une augmentation de celui de son collègue uniquement concernant l'année 2013.

La comparaison avec le chiffre d'affaires de M. B..., non contestée par M. X..., met en exergue une baisse très importante de résultats concernant M. X... pour l'année 2013
(-4,5 %). Cette baisse s'est accentuée sur 5 mois d'activité en 2014. M. X... n'apporte aucun élément permettant de justifier cette baisse importante de son chiffre d'affaires. Cette baisse spectaculaire de productivité est bien inhérente au manque de travail de M. X... et non à une cause tenant à une conjoncture défavorable du secteur d'activité, ni à des causes imputables à l'entreprise puisque son collègue, M. B..., a augmenté son chiffre d'affaires. L'insuffisance professionnelle est dès lors caractérisée et justifie le licenciement prononcé, puisque traduisant un manque évident d'implication de M. X... dans l'exercice de ses fonctions.

Sur le préjudice moral

M. X... ne fait pas état d'un préjudice moral particulier, de telle sorte que sa demande à ce titre sera rejetée.

Sur les autres demandes

M. X... ayant succombé en ses prétentions sera condamné aux entiers dépens.

L'équité ne commande pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Par ces motifs

La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

Déboute M. X... de l'ensemble de ses demandes,

Condamne le M. X... aux entiers dépens,

Déboute l'appelante de toutes prétentions plus amples ou contraires.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 16/005721
Date de la décision : 22/01/2018
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2018-01-22;16.005721 ?
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