VS-BR
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 126 DU TROIS AVRIL DEUX MILLE DIX SEPT
AFFAIRE No : 13/ 00646
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 20 mars 2013- Section Activités Diverses.
APPELANT
Maître Marie-Agnès X..., ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL ECOLE DE CONDUITE S. K 971
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97190 GOSIER
Représentée par Maître Valérie CHOVINO-AUBERT (Toque 101), avocat au barreau de GUADELOUPE/ ST MARTIN/ ST BART
INTIMÉES
Madame Gisèle Z...
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97170 PETIT BOURG
Représentée par M. Ernest A...(Délégué syndical ouvrier)
AGS-CGEA DE FORT DE FRANCE
Lotissement Dillon Stade
10 rue des Arts et Métiers
97200 FORT DE FRANCE
Représentée par Maître Frederic FANFANT de la SELARL EXCELEGIS (Toque 67), avocat au barreau de GUADELOUPE/ ST MARTIN/ ST BART
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 6 février 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, président,
Mme Marie-Josée BOLNET, conseiller,
Mme Françoise GAUDIN, conseiller,
qui en ont délibéré.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 3 avril 2017.
GREFFIER Lors des débats : Mme Rachel Fresse, greffier.
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC.
Signé par M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, président, et par Mme Valérie SOURIANT, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
Faits et procédure :
Il résulte des pièces versées au débat et des explications fournies par les parties, les éléments suivants
Le contrat de travail conclu le 1er septembre 1998 entre d'une part la Société de Conduite Auto Moto dont le gérant était M. Alex D...et d'autre part Mme Gisèle Z... pour un emploi de monitrice d'auto école, a été annulé et remplacé par les dispositions d'un avenant en date du 6 octobre 2005, selon lequel la salariée était embauchée par ladite société dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel.
Par contrat de travail à temps partiel annualisé à durée indéterminée, en date du 25 septembre 2007, Mme Z... était engagée par la Société Ecole de Conduite S. K. 971, ayant le même gérant et le même objet que la précédente, toujours en qualité de monitrice d'auto école, à compter du 1er octobre 2007, pour une durée annuelle de travail de 804 heures.
Par courrier du 30 mars 2012, Mme Z... faisait savoir à la Société Ecole de Conduite S. K. 971 qu'elle prenait sa retraite à compter du 1er avril 2012 et sollicitait le paiement d'une indemnité de départ à la retraite équivalente à un demi-mois de salaire.
Le 31 mai 2012, Mme Z... saisissait le conseil de prud'hommes de Pointe à Pitre, aux fins d'obtenir paiement d'une indemnité pour travail dissimulé et d'une indemnité de congés payés. Elle devait par la suite présenter devant la même juridiction, des demandes de paiement de rappel de salaire, d'indemnité de départ à la retraite, et des dommages et intérêts pour préjudice subi.
Par jugement du 20 mars 2013, la juridiction prud'homale condamnait la Société Ecole de Conduite S. K. 971 à payer à Mme Z... les sommes suivantes :
-3360, 18 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011,
-336, 02 euros d'indemnité de congés payés,
-1000 euros à titre de dommages et intérêts,
-549, 48 euros à titre d'indemnité de départ à la retraite,
-1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
En outre il était ordonné à la Société Ecole de Conduite S. K. 971 de délivrer à Mme Z... les fiches de paie rectifiées du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011, sous astreinte de 30 euros par jour de retard, et ce 8 jours après la notification du jugement.
Par déclaration du 25 mars 2013, la Société Ecole de Conduite S. K. 971 interjetait appel de cette décision.
Par jugement du 23 janvier 2014, le tribunal mixte de commerce de Pointe à Pitre ouvrait une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la Société Ecole de Conduite S. K. 971, ce redressement judiciaire était converti en liquidation judiciaire par jugement du 15 janvier 2015.
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Par conclusions communiquées aux autres parties, le 11 janvier 2017, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, Me X..., ès qualités de mandataire liquidateur de la Société Ecole de Conduite S. K. 971 sollicite l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il a retenu à tort une modification unilatérale de la part de l'employeur, du contrat de travail de Mme Z... et l'a condamné à payer à celle-ci un rappel de salaire, une indemnité de congés payés, des dommages et intérêts pour préjudices subis et une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Elle réclame paiement de la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
En ce qui concerne les retenues pratiquées sur le salaire de Mme Z..., Me X...explique que la salariée s'est toujours autorisée à quitter son lieu de travail, pour vaquer à ses occupations personnelles, à chaque annulation de cours des élèves, et ce à l'insu de l'employeur, alors qu'en cas d'annulation de cours par des élèves, le moniteur doit rester sur son lieu de travail, à disposition de l'employeur, et pendant toute la durée hebdomadaire de travail, contractuellement convenue.
Me X...souligne que le caractère forfaitaire du salaire mensualisé ne s'oppose nullement à ce que le montant de la rémunération soit réduit pour les mois de travail incomplets, notamment en cas d'absences injustifiées.
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Par conclusions communiquées aux autres parties le 30 décembre 2013 et le 7 juillet 2016, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, Mme Z... sollicite la confirmation des condamnations prononcées à l'encontre de la Société Ecole de Conduite S. K. 971, mais en en portant les montants aux sommes suivantes :
-18 782, 69 euros de rappels de salaire du 01 janvier 2009 au 31 juillet 2013,
-1878, 27 euros d'indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire,
-60, 03 euros de reliquat d'indemnité de congés payés.
Mme Z... demande en outre paiement des sommes suivantes :
-3310, 86 euros pour les jours fériés,
-310, 09 euros d'indemnité compensatrice de congés payés sur jours fériés,
-10 000 euros de dommages et intérêts pour préjudices subis,
-1097, 65 euros de reliquat d'indemnité de départ à la retraite,
-10 401, 53 euros d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,
-5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme Z... demande en outre la remise sous astreinte des fiches de paye rectifiées à compter du 1 janvier 2009 au 31 décembre 2011.
Mme Z... expose que son contrat de travail n'est pas un contrat de travail à temps partiel annualisé et que même si c'était le cas, ce type de contrat a été abrogé par la loi 2000-37 du 19 janvier 2000, et remplacé par un contrat de travail à temps modulé. Elle relève en outre que son contrat de travail ne répond pas non plus aux conditions du contrat de travail à temps partiel.
Mme Z... explique par ailleurs que conformément à la loi relative à la mensualisation, en aucune manière la Société Ecole de Conduite S. K. 971 ne devait lui déduire des heures de travail sur ses fiches de paie, soutenant qu'elle était bien présente à son poste de travail et qu'elle ne pouvait vaquer à ses occupations, restant à la disposition de la Société Ecole de Conduite S. K. 971.
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Par conclusions communiquées le 16 janvier 2017, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, l'AGS sollicite l'infirmation du jugement entrepris et le rejet des demandes de Mme Z....
L'AGS fait valoir qu'en application des articles L. 3242-1 et suivants du code du travail, l'employeur était parfaitement fondé à appliquer la mensualisation de la rémunération assortie d'une variation de celle-ci en fonction des heures effectivement travaillées.
L'AGS demande qu'il soit jugé que sa garantie est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, à un des trois plafonds définis à l'article D 3253-5 du code du travail, le plafond de la garantie étant en l'espèce le plafond 4, et que son obligation de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et sur justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement.
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MOTIFS DE LA DECISION :
Bien que Mme Z... conteste la qualification de son contrat de travail à temps partiel annualisé, elle n'en demande pas la requalification et n'en tire aucune conséquence pécuniaire, sollicitant seulement le paiement des heures figurant sur ses bulletins de salaires comme étant des " heures d'absence non rémunérées ", faisant valoir qu'elle était bien présente à son poste de travail, qu'elle ne pouvait vaquer à ses occupations et qu'elle demeurait à la disposition de l'employeur.
Pour s'opposer à cette demande, l'employeur explique qu'en cas d'annulation de cours par des élèves, le moniteur doit rester sur son lieu de travail, à la disposition de son employeur, et pendant toute la durée hebdomadaire fixe de travail, contractuellement convenue, et pour laquelle il reçoit en contrepartie paiement.
L'employeur ajoute que Mme Z..., comme les autres moniteurs n'a jamais bénéficié d'une quelconque flexibilité d'horaire que ce soit, et encore moins d'une quelconque autonomie dans la gestion de ses heures de présence sur son lieu de travail, les horaires de travail à respecter, peu important l'annulation de cours par des élèves, étant fixes.
Selon la Société Ecole de Conduite S. K. 971 Mme Z... se serait toujours autorisée à quitter son lieu de travail, pour vaquer à ses occupations personnelles, à chaque annulation de cours par les élèves, et ce à l'insu de l'employeur. La Société Ecole de Conduite S. K. 971 précise que dûment informée par la secrétaire qu'elle employait, elle n'a jamais considéré qu'elle devait faire la preuve d'une quelconque
tolérance à l'égard de ces comportements, et qu'elle a pu pratiquer des retenues sur salaires.
Cependant la Société Ecole de Conduite S. K. 971 qui apparaît ainsi exiger la présence des moniteurs au sein de son établissement, même en cas d'annulation de cours par les élèves, n'a jamais, à l'examen des pièces versées au débat, fait la moindre remarque, la moindre observation, la moindre mise en garde à l'égard de la salariée au sujet d'absences à l'occasion d'annulations de cours. Cette absence de rappel à l'ordre conforte les explications de Mme Z... qui soutient qu'elle restait à la disposition de son employeur.
Dans la mesure où les retenues figurant sur les bulletins de salaire au regard de la mention " heures d'absences non rémunérées ", correspondent aux heures de cours d'enseignement programmées pour lesquelles les élèves ne se sont pas présentés, mais pour lesquelles le moniteur était à la disposition de son employeur, celui-ci doit verser la rémunération correspondant aux dites heures.
L'examen des bulletins de salaires qui ont été versés au débat et qui couvrent la période de janvier 2009 à mars 2012 (Mme Z... prenant sa retraite le 1er avril 2012), montre que le total des retenues opérées par l'employeur pour " heures d'absence non rémunérées " s'élève à la somme de 9 665, 68 euros, Mme Z... ne produisant aucun autre justificatif faisant apparaître d'autres retenues.
La créance de la salariée sera fixée à ce montant au titre des rappels de salaire. Il y sera ajouté la somme de 966, 57 euros au titre de l'indemnité de congés payés correspondante.
Mme Z... entend obtenir paiement de la somme de 10 000 euros pour préjudices subis. En application de l'article 1153 du code civil, les dommages et intérêts résultant du retard de paiement ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal, ces intérêts courant en l'espèce à compter de la demande en justice, à savoir la date à laquelle l'affaire a été appelée devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes, c'est-à-dire le 28 juin 2012, étant observé que le jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire en date du 23 janvier 2014, a, par l'effet des dispositions de l'article L. 622-28 du code de commerce, arrêté le cours des intérêts.
Mme Z... ne fournit aucune explication, ni aucune justification à sa demande de paiement d'un reliquat d'indemnité de congés payés à hauteur de 60, 03 euros. Il ne peut donc y être fait droit.
Il ne ressort pas de l'examen des bulletins de paie produits au débat que l'employeur ait effectué, sur le salaire versé mensuellement, des retenues au titre de jours fériés ; il ne peut donc être fait droit à la demande de paiement des dits jours.
Il ressort des articles L. 1237-9 et D 1237-1 du code du travail, que lorsque le salarié quitte volontairement l'entreprise pour prendre sa retraite, comme c'est le cas en l'espèce, il lui est versé par l'employeur une indemnité de départ à la retraite au moins égale à un demi-mois de salaire après dix ans d'ancienneté et un mois de salaire après 15 ans d'ancienneté.
Il ressort des pièces du dossier que l'ancienneté de Mme Z... remonte au 1er septembre 1998, aucun élément ne permet de faire remonter son ancienneté plus avant. En conséquence elle a droit à une indemnité de départ à la retraite équivalente à un demi-mois de salaire, soit la somme de 791, 20 euros.
Pour justifier sa demande en paiement d'une indemnité pour travail dissimulé, Mme Z... fait valoir que l'employeur a refusé de la rémunérer de l'intégralité de son salaire. Toutefois il ne peut être reproché à l'employeur d'avoir dissimulé un certain nombre d'heures de travail effectuées par le salarié, puisqu'il mentionne expressément sur les bulletins de salaires le nombre d'heures qu'il estime ne pas devoir payer. L'intention frauduleuse au sens de l'article L. 8221-5 du code du travail n'est donc pas caractérisée. Il ne peut être fait droit à la demande d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé présentée par Mme Z....
Il devra être établi par le mandataire liquidateur un bulletin de paie complémentaire faisant apparaître les rappels de rémunération dont les montant sont fixés par le présent arrêt, le prononcé d'une astreinte n'étant pas nécessaire en l'état.
Comme il paraît inéquitable de laisser à la charge de Mme Z... les frais irrépétibles qu'elle a exposés, il lui sera alloué la somme de 700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ces motifs,
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Déclare l'appel recevable,
Au fond, réforme le jugement déféré,
Et statuant à nouveau,
Fixe le montant de la créance de Mme Z... au passif de la Société Ecole de Conduite S. K. 971, aux montants suivants :
-9 665, 68 euros de rappel de salaire pour la période du 1er janvier 2009 au 31 mars 2012, et celle de 966, 57 euros d'indemnité de congés payés correspondantes, avec intérêts au taux légal à compter du 28 juin 2012, étant rappelé que le jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire en date du 23 janvier 2014, a, par l'effet des dispositions de l'article L. 622-28 du code de commerce, arrêté le cours des intérêts.
-791, 20 euros d'indemnité de départ à la retraite,
-700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Rappelle que l'AGS est tenue de garantir le paiement des créances salariales de Mme Z... dans les conditions prévues aux articles L3253-8 et suivants du code du travail, et qu'en aucun cas l'indemnité allouée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile n'est garantie par l'AGS, ne s'agissant pas d'une créance salariale,
Dit que le mandataire liquidateur de la Société Ecole de Conduite S. K. 971 devra délivrer à Mme Z..., dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, un bulletin de paie complémentaire sur lequel seront portés les rappels de rémunération dont les montants sont fixés par le présent arrêt,
Dit que les dépens sont à la charge de la Société Ecole de Conduite S. K. 971,
Déboute les parties de toutes conclusions plus amples ou contraires.
Le Greffier, Le Président.