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20/02/2017 | FRANCE | N°15/01196

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 20 février 2017, 15/01196


VS-FG

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 71 DU VINGT FEVRIER DEUX MILLE DIX SEPT

AFFAIRE No : 15/ 01196
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 25 juin 2015- Section Industrie.
APPELANTE
SARL PAIN DES ILES rue du Port-Borel 97129 LAMENTIN (GUADELOUPE) Représentée par Maître Pierre DEBRAY, avocat au barreau de MARTINIQUE substitué par Maître SARDA, avocat au barreau de GUADELOUPE/ ST MARTIN/ ST BART

INTIMÉES

Mademoiselle Marlène X...Y......45000 ORLÉANS Dispensée de

comparaître en application des dispositions des articles 446-1 et 946 du Code de Procédure Civile

A...

VS-FG

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 71 DU VINGT FEVRIER DEUX MILLE DIX SEPT

AFFAIRE No : 15/ 01196
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 25 juin 2015- Section Industrie.
APPELANTE
SARL PAIN DES ILES rue du Port-Borel 97129 LAMENTIN (GUADELOUPE) Représentée par Maître Pierre DEBRAY, avocat au barreau de MARTINIQUE substitué par Maître SARDA, avocat au barreau de GUADELOUPE/ ST MARTIN/ ST BART

INTIMÉES

Mademoiselle Marlène X...Y......45000 ORLÉANS Dispensée de comparaître en application des dispositions des articles 446-1 et 946 du Code de Procédure Civile

Ayant pour conseil, Maître Daîna DESBONNES (Toque 71), avocat au barreau de GUADELOUPE/ ST MARTIN/ ST BART (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2015/ 001205 du 14/ 12/ 2015 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASSE-TERRE)

Maître Marie-Agnès A...ès qualité de mandataire judiciaire de la « SARL PAIN DES ILES », ... 97190 GOSIER (GUADELOUPE) Non Comparante, ni représentée

ETUDE BCM et ASSOCIES, es-qualité d'administrateur judiciaire de la SARL PAIN DES ILES Immeuble Marina Center Blanchard 97190 LE GOSIER Représentée par Maître Pierre DEBRAY, avocat au barreau de MARTINIQUE substitué par Maître SARDA, avocat au barreau de GUADELOUPE/ ST MARTIN/ ST BART

AGS-CGEA DE FORT DE FRANCE Lotissement Dillon Stade 10, rue des Arts et Metiers 97200 FORT DE FRANCE Représentée par Maître Frédéric FANFANT (Toque 67), avocat au barreau de GUADELOUPE/ ST MARTIN/ ST BART substitué par Maître Christelle REYNO.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 9 janvier 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, Mme Marie-Josée Bolnet, conseiller, Mme Françoise Gaudin, conseiller,

qui en ont délibéré.
Les parties présentes à l'audience ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 20 février 2017.

GREFFIER Lors des débats : Mme Rachel Fresse, greffier.

ARRÊT :

Réputé Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Mme Valérie Souriant, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Mme Marlène X...Y..., de nationalité brésilienne, a été engagée le 17 juin 2003 par la SARL PAON DES ILES, selon contrat à durée déterminée en remplacement d'une salariée en congé maladie, en qualité de vendeuse – caissière. Dans le dernier état de la relation contractuelle, elle percevait une rémunération mensuelle brute de 1. 468, 17 € pour 151, 67 heures.

La SARL PAIN DES ILES a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire le 7 novembre 2013. Maître Marie-Agnès A...a été désignée en qualité de mandataire judiciaire et Maître E...en qualité d'administrateur judiciaire.

Par courrier daté du 13 décembre 2013, l'employeur demandait à Mme X...Y...de lui justifier d'une carte de séjour en cours de validité.
Mme X...Y...sollicitait le 9 janvier 2014 l'accord de son employeur pour des congés payés à prendre du 12 février 2014 au 5 mars 2014.
Par courrier remis en main propre le 5 février 2014 à la salariée, l'employeur lui faisait savoir qu'il n'avait reçu aucun document et lui indiquait que « à réception de ce courrier, si vous ne vous manifestez pas, je me verrai dans l'obligation de mettre un terme à ce contrat de remplacement ». Le 11 février 2014, l'employeur lui remettait les documents de fin de contrat, portant come motif de rupture, la mention « démission ».

Le 10 avril 2014, Mme X...Y...saisissait le conseil des Prud'hommes de Pointe à Pitre, sollicitant la requalification de son contrat de travail en contrat à durée indéterminée et la condamnation de la SARL PAIN DES ILES au paiement de :

1. 468, 17 € à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, 8. 809, 02 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif, 2. 495, 89 € à titre d'indemnité de précarité de 10 %, et remise des documents de rupture ;

Par jugement en date du 25 juin 2015, le conseil des prud'hommes a dit et jugé que le licenciement de Mme X...Y...ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse, a fixé la créance de Mme X...Y...à l'égard de la SARL PAIN DES ILES, en liquidation judiciaire, aux sommes suivantes : 1. 468, 17 € à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, 1. 408, 17 € à titre de préjudice subi pour licenciement abusif, 587, 27 € à titre d'indemnité légale de licenciement, 2. 309, 01 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés, 1. 468, 17 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 146, 80 € à titre de congés payés y afférents, ordonné à la société PAIN DES ILES la délivrance sous astreinte de 20 € par jour de retard sur une période de 30 jours à compter de la notification du jugement des documents de rupture rectifiés, dit ladite décision opposable à l'AGS dans les limites de sa garantie, condamné Me A..., liquidateur judicaire, aux dépens.

La SARL PAIN DES ILES a interjeté appel de ce jugement le 23 juillet 2015.
Aux termes de conclusions déposées au greffe en date du 17 mai 2016 et régulièrement notifiées aux parties adverses, et auxquelles il a été fait référence lors des débats, la SARL PAIN DES ILES, représentée par la SELARL BCM et Associés, ès qualité de Commissaire à l'exécution du plan de ladite SARL, demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris, de constater la situation irrégulière de Mme Marlène X...Y...et sa démission, déclarer mal fondées ses demandes de dommages et intérêts pour rupture abusive et l'en débouter, différer la fixation du montant de l'indemnité forfaitaire, dans l'attente de la production des bulletins de salaire sur la durée du contrat, condamner Mme X...Y...au paiement de la somme de 1. 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Ladite société fait essentiellement valoir que les règles relatives au licenciement ne s'appliquent pas à la rupture du contrat de travailleur étranger en situation irrégulière depuis son embauche (titulaire d'un titre de séjour établi par la Guyane).
Aux termes de conclusions déposées au greffe en date du et régulièrement notifiées à l'appelante et à l'AGS, Mme Marlène X...Y...demande à la cour : si la requalification du contrat de travail en contrat à durée indéterminée est retenue, les condamnations suivantes : 1. 468, 17 € à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, 8. 809, 02 € à titre de préjudice subi pour licenciement abusif, 587, 27 € à titre d'indemnité légale de licenciement, 2. 309, 01 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés, 1. 468, 17 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 146, 80 € à titre de congés payés y afférents, si la requalification du contrat de travail en contrat à durée indéterminée n'est pas retenue, les condamnations suivantes : 8. 809, 02 € à titre de préjudice subi pour rupture anticipée, 2. 495, 89 € à titre d'indemnité de fin de contrat, outre la délivrance sous astreinte de 50 € par jour de retard des documents de rupture rectifiés, de dire et juger opposable à l'AGS l'arrêt à intervenir.

La salariée rétorque que son contrat de travail doit être requalifié en contrat à durée indéterminée, que l'employeur n'a pas respecté la procédure de licenciement et qu'elle disposait d'un titre de séjour régulier pour travailler en Guadeloupe.
Aux termes de conclusions déposées au greffe en date du 4 janvier 2016 et régulièrement notifiées à l'appelante et à l'intimée, la Centre de Gestion et d'Etudes AGS (CHEA) de FORT DE France a demandé à la cour de réformer le jugement en ce qu'il a requalifié le contrat de travail en contrat de travail à durée indéterminée et jugé que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse, de dire que Mme X...Y...était titulaire d'un contrat à durée déterminée et de la débouter de toutes ses demandes, subsidiairement, de faire une stricte application des dommages et intérêts pour rupture abusive, en l'absence de preuve de préjudice spécifique à la rupture, dire et juger qu'aucune condamnation directe ne saurait intervenir à l'encontre de l'AGS et que celle-ci ne pourrait être amenée à prendre en charge les créances éventuellement fixées et ce, en application de sa garantie, à savoir le plafond 6 et dire que les dépens et l'article 700 du code de procédure civile ne peuvent être mis à la charge de l'AGS.
Maître A..., ès qualité de mandataire judiciaire, n'a pas comparu, ni personne pour elle.

MOTIFS

Sur la requalification du contrat de travail
Attendu que Mme X...Y...a été embauchée selon un contrat à durée déterminée du 3 septembre 2012, sans terme précis, pour « remplacement d'un salarié en maladie » ; Attendu que la salariée demande la requalification de son contrat de travail en contrat à durée indéterminée ; Attendu qu'il résulte des articles L 1242-1 et suivants du code du travail, que le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise et ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas énumérés à l'article L 1242-2 du code du travail ;

Attendu que si l'article susvisé prévoit en son article 1o a) et c) le remplacement d'un salarié en cas d'absence et de suspension de son contrat de travail, il résulte de la combinaison des articles L. 1245-1 et L. 1242-12 du code du travail, qu'est réputé à durée indéterminée le contrat de travail à durée déterminée qui ne comporte par la définition précise de son motif, et que cette exigence de précision quant à la définition du motif implique nécessairement que le nom et la qualification du salarié remplacé figurent dans le contrat lorsqu'il s'agit de l'un des cas visés par l'article L. 1242-2 du même code ;
Qu'il est constant qu'en l'espèce, le motif de recours prévu à l'article L 1242-2 du code du travail, à savoir « remplacement d'un salarié en maladie » n'est pas justifié ; Qu'en effet, ne figurent expressément dans le contrat susvisé, ni le nom de la personne remplacée, ni sa qualification professionnelle ;

Que faute de comporter toutes les mentions obligatoires, ledit contrat n'entre pas dans les prévisions légales, et doit être réputé à durée indéterminée, conformément à l'article L. 1245-1 du code du travail ;

Sur la rupture du contrat de travail

Attendu que compte tenu de la requalification de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée, la rupture de ce contrat était dès lors régie par les règles du licenciement ;
Que la lettre du 5 février 2014 adressée par la SARL PAIN DES ILES à Mme X...Y...en ces termes : « Je vous ai envoyé un courrier vous réclamant votre titre de séjour, je n'ai jusqu'à ce jour reçu aucun document. A réception de ce courrier, si vous ne vous manifestez pas, je me verrai dans l'obligation de mettre un terme à ce contrat de remplacement », vaut lettre de rupture imputable à l'employeur ;

Que ce dernier n'a cependant pas respecté la procédure de licenciement et n'a pas donné à la salariée les moyens de s'expliquer ;
Qu'en outre, Mme X...Y...a produit en cours d'instance, un titre de séjour valide (du 10 mars 2007 au 9 mars 2017) l'autorisant à travailler en Guadeloupe, soit durant la période du contrat de travail ;
Que si un entretien préalable avait été tenu, la salariée aurait pu justtifier de l'autorisation de travailler dont elle bénéficiait
Que le motif de rupture, invoqué par l'employeur, pris de l'absence de titre de séjour régulier de la part de Mme X...Y...n'est donc pas établi et en l'absence de manquement de la salariée à ses obligations, il s'ensuit que la rupture, imputable à l'employeur, s'analyse en un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse, ainsi que l'a dit et jugé la décision déférée ;
Attendu qu'en l'état de l'ancienneté de 17 mois de Mme X...Y...dans l'entreprise, de son salaire moyen de 1. 468, 17 € au moment de la rupture, du défaut de justification de sa situation professionnelle depuis la rupture, il convient de lui allouer la somme de 3. 000 € en réparation de son préjudice en application de l'article L 1235-5 du code du travail, en ce compris le préjudice subi du fait de l'irrégularité de la procédure ;

Qu'en outre, la salariée, compte tenu de la requalification de la relation de travail en contrat de travail à durée indéterminée, peut prétendre aux indemnités de rupture, soit une indemnité de préavis, à hauteur d'un mois de salaire, soit la somme de 1. 468, 17 € et son incidence congés payés de 146, 81 € et une indemnité légale de licenciement, s'élevant à la somme de 587, 27 € ;

Qu'il résulte des bulletins de salaire des mois de janvier et février 2014 versés au dossier de la salariée, que celle-ci avait droit à 42, 33 jours de congés payés au moment de la rupture et que l'employeur ne lui a réglé qu'une somme de 186, 88 €, sans qu'il soit mentionné le nombre de jours de congés y correspondant ; Que Mme X...Y...a donc droit à une somme de 1. 884, 70 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés ; Que l'employeur devra remettre à la salariée les documents légaux de rupture rectifiés en conséquence du présent arrêt ;

Que le présent arrêt sera déclaré opposable à l'AGS-CGEA de FORT de France dans les limites de sa garantie, soit au plafond 6 ;

Qu'il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en la cause ;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Réforme le jugement déféré et statuant à nouveau sur le tout pour une meilleure compréhension,

Requalifie la relation contractuelle de travail au sein de la société PAIN DES ILES en contrat à durée indéterminée.

Dit et juge que la rupture de la relation de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
En conséquence,

Condamne la SARL PAIN DES ILES à payer à Mme X...Y...Marlène les sommes de :

3. 000 € à titre de préjudice subi pour licenciement abusif et irrégulier, 587, 27 € à titre d'indemnité légale de licenciement, 1884, 70 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés, 1. 468, 17 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 146, 80 € à titre de congés payés y afférents

Ordonne la remise par l'employeur des documents légaux de rupture rectifiés en conséquence de la présente décision ;
Dit le présent arrêt opposable à l'AGS, CGEA de FORT de France dans les limites de sa garantie, soit au plafond 6.
Rejette le surplus,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
Dit les dépens, frais privilégiés de la procédure collective de la SARL PAIN DES ILES.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15/01196
Date de la décision : 20/02/2017
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2017-02-20;15.01196 ?
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