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20/02/2017 | FRANCE | N°14/00445

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 20 février 2017, 14/00445


VS-FG
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 64 DU VINGT FEVRIER DEUX MILLE DIX SEPT

AFFAIRE No : 14/ 00445
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes POINTE A PITRE du 25 février 2014- Section Commerce.
APPELANT
Monsieur Franck Hugues X...X...97118 SAINT-FRANCOIS Représenté par Maître Nadia BOUCHER (Toque 18), avocat au barreau de GUADELOUPE/ ST MARTIN/ ST BART (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2014/ 001438 du 10/ 09/ 2014 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASSE-TERRE)

INTIM

ÉS
SNC D'EXPLOITATION DE LA COCOTERAIE Avenue de l'Europe 97118 SAINT-FRANCOIS Représen...

VS-FG
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 64 DU VINGT FEVRIER DEUX MILLE DIX SEPT

AFFAIRE No : 14/ 00445
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes POINTE A PITRE du 25 février 2014- Section Commerce.
APPELANT
Monsieur Franck Hugues X...X...97118 SAINT-FRANCOIS Représenté par Maître Nadia BOUCHER (Toque 18), avocat au barreau de GUADELOUPE/ ST MARTIN/ ST BART (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2014/ 001438 du 10/ 09/ 2014 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASSE-TERRE)

INTIMÉS
SNC D'EXPLOITATION DE LA COCOTERAIE Avenue de l'Europe 97118 SAINT-FRANCOIS Représentée par Maître Antonio ALONSO, avocat au barreau de Paris

Société LAGON RESTAURATION Hôtel de la Cocoteraie Avenue de l'Europe 97118 SAINT-FRANCOIS Non Comparante, ni représentée

Société CORAYA RESTAURATION Hôtel la Cocoteraie Avenue de l'Europe 97118 SAINT-FRANCOIS Non Comparante, ni représentée

Monsieur Bernard Z......75013 PARIS Représenté par Maître Michaël SARDA (Toque 1), avocat au barreau de GUADELOUPE/ ST MARTIN/ ST BART-qui s'est constitué pour cette partie le 28 novembre 2014.

Maître Marie-Agnès B..., ès qualité de mandataire liquidateur de la société CORAYA PRO ...... 97190 GOSIER Représentée par Maître Jérôme NIBERON de la SCP MORTON et ASSOCIES (Toque 104), avocat au barreau de GUADELOUPE/ ST MARTIN/ ST BART

AGS-CGEA DE FORT DE FRANCE Lotissement Dillon Stade 10 rue des Arts et Métiers 97200 FORT-DE-FRANCE Représentée par Maître Frederic FANFANT (Toque 67) de la SELARL EXCELEGIS, avocat au barreau de GUADELOUPE/ ST MARTIN/ ST BART

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 9 janvier 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, Mme Marie-Josée Bolnet, conseiller, Mme Françoise Gaudin, conseiller,

qui en ont délibéré.
Les parties présentes à l'audience ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 20 février 2017.

GREFFIER Lors des débats : Mme Rachel Fresse, greffier.

ARRÊT :

Défaut, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Mme Valérie Souriant, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

La société SNC d'exploitation LA COCOTERAIE, gérée par M. Bernard Z..., est propriétaire de l'hôtel exerçant sous l'enseigne « LA COCOTERAIE » situé à St François. Chaque année, elle conclut une convention de concession d'activité à titre précaire avec un prestataire pour assurer le service de restauration de cet hôtel, pour la période d'octobre à août de l'année suivante. Dans ce contexte, plusieurs concessionnaires se sont succédé.

M. X...Franck a été embauché à compter du 26 novembre 1997 par la société SGRH, un de ces concessionnaires, en qualité de cuisinier, sans contrat de travail écrit et a été repris par les concessionnaires successifs, aux termes d'avenants.

Le 1er octobre 2008, la SNC d'exploitation LA COCOTERAIE, a signé avec la SARL LAGON RESTAURATION, gérée dans un premier temps par M. Z...puis par M. F...Stéphane, une convention de concession d'activité à titre précaire portant sur les activités de restauration, bar, et petits déjeuners de l'hôtel, pour la période du 23 octobre au mois d'août suivant. Cette société a succédé à la société AJ RESTAURANT qui a été liquidée le 3 avril 2008 et qui était également en charge dans les mêmes conditions contractuelles, de l'exploitation du service restauration de l'hôtel LA COCOTERAIE. Le contrat de travail de M. X...Franck a été transféré à la société LAGON RESTAURATION, pour la période du 23 octobre 2008 au 23 août 2009.

Par la suite, la société LA COCOTERAIE aurait concédé l'activité de restauration de l'hôtel LA COCOTERAIE sis à SAINT FRANCOIS à la société CORAYA RESTAURATION, nouveau concessionnaire en 2009, puis selon contrat de concession à titre précaire à la société en formation CORAYA PRO, en date du 22 octobre 2010.
Un protocole d'accord a été signé le 18 octobre 2010 entre la SNC LA COCOTERAIE et l'EURL CORAYA PRO, représentée par Mme Christine G..., prévoyant les modalités de paiement du salaire du mois d'octobre 2010 et des heures supplémentaires ainsi que la remise des fiches de paie non reçues par les salariés, pour l'année 2010.
L'EURL CORAYA PRO a résilié unilatéralement le 23 mars 2011 ledit contrat de concession.
Par jugement du 11 août 2011, le tribunal mixte de commerce a prononcé la liquidation judiciaire de la société CORAYA PRO et désigné Maître B..., ès qualités de liquidateur.
Cette dernière a notifié à M. X..., par lettre du 26 septembre 2011, son licenciement pour motif économique, compte tenu de la liquidation judiciaire de la société CORAYA PRO, après avoir sollicité le 22 août 2011 et obtenu l'autorisation de licenciement de l'inspection du travail, M. X...ayant la qualité de délégué du personnel titulaire au sein de l'entreprise.
Cependant, par une lettre datée du 27 octobre 2011, Maître B...a informé M. X...ainsi que les autres salariés de CORAYA PRO qu'elle ne pouvait poursuivre l'instruction de leurs dossiers de licenciement, la société CORAYA PRO n'ayant aucune existence légale, invitant les salariés à saisir les instances juridictionnelles.

M. X...a saisi le conseil des prud'hommes de Pointe à Pitre le 6 juin 2012, à l'encontre de la société d'exploitation LA COCOTERAIE, des sociétés LAGON RESTAURATION, COROYA RESTAURATION et M. Z...Bernard, mettant en cause Maître B..., ès qualités de liquidateur de la société CORAYA PRO, et l'AGS, aux fins de paiement de rappels de salaire, au titre du 13ème mois, d'heures supplémentaires, d'une indemnité pour travail dissimulé et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement de départage en date du 25 février 2014, le conseil des prud'hommes de Pointe à Pitre a débouté M. X...Franck de l'ensemble de ses demandes et a rejeté la demande de la SNC D'EXPLOITATION LA COCOTERAIE formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
* * *
Le 10 mars 2014, M. X...Franck a formé appel de ladite décision qui lui a été notifiée le 27 février 2014.
Dans ses dernières conclusions déposées le 15 février 2016 et régulièrement notifiées aux parties adverses, il a demandé à la cour d'infirmer le jugement querellé, de :
dire et juger que la SNC LA COCOTERAIE est devenue l'employeur de M. X...en vertu de l'article L. 1244-1 du code du travail, prononcer la réintégration de M. X...au sein de la société SNC D'EXPLOITATION LA COCOTERAIE, de manière rétroactive depuis le 23 août 2009, sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir, condamner la SNC D'EXPLOITATION LA COCOTERAIE à lui payer les sommes suivantes :

92. 745, 76 € à titre de salaires du 1er mars 2011 au 20 janvier 2016, 11. 200 € à titre de prime BINO, 4. 660, 48 € au titre de l'indemnité de nourriture, 12. 461, 48 € au titre du 13ème mois, 10. 747, 94 € à titre d'indemnité de congés payés à partir de 2010, 875, 87 € au titre de rappel des heures supplémentaires effectuées au cours de l'année 2010, 30. 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice né de l'inexécution de son contrat de travail, et sollicitant la remise des bulletins de salaire depuis août 2009 à ce jour sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir et de rétablir X...dans ses droits sociaux.

A l'appui, M. X...soutient que son véritable employeur serait la SNC D'EXPLOITATION LA COCOTERAIE, que le licenciement prononcé par Maître B...serait nul et non avenu, considérant l'absence de personnalité morale de la société CORAYA PRO, que dès lors, la relation de travail n'ayant jamais été rompue, il est fondé à solliciter sa réintégration au sein de la SNC LA COCOTERAIE, son véritable employeur, de manière rétroactive à compter du 23 août 2009 et à réclamer le paiement de ses rappels de salaires, de ses accessoires, des heures supplémentaires qu'il a effectuées et qui ne lui ont jamais été réglées et des congés payés, sur la période de mars 2011 à janvier 2015.

Dans ses dernières conclusions déposées le 9 janvier 2017 et régulièrement notifiées aux autres parties, la société d'exploitation LA COCOTERAIE a soulevé in limine litis l'incompétence de la cour de céans au profit du tribunal administratif, eu égard à la qualité de salarié protégé de X..., subsidiairement, a demandé à la cour de confirmer le jugement déféré, de dire et juger que la société SNC D'EXPLOITATION LA COCOTERAIE ne peut pas être qualifiée d'employeur de X..., de débouter M. X...de sa demande de réintégration, celle-ci étant au surcroît tardive et impossible, de rejeter l'ensemble de ses demandes, subsidiairement, fixer le point de départ de la demande de rappel de salaires au 20 janvier 2016, date de la demande de réintégration et plus subsidiairement, déduire des rappels de salaires, les rémunérations et revenus de remplacement perçus par le salarié sur la même période, plafonner la demande au titre de la prime BINO à 50 € par mois, condamner M. X...au paiement de la somme de 3. 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Elle fait valoir en substance que :
- la société LA COCOTERAIE n'a jamais été l'employeur de M. X...;- aucune confusion juridique n'existe entre la SNC LA COCOTERAIE et ses concessionnaires ;- l'EURL CORAYA PRO ne peut être qualifiée de société fictive, elle a eu une activité économique, a embauché et déclaré ses salariés, dont X...et a été immatriculée au registre du commerce dès le 26 mai 2011 ;- le contrat de travail de M. X...n'a jamais été transféré à la société SNC D'EXPLOITATION LA COCOTERAIE ;- le licenciement prononcé par Maître B...n'est pas nul et sans effet et consomme bien la rupture du contrat de travail ;- le salarié ayant tardé à solliciter sa réintégration, en tout état de cause, elle ne saurait être tenue au paiement des salaires durant toute la procédure, alors que le salarié ne s'est pas tenu à sa disposition, ne lui ayant jamais proposé ses services ;

Par conclusions déposées le 29 octobre 2015, Maître B...ès qualités de liquidateur de la société CORAYA PRO, demande sa mise hors de cause et la confirmation du jugement, de désigner la société LAGON RESTAURATION puis la SNC d'exploitation LA COCOTERAIE employeur de l'appelant, de condamner solidairement la société LAGON RESTAURATION et la SNC d'exploitation LA COCOTERAIE à payer à Maître Marie-Agnès B...ès qualités de liquidateur de la société CORAYA PRO, la somme de 10. 000 € pour procédure abusive et celle de 5. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le CGEA de FORT DE France, gestionnaire de l'AGS, dans ses dernières conclusions du 10 novembre 2016, notifiées aux autres parties, sollicite sa mise hors de cause, en l'absence de demande dirigée à son encontre, subsidiairement de débouter M. X...de ses demandes, plus subsidiairement, de dire et juger que la garantie de l'AGS ne saurait excéder les limites de sa garantie légale, que sa garantie est plafonnée en l'espèce au plafond 6, de dire et juger que l'AGS ne devra procéder à l'avance des créances fixées que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-19 et suivants et L. 3253-17 du code du travail, de dire et juger que l'obligation de l'AGS de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et sur justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement, de statuer ce que de droit quant aux frais d'instance et l'article 700 du code de procédure civile sans qu'ils puissent être mis à la charge de l'AGS.

La société LAGON RESTAURATION et la société CORAYA RESTAURATION, bien que régulièrement avisées par le greffe de la cour par lettres recommandées du 13 mars 2014 de la déclaration d'appel de M. X..., n'ont pas comparu, ni personne pour elles. Ladite lettre est revenue avec la mention « n'habite pas à l'adresse indiquée » et l'appelant a été invité à les assigner par ordonnance du magistrat chargé d'instruire l'affaire en date du 15 septembre 2014, ce qui n'a pas été fait ;

Il n'a pas été présenté de conclusions pour M. Bernard Z....
MOTIFS
Sur la compétence matérielle de la juridiction prud'homale et de la cour
Attendu que la SNC d'exploitation LA COCOTERAIE soulève en cause d'appel l'incompétence rationae materiae de la cour de céans, au motif que le licenciement de X..., délégué du personnel, a été autorisé par l'inspection du travail et que l'intéressé n'avait exercé aucun recours devant le tribunal administratif et que l'autorité judiciaire n'était donc pas compétente pour apprécier le bien-fondé dudit licenciement ;
Que la décision administrative qui a accordé la décision de licencier M. X..., salarié protégé de la société CORAYA PRO, du fait de sa liquidation judiciaire, ne s'est pas prononcée sur l'existence d'un autre employeur ou co-employeur, à savoir la société SNC LA COCOTERAIE, comme le revendique le salarié ; Qu'en outre, la juridiction prud'homale est compétente pour statuer sur le licenciement économique, même autorisé par l'inspection du travail et seule compétente pour statuer sur l'existence et la rupture d'un contrat de travail et toutes les conséquences en découlant ;

Que l'exception d'incompétence sera rejetée ;

Sur l'employeur de M. X...

Attendu qu'il résulte des bulletins de salaire versés au dossier que X...a travaillé en qualité de cuisinier pour la société LAGON RESTAURATION et a reçu des bulletins de salaire de ladite société jusqu'en février 2010, sans qu'un contrat de travail n'ait été signé entre les parties ;

Qu'en l'absence d'écrit, le contrat de travail est réputé à durée indéterminée et la société LAGON RESTAURATION, défaillante, n'écarte pas cette présomption légale en prouvant l'existence d'un contrat à durée déterminée ;

Attendu que le salarié soutient que son contrat de travail a été transféré de plein droit, en application de l'article L. 1224-1 du code du travail, à la société LA COCOTERAIE, laquelle a repris indirectement l'activité de restauration attachée à l'hôtel qu'elle exploite, à partir de février 2010, au travers de sociétés fictives ; Qu'en vertu de l'article L. 1224-1 du code du travail, les contrats de travail en cours sont maintenus entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise en cas de transfert d'une entité économique conservant son identité dont l'activité est poursuivie ou reprise ;

Que la perte d'un marché ou d'une concession précaire comme en l'espèce au profit d'un concurrent n'entre dans le champ d'application dudit article que dans la seule hypothèse où elle s'accompagne du transfert au nouveau titulaire du marché d'une entité économique constituée d'un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre et dont l'identité est maintenue ;
Que la société d'exploitation La COCOTERAIE concède chaque saison, soit du 23 octobre au 23 août suivant, une partie des activités de restauration, bar, petits déjeuners de l'hôtel à un concessionnaire et fournit à ce dernier des locaux, du matériel, mobilier, équipements ;
Attendu qu'à partir du 23 octobre 2009, le contrat de concession de la société LAGON RESTAURATION ayant pris fin dès le 23 août, la société LA COCOTERAIE soutient avoir concédé l'activité de restauration à la société CORAYA Restauration, selon contrat de concession qui aurait été signé en janvier 2010 mais qui n'est pas produit aux débats, puis toujours dans les mêmes conditions, pour la période d'octobre 2010 à août 2011, à la société CORAYA PRO, selon contrat de concession signé avec ladite société, dite en formation, le 22 octobre 2010 ;
Qu'en l'espèce, il y a bien eu transfert d'une entité économique autonome au profit desdites société CORAYA RESTAURATION et CORAYA PRO, qui ont continué à travailler dans les mêmes locaux, avec le personnel en place, avec le même matériel de cuisine (fours, chambre froide etc..) et qui ont récupéré l'enseigne et la clientèle du restaurant de l'hôtel LA COCOTERAIE ; Qu'en conséquence, il y a eu transfert de plein droit du contrat de travail de M. X...au nouvel employeur sans que l'accord du salarié ne soit nécessaire ;

Que cependant, le salarié soutient que son contrat a été transféré sur le même fondement, au profit du concédant, la société LA COCOTERAIE, en invoquant le caractère fictif des concessionnaires qui se sont succédés (CORAYA RESTAURATION et CORAYA PRO) et la reprise en gestion directe de ladite activité et du personnel y attaché, par la SNC d'exploitation de LA COCOTERAIE ;

Que concernant la société CORAYA RESTAURATION, dont la gérante était la même (Mme Christine G...) que la société CORAYA PRO qui va lui succéder, cette première société n'a jamais été immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Pointe à Pitre ;
Qu'en outre, il s'avère que si un protocole d'accord a été signé le 8 janvier 2010 entre la société CORAYA, représentée par Mme Christine G..., gérante et I..., associé dans la SNC LA COCOTERAIE, et les organisations syndicales prévoyant que les salaires du personnel de la société CORAYA RESTAURATION seraient payés le 4 de chaque mois par la société CORAYA RESTAURATION, en réalité les bulletins de paie ont été émis à l'entête de la société LAGON RESTAURATION jusqu'au mois de mai 2010, alors que le contrat de concession de cette dernière avait pris fin depuis août 2009 ;
Qu'en octobre 2010, la société CORAYA PRO prend le relais au niveau de l'activité restauration et s'engage selon protocole d'accord à régler le salaire d'octobre 2010 aux salariés, les heures supplémentaires qu'ils ont effectuées en 2010 et qui ne leur ont pas été réglées et à leur délivrer des bulletins de salaire y afférents jamais reçus auparavant, ce qui démontre déjà la fictivité de la précédente concessionnaire ;
Que le caractère fictif de la société CORAYA PRO ressort également des éléments suivants produits aux débats ;

Attendu qu'il résulte du courrier versé au dossier, daté du 27 octobre 2011, émanant de Maître B..., ès qualités de liquidateur de la société CORAYA PRO, que ladite société n'a jamais été immatriculée au registre du commerce, qu'il s'agit d'une société fictive qui n'a jamais eu de compte courant, qui n'a fonctionné qu'à travers le compte personnel de son associé la SNC LA COCOTERAIE, cette dernière réglant salaires et fournisseurs ;

Que la société CORAYA PRO a été néanmoins immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Pointe à Pitre le 12 juillet 2011, soit cinq jours après que sa gérante ait déposé le 7 juillet 2011, le bilan auprès du même tribunal, en notant dans sa déclaration, que la société CORAYA PRO n'avait pas de compte bancaire, n'avait pas de comptabilité, ni de statuts et que ladite déclaration de cessation des paiements et immatriculation concomitante étaient destinées à faire prendre en charge par l'AGS les salariés affectés au restaurant de la SNC COCOTERAIE ;
Que ladite EURL, CORAYA PRO, avait signé un contrat de concession alors qu'elle n'avait aucune existence juridique, que ledit acte n'a jamais été repris lors de son immatriculation, en l'absence de statuts ou décision autre ;
Qu'elle a procédé à des déclarations uniques d'embauche de salariés, sans numéro URSSAF et sans déclarer lesdits salaires ni payer les cotisations y afférentes, a délivré des bulletins de salaire aux salariés, dont M. X..., sans numéro URSSAF ;
Que lesdits salaries étaient réglés en réalité par la SNC D'EXPLOIATION LA COCOTERAIE ou par son associé, ou par Mme G...sur son compte personnel, ainsi que cette dernière le reconnait et qu'en témoignent les chèques ou extraits de compte bancaire produits au dossier ;
Qu'il convient en conséquence de considérer qu'à partir du 23 août 2009, l'activité de restauration ayant continué dans les locaux de l'hôtel LA COCOTERAIE, M. X...Franck travaillait nécessairement pour le compte et sous la subordination exclusive de la SNC d'exploitation LA COCOTERAIE, celle-ci ne rapportant pas la preuve de l'existence d'une concession de l'activité de restauration donnée à une entité légalement constituée ;
Que le seul fait qu'il ait reçu jusqu'en février 2010 des bulletins de salaire à l'entête de la société LAGON RESTAURATION ne saurait suffire à caractériser le lien de subordination avec ladite société, alors qu'il ressort des pièces du dossier qu'en réalité la SNC D'EXPLOITATION a réglé lesdits salaires, à la place de la société LAGON RESTAURATION ;
Que la SNC LA COCOTERAIE doit être considérée comme l'employeur de M. X...à compter du 23 août 2009 ; Que dès lors, il convient de mettre hors de cause, la société CORAYA PRO, représentée par Maître B...et dire qu'il n'y a lieu à garantie de l'AGS ;

Sur la demande de réintégration
Qu'il n'est pas contesté que M. X...a travaillé jusqu'à ce que Maître B..., ès qualités de liquidateur de la société CORAYA PRO, lui notifie le 26 septembre 2011 son licenciement pour motif économique ; Que cependant, compte tenu de ce qu'il a été dit et jugé que le véritable employeur du salarié était la SNC D'EXPLOITATION LA COCOTERAIE au travers de sociétés fictives, depuis le 23 août 2009, un tel licenciement émanant du représentant d'une société fictive, qui n'était pas le réel employeur, ne peut qu'être considéré comme nul et de nul effet ; Attendu qu'en l'absence de licenciement régulièrement intervenu et en l'absence de démission ou de prise acte de rupture de la part du salarié, la relation contractuelle de travail s'est poursuivie jusqu'à la date du présent arrêt ; Attendu que M. X...a ajouté à ses demandes d'indemnités une demande nouvelle en réintégration au sein de la société SNC LA COCOTERAIE, son employeur ;

Que la SNC D'EXPLOITATION LA COCOTERAIE s'y oppose aux motifs que le salarié a sollicité tardivement sa réintégration lors même qu'aucun délai n'est imparti au salarié protégé victime d'un licenciement nul pour demander sa réintégration et en invoquant, sans apporter le moindre élément probant, l'impossibilité de réintégration de M. X...;
Que la société intimée ne peut valablement invoquer un abus dans la demande d'indemnisation de M. X..., et solliciter son point de départ à la demande de réintégration, alors que dès la saisine, M. X...a demandé le paiement de ses salaires en invoquant la nullité de son licenciement ; Qu'en outre, ladite société soutient que n'ayant pas d'activité de restauration, elle ne peut réintégrer un cuisinier mais ne justifie pas avoir concédé ladite activité à une société extérieure depuis 2011 ; Qu'en tout état de cause, la cour de cassation a jugé que le seul fait de confier à un prestataire de service le « nettoyage des locaux » ne caractérise pas une impossibilité matérielle pour l'employeur de réintégrer la salariée dans son emploi ou, à défaut, dans un emploi équivalent, peu important le fait que la salariée ait attendu trois ans pour solliciter sa réintégration ;

Qu'il convient en conséquence de faire droit à la demande de réintégration, en ce que la SNC D'EXPLOITATION LA COCOTERAIE devra procéder à la réintégration de Franck X...dans un emploi équivalent à celui de cuisinier, qu'il occupait lors de son licenciement et tenant compte de son niveau de classification et de son ancienneté et ce, dans les trois mois suivant la notification de l'arrêt, sous peine d'une astreinte de 50 € par jour de retard pendant un délai de trois mois passé lequel il sera à nouveau statué ;

Sur les demandes en paiement de sommes

rappel de salaires

Attendu que si le salaire est en principe la contrepartie du travail, aucune retenue sur salaire ne peut être effectuée lorsque l'inexécution du travail est imputable à l'employeur et non au salarié qui est resté à la disposition de celui-ci ;

Qu'en l'absence de licenciement régulièrement intervenu, le salarié a droit aux salaires échus, car l'inexécution du travail n'est pas de son fait et il a réclamé dès le 6 juin 2012 ses salaires impayés à partir de mars 2011 ;
Qu'il s'est tenu à la disposition de son employeur, ayant même fait grève sur place et ayant été expulsés de son lieu de travail à la demande de la SNC D'EXPLOITATION LA COCOTERAIE ;
Que M. X...soutient, sans être démenti, ne plus avoir été payé à partir de mars 2011 ; Que compte tenu de son salaire de base tel que figurant sur son bulletin de salaire de décembre 2010, il lui est donc dû : en 2011 : 10 mois, en 2012 : 12 mois, en 2013 : 12 mois, en 2014 : 12 mois en 2015 : 12 mois soit sur la base de 1599, 06 € bruts mensuels, une somme totale de 92. 745, 48 € ;

rappel de la prime BINO

Attendu que l'accord interrégional sur les salaires en Guadeloupe, dit « accord Jacques BINO » s'applique depuis le 1er mars 2009 et prévoit le versement d'une prime de 200 euros aux salariés dont le salaire ne dépasse pas 1, 4 SMIC, se décomposant comme suit :- pour les entreprises de moins de 50 salariés, versements à hauteur de 50 € par les entreprises et 50 € par les collectivités territoriales, ces derniers versements étant prévus pour une durée de 36 mois,- parallèlement, l'Etat a introduit le RSTA en Guadeloupe d'un montant de 100 € versé directement au salarié.

Qu'il résulte de la note du 4 février 2010 produite au dossier du salarié et de ses bulletins de salaire, que M. X...percevait la prime de 54 € dite BINO ; Qu'il convient dès lors de faire droit à sa demande de rappel de ladite prime de 2010 à 2012, soit une somme de 1944 € ;

sur la prime de nourriture Que si le salarié percevait un avantage en nature à l'occasion des repas pris dans l'entreprise ; Que cette indemnité constituant un remboursement de frais, M. X...ne saurait réclamer ladite prime alors qu'il n'a pas pris de repas durant la période réclamée ; sur le 13ème mois Attendu qu'il était également prévu une prime de 13ème mois dans le protocole du 8 janvier 2010 pour les salariés travaillant au restaurant ; Que M. X...a donc droit aux primes de 13ème mois sur les années 2011, 2012, 2013 et 2014, 2015, soit une somme de 7. 995, 30 € ; sur les congés payés

Attendu que M. X...réclame la méthode du maintien du salaire et fait valoir qu'il n'a pas perçu ses congés payés depuis 2010 ; Que selon la méthode du maintien du salaire prévue à l'article L. 3141-22 II-du code du travail, l'indemnité ne peut être inférieure au montant de la rémunération que le salarié aurait perçue pendant la période de congé si le salarié avait continué à travailler ; Que cependant, la prime de 13ème mois et l'indemnité de repas doivent être exclues de ladite indemnité ; Qu'il résulte du bulletin de salaire de décembre 2010 qu'il lui était dû 7, 5 jours de congés payés ; Qu'en conséquence, X...peut prétendre sur les années 2010 à 2015 à une indemnité congés payés de 1. 854, 24 € x5 = 9. 271, 20 € plus 421, 60 €, soit une somme globale de 9. 692, 80 € ; Que la société SNC société d'exploitation de LA COCOTERAIE sera donc condamnée à payer lesdites sommes à M. X...Franck et à lui remettre les bulletins de salaire y afférents, sans qu'une astreinte soit nécessaire ;

sur les heures supplémentaires

Attendu qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production de tous éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments sur les horaires effectivement réalisés ;
Qu'au soutien de sa demande en paiement d'heures supplémentaires qu'il aurait effectuées en 2010, le salarié produit un décompte manuscrit non daté, ni suffisamment précis sur les horaires de travail journaliers, permettant à l'employeur d'y répondre et ce alors que les bulletins de salaire produits établissent le paiement d'heures supplémentaires ; Qu'il convient en conséquence de rejeter ce chef de demande ;

Sur les demandes de dommages et intérêts
Attendu que le salarié sollicite des dommages et intérêts pour inexécution du contrat de travail, laquelle est déjà compensée par le versement des salaires et accessoires, sans qu'il justifie de sa situation durant la procédure, ni d'un préjudice distinct de nature à lui allouer des dommages et intérêts supplémentaires ;
Que ladite demande sera rejetée ;
Attendu que Maître B..., ès qualités, sollicite la condamnation solidaire des sociétés LAGON RESTAURATION et SNC D'EXPLOITATION LA COCOTERAIE au paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive à son égard ; Que cependant, l'instance a été engagée par les salariés de la société CORAYA PRO, sur invitation de Maître B...et il était normal que cette dernière, ès qualités de liquidateur, ayant prononcé puis rétracté leur licenciement, soit appelée en la cause ; Que cette demande sera rejetée ;

Que de même, il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel et les demandes formées à ce titre seront rejetées ;
Que la société d'exploitation de LA COCOTERAIE, succombant, supportera les entiers dépens ;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt de défaut et en dernier ressort,
Rejette l'exception d'incompétence matérielle,
Infirme le jugement déféré,
Statuant à nouveau,
Dit et juge que la société d'exploitation LA COCOTERAIE est devenue l'employeur de M. X...Franck en vertu de l'article L. 1224-1 du code du travail,
Met hors de cause M. Z...et la société CORAYA PRO représentée par Maître B..., liquidateur ;
Dit n'y avoir lieu à garantie de l'AGS ;
Ordonne à la société d'exploitation LA COCOTERAIE de procéder à la réintégration de Franck X...dans un emploi équivalent à celui de cuisinier, qu'il occupait lors de son licenciement et tenant compte de son niveau de classification et de son ancienneté et ce, dans les trois mois suivant la notification de l'arrêt, sous peine d'une astreinte de 50 € par jour de retard pendant un délai de trois mois passé lequel il sera à nouveau statué ;

Condamne la société SNC d'exploitation LA COCOTERAIE à payer à M. X...Franck les sommes suivantes :

92. 745, 48 € à titre de rappels de salaires du 1er mars 2011 au 31 décembre 2015, 1. 944 € à titre de prime BINO, 7. 995, 30 € au titre de 13 ème mois ; 9. 692, 80 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés.

Ordonne à la société SNC d'exploitation LA COCOTERAIE la remise à M. X...Franck des bulletins de salaire afférents auxdites condamnations dans le mois de la signification du présent arrêt, Dit n'y avoir lieu à prononcer une astreinte de ce chef,

Déboute les parties de toutes leurs demandes, différentes, plus amples ou contraires.
Condamne la société SNC d'exploitation LA COCOTERAIE aux entiers dépens.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14/00445
Date de la décision : 20/02/2017
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2017-02-20;14.00445 ?
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