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30/01/2017 | FRANCE | N°15/00951

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 30 janvier 2017, 15/00951


VS-BR

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 34 DU TRENTE JANVIER DEUX MILLE DIX SEPT

AFFAIRE No : 15/ 00951
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 18 février 2014- Section Encadrement.
APPELANTE
Association CARAIBES MELONNIERS BP 169 Sainte Marie 97160 MOULE Représentée par Maître Sully LACLUSE de la SELARL LACLUSE-CESAR (toque 2), substitué par Maître LEDESMA, avocat au barreau de GUADELOUPE/ ST MARTIN/ ST BART

INTIMÉ
Monsieur Marius Y... ...97160 MOULE Représenté par Ma

ître Claudel DELUMEAU (toque 44), substitué par Maître BOURACHOT, avocat au barreau de GUADELOUPE/...

VS-BR

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 34 DU TRENTE JANVIER DEUX MILLE DIX SEPT

AFFAIRE No : 15/ 00951
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 18 février 2014- Section Encadrement.
APPELANTE
Association CARAIBES MELONNIERS BP 169 Sainte Marie 97160 MOULE Représentée par Maître Sully LACLUSE de la SELARL LACLUSE-CESAR (toque 2), substitué par Maître LEDESMA, avocat au barreau de GUADELOUPE/ ST MARTIN/ ST BART

INTIMÉ
Monsieur Marius Y... ...97160 MOULE Représenté par Maître Claudel DELUMEAU (toque 44), substitué par Maître BOURACHOT, avocat au barreau de GUADELOUPE/ ST MARTIN/ ST BART

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 novembre 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Bernard Rousseau, président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, Mme Marie-Josée Bolnet, conseiller, Mme Françoise Gaudin, conseiller.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 30 janvier 2017.
GREFFIER Lors des débats : Mme Valérie SOURIANT, greffier.
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Mme Valérie Souriant, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure :
Par contrat de travail à durée indéterminée en date du 26 janvier 2009, M. Y... était engagé en qualité de technicien agricole par l'Association CARAÏBES MELONNIERS.
Le 23 février 2011, l'employeur adressait un avertissement à M. Y....
A la suite de la convocation à un entretien préalable fixé au 25 mars 2011, M. Y... se voyait notifier son licenciement par courrier du 14 avril 2011.
Le 13 décembre 2011, M. Y... saisissait le conseil de prud'hommes de Pointe à Pitre, aux fins de contester son licenciement et obtenir indemnisation.
Par jugement du 18 février 2014, la juridiction prud'homale considérant que le licenciement de M. Y... ne reposait sur aucune cause réelle et sérieuse, condamnait l'Association CARAÏBES MELONNIERS à payer à ce dernier les sommes suivantes :-18 089, 40 euros à titre d'indemnité pour licenciement abusif,-3014, 90 euros à titre d'indemnité sur préavis,-1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 31 mars 2014, l'Association CARAÏBES MELONNIERS interjetait appel de cette décision.
****
Par conclusions communiquées le 14 avril 2015, auxquelles il a été fait référence à l'audience des débats, l'Association CARAÏBES MELONNIERS sollicite l'infirmation du jugement déféré et le rejet des demandes de M. Y.... Elle réclame paiement de la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
A l'appui de sa demande l'Association CARAÏBES MELONNIERS entend voir constater le bien fondé de la rupture conventionnelle et l'absence de tout harcèlement moral.
****
Par conclusions communiquées le 12 février 2016, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, M. Y... sollicite la confirmation du jugement entrepris, sauf en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts pour rupture vexatoire, soutenant qu'il a fait l'objet d'un harcèlement humiliant et vexatoire visant à obtenir sa démission. A ce titre il demande paiement de la somme de 20 000 euros pour harcèlement moral et licenciement vexatoire. Il entend voir porter à 9042 euros le montant de l'indemnité de préavis et réclame paiement de la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
****

Motifs de la décision :

Sur la rupture du contrat de travail :
Dans sa lettre de licenciement du 14 avril 2011, l'employeur justifie sa décision de la façon suivante.
" Peu de temps après votre embauche, nous avons eu à déplorer de votre part des manquements professionnels dans l'exécution des tâches ; manquements suffisamment graves au point de nous interpeller sur votre capacité véritable à conduire avec toute la rigueur et l'efficacité professionnelle attendues, les responsabilités contractuelles qui sont les vôtres.
Aujourd'hui, nous sommes de nouveau amenés à constater qu'en dépit de nos nombreux rappels à l'ordre verbaux et singulièrement de notre dernier avertissement daté du 14 février 2011, vous ne semblez pas vouloir vous ressaisir durablement.
En effet, vous préférez vous inscrire dans une inconduite particulièrement inquiétante à travers l'adoption d'un comportement plutôt ambigu caractérisé par un véritable refus d'une franche et réelle coopération.
Nous en voulons pour preuve le fait que vous refusez de mettre en oeuvre nos directives en feignant de ne pas saisir le sens et la portée des récents griefs formulés à votre encontre.
Ainsi dans votre lettre de contestation de l'avertissement vous ne répondez pas du grief de l'insuffisance qualitative à propos du rapport d'activité sur la diversification ; l'essentiel pour vous étant :- que vous soyez personnellement satisfait de votre travail,- que vous ayez pris soin de nous transmettre un exemplaire.

Dans le même ordre d'idée, vous venez de me remettre un nouveau travail, lequel s'avère truffé d'erreurs.
Ce fait intolérable traduit une légèreté blâmable avec laquelle vous accomplissez vos fonctions.
De même, il vous avait été demandé de remettre dans les meilleurs délais le véhicule de service type 4x4 mis à votre disposition mais devenu inadapté à vos fonctions actuelles afin de pouvoir récupérer un autre véhicule ; à ce jour, vous persistez dans votre refus d'obtempérer et ce, au plus parfait mépris de notre pouvoir d'organisation et direction ;
Par ailleurs, nous avions convenue de la tenue d'un point hebdomadaire destiné au suivi de la conduite de vos actions fixé au mardi ; là aussi, vous contentant de votre réponse écrite, vous persistez à ne pas vous manifester auprès de nous pour rendre effectif cette séance de travail ;
Au cours de l'entretien préalable en présence de votre conseiller extérieur, vous avez persisté dans votre refus d'admettre toute part de responsabilité dans la dégradation notable des rapports que nous avons soulignée ainsi que de leur caractère fautif.
Or il n'y a aucune malice pour un employeur, en considération de l'intérêt de l'entreprise, à demander à un salarié qu'il exécute effectivement et correctement les tâches pour lesquelles, il est employé par des moyens qui ne révèlent aucune pression excessive.
Dès lors nous sommes dans l'impossibilité de poursuivre, sans dommage pour l'entreprise, notre relation de travail d'autant que la confiance placée en vous est définitivement perdue... "
Certains des griefs invoqués dans la lettre de licenciement ont déjà été mentionnés dans la lettre d'avertissement qui a été notifiée deux mois auparavant, le 14 février 2011, ils portent sur une insuffisance qualitative concernant un rapport d'activité sur la diversification, la non-remise d'un véhicule de service de type 4x4, et l'absence aux séances hebdomadaires de travail fixées le mardi aux fins de faire le point sur le suivi des actions à mener.
Certes comme le relève l'employeur le " rapport d'activité saison 2008/ 2009 " n'a pas de caractère technique mais constitue un bilan commercial, et par suite peut être qualifié d'insuffisant, mais cette insuffisance a déjà été sanctionnée par l'avertissement du 14 février 2011.
En ce qui concerne le second rapport produit au débat, dit " rapport en diversification 2010/ 2011 ", l'employeur le qualifie de " truffé d'erreurs " sans mettre en évidence les erreurs dont il serait affecté. En outre contrairement à ce qui est exposé dans ses conclusions, il n'est pas reproché au technicien, dans la lettre de licenciement, d'avoir adressé directement ce rapport à l'autorité de contrôle en court-circuitant ses supérieurs hiérarchiques, ce grief ayant été seulement invoqué au sujet du premier rapport, dans la lettre d'avertissement du 14 février 2011.
Toutefois il est vrai que ce deuxième rapport contient essentiellement des constatations quant à la variation des productions agricoles, un état prévisionnel des productions, et un examen critique des rapports entre les producteurs et l'Association CARAÏBES MELONNIERS ainsi que les perspectives de commercialisation, mais l'étude technique des modes de productions est extrêmement réduite.
Dans sa réponse du 23 février 2011 à l'avertissement reçu, M. Y... montre qu'il n'entend pas se plier aux exigences de son employeur. En effet il fait savoir qu'il entend conserver le véhicule qui a été mis à sa disposition, en l'occurrence un véhicule 4x4, qu'il qualifie de véhicule de fonction, alors qu'il ressort des termes du contrat que ce véhicule, n'est pas un véhicule attaché à la fonction, mais est un véhicule de service puisqu'il est stipulé que le salarié l'utilisera dans le cadre de ses activités, l'employeur entendant vouloir fournir à M. Y... un véhicule en rapport avec l'exercice de ses missions.
Il apparaît par ailleurs que dans les semaines qui ont suivi l'avertissement du 14 février 2011, M. Y..., qui, dans sa réponse du 23 février 2011, faisait valoir qu'il se tenait à la disposition de son employeur pour les réunions du mardi en faisant état de circonstances particulières qui avaient empêché ces réunions, n'a manifestement pas satisfait à la demande de l'employeur dans les semaines qui ont suivi l'avertissement.
Ainsi il ressort de ces constatations qu'à la suite de l'avertissement du 14 février 2011, M. Y... a montré l'intention de ne pas se conformer aux exigences légitimes de son employeur. Il en résulte que celui-ci était fondé à en tirer les conséquences et à procéder au licenciement de M. Y..., le comportement d'obstruction, et pour le moins d'absence de coopération avec la hiérarchie constituant une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Sur les allégations de harcèlement moral et de licenciement vexatoire :

Il ressort des constatations qui précèdent que les critiques émises par l'employeur tant dans la lettre d'avertissement du 14 février 2011 que dans la lettre de licenciement du 14 avril 2011, sont fondées, et que les exigences exprimées à l'égard du salarié n'ont rien d'abusives et sont justifiées par le soucis d'obtenir du salarié un travail présentant un minimum de qualité, avec des moyens matériels adaptés.
En ce qui concerne les conditions matérielles de travail dénoncées par M. Y..., celui-ci ne peut faire valoir qu'il a dû " acquérir de sa poche " un ordinateur portable, puisque la facture d'achat qu'il produit est antérieure de près de deux ans à son embauche par l'Association CARAÏBES MELONNIERS. Par ailleurs s'il est vrai que M. Y... ne disposait pas d'un bureau personnel, mais travaillait dans une salle commune, il ne ressort d'aucune pièce versée au débat qu'il ait sollicité de son employeur l'attribution d'un bureau personnel ou d'un ordinateur, ni qu'il se soit plaint de ses conditions matérielles de travail, le seul courrier, en date du 23 février 2011 qu'il ait adressé à son employeur, par lequel il répondait à l'avertissement qui lui avait été notifié, étant exempt de toute revendication matérielle.
Il ne peut dès lors, comme il le fait dans ses conclusions, prétendre qu'il " n'a jamais pu obtenir de son employeur des conditions de travail optimales ".
Les insuffisances de M. Y..., en particulier dans l'élaboration de ses rapports, comme il a été relevé ci-avant, sont de nature à justifier les reproches de l'employeur et l'engagement de procédures disciplinaires, lesquelles ne peuvent constituer dès lors, des faits de harcèlement.
En outre la demande légitime, par l'employeur, de produire des diplômes en original, ne peut participer d'un harcèlement moral.
Il ne ressort donc pas des éléments des débats que M. Y... ait fait l'objet d'un harcèlement moral de la part de son employeur, ni que son licenciement ait pu avoir un caractère humiliant et vexatoire.
En conséquence M. Y... sera débouté de sa demande de paiement de la somme de 20 000 euros d'indemnité pour harcèlement moral et licenciement vexatoire.
Il ressort de l'examen des bulletins de paie versés au débat que M. Y... a perçu au cours des mois de janvier à mars 2011, un salaire de base de 3014, 90 euros. Il n'est pas justifié du versement d'une rémunération au titre de la période de préavis que le salarié a été dispensé d'effectuer.
En conséquence, compte tenu des stipulations contractuelles prévoyant un préavis de trois mois, M. Y... a droit à une indemnité compensatrice de préavis d'un montant de 9042 euros.
Comme il paraît inéquitable de laisser à la charge de M. Y... les frais irrépétibles qu'il a exposés, il lui sera alloué la somme de 1500 euros.

Par ces motifs,

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Déclare recevable l'appel de l'Association CARAÏBES MELONNIER,
Au fond,
Confirme le jugement du 18 février 2014 du conseil de prud'hommes de Pointe à Pitre en ce qu'il a condamné l'Association CARAÏBES MELONNIERS à payer à M. Y... la somme de 9042 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
Le réforme pour le surplus et statuant à nouveau,
Dit que le licenciement de M. Y... est fondé sur une cause réelle et sérieuse,
Déboute M. Y... de ses demandes d'indemnités pour licenciement abusif et pour harcèlement moral et licenciement vexatoire,
Condamne l'Association CARAÏBES MELONNIERS à payer à M. Y... la somme de 1500 euros à titre d'indemnité fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que les dépens sont à la charge de l'Association CARAÏBES MELONNIERS,
Déboute les parties de toutes conclusions plus amples ou contraires.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15/00951
Date de la décision : 30/01/2017
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2017-01-30;15.00951 ?
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