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30/01/2017 | FRANCE | N°14/01937

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 30 janvier 2017, 14/01937


VS-FG

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 24 DU TRENTE JANVIER DEUX MILLE DIX SEPT

AFFAIRE No : 14/ 01937
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 26 novembre 2014- section activités diverses.
APPELANT
Monsieur Jean-Yves X... ...97160 LE MOULE Représenté par Maître Claudel DELUMEAU de la SELARL JUDEXIS (toque 44), substitué par Maître PHILIBIEN, avocat au barreau de GUADELOUPE/ ST MARTIN/ ST BART

INTIMÉE
SARL CLG AFFICHAGE 44 lot Dugazon de Bourgogne 97139 LES ABYMES Repré

sentée par Maître Jean MACCHI, avocat au barreau de MARTINIQUE, substitué par Maître KAMMERER, av...

VS-FG

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 24 DU TRENTE JANVIER DEUX MILLE DIX SEPT

AFFAIRE No : 14/ 01937
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 26 novembre 2014- section activités diverses.
APPELANT
Monsieur Jean-Yves X... ...97160 LE MOULE Représenté par Maître Claudel DELUMEAU de la SELARL JUDEXIS (toque 44), substitué par Maître PHILIBIEN, avocat au barreau de GUADELOUPE/ ST MARTIN/ ST BART

INTIMÉE
SARL CLG AFFICHAGE 44 lot Dugazon de Bourgogne 97139 LES ABYMES Représentée par Maître Jean MACCHI, avocat au barreau de MARTINIQUE, substitué par Maître KAMMERER, avocat au barreau de GUADELOUPE/ ST MARTIN/ ST BART

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 5 décembre 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, Mme Marie-Josée Bolnet, conseiller, Mme François Gaudin, conseiller, qui en ont délibéré.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 30 janvier 2017.
GREFFIER Lors des débats : Mme Valérie SOURIANT, greffier.

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Mme Valérie Souriant, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
M. Jean-Yves X... a été embauché par la société SARL CLG AFFICHAGE le 3 mai 1990 en qualité de monteur-afficheur de seconde catégorie. En l'absence de contrat de travail écrit, la relation de travail ayant pris uniquement la forme d'une lettre d'engagement ne peut être admise que dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée. Par lettre datée du 7 avril 2011, notifiée par huissier, M. Jean-Yves X... a été licencié pour faute grave. Contestant cette mesure, celui-ci saisissait le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre aux fins de voir son employeur condamner au paiement de diverses sommes. Par jugement du 26 novembre 2014, la juridiction prud'homale a considéré le licenciement causé par des fautes graves, et a débouté M. Jean-Yves X... de l'intégralité de ses demandes et l'employeur de toute demande reconventionnelle. Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 14 décembre 2014, M. Jean-Yves X... interjeta appel de cette décision.

Par conclusions notifiées à l'intimée le 30 juillet 2015 et auxquelles il a été fait référence à l'audience des plaidoiries du 5 décembre 2016, M. Jean-Yves X... a demandé à la cour de dire et juger, au visa des articles 1382 du code civil et L. 1232-1 et L. 1234-4 du code du travail, qu'il a fait l'objet d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de condamner la société Affichage CLG à lui payer les sommes suivantes :
14782, 37 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 4040, 74 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 12122, 22 euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, 15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice distinct, 8000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civil, outre les dépens, d'ordonner la rectification des pièces et documents de fin contrat, notamment l'attestation Pôle Emploi, et d'ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

Par conclusions notifiées à la partie adverse le 27 janvier 2016, la SARL CLG AFFICHAGE a soulevé la caducité de l'appel et le rejet des conclusions tardives de l'appelant. Par arrêt du 23 mai 2016, la cour d'appel de céans a rejeté l'exception de caducité de la déclaration d'appel, dit n'y avoir lieu de prononcer le rejet des conclusions et pièces de M. Jean-Yves X..., ordonné la réouverture des débats et renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état du 14 novembre 14 novembre 2016, dit que la SARL CLG AFFICHAGE devra notifier ses pièces et conclusions dans un délai de trois mois à l'appelant.

A l'appui de ses demandes, M. Jean-Yves X... invoque tout d'abord les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, déplorant l'absence de motivation dans le jugement querellé, et soutient que la faute grave ne peut être caractérisée par une prétendue insubordination qui se serait manifestée par le refus délibéré d'effectuer les tâches d'affichage qui ont lui été confiées, faute prétendue grave mais non conforme aux critères retenus par la jurisprudence de la chambre sociale de la cour de cassation, étant, lui, dans l'impossibilité manifeste d'afficher 22 panneaux de 12 m2 chacun, soit un total de 264 m2 sur la totalité du territoire de la Guadeloupe. Il fait observer que toutes les sanctions qui lui ont été infligées, c'est à dire les avertissements puis le licenciement, sont tous fondées sur un texte qui a été abrogé (Annexe II de la convention collective nationale de travail des cadres, techniciens et employés de la publicité française du 22 avril 1955, relative à la grille de classification des qualifications professionnelles) et qui retenait un affichage de 210 m2 en moyenne par jour, que même au regard de ces anciens critères, la mission était d'autant plus impossible à réaliser qu'il fallait qu'il se consacre aussi au grattage des façades, à leur nettoyage, au lavage des moulures, à l'élagage et l'entretien des arbres et bosquets afin que les panneaux soient bien visibles, et ce, sur une zone d'activité très étendue comprenant le Gosier Bas du fort, Pointe-à-Pitre, les Abymes, Sainte-Rose, Lamentin et Deshaies. Il ajoute que le licenciement est en réalité une mesure de rétorsion, résultant du refus opposé par les salariés à la décision de l'employeur d'orienter ses employés vers le statut d'auto-entrepreneur comme le prouve la préparation et la présentation du contrat de location-vente de véhicules proposé aux salariés, et qu'il est légitime à réclamer les dites indemnités et les dits dommages-intérêts au regard de son ancienneté de 20 ans et 11 mois au sein de l'entreprise, des dispositions de la convention collective 3073 applicable à sa situation et de ses difficultés à retrouver un emploi similaire à l'âge de 47 ans.

Par conclusions notifiées à l'appelant le 19 août 2016 et auxquelles il a été fait référence à l'audience des plaidoiries du 5 décembre 2016, la SARL CLG AFFICHAGE demande la confirmation du jugement entrepris, le débouté des demandes de M. X... et sa condamnation au paiement d'une somme de 3. 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Elle fait valoir que le salarié, malgré plusieurs avertissements antérieurs pour des faits similaires, a persisté dans un comportement d'insubordination, en s'abstenant d'afficher le nombre de panneaux de publicité requis par les instructions et de respecter les consignes professionnelles, que la répétition desdits agissements fautifs rendait impossible le maintien de M. X... dans l'entreprise. Elle conteste la thèse du salarié faisant état d'un motif déguisé de licenciement, rétorquant qu'elle ne souhaiter pas se séparer de M. X... et qu'elle a tardé avant d'entamer la procédure de licenciement.

MOTIFS

Sur le bien-fondé du licenciement :

Attendu que la faute grave visée par les articles L 1234-1 et L 1234-5 du code du travail résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant de son contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ;
Attendu qu'il appartient à l'employeur de rapporter la preuve de la réalité et de la gravité des griefs énoncés dans la lettre de rupture, dont les termes lient le débat ;
Qu'enfin, selon la règle non bis in idem, un même fait ne peut être sanctionné deux fois ;
Attendu que la lettre de licenciement en date du 7 avril 2011, est libellée ainsi :
« En effet, depuis maintenant trop longtemps, vous refusez sciemment d'assurer les affichages qui vous sont confiés, sans que ce refus puisse trouver de justification recevable.
Cette situation a fait, par le passé, l'objet de deux avertissements clairs, aux termes desquels il vous était expressément demandé d'assurer l'affichage de tous les panneaux pour lesquels vous receviez instruction et matériel, quotidiennement.
Ainsi, les 28 octobre 2010 et 06 décembre 2010, force était pour nous de vous signifier un avertissement, pour refus délibéré d'exécuter les missions qui étaient les vôtres.
Aux termes de ces deux sanctions prises après qu'un constat d'huissier ait formellement établi les faits reprochés, nous vous demandions solennellement de vous ressaisir. Enfin, au titre de notre dernière correspondance en date du 21 janvier 2011, nous vous indiquions précisément que s'il n'était pas dans nos intentions d'essayer de vous licencier, il vous appartenait malgré tout, afin de permettre la poursuite de notre collaboration, de simplement respecter les consignes de travail, d'exécuter les tâches et missions qui vous sont confiées.

Malgré cette mise au point claire et solennelle, le 10 février dernier, alors que vous était confié l'affichage de vingt-deux panneaux du réseau « Lagon » avec les affiches du client « Caraïbes Résidence », pour faire suite à la plainte du client qui dès le 11 février, constatait que seulement quinze panneaux avaient été affichés, alors que la campagne facturée et payée par lui, comprenait vingt-deux panneaux, nous devions missionner un huissier de justice qui, ce même jour, établissait le même constat.
Ainsi et à l'instar des deux précédentes sanctions qui vous avaient été notifiées, vous persistiez ce 10 février 2011, à ne pas effectuer sciemment, les affichages qui vous avaient été demandés.
Au-delà d'un réel problème avec les clients de l'entreprise qui, de votre fait, ne bénéficient pas de tous les affichages pour lesquels ils ont réglé leurs factures, votre attitude de refus, sciemment et délibérément entretenu, est la démonstration de votre peu de respect des consignes de travail, des clients et enfin, le plus absolu laxisme quant aux règles de fonctionnement de notre petite entreprise. Dans ces circonstances, vous comprendrez que devant cette situation, nous ne pouvons que procéder à la rupture de nos relations contractuelles du fait de votre inexécution, répétitive et délibérée de vos obligations contractuelles, sans justification acceptable.

Ce n'est pas faute, pour ce qui nous concerne, de vous avoir solennellement et à plusieurs reprises alerté. Vous n'avez pas voulu vous ressaisir et aujourd'hui, le constat est clair de l'impossibilité dans laquelle nous sommes, de pouvoir envisager, la poursuite de nos relations contractuelles.

En conséquence, la présente notification de licenciement pour faute grave tirée de votre attitude professionnelle inacceptable, prendra effet dès réception, date à laquelle seront à votre disposition certificat de travail, attestation employeur pour le pôle emploi et solde de tout compte.. »
Attendu que l'employeur, exploitant l'activité de régie publicitaire de médias, fustige le refus persistant de M. X..., afficheur, d'afficher dans un certain délai le nombre de panneaux publicitaires qui lui est demandé ;
Que M. X... sans contester les faits qui lui sont reprochés, fait valoir désormais que le nombre de panneaux qui lui était imposé était impossible à réaliser compte tenu de l'ampleur du territoire à traiter et des autres tâches annexes qui lui incombaient ;
Qu'il ressort du dossier que M. X... s'est vu infliger deux avertissements successifs en octobre et décembre 2010, pour des faits similaires, à savoir un affichage non conforme aux instructions et insuffisant, faits fautifs établis par constats d'huissier en date des 15 septembre et 29 octobre 2010 ;
Que cependant, la poursuite par un salarié d'un fait fautif autorise l'employeur à se prévaloir de faits similaires y compris ceux ayant déjà été sanctionnés pour caractériser une faute grave ;
Que si effectivement, M. X... a reçu deux avertissements les 28 octobre et 6 décembre 2010 pour ne pas avoir affiché tous les panneaux d'une campagne publicitaire notamment dans les temps prévus, il a persisté dans son refus de respecter les plannings d'affichage et les consignes de travail ; Qu'il est établi par l'employeur (constat d'huissier du 11 février 2011) qu'un nouveau fait fautif a été commis par le salarié le 10 février 2011, ce dernier n'ayant affiché que 15 panneaux sur les 22 commandés et réglés par le client CARAIBES RESIDENCE à l'employeur pour la campagne « LAGON » ; Que M. X... a d'abord, dans une lettre adressée à la société CLG AFFICHAGE le 13 décembre 2010, contesté les manquements, faisant valoir que l'employeur voulait le contraindre à prendre le statut d'auto-entrepreneur, ce que la société intimée a réfuté dans son courrier du 21 janvier 2011, puis a invoqué en cours de procédure l'impossibilité matérielle d'effectuer lesdits affichages au regard de la taille des panneaux (12 m2) et de l'abandon dans la nouvelle convention collective de la notion de rentabilité au mètre carré ;

Que le contrat de location-vente d'un véhicule Toyota équipé d'une galerie et d'un bed liner entre la société d'affichage CLG et M. X... daté du 1er janvier 2010 n'est resté qu'à l'état de projet et le salarié ne saurait en déduire que son licenciement survenu plus d'un an après est lié à son refus de prendre le statut d'artisan y mentionné ;
Qu'antérieurement à son licenciement, M. X... n'a jamais invoqué l'impossibilité matérielle d'afficher le nombre de panneaux qui lui était demandé ; Qu'il résulte d'ailleurs des plannings produits par le salarié qu'il effectuait l'affichage d'une vingtaine de panneaux par jour fin août et début septembre 2010 sans se plaindre du nombre de faces à afficher ; Que le salarié invoque des contingences annexes importantes l'empêchant de mener à bien l'affichage de 22 panneaux par jour, telles que l'élagage d'arbres, le curage et lavage des panneaux ; Que selon la définition conventionnelle, résultant de l'avenant étendu du 16 mars 2004 de la convention collective des entreprises de la publicité, l'afficheur sur dispositif publicitaire est tenu outre l'affichage en lui-même de veiller « au bon entretien défini par l'entreprise et plus généralement de « faire disparaître tous graffitis, affiches sauvages et éléments étrangers du mobilier dont il a la charge » ce qui implique de nettoyer le panneau et couper les branches gênantes aux abords de celui-ci, sans travail important comme l'allègue X... ; Qu'en tout état de cause, les tâches annexes étaient rémunérées en sus ainsi qu'il en résulte de la lecture des bulletins de salaire de l'intéressé, sous le vocable « heures diverses » ;

Que dès lors, le salarié ne donne pas de motif légitime de nature à justifier son refus réitéré et délibéré d'exécuter les travaux d'affichage résultant de ses attributions ;

Que c'est justement que le premier juge a dit que les dits griefs caractérisaient la faute grave du salarié, privative des indemnités de rupture, dans la mesure où elle imposait le départ immédiat de ce dernier de l'entreprise ;

Que M. X... sera débouté en conséquence de ses demandes liées à un licenciement sans cause réelle et sérieuse et abusif ;
Que la faute grave est en outre privative des indemnités de rupture (préavis et incidence congés payés) ;
Que dès lors, la confirmation du jugement entrepris s'impose ;
Attendu que l'appelant échouant en ses prétentions, sera débouté de sa demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et supportera les dépens de la présente instance.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.
Y ajoutant,
Déboute M. X... Jean-Yves de toutes ses autres demandes et le condamne aux entiers dépens.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14/01937
Date de la décision : 30/01/2017
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2017-01-30;14.01937 ?
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