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28/11/2016 | FRANCE | N°14/01859

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 28 novembre 2016, 14/01859


MJB-VS

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 333 DU VINGT HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE SEIZE

AFFAIRE No : 14/ 01859
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 16 décembre 2013- Section Activités Diverses.
APPELANTE
Madame Monica X.........97150 SAINT-MARTIN Représentée par Maître Ioana ANDRE (Toque 57) substituée par Maître JULIN, avocat au barreau de GUADELOUPE/ ST MARTIN/ ST BART

INTIMÉE
Madame Elmitha A...C/ o Emmanuel B......97150 SAINT-MARTIN Dispensée de comparaître en applic

ation des dispositions des articles 446-1 et 946 du Code de Procédure Civile

Ayant pour délégué s...

MJB-VS

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 333 DU VINGT HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE SEIZE

AFFAIRE No : 14/ 01859
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 16 décembre 2013- Section Activités Diverses.
APPELANTE
Madame Monica X.........97150 SAINT-MARTIN Représentée par Maître Ioana ANDRE (Toque 57) substituée par Maître JULIN, avocat au barreau de GUADELOUPE/ ST MARTIN/ ST BART

INTIMÉE
Madame Elmitha A...C/ o Emmanuel B......97150 SAINT-MARTIN Dispensée de comparaître en application des dispositions des articles 446-1 et 946 du Code de Procédure Civile

Ayant pour délégué syndical, M. Ernest C...

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 2 mai 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, Mme Marie-Josée Bolnet, conseiller, Mme Françoise Gaudin, conseiller, qui en ont délibéré.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 4 juillet 2016, date à laquelle le prononcé de l'arrêt a été prorogé successivement au 28 novembre 2016.
GREFFIER Lors des débats : Mme Yolande Modeste, greffier.
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Mme Valérie Souriant, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Mme Elmitha A...a été engagée en qualité de femme de ménage par Mme Monica X...dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée " Nouvelle Embauche " qui a débuté le 1er novembre 2005.

La durée mensuelle de travail a été fixée à 65 heures moyennant une rémunération brute de 521, 87 euros, sans indication des horaires précises d'activité.
Toujours au service de Mme Monica X..., Mme Elmitha A...a saisi le conseil de prud'hommes de Basse-Terre aux fins de voir condamner son employeur au paiement de rappel de salaires pour la période de janvier 2008 à mai mai 2013 à hauteur de 39 978, 50 euros, d'indemnités de congés payés sur rappel de salaires pour 3 997, 85 euros et la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code d procédure civile.
Par jugement du 16 décembre 2013, la juridiction saisie a reçu les demandes de la salariée et les a déclarées bien fondées, condamné en conséquence l'employeur au paiement du rappel de salaires de 39 978, 50 euros, de l'indemnité de congés payés pour le montant de 3 997, 85 euros et de la somme de 750 euros au titre des frais irrépétibles, lui a ordonné la remise des bulletins de paye rectifiés à compter de sa véritable date d'embauche en novembre 2005, de régulariser la situation de la salariée auprès des organismes sociaux, dit que la moyenne des derniers mois de salaires s'élève à la somme brute de 672, 68 euros, a rappelé l'exécution provisoire conformément aux dispositions de l'article R. 1454-28 du code du travail et condamné la partie défenderesse aux dépens.
Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 02 décembre 2014, Mme X...a interjeté appel de cette décision.

MOYENS ET DEMANDES DES PARTIES

Par conclusions notifiées à la partie adverse le 26 février 2015 et auxquelles il a été fait référence à l'audience du 02 mai 2016, Mme X...demande à la cour de recevoir son appel, de le déclarer bien fondé et de réformer le jugement déféré, de débouter Mme Elmitha A...de l'intégralité de ses demandes et de la condamner au paiement de la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir que Mme Elmitha A...a travaillé durant cinq années sans formuler la moindre demande et sans prouver qu'elle travaillait en réalité à temps complet. Elle rappelle la règle selon laquelle nul ne peut se prévaloir d'une preuve délivrée à soi-même et se prévaut des dispositions de l'article L. 3171-4 du code de travail et de la jurisprudence qui en découle.
Elle attire également l'attention de la cour sur le fait qu'elle exploite un commerce de vêtements et produis pour touristes près de l'aéroport Juliana à Saint Martin sous l'enseigne ..., ouvert 7 jours sur 7 de 10 heures du matin à 23 heures. Ses contraintes professionnelles ne lui permettent pas de contrôler la présence et le travail de sa femme de ménage du côté français de l'île.
Par conclusions no2 notifiées à la partie appelante le 17 mars 2016, accompagnées d'une demande de dispense de comparaître à l'audience des plaidoiries, Mme Elmitha A...demande de confirmer la décision querellée et de condamner Mme X...à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient que par lettre du 23 avril 2012, elle a rappelé à son employeur la véritable date de son embauche et réclamait des rappels de salaires dus depuis janvier 2008 ; qu'à la suite de cette réclamation, Mme X...modifiait ses horaires les faisant passer de 8 h à 11 h 30, accomplissant ainsi 3 heures 30 par jour, soit un total de 17 heures 30 par semaine et 75 heures 83 par mois, alors que son salaire continuait à être calculé sur la base de 65 heures « par semaine ».
Elle dit avoir adressé une première lettre de réclamation le 23 avril 2012 que l'employeur prétend ne pas avoir reçue, et devant le refus de celui-ci de régulariser sa situation, en avoir adressé une seconde sous pli recommandé avec avis de réception en date du 25 octobre 2012.
Elle insiste sur le fait qu'à l'audience du 15 mars 2013, Mme X...reconnaissait devoir des rappels de salaire mais faisait état de son impossibilité de les régler.
Elle conclut qu'en tout état de cause, il ressort des éléments du dossier que le contrat à temps partiel passé dans le cadre d'un CNE doit être requalifié en un contrat à temps plein. Le régime du CNE a été proscrit par la jurisprudence comme étant contraire à la convention no158 de l'organisation internationale du travail et c'est ainsi que cette jurisprudence procédait à la requalification du CNE en contrat à durée indéterminée. Par la suite, le législateur a abrogé le CNE le 25 juin 2008.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la qualification du contrat de travail litigieux en contrat à temps plein
Le contrat « Nouvelle Embauches » a été abrogé par la loi no2008-596 du 25 juin 2008 et les contrats CNE en cours à la date de publication de ladite loi ont été requalifiés en contrats à durée indéterminée de droit commun.
Contrairement à ce que soutient Mme Elmitha A..., cette requalification légale n'a pas eu pour effet de transformer automatiquement le dit contrat CNE en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet.
Ce moyen, inopérant, est rejeté.
Sur la rémunération des heures de travail effectuées
L'article L. 3171-4 du code du travail énonce qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction, qu'il estime utiles. La charge de la preuve ne pèse donc pas uniquement sur le salarié. Il appartient également à l'employeur de justifier des horaires de travail effectués par l'intéressé.
En substance, le salarié doit étayer sa demande en apportant un début de preuve ou en faisant état d'indices ou pour le moins de circonstances particulières. Il suffit que ces éléments laissent planer un doute sur la réalité des heures effectuées.
En l'espèce, Mme Elmitha A...sollicite la rémunération de son temps complet depuis 2005.
Mme X...rétorque qu'aucun document ne vient contredire les termes du contrat à temps partiel signé le 1er novembre 2005 entre les parties qui est la loi des parties et s'exécute de bonne foi.
Le contrat de travail versé au débat fixe la durée de travail à 65 heures.
S'agissant de la période de 2005 à 2008, en l'absence de bulletins de paye versés aux débats, et d'aucun autre document, il n'est pas démontré que Mme Elmitha A...réalisait un temps complet de 35 heures par semaine, de 8 heures à 15 heures, en qualité de femme de ménage au domicile de Mme X...depuis son embauche en novembre 2005.
Pour la période de janvier 2008 à mai 2013, les bulletins de paye qui sont produits par l'intéressée, font apparaître la mention de 65 heures mensuelles. Mais aucun document, ni aucun tableau ne vient prouver une activité au-delà des 65 heures mensuelles si ce n'est qu'à partir du 03 avril 2012, Mme Elmitha A...a accepté d ‘ exercer son métier de femme de ménage aux heures suivantes : 8 heures – 11 heures 30, soit 3 heures 30 hebdomadaires (3, 5), soit 17 heures 30 par semaine (17, 5) et 75 heures 15 (75, 25) par mois.

Ce que ne conteste pas Mme X....
Il est manifeste que Mme Elmitha A...n'a pas été entièrement rémunérée pour les heures accomplies à partir d'avril 2012 à hauteur de 75 heures 15 par mois.
Son manque à gagner est ainsi calculé :
1/ solde au titre de l'année 2012 : 9, 40 x 75, 25 = 707, 35 euros x 9 mois : 6 366, 15 euros – 5 436, 24 euros (salaires perçus à partir d'avril) = 929, 91 euros
2/ solde au titre de l'année 2013 : 9, 43 x 75, 25 = 709, 61 euros x 5 mois : 3 548, 05 euros – 3 064, 75 euros (salaires perçus) = 483, 30 euros
Soit un total de 1 413, 21 euros
Dans ces conditions, il convient de réformer le jugement déféré et de condamner Mme Monica X...à payer à Mme Elmitha A...la somme de 1 413, 21 euros à titre de solde de salaire pour la période d'avril 2012 à mai 2013 et celle de 141, 21 euros à titre de congés payés y afférents.
Il convient aussi de préciser que le présent arrêt suffit à prouver le caractère erroné des bulletins délivrés par l'employeur pour la dite période et de débouter Mme Elmitha A...de sa demande relative à la délivrance de bulletins rectifiés.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Succombant principalement, Mme Monica X...est condamnée aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et en dernier ressort,
Réforme le jugement déféré ;
Statuant à nouveau,
Condamne Mme Monica X...à payer à Mme Elmitha A...la somme de 1 413, 21 euros à titre de solde de salaire pour la période de d'avril 2012 à mai 2013 ;
Condamne Mme Monica X...à payer à Mme Elmitha A...la somme de 141, 21 euros à titre de congés payés y afférents ;
Dit que le présent arrêt suffit à prouver le caractère erroné des bulletins délivrés pour la dite période ;
Déboute Mme Elmitha A...de sa demande relative à la délivrance de bulletins rectifiés ;
Ordonne à Mme Monica X...de régulariser la situation de Mme Elmitha A...auprès des organismes de protection sociale conformément aux dispositions du présent arrêt ;
Condamne Mme Monica X...à payer à Mme Elmitha A...la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires ;
Condamne Mme Monica X...aux dépens ;

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14/01859
Date de la décision : 28/11/2016
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2016-11-28;14.01859 ?
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