VS-BR
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 324 DU VINGT ET UN NOVEMBRE DEUX MILLE SEIZE
AFFAIRE No : 15/ 00702
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 30 avril 2015- Section Commerce.
APPELANTE
Madame Vanessa X......... 97160 LE MOULE Représentée par Maître Alain ROTH (Toque 124), avocat au barreau de GUADELOUPE/ ST MARTIN/ ST BART
INTIMÉE
SARL SAINTE CLAIRE VOYAGE 12 Avenue du général de GAULLE 97300 CAYENNE Représentée par Maître Fabienne Jeanne CONQUET FABIENNE (Toque 42) substituée par Maître SZWARCBART, avocat au barreau de GUADELOUPE/ ST MARTIN/ ST BART
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 3 octobre 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, Mme Marie-Josée Bolnet, conseiller, Mme Françoise Gaudin, conseiller,
qui en ont délibéré.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 21 novembre 2016.
GREFFIER Lors des débats : Mme Valérie Souriant, greffier.
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Mme Valérie Souriant, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
Faits et procédure :
Par contrat à durée indéterminée, Mme Vanessa X... a été engagée, à compter du 1er octobre 2012, par la Société SAINTE CLAIRE VOYAGES GUADELOUPE, en qualité de commercial, moyennant le versement d'une rémunération brute mensuelle de 1798, 02 euros.
Auparavant Mme X... avait travaillé pour le compte de la Société NOUVELLES FRONTIERES comme agent de comptoir depuis le 4 novembre 2002, mais à la suite d'une restructuration, des agences de cette société avaient été rachetées par la Société SAINTE CLAIRE VOYAGES GUADELOUPE.
Mme X... revendiquant le transfert de son contrat de travail au nouvel acquéreur, il était souscrit par les deux employeurs et Mme X..., le 15 septembre 2012, un protocole d'accord stipulant l'engagement des deux employeurs à verser à la salariée la somme de 42 500 euros, en précisant que ce versement avait pour objet de compenser les préjudices qu'elle prétendait avoir subis dans le cadre du transfert de son contrat de travail, son ancienneté, notamment, n'étant pas reprise par son nouvel employeur.
Après convocation à un entretien préalable fixé au 13 décembre 2012, Mme X... s'est vu notifier son licenciement par lettre du 26 décembre 2012, pour insubordination et manque d'implication et de collaboration au sein de l'équipe.
Le 26 mars 2013, Mme X... a saisi le conseil de prud'hommes de Pointe à Pitre aux fins de contester son licenciement et obtenir paiement de diverses indemnités.
Par jugement du 30 avril 2015, la juridiction prud'homale déboutait Mme X... de l'ensemble de ses demandes et la condamnait au paiement de la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration du 5 mai 2015, Mme X... interjetait appel de cette décision.
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Par conclusions communiquées à la partie adverse le 28 août 2015, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, Mme X... sollicite l'infirmation du jugement entrepris et la condamnation de la Société SAINTE CLAIRE VOYAGES GUADELOUPE à lui payer la somme de 35 960 euros à titre d'indemnisation, outre la somme de 1798 euros d'indemnité compensatrice de préavis, 1500 euros pour la procédure de première instance et 2000 euros pour la procédure d'appel.
A l'appui de ses demandes Mme X... expose qu'elle a travaillé pendant plus de 9 ans sans aucun problème et qu'il appartient à la Société SAINTE CLAIRE VOYAGES GUADELOUPE d'apporter aux débats la preuve de l'insubordination alléguée, aux moyens d'attestations conformes à l'article 202 du code de procédure civile. Or l'employeur ne produit qu'un seul email du 31 octobre 2012, adressée par une salariée indiquant que faute d'avoir eu le temps, Mlle X... demandait à sa collègue de lui établir une cotation pour un vol Pointe à Pitre-Paris, ajoutant que " s'il fallait juste un mouvement d'humeur entre deux salariés dans un bureau, tous les salariés seraient licenciés ", faisant valoir qu'elle pouvait, à la rigueur, faire l'objet d'un avertissement.
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Par conclusions communiquées le 25 janvier 2016 à la partie adverse, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, la Société SAINTE CLAIRE VOYAGES GUADELOUPE sollicite la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions, et donc le rejet de toutes les demandes de Mlle X..., réclamant à celle-ci paiement de la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
En ce qui concerne l'ancienneté de Mlle X..., la Société SAINTE CLAIRE VOYAGES GUADELOUPE expose, à titre principal, que le contrat de travail conclu avec Mlle X... est en date du 14 septembre 2012, cette dernière ayant par volonté expresse et non équivoque nové l'ancien contrat qui la liait avec son précédent employeur, le protocole transactionnel passé entre les parties empêchant Mlle X... de faire valoir une quelconque contestation, notamment sur la non reprise de l'ancienneté chez l'ancien employeur.
A titre subsidiaire, la Société SAINTE CLAIRE VOYAGES GUADELOUPE relève qu'en cas d'annulation du protocole transactionnel, Mlle X... devra restituer la somme de 42 500 euros versée dans le cadre de l'accord annulé.
Sur le licenciement, la Société SAINTE CLAIRE VOYAGES GUADELOUPE fait valoir que Mlle X... n'a jamais contesté les griefs figurant dans la lettre de licenciement, preuve que ces griefs étaient parfaitement identifiés et reconnus par la salariée, s'agissant du refus d'exécuter les instructions données le 6 octobre 2012 et le 9 novembre 2012 par son supérieur hiérarchique, l'insubordination reprochée étant relatée dans un courriel en date du 31 octobre 2012, les faits s'étant reproduits à plusieurs reprises, notamment le 9 novembre 2012.
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Motifs de la décision :
Sur l'ancienneté :
Il résulte des termes du protocole transactionnel auquel a souscrit Mlle X..., que celle-ci renonçait à se prévaloir du transfert de plein droit de son contrat de travail auprès de la Société SAINTE CLAIRE VOYAGES GUADELOUPE, renonciation en contrepartie de laquelle il lui a été versé une indemnité substantielle de 42 500 euros. Elle ne peut donc se prévaloir de l'ancienneté de 9 ans acquise au sein de son précédent employeur, Nouvelles Frontières.
Sur le licenciement :
Contrairement à ce que soutient l'employeur, Mlle X... conteste la réalité des griefs invoqués par l'employeur, puisque dans ses conclusions elle relève que la Société SAINTE CLAIRE VOYAGES GUADELOUPE ne produit qu'un seul courriel en date du 31 octobre 2012 faisant ressortir que faute d'avoir eu le temps, elle avait demandé à sa collègue de lui établir une cotation pour un vol Pointe à Pitre.
Le courriel en cause émane de Mme Indira C..., responsable de l'agence dans laquelle travaillait Mlle X.... Il y est mentionné que le 6 octobre 2012, la responsable de l'agence a demandé à Mlle X... d'effectuer une cotation pour des vols par avion, cette dernière ayant répondu qu'elle ne comprenait pas qu'il lui soit demandé de faire des choses que sa supérieure hiérarchique pouvait faire elle-même.
Ainsi, si l'on retient la véracité des faits évoqués par la responsable d'agence, l'employeur n'établit l'existence que d'un seul acte de refus d'exécuter une consigne donnée par le supérieure hiérarchique, aucun autre acte d'insubordination n'étant établi, et notamment celui dont il est dit qu'il serait en date du 9 novembre 2012 et pour lequel il n'est décrit aucun élément constitutif.
Ainsi dans la mesure où il n'est pas établi la répétition d'actes d'insubordination, ni d'ailleurs une " attitude peu professionnelle, incompatible avec un travail en équipe ", ni la réalité de " difficultés relationnelles " avec ses collègues, comme reproché dans la lettre de licenciement, le seul fait relaté dans l'email du 31 octobre 2012, dont Mlle X... donne une toute autre version puisque ce serait elle qui aurait demandé à une collègue d'établir une cotation pour un vol Pointe à Pitre-Paris, est insuffisant pour caractériser une cause réelle et sérieuse de licenciement.
Sur les indemnités sollicitées :
Mlle X... n'a travaillé que du 1er octobre 2012 jusqu'au 26 décembre 2012, date de son licenciement ; elle ne peut donc se prévaloir de l'usage en vigueur dans le ressort du conseil de prud'hommes de Pointe à Pitre selon lequel après un an d'ancienneté, le préavis est de 3 mois dans le commerce et les services, comme il a été constaté par la convention collective régionale du commerce et des services de la Guadeloupe en date du 25 mai 1982, en particulier par son article 37 et son annexe 1.
Mlle X... qui a déjà perçu une indemnité compensatrice équivalente à deux mois de salaire, conformément à l'article 3 du contrat de travail, sera déboutée de sa demande de paiement de solde d'indemnité de préavis.
Par ailleurs, Mlle X... n'ayant qu'une faible ancienneté au sein de la Société SAINTE CLAIRE VOYAGES GUADELOUPE, ne peut prétendre à l'indemnité minimale prévue par l'article L. 1235-3 du code du travail, équivalente à 6 mois de salaire, et ne justifiant sa période de chômage que par un courrier de Pôle Emploi faisant état d'une indemnisation à hauteur de 1185, 30 euros pour le mois de novembre 2013, l'indemnité due à Mlle X... pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sera fixée à 5000 euros.
Comme il paraît inéquitable de laisser à la charge de Mlle X... les frais irrépétibles qu'elle a exposés, tant en première instance qu'en cause d'appel, il lui sera alloué la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ces motifs,
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Infirme le jugement déféré,
Et statuant à nouveau,
Dit que le licenciement de Mlle X... est sans cause réelle et sérieuse,
Condamne la Société SAINTE CLAIRE VOYAGES GUADELOUPE à payer à Mlle X... les sommes suivantes :
-5000 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-2500 euros d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure suivant,
Dit que les entiers dépens sont à la charge la Société SAINTE CLAIRE VOYAGES GUADELOUPE,
Déboute les parties de toutes conclusions plus amples ou contraires.
le Greffier, Le Président,