La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/04/2016 | FRANCE | N°14/01259

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 18 avril 2016, 14/01259


VS-BR
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 68 DU DIX HUIT AVRIL DEUX MILLE SEIZE

AFFAIRE No : 14/ 01259
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 6 juin 2014- Section Commerce.
APPELANTE
SARL RIVE DROITE, prise en la personne de son gérant Monsieur X......97100 BASSE-TERRE Représentée par Maître Sully LACLUSE de la SELARL LACLUSE-CESAR (Toque 2), avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉE
Madame Véronique Y......97170 PETIT BOURG Représentée par Maître Roland EZELIN (Toque 96) substit

ué par Maître DIONE, avocat au barreau de la GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

En appl...

VS-BR
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 68 DU DIX HUIT AVRIL DEUX MILLE SEIZE

AFFAIRE No : 14/ 01259
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 6 juin 2014- Section Commerce.
APPELANTE
SARL RIVE DROITE, prise en la personne de son gérant Monsieur X......97100 BASSE-TERRE Représentée par Maître Sully LACLUSE de la SELARL LACLUSE-CESAR (Toque 2), avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉE
Madame Véronique Y......97170 PETIT BOURG Représentée par Maître Roland EZELIN (Toque 96) substitué par Maître DIONE, avocat au barreau de la GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 janvier 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Bernard Rousseau, président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, Mme Marie-Josée Bolnet, conseiller, Mme Françoise Gaudin, conseiller.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 18 avril 2016.
GREFFIER Lors des débats : Mme Yolande Modeste, greffier.
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Mme Valérie Souriant, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure :

Il est versé au débat un contrat de travail à durée indéterminée daté du 8 août 1998, par lequel Mme Véronique Y...aurait été embauchée en qualité d'assistante manager à compter de la même date, par une société dénommée STAR MART BOLOGNE représentée par M. Frantz A...son gérant.
Il est également produit un avenant audit contrat de travail stipulant que Mme Y...occuperait les fonctions de manager de la Société STAR MART BOLOGNE, à compter du 1er février 2004, ladite société étant représentée par son gérant M. Frantz A...pour la signature de cet avenant.
Toutefois il ressort de l'extrait K bis du registre du commerce figurant en pièce no22-1 de l'intimée, qu'une Société BOLOGNE STATION SERVICE, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Basse-Terre depuis le 13 juin 1995 sous le numéro d'identification 400 216 735 No de Gestion 95 B 319, a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 10 septembre 1997 du tribunal mixte de commerce de Basse-Terre. Elle avait pour objet la vente de produits pétroliers sous l'enseigne PEBELCAZ.
Par ailleurs une Société BOLOGNE STAR SERVICE, initialement dénommée EDCAS OIL, a été immatriculée le 3 janvier 2003 au Registre du Commerce et des Sociétés de Basse-Terre sous le numéro d'identification 444 594 030 No de Gestion 2003 B 5, utilisant le nom commercial STAR MART.
Un procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire de la Société EDCAS OIL, en date du 24 octobre 2005, montre que les modifications suivantes ont été adoptées :- Mme Y...acquiert 250 parts sociales de la société,- Mme Y...est nommée gérante de la société en remplacement de M. Félix CASSIN,- la nouvelle dénomination de la Société EDCAS OIL est BOLOGNE STAR SERVICE, ayant pour enseigne STAR MART.

La Société BOLOGNE STAR SERVICE a souscrit un contrat de location-gérance le 31 octobre 2005 auprès de la Société Anonyme des Pétroles Chevron (SPAC) pour l'exploitation d'une station service située à Rivière des Pères à Basse-Terre, pour une durée de 3 ans.
A l'expiration de ce contrat, la location-gérance était reprise par la Société RIVE DROITE SERVICES.
Les contrats de travail des salariés étaient transférés à la Société RIVE DROITE SERVICES par application des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail.
Par courrier du 23 décembre 2008, M. X..., gérant de la Société RIVE DROITE SERVICES, relevant que l'ensemble des éléments relatifs au personnel ne lui avaient pas été communiqués, proposait à Mme Y...une rencontre pour faire le point sur la situation administrative et financière du personnel, en particulier sur les contrats en cours, notamment celui de Mme Y....
Après convocation à un entretien préalable fixé au 9 février 2009, la Société RIVE DROITE SERVICES notifiait à Mme Y...son licenciement pour faute lourde. Dans ce courrier il était invoqué :- la violation délibérée des instructions de travail établies par la nouvelle gérance, et plus précisément la mise en circulation sans autorisation préalable d'une quinzaine de bons de carburant non signés d'une valeur de 20 €,- le refus manifeste de toute collaboration véritable avec la nouvelle gérance, en vue de mettre définitivement fin à l'existence d'un désordre administratif, en pratiquant de manière délibérée et systématique, une rétention d'informations essentielles relatives à la gestion du personnel tant en ce qui concerne Mme Y...elle-même, à titre personnel, que concernant ses autres collègues de travail ; il était fait état des pires difficultés à obtenir de Mme Y...des éléments d'information suffisants pour renseigner le nouvel exploitant sur la situation effective du personnel (non fourniture des avenants aux contrats de travail liant le personnel au précédent exploitant, non fourniture du registre du personnel, non fourniture du règlement intérieur régissant les rapports internes),- une déloyauté caractérisée à l'égard de la nouvelle gérance en entretenant sciemment et à des fins personnelles un conflit d'intérêts susceptibles d'être préjudiciable à la SARL RIVE DROITE SERVICES, étant relevé qu'à la veille du transfert de la gérance, Mme Y...avait précipitamment démissionné de ses fonctions de gérant du précédent exploitant la société BOLOGNE STAR SERVICE, et avait désigné M. Z... en qualité de nouveau gérant, lequel n'était qu'un prête-nom puisque Mme Y...continuait à exercer la gérance de fait de la société BOLOGNE STAR SERVICE, laquelle refusait de régler la situation d'endettement à l'égard du personnel qui s'était mis en grève.

Le 30 mars 2009 Mme Y...saisissait le conseil de prud'hommes de Basse-Terre aux fins de contester son licenciement et obtenir paiement de diverses indemnités.
Par jugement de départage du 6 juin 2014, la juridiction prud'homale disait que le licenciement de Mme Y...était sans cause réelle et sérieuse et condamnait la Société RIVE DROITE SERVICES à lui payer les sommes suivantes :-7775, 67 euros pour un préavis de trois mois,-5857, 69 euros d'indemnité légale de licenciement,-1123, 17 euros d'indemnité de congés payés sur préavis,-15 551, 34 euros d'indemnité pour licenciement sans cause,-800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration reçue le 3 juillet 2014 au greffe de la cour, la SARL RIVE DROITE SERVICES interjetait appel de cette décision.
****
Par conclusions notifiées à la partie adverse le 30 juin 2015, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, la SARL RIVE DROITE SERVICES sollicite l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il a écarté la faute lourde de la salariée et jugé abusive la rupture contractuelle. Elle entend voir rejeter l'ensemble des demandes de Mme Y...et voir condamner celle-ci à lui payer la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La SARL RIVE DROITE SERVICES relève notamment qu'à la veille de la cessation de la location-gérance concédée à la Société BOLOGNE STAR SERVICE, Mme Y...a précipitamment démissionné de ses fonctions de gérant-manager sans en aviser la SEP CHEVRON et ce, en parfaite violation de leurs rapports contractuels de façon à se prévaloir faussement de la qualité de salariée auprès du repreneur. Il est ajouté que la désignation de Mme Y...aux fonctions de gérant de la Société BOLOGNE STAR SERVICE à compter d'octobre 2005 a eu pour conséquence la rupture de tout lien de subordination entre elle et ladite société. Elle en conclut que Mme Y...a ipso facto perdu son statut de salarié.

La SARL RIVE DROITE SERVICES fait valoir que cette duplicité a valu à Mme Y...d'être licenciée pour faute professionnelle lourde, et rappelle les griefs contenus dans la lettre de licenciement.
****
Par conclusions notifiées à la partie adverse le 8 octobre 2015, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, Mme Y...sollicite la confirmation du jugement entrepris et réclame paiement de la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme Y...fait valoir notamment qu'au moment de la cession de la location-gérance de la SARL BOLOGNE STAR SERVICE, elle n'était plus gérante salariée, mais salariée seulement et soutient qu'elle n'était pas actionnaire et qu'il y a une continuité du fonds de commerce.
****

Motifs de la décision :

Comme l'a rappelé la Chambre sociale de la Cour de Cassation dans un arrêt du 15 mai 1984, no 82-40. 556, il appartient à la juridiction qui statue en matière prud'homale de vérifier sa compétence matérielle, et au besoin de relever d'office son incompétence en requalifiant le contrat sur lequel se fonde l'action.
La Cour constate que le contrat de travail à durée indéterminée en date du 8 août 1998 produit par Mme Y...présente les caractères d'un faux en écriture privée, puisqu'il fait mention de la Société STAR MART BOLOGNE en qualité d'employeur, alors qu'à la date portée sur ledit contrat cette société n'existait pas puisqu'elle a été créée le 3 janvier 2003.
Il en est de même de l'avenant au contrat de travail daté du 1er février 2004, puisqu'il est mentionné qu'il est signé par Frantz A..., en qualité de gérant de la Société STAR MART BOLOGNE, alors qu'il ne ressort pas des extraits du registre du commerce et des sociétés versés aux débats que Frantz A...ait été à un moment quelconque gérant de ladite société, l'intéressé ayant été par contre gérant de la Société STATION BOLOGNE SERVICE immatriculé le 13 juin 1995, sous le numéro d'identification 400 216 735 No de Gestion 95 B 319, laquelle a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 10 septembre 1997.

Par ailleurs Mme Y...entend contester la cession en sa faveur de 250 parts de la Société EDCAS OIL devenue BOLOGNE STAR SERVICE par décision d'assemblée générale du 24 octobre 2005, ladite assemblée ayant à la fois autorisé la cession par Mme Catherine B...de 250 parts sociales à Mme Y..., numérotées 551 à 800, et nommé Mme Y...aux fonctions de gérant de la société à compter du 26 octobre 2005.

Mme Y...ne peut sérieusement contester la validité du procès-verbal de ladite assemblée générale produit au débat, puisqu'elle admet qu'elle a bien été nommée aux fonctions de gérant comme le mentionne ledit procès-verbal, celui-ci faisant état également de la cession de 250 parts sociales en faveur de Mme Y....
Il est d'ailleurs versé aux débats les statuts de la Société BOLOGNE STAR SERVICE modifiés, résultant des décisions de l'assemblée générale du 24 octobre 2005 et portant notamment mention de la nouvelle répartition du capital social faisant apparaître Mme Y...comme détenant 250 parts sociales numérotées 301 à 550.
Tant les statuts mis à jour que le procès-verbal de décision, sont mentionnés dans le récépissé de diffusion en date du 28 octobre 2005 établi par la Chambre de Commerce et d'Industrie de Basse-Terre.
Il ressort de l'ensemble de ces constatations, que Mme Y...n'a jamais souscrit de véritable contrat de travail avec les exploitants précédents de la station service prise en location-gérance par la SARL RIVE DROITE SERVICES à compter du 3 novembre 2008, et qu'en réalité Mme Y...qui s'est délivrée des bulletins de salaire en portant la mention " manager ", n'a été que gérante de la Société BOLOGNE STAR SERVICE et non salariée ; il n'apparaît établi aucun lien de subordination entre Mme Y...et la société qu'elle dirigeait, l'intéressée exerçant des fonctions de gérante, et s'arrogeant le titre de manager.
En conséquence, dans la mesure où il apparaît que Mme Y...n'était pas liée par un contrat de travail à la Société BOLOGNE STAR SERVICE, aucun contrat de travail la concernant n'a pu être transféré à la SARL RIVE DROITE SERVICES.
Elle doit donc être déboutée de ses demandes d'indemnités fondées sur la rupture d'un contrat de travail.
Comme il paraît inéquitable de laisser à la charge de l'appelante les frais irrépétibles qu'elle a exposés, il lui sera alloué la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs,

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Infirme le jugement déféré,
Et statuant à nouveau,
Déboute Mme Y...de l'ensemble de ses demandes,
Condamne Mme Y...à payer à la Société RIVE DROITE SERVICES une indemnité de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que les entiers dépens sont à la charge de Mme Y...,
Déboute les parties de toutes conclusions plus amples ou contraires.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14/01259
Date de la décision : 18/04/2016
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2016-04-18;14.01259 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award