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18/04/2016 | FRANCE | N°13/01401

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 18 avril 2016, 13/01401


VS-BR
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 60 DU DIX HUIT AVRIL DEUX MILLE SEIZE

AFFAIRE No : 13/ 01401
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 18 juin 2013- Section Activités Diverses.
APPELANTE
ASSOCIATION LE SON DES PERES LCR Résidence Maracudja Rivières des Pères 97100 BASSE-TERRE Représentée par Maître Brigitte RODES (Toque 81) substituée par Maître DIONE, avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉ
Monsieur Yann X...... 97120 SAINT-CLAUDE Représenté par M. Ernest Y... (Délé

gué syndical ouvrier)

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 94...

VS-BR
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 60 DU DIX HUIT AVRIL DEUX MILLE SEIZE

AFFAIRE No : 13/ 01401
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 18 juin 2013- Section Activités Diverses.
APPELANTE
ASSOCIATION LE SON DES PERES LCR Résidence Maracudja Rivières des Pères 97100 BASSE-TERRE Représentée par Maître Brigitte RODES (Toque 81) substituée par Maître DIONE, avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉ
Monsieur Yann X...... 97120 SAINT-CLAUDE Représenté par M. Ernest Y... (Délégué syndical ouvrier)

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 janvier 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Bernard Rousseau, président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, Mme Marie-Josée Bolnet, conseiller, Mme Françoise Gaudin, conseiller.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 18 avril 2016.
GREFFIER Lors des débats : Mme Yolande Modeste, greffier.
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Mme Valérie Souriant, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE :
Monsieur Yann X... a été embauché le 1er septembre 2010 par l'Association LE SON DES PERES en qualité d'animateur socio-culturel dans le cadre d'un " contrat d'avenir " à durée déterminée prenant fin le 31 août 2012.
A partir du mois d'août 2011, ses salaires étaient versés irrégulièrement.
Ses salaires d'août et de décembre 2011 et celui de février 2012 étant impayés, Monsieur X... saisissait le conseil de prud'hommes de Basse-Terre qui par jugement du 18 juin 2013, a requalifié son contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, a dit que la rupture de la relation de travail était imputable à l'employeur, et a condamné ce dernier à lui payer les sommes suivantes :-1 028 euros à titre de rappel de salaires,-162 euros à titre de perte de salaire consécutive à la mise à pied conservatoire,-1 198, 60 euros au titre de l'indemnité de requalification du contrat de travail,-7 191, 60 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive,-1 198, 60 euros au titre de l'indemnité de préavis,-362, 96 euros au titre de l'indemnité de licenciement,-136, 06 euros au titre de l'indemnité de congés payés,-1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du ode de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Par déclaration enregistrée le 1er octobre 2013, l'Association LE SON DES PERES a interjeté appel de cette décision.
Par arrêt avant dire droit en date du 15 décembre 2014, il a été ordonné la réouverture des débats, l'Association LE SON DES PERES ayant changé de représentant légal.
****
Par conclusions du 11 décembre 2014, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, l'Association LE SON DES PERES sollicite l'annulation du jugement déféré au motif que contrairement à ce qui est mentionné dans cette décision, l'Association LE SON DES PERES n'était pas valablement représentée à l'audience de jugement, faute d'un mandat spécial de la part de son représentant légal.
L'Association LE SON DES PERES fait valoir par ailleurs qu'il n'y a pas de fondement à la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, en expliquant que l'abrogation des dispositions concernant le contrat d'avenir n'entraîne pas la transformation du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée.
Subsidiairement elle entend voir constater qu'elle a déféré à la demande concernant le salaire du mois d'août 2011 et la remise du bulletin de paie correspondant.
L'Association LE SON DES PERES réclame paiement de la somme de 1200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
****
Par conclusions notifiées à la partie adverse le 28 mai 2015, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, M. X... sollicite la confirmation du jugement entrepris et réclame en outre paiement de la somme de 1200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
M. X... fait valoir que la mise à pied qu'il a subie n'est justifiée par aucune faute de sa part. En ce qui concerne la requalification du contrat de travail, il explique que le contrat ne précise pas la qualification exacte du contrat auquel se réfère l'employeur et qu'en conséquence l'Association LE SON DES PERES ne peut se prévaloir de quelconques dispositions du contrat d'avenir, ce dont il résulte qu'il s'agit d'un contrat à durée déterminée de droit commun, lequel ne respecte pas les dispositions de l'article L. 1242-2 du code du travail, et doit donc être requalifié en contrat à durée indéterminée.
****
Motifs de la décision :
Sur la demande d'annulation du jugement :
L'Association LE SON DES PERES ne peut se prévaloir de ses propres errements pour solliciter l'annulation du jugement de première instance. Il lui appartenait de se faire représenter dans les conditions réglementaires. Le fait que le jugement qualifié de contradictoire ait été en fait un jugement réputé contradictoire n'entraîne pas la nullité dudit jugement. Le principe du contradictoire a été respecté dans la mesure où l'Association LE SON DES PERES a été régulièrement convoquée devant les premiers juges et que les conclusions et pièces du demandeur lui ont été communiquées.
Sur la demande de paiement d'arriéré de salaires :
L'Association LE SON DES PERES ne justifie pas avoir réglé la totalité des salaires dus à M. X... pour les mois d'août et décembre 2011 et de février 2012, pour lesquels il est demandé un solde s'élevant respectivement pour chacun de ces mois à :-458, 91 euros sur un total de 918, 91 euros,-250 euros sur un total de 938, 32 euros,-319, 37 euros sur un total de 941, 37 euros.

L'appelante ne produit aucun justificatif du règlement de la totalité de ces salaires. En conséquence la condamnation de l'Association LE SON DES PERES au paiement de la somme de 1028, 28 euros sera confirmée.
Sur la demande de requalification du contrat de travail :
Il est versé au débat un contrat intitulé " CONTRAT D'AVENIR ", qui prévoit une durée de deux ans, allant du 1er septembre 2010 au 31 août 2012. Ce contrat comprend notamment une rubrique " les actions d'accompagnement et de formation prévues par l'employeur » et une rubrique « prise en charge » énonçant notamment le taux différencié de prise en charge par l'État de la rémunération versée. Ce contrat est co-signé par l'employeur, le salarié et le Président de l'Agence d'Insertion de la Guadeloupe, aux dates des 19 juillet et 31 décembre 2010.

Par ailleurs l'employeur et le salarié ont signé un contrat à durée déterminée en date du 19 juillet 2010, prévoyant la même période de travail, mais détaillant les conditions d'exécution du dit contrat.

Il apparaît ainsi que les parties ont entendu être liées par un contrat d'avenir tel que prévu par les articles L. 5134-35 et suivants du code du travail, alors applicables, avec une durée de deux ans s'étendant du 1er septembre 2010 au 31 août 2012.
L'abrogation des dispositions relatives au contrat d'avenir à partir du 1er janvier 2011 dans les DOM, n'a pu avoir pour effet de transformer le contrat conclu entre les parties en contrat à durée indéterminée, et le contrat initial est resté soumis au régime en vigueur au moment de sa conclusion.
S'agissant d'un " contrat aidé " dont les conditions sont prévues par la loi, il échappe aux prescriptions des articles L. 1242-2 et L. 1245-1 du code du travail lesquels prévoient dans quelles conditions un contrat à durée déterminée de droit commun peut être souscrit, ainsi que la sanction de requalification en contrat à durée indéterminée en cas de non-respect de ces conditions.
En conséquence la demande de requalification en contrat à durée indéterminée sera rejetée.
Sur la rupture du contrat de travail :
Par courrier du 21 mars 2012, M. X... rappelait à son employeur que depuis le mois de janvier 2012 il n'avait reçu aucun salaire ni aucune fiche de paye, que le salaire du mois de décembre ne lui avait pas été versé dans l'intégralité et que pour le mois d'août, il ne lui avait été réglé que la somme de 460 euros au début du mois de décembre 2011 comme le mentionnait la lettre de la direction en date du 2 décembre 2011, laquelle faisait état d'un virement sur le compte de M. X... d'un montant de 460 euros à titre d'acompte sur le salaire du mois d'août 2011. L'employeur accusait réception de ce courrier le 23 mars 2012.
Dans un courrier du 4 avril 2012, l'employeur faisait savoir à M. X... que les salaires des mois de janvier et février avaient été régularisés à la date du 2 avril 2012 et que suite à l'acompte de 460 euros au titre du salaire du mois d'août, versé au début du mois de décembre, ce salaire ferait l'objet d'une régularisation à la fin du mois d'avril.
Dans un courrier du 7 avril 2012, la Banque Postale faisait savoir à M. X... que la somme de 941, 37 euros avait été portée à tort au crédit de son compte le 2 avril 2012.
La banque devait préciser par la suite, dans un courrier du 7 février 2013, en réponse à une demande formée par le salarié, que c'était la banque de l'Association LE SON DES PERES qui avait donné l'ordre de renvoyer les fonds d'un montant de 941, 37 euros qui avaient été virés sur le compte de M. X....
Dans un courrier en date du 6 juin 2012 dont l'accusé de réception était signé le 8 juin 2012 par l'employeur, M. X..., reprochant à l'employeur de rester lui devoir plusieurs mois de salaire malgré les engagements qu'il avait pris, faisait savoir qu'il prenait acte de la rupture de son contrat de travail, celle-ci étant imputable à l'employeur et s'analysant en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par le même courrier il réclamait les salaires restant dûs, à savoir le solde du mois d'août 2011, 250 euros du mois de décembre 2011 ainsi que les mois de mars, avril et mai 2012 avec les bulletins de salaire correspondant. Il réclamait en outre une indemnité compensatrice de congés payés, son certificat travail et une attestation Pôle Emploi avec comme motifs de la rupture « prise d'acte ».

L'employeur ne justifie pas que les sommes ainsi réclamées par M. X... aient été payées à celui-ci avant la prise d'acte de rupture du contrat de travail.
Le non-paiement régulier des salaires pendant plusieurs mois constitue un manquement grave de la part de l'employeur, justifiant la rupture du contrat de travail aux torts de ce dernier.
Sur les conséquences financières de la rupture du contrat de travail :
La prise d'acte de rupture du contrat de travail formalisée par M. X..., étant justifiée par une faute grave de l'employeur, donne droit pour le salarié à l'indemnisation prévue par l'article L. 1243-4 du code du travail, à savoir des dommages et intérêts d'un montant au moins égal aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme du contrat.
Il sera donc fait droit à la demande de paiement formé par M. X... à hauteur de 7191, 60 euros représentant six mois de salaire, en conséquence de la rupture du contrat de travail imputable à l'employeur.
Tout autre demande d'indemnité prévue dans le cas de rupture du contrat de travail à durée indéterminée doit être rejetée.
Sur l'indemnisation de la mise à pied :
Dans un courrier du 27 septembre 2011, l'employeur faisant état d'une affiche qui avait été posée sur la porte d'entrée du local de l'Association LE SON DES PERES dans un lieu où des élèves et des parents étaient reçus et sur le passage des locataires du quartier, il était procédé à la notification à M. X... d'une mise à pied de trois jours « sur la base d'affichage collé sur la voie publique ».
Il résulte des termes de ce même courrier du 27 septembre 2011, que la mise à pied était prononcée " à fin de connaître les commanditaires de cet événement et de prendre une disposition sur le déroulement la procédure à suivre ".
Il ne ressort d'aucune des pièces versées aux débats que l'apposition d'une affiche sur la porte d'entrée du local de l'Association LE SON DES PERES soit le fait de M. X.... En conséquence celui-ci a droit au paiement de la rémunération correspondant aux trois jours de mise à pied, soit la somme de 119, 86 euros.

Sur l'indemnité compensatrice de congés payés :

M. X... a droit au paiement de la somme de 114, 82 euros d'indemnité compensatrice de congés payés calculée sur la base du rappel de salaire accordé au salarié et sur la rémunération correspondant à la mise à pied de trois jours.
Sur la remise de documents de fin de contrat :
Contrairement à ce qui est mentionné dans l'attestation destinée à Pôle Emploi, le motif de la rupture du contrat de travail n'est pas la démission pour raisons personnelles du salarié, mais une prise d'acte de la rupture du contrat de travail à initiative du salarié et aux torts de l'employeur. En conséquence il sera ordonné la remise à M. X... d'une nouvelle attestation destinée à Pôle Emploi mentionnant comme motifs de la rupture :
« prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur ».
Le certificat de travail n'ayant pas à mentionner le motif de la rupture du contrat de travail, il ne peut être fait droit à la demande de M. X... tendant à voir ordonner la remise d'un certificat de travail en précisant comme motifs de la rupture : licenciement.
Compte tenu du montant des sommes allouées à M. X..., l'équité n'implique pas qu'il soit fait application, en sa faveur, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs,

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a dit que la rupture du contrat de travail est imputable à l'Association LE SON DES PERES, et a condamné celle-ci à payer à M. X... la somme de 1028, 28 euros à titre de rappel de rémunération sur les salaires des mois d'août et décembre 2011, et février 2012,
Le réforme pour le surplus, et statuant à nouveau,
Dit que la prise d'acte de rupture du 6 juin 2012 formalisée par M. X..., est justifiée par le manquement grave de l'employeur dans le versement des salaires,
Condamne l'Association LE SON DES PERES à payer à M. X... les sommes suivantes :
-7191, 60 euros de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,
-119, 86 euros au titre de la rémunération correspondant à la période mise à pied,
-114, 82 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,
Dit que les entiers dépens sont à la charge de l'Association LE SON DES PERES,
Déboute les parties de toutes conclusions plus amples ou contraires.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/01401
Date de la décision : 18/04/2016
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2016-04-18;13.01401 ?
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