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30/11/2015 | FRANCE | N°13/01611

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 30 novembre 2015, 13/01611


VS-FG

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 338 DU TRENTE NOVEMBRE DEUX MILLE QUINZE

AFFAIRE No : 13/ 01611
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 26 septembre 2013- Section Commerce.
APPELANT
Monsieur Félix X... ......97115 SAINTE ROSE Comparant en personne Assisté de Maître Marie-Michelle HILDEBERT de la SCP NAEJUS-HILDEBERT (Toque 108), avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉE
SARL DARJI DISTRIBUTION SECTION BOIS RADA-BONNE MERE Bonne Mère 97115 SAINTE-ROSE Représentée par

Maître Michaël SARDA (Toque 1), avocat au barreau de la GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR ...

VS-FG

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 338 DU TRENTE NOVEMBRE DEUX MILLE QUINZE

AFFAIRE No : 13/ 01611
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 26 septembre 2013- Section Commerce.
APPELANT
Monsieur Félix X... ......97115 SAINTE ROSE Comparant en personne Assisté de Maître Marie-Michelle HILDEBERT de la SCP NAEJUS-HILDEBERT (Toque 108), avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉE
SARL DARJI DISTRIBUTION SECTION BOIS RADA-BONNE MERE Bonne Mère 97115 SAINTE-ROSE Représentée par Maître Michaël SARDA (Toque 1), avocat au barreau de la GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 octobre 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Françoise Gaudin, conseiller chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, président, Madame Marie-Josée Bolnet, conseiller, Madame Françoise Gaudin, conseiller,

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 30 novembre 2015.
GREFFIER Lors des débats : Madame Yolande Modeste, greffier.
ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Madame Valérie Souriant, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
M. X... Félix, reconnu travailleur handicapé du 21/ 11/ 2007 au 21/ 11/ 2012, a été embauchée selon contrat à durée déterminée en contrat d'accès à l'emploi de 2 ans, prenant effet le 23 août 2010 jusqu'au 22 août 2012, par la SARL DARJI DISTRIBUTION, qui exploite un commerce d'alimentation, en qualité de caissier étalagiste, moyennant une rémunération brute mensuelle de 1. 343, 79 ¿ pour 151, 67 heures mensuelles de travail.
L'article 4 du contrat précisait que cet engagement était effectué avec une période d'essai d'un mois, renouvelable une fois ;
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 19 septembre 2010, la SARL DARJI DISTRIBUTION mettait fin à la période d'essai, estimant que celle-ci n'était pas satisfaisante.
Contestant ladite rupture, M. X... a saisi le conseil des Prud'hommes de Pointe à Pitre le 22 décembre 2010 des demandes suivantes :
dire et juger que la rupture de la période d'essai par la société DARJI DISTRIBUTION constitue un abus de droit, condamner cette dernière à lui payer les sommes suivantes : 30. 996, 98 ¿ à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive, 2. 956, 36 ¿ à titre d'indemnité de fin de contrat, 1. 343, 80 ¿ à titre d'indemnité compensatrice de congés payés, 1. 343, 80 ¿ à titre de dommages et intérêts pour absence de remise de l'attestation Pôle emploi et voir ordonner la remise de ladite attestation et des bulletins de salaire en conséquence sous astreinte ;

Par jugement en date du 26 septembre 2013, le conseil des prud'hommes de Pointe à Pitre a constaté que la rupture de la période d'essai de M. Félix X... n'est pas abusive, condamné la SARL DARJI DISTRIBUTION à lui payer la somme de 1. 343, 80 ¿ à titre de dommages et intérêts pour absence de remise de l'attestation Pôle emploi, condamné ladite société à remettre à M. X... son attestation Pôle emploi sous astreinte de 50 ¿ par jour de retard à compter de la signification de la présente décision, rejetant le surplus des demandes.

Le 4 novembre 2013, M. Félix X... a formé appel dudit jugement, qui lui a été notifié le 11 octobre 2013.
Aux termes des écritures de son conseil, régulièrement notifiées à la société intimée le 23 décembre 2014, M. X... demande à la cour d'infirmer le jugement déféré, et statuant à nouveau, de condamner la société DARJI DISTRIBUTION à payer à M. X... Félix les sommes suivantes : 30. 996, 98 ¿ à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive, 2. 956, 36 ¿ à titre d'indemnité de fin de contrat, 1. 343, 80 ¿ à titre d'indemnité compensatrice de congés payés, 1. 343, 80 ¿ à titre de dommages et intérêts pour absence de remise de l'attestation Pôle emploi et voir ordonner la remise de ladite attestation sous astreinte de 100 ¿ par jour de retard ;

A l'audience, le conseil de l'appelant a demandé à la cour d'écarter les conclusions de l'intimée notifiées le 13 octobre 2015 et les pièces numérotées 16 à 18, comme produites tardivement ;
M. X... soutient essentiellement que :
la rupture doit s'analyser en une rupture anticipée abusive, car motivée en réalité par son handicap. l'employeur lui a imposé des conditions de travail inacceptables malgré son handicap, lui demandant ainsi de charger des bouteilles de gaz lors de l'arrivée de clients ; les attestations d'anciens collègues de travail et de clients de l'établissement qu'il produit aux débats sont suffisamment probantes pour confirmer la violation par l'employeur de son statut d'handicapé ;

Selon écritures en date des 29 octobre 2014 et 13 octobre 2015, la SARL DARJI DISTRIBUTION demande la confirmation de la décision déférée, sauf sur la condamnation afférente à la non-remise de l'attestation destinée au Pôle emploi. Elle conclut au débouté de toutes les demandes du salarié et à sa condamnation au paiement d'une somme de 3. 000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle expose que :
l'inadaptation de M. X... au poste qui lui a été proposé justifiait l'initiative de l'employeur de mettre fin à ladite période d'essai ;
elle connaissait le handicap de M. X... et a pris les mesures les plus appropriées pour que son intégration professionnelle se fasse dans les meilleures conditions ;
les documents de rupture, dont l'attestation destinée au Pôle emploi, ont été remis au salarié le 22 septembre 2010 ;

MOTIFS

Sur l'irrecevabilité de pièces et conclusions
Que selon ordonnance du magistrat chargé d'instruire l'affaire en date du 12 février 2014, les parties devaient conclure et échanger leurs pièces avant le 12 novembre 2014 ;
Qu'en conséquence, les pièces numérotées 16 à 18, versées aux débats et les conclusions remises au greffe et notifiées à l'appelant le 13 octobre 2015 par la société intimée seront écartées des débats, conformément aux dispositions des articles 446-2 et 939 du code de procédure civile ;

Sur la rupture

Qu'il est constant que les parties étaient liées par un contrat de travail à durée déterminée, lequel comportait une période d'essai, conformément à l'article L. 1242-10 du code du travail, fixée à un mois et renouvelable une fois ;
Que l'employeur a mis fin à la période d'essai de M. X... par lettre recommandée du 19 septembre 2010, soit avant l'expiration du délai d'un mois de l'essai ;

Que l'employeur a écrit au salarié qu'il a décidé de mettre fin à l'essai en ces termes : « Nous sommes au regret de vous informer que nous avons décidé de mettre fin à votre période d'essai, car vous ne convenez pas au poste de caissier-étalagiste, que vous occupez au sein de notre entreprise. Malgré, tous nos efforts pour vous former, nous constatons que vous ne faites aucun progrès, votre rayon est désorganisé, nous constatons l'absence d'étiquetage sur les nouveaux produits que vous mettez en place, vous appliquez trop lentement les consignes données, et votre attitude lorsque l'on vous confie une tache tend à nous faire penser que l'on vous dérange. Ces différents motifs nous conduisent à faire cesser notre collaboration.. »

Que l'employeur n'ayant pas invoqué une faute de M. X..., n'était pas tenu de respecter la procédure disciplinaire ;
Qu'en l'espèce, il y a eu rupture du contrat à l'initiative de l'employeur pendant la période d'essai et les règles régissant la rupture anticipée du contrat à durée déterminée ne sont pas applicables, en vertu de l'article L. 1242-11 du code du travail.
Que cependant, si l'employeur peut discrétionnairement mettre fin aux relations contractuelles avant l'expiration de la période d'essai, ce n'est que sous réserve de ne pas faire dégénérer ce droit en abus ; Qu'en l'espèce, M. X... fait valoir que ladite résiliation de son contrat au cours de la période d'essai est abusive, sans rapport avec l'appréciation de ses qualités professionnelles, mais qu'en réalités son employeur n'a pas voulu le garder en raison de son handicap lequel constituait un frein pour certaines tâches qui lui étaient confiées ;

Qu'il appartient au salarié d'apporter la preuve de cet abus ;
Que ce dernier invoque un motif inhérent à sa personne, tenant à son handicap, ayant été reconnu travailleur handicapé du 21/ 11/ 2007 au 21/ 11/ 2012 selon décision de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées en date du 23 novembre 2007, dues notamment à des problèmes de santé liés à l'épaule droite opérée et des cervicalgies bilatérales importantes, ayant été opéré d'hernie discale cervicale en 2004 ;
Que cependant, l'employeur connaissait le handicap de M. X... lors de l'embauche, ce qui est confirmé par la mention portée à ce titre dans la convention tripartite de contrat d'accès à l'emploi ¿ DOM, signée le 23 août par l'employeur et l'Etat ;
Que le salarié avait remis à l'employeur la décision susvisée de la CDAPH du 23 novembre 2007, de même que des certificats médicaux et compte-rendu opératoire de 2005 ;
Que dans ces conditions, la société DARJI DISTRIBUTION a sollicité de la médecine du travail le 20 août 2010 une visite médicale d'embauche concernant M. X... afin de vérifier la compatibilité du poste de travail avec le handicap du salarié ;
Que M. X... a été déclaré apte le 24 août 2010, sans réserves, pour le poste de caissier-étalagiste alors que figuraient dans le descriptif des fonctions y attachées, la réception et le déchargement des marchandises ;

Que M. X... fait valoir que l'employeur lui a confié des taches incompatibles avec son handicap, telles que celles de soulever des bouteilles de gaz pour les clients et que lorsqu'il se serait plaint de ses conditions de travail, il aurait été mis fin à son contrat ;

Qu'il produit des attestations d'anciens collègues de travail, dont M. A..., employé par la société DARJI DISTRIBUTION à la même période, qui confirme les dires de M. X... ; Que cependant, cette attestation est sujette à caution dans la mesure où M. A...et la société DARJI DISTRIBUTION ont signé une rupture conventionnelle en octobre 2010, que le salarié a dénoncée devant la juridiction prud'homale le 10 décembre 2010 et les parties sont dès lors en procès ;

Que de même, l'attestation de M. B...Guy, ancien salarié de la société DARJI DISTRIBUTION, n'est guère précise sur les faits relatés imputables à l'employeur, ledit salarié se bornant à mentionner « Mr C...mettait la santé de M. X... Félix en danger.. (..) c'est atroce et abusif et inhumain sur un handicapé » ;
Qu'en revanche, l'employeur verse aux débats l'attestation de Mme D...Anne-Marie, ancienne responsable du magasin, laquelle déclare : « en août 2010, j'ai moi-même validé le recrutement de M. X... Félix qui était reconnu travailleur handicapé. A cette époque, les consignes ont été clairement signifiées, M. X... vu son état de santé, ne devait en aucun cas soulever, porter de la marchandise dite lourde, ses fonctions principales étaient le réassort des rayons et la tenue de la caisse. Il m'a été ordonné par M. C...de bien veiller à ce que tous les employés respectent ces consigne afin que M. X... puisse accomplir son travail dans les meilleures conditions » ;
Que les salariés E...Steeve (responsable de magasin et salarié depuis 2007) et F...Gladys (caissière polyvalente depuis le 29 juillet 2010) attestent dans le même sens, à savoir que les consignes étaient de mettre les cartons devant chaque emplacement dans les allées du magasin pour M. X..., ce dernier n'ayant pas le droit de soulever des produits lourds et que la société disposait d'un chauffeur-livreur, en la personne de M. A...Larry, qui déchargeait les marchandises livrées ;
Que les attestations de clients du magasin (G...Epiphaine, H...Victor et I...Lydie), produites en cours de procédure par l'appelant, trois ans après les faits, lesquels se souviennent avec précision des marchandises que leur avait portées en M. X... (telles bouteilles de gaz ou cartons de bouteilles d'eau ou coca-cola) sont insuffisamment probantes et ce d'autant qu'il s'agit d'attestations non manuscrites, donc non conformes aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile ; Que Mme I...reconnait d'ailleurs qu'« elle connait M. X... depuis 2 ans passés » ;

Qu'en outre, pour établir la dégradation de son état de santé consécutivement à ces faits, M. X... produit des certificats médicaux postérieurs de plus d'un an, lesquels ne sont guère probants quant au lien de causalité avec les fonctions exercées durant un mois, compte tenu de l'état préexistant du salarié ;

Que dès lors, M. X... ne justifie pas que ladite rupture repose sur une discrimination liée à son état de santé ou à son handicap, prohibée par l'article L. 1132-1 du code du travail ;

Que dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit la rupture de l'essai n'était pas abusive et en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour rupture abusive.
Que de même, c'est à juste titre que le salarié a été débouté de sa demande d'indemnité de fin de contrat prévue à l'article L. 1243-8 du code du travail, laquelle n'est pas applicable pendant la période d'essai ;
Que M. X... a été réglé de l'indemnité compensatrice de congés payés afférents au mois travaillé et dès lors, sa demande à ce titre sera rejetée, à l'instar du jugement déféré ;

Sur la remise de l'attestation destinée à Pôle emploi

Que M. X... reproche à l'employeur de ne pas lui avoir délivré lors de la rupture du contrat de travail, l'attestation destinée à Pôle emploi ;
Qu'en vertu de l'article R. 1234-9 du code du travail, l'employeur doit effectivement délivrer au salarié au moment de la rupture du contrat de travail les attestations et justifications qui lui permettent d'exercer ses droits aux prestations chômage.
Que la société DARJI DISTRIBUTION rétorque qu'elle a remis tous les documents de rupture au salarié et son solde de tout compte le 22 septembre 2010, sans toutefois le justifier ;
Que dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné l'employeur à payer à M. X... une somme de 1. 343, 80 ¿ à titre de dommages et intérêts pour absence de remise de l'attestation Pôle emploi et condamné ladite société à remettre à M. X... son attestation Pôle emploi sous astreinte de 50 ¿ par jour de retard à compter de la signification de ladite décision ;
Que la société sera de nouveau condamnée à remettre à M. X... une attestation destinée à Pôle emploi, dans un délai de 8 jours à compter de la notification du présent arrêt et passé ce délai, sous astreinte de 100 ¿ par jour de retard et durant deux mois ;
Qu'il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en la cause ;
Attendu que l'appelant qui succombe, supportera les entiers dépens ;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et en dernier ressort,
Déclare irrecevables les pièces et les conclusions déposées par l'intimée le 13 octobre 2015.
Les écarte des débats.
Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la SARL DARJI DISTRIBUTION à remettre à M. X... une attestation destinée à Pôle emploi, dans un délai de 8 jours à compter de la notification du présent arrêt et passé ce délai, sous astreinte de 100 ¿ par jour de retard et durant deux mois ;

Rejette toute autre demande.

Laisse les dépens à la charge de M. X....

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/01611
Date de la décision : 30/11/2015
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2015-11-30;13.01611 ?
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