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09/11/2015 | FRANCE | N°14/00958

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 09 novembre 2015, 14/00958


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 328 DU NEUF NOVEMBRE DEUX MILLE QUINZE
AFFAIRE No : 14/00958
Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de la Guadeloupe du 25 février 2014.

APPELANTE

LA CAISSE GENERALE DE SECURITE SOCIALE DE LA GUADELOUPE, agissant poursuites et diligences de son directeur général Monsieur Henri X... B. P. 486- Quartier de l'Hôtel de Ville 97110 POINTE A PITRE Représentée par Maître Betty NAEJUS (Toque 108) substituée par Maître TROUPEL, avocat au barreau de la GUADELO

UPE

INTIMÉE
SARL SPRIMTOUR Immeuble " Entre deux mers " Zac Moudong Sud 97122 BAIE-MA...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT No 328 DU NEUF NOVEMBRE DEUX MILLE QUINZE
AFFAIRE No : 14/00958
Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de la Guadeloupe du 25 février 2014.

APPELANTE

LA CAISSE GENERALE DE SECURITE SOCIALE DE LA GUADELOUPE, agissant poursuites et diligences de son directeur général Monsieur Henri X... B. P. 486- Quartier de l'Hôtel de Ville 97110 POINTE A PITRE Représentée par Maître Betty NAEJUS (Toque 108) substituée par Maître TROUPEL, avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉE
SARL SPRIMTOUR Immeuble " Entre deux mers " Zac Moudong Sud 97122 BAIE-MAHAULT Représentée par Maître Nadine PANZANI de la SCP FRESSE-PANZANI (Toque 20) substituée par Maître WERTER, avocat au barreau de la GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 7 septembre 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mesdames Marie-Josée Bolnet et Françoise Gaudin, conseillers.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, président, Madame Marie-Josée Bolnet, conseiller, Madame Françoise Gaudin, Conseiller,

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 26 octobre 2015, date à laquelle le prononcé de l'arrêt a été prorogé au 9 novembre 2015.
GREFFIER Lors des débats : Valérie SOURIANT, greffier.
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC.
Signé par Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Madame Valérie Souriant, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******
FAITS ET PROCEDURE :
Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 14 décembre 2011, la sarl SPRIMTOUR a formé un recours contre la décision de la commission de recours amiable de la Caisse générale de sécurité sociale de la Guadeloupe, en date du 12 octobre 2011, rejetant sa requête visant à contester partie des montants redressés à son encontre, soit la somme de 18 795 euros. Ce contrôle portait sur l'application de la législation de la sécurité sociale, de l'assurance chômage et de la garantie " AGS " au titre de la période du 01 janvier 2007 au 31 décembre 2009.
Par jugement du 25 avril 2014, le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Guadeloupe a déclaré recevable et bien fondé le recours soutenu, constaté que le défaut d'affiliation de Mme Z... Sylvie, sans qu'ait été caractérisé et établi le lien de subordination entre la salariée et l'employeur, n'autorise pas l'application des articles L121-1, L 1221-1, L 1221 et L1221-3 du code du travail, constaté que le contrôle effectué aurait dû procéder à la vérification de l'existence ou de l'absence de lien de subordination entre Mme Z... et la sarl SPRIMTOUR, constaté qu'en n'effectuant pas ce contrôle et cette vérification, la caisse générale de sécurité sociale de Guadeloupe, dite ci-après la CGSS de la Guadeloupe, ne pouvait suspecter la société de mauvaise foi, en conséquence a infirmé la décision de rejet de la commission de recours amiable du 12 octobre 2011 et a invalidé le redressement notifié à la sarl SPRIMTOUR.

Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 04 juin 2014, la CGSS a interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance du 14 janvier 2014, le magistrat chargé d'instruire l'affaire a fixé un calendrier de procédure accordant un délai de trois mois à l'appelante pour notifier à l'intimée ses pièces et conclusions et à cette dernière un nouveau délai de trois mois pour notifier les siennes en retour.
Par conclusions soutenues oralement à l'audience du 07 septembre 2015, la CGSS, représentée, a demandé à la Cour de :- infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 24 février 2014,- constater que la contestation ne porte que sur le chef no17 du redressement pour emploi dissimulé,- infirmer le jugement en ce qu'il a invalidé dans son intégralité le redressement notifié à la société SPRIMTOUR,- dire et juger bien fondé le redressement portant sur le chef no17 pour emploi dissimulé,- dire et juger valide le redressement notifié à la société SPRIMTOUR tant pour le chef du no17 que pour les autres chefs de redressement,- condamner la société SPRIMTOUR à lui payer la somme de 1 085 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- condamner la même aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP NEAJUS-HILDEBERT.

La CGSS expose que la contestation de la société porte essentiellement sur le point no17 du redressement relatif à la dissimulation d'emploi d'un salarié (Mme Z...) à hauteur de 8 385 euros au titre de l'année 2007, qu'elle a maintenu la régularisation pour cette personne en requalifiant les sommes perçues par celle-ci en salaires pour un montant global de 18 488 euros sur trois ans, qu'il n'est pas prouvé que Mme Z... exerçait la profession d'agent commercial indépendant, comme le prétend la société SPRIMTOUR, conformément aux dispositions de la loi no70-09 du 02 janvier 1970 et du décret d'application no72-678 du 20 juillet 1972, étant non titulaire de la carte professionnelle indiquant la mention " transaction sur immeubles et fonds de commerce " et non inscrite au registre des agents commerciaux, sans être également connue des fichiers de l'Urssaf, qu'au contraire, Mme Z... se trouvait placée dans un lien de subordination caractérisé par la limitation par la société SPRIMTOUR de son secteur d'activité, que les termes du contrat d'agent commercial du 07 juillet 2002 en attestent par l'indication d'une rétrocession d'honoraires mensuelle à hauteur de 1 200 euros minimum démontrant ainsi l'existence ce lien de subordination et que celle-ci, après avoir été autorisée à utiliser l'enseigne SPRIMTOUR, a fini par devenir salariée de la société SPRIMTOUR à compter du 02 janvier 2008.

Elle insiste sur l'absence de pertinence du moyen selon lequel la mise en demeure serait nulle pour ne pas avoir pris en compte les mêmes périodes énoncées dans la lettre d'observations alors que celle-ci intéresse sans conteste la période couverte par le contrôle du 01 janvier 2007 au 31 décembre 2009.

********
La sarl SPRIMTOUR, représentée, demande de confirmer le jugement querellé, de débouter la CGSS de ses demandes et de condamner cette dernière à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
La société SPRIMTOUR rappelle qu'elle a fait l'objet d'un redressement à la suite d'un contrôle de l'application des législations sociales, de l'assurance chômage et de la garantie des salaires AGS le 12 février 2010, qu'une lettre d'observations lui a été adressée le 29 avril 2010 mentionnant 19 points donnant lieu à observations ou régularisations, qu'après divers échanges intervenus entre les parties, la CGSS a maintenu un seul point de redressement relatif à la prétendue dissimulation d'activité salariée de Mme Sylvie Z... et lui a adressé une mise en demeure en date du 05 août 2010 portant sur les sommes suivantes : 11 014 euros (principal) + 550 euros (majorations) pour l'année 2007, 3 389 euros (principal) + 169 euros (majorations) pour l'année 2008 et 3 899 euros (principal) + (194 euros) pour l'année 2009, soit un total de 18 795 euros.
Elle explique qu'elle a passé avec Mme Z..., le 07 janvier 2002, un contrat d'agent commercial d'une durée d'un an, renouvelable par tacite reconduction avec l'indication suivante " le mandant n'est pas considéré comme l'employeur et le mandataire déclare formellement qu'étant travailleur indépendant non salarié, il fera son affaire personnelle de toutes charges fiscales ou sociales lui incombant à ce titre et s'engage à ne pas déclarer les revenus de son activité comme traitements et salaires... Le mandataire, en sa qualité de travailleur indépendant, s'engage notamment à régulariser son inscription à une caisse de retraite, à une caisse d'assurance maladie-maternité et à une caisse d'allocations familiales ", que Mme Z... a justifié de son inscription au registre du commerce et des sociétés en qualité de travailleur indépendant et d'une attestation d'enregistrement de sa création d'activité " non salariée " auprès du Centre de Formalités des Entreprises, et ce à compter du 20 mai 2003, qu'elle lui a fourni régulièrement des factures d'honoraires correspondant à la prestation effectuée et que cette personne a exercé son activité auprès d'autres sociétés du secteur immobilier.
Elle soutient que les dispositions de l'article L 8221-6- I, 1oont été scrupuleusement observées dans le cas de Mme Z... et qu'il incombe à la CGSS de faire tomber la présomption simple de non-salariat prévue au II de l'article précité en rapportant la preuve du lien de subordination entre elle et Mme Z..., qu'en l'espèce, les éléments permettant de caractériser un tel lien font défaut au regard des critères retenus par la jurisprudence de la Cour de cassation, à savoir le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné, qu'en revanche, Mme Z... répond aux conditions d'exercice du métier d'agent commercial définies à l'article L 134-6 alinéa 1 du code du commerce.
Elle fait aussi observer que les moyens relatifs à la non-inscription au registre des agents commerciaux, au fichier de l'URSSAF et le défaut de détention de la carte professionnelle " transactions sur immeubles et fonds de commerce " sont inopérants à faire la preuve contraire du lien de subordination.
A titre subsidiaire, elle rappelle qu'aucun chef de redressement ne peut être ajouté après le redressement, les sommes visées dans la mise en demeure adressée à la suite du contrôle doivent nécessairement avoir été visées dans la lettre d'observations en application des articles R. 243-43-4 et R 243-59 al. 5 du code de la sécurité sociale et de la jurisprudence de la cour de cassation (Cass. soc 6 décembre 2006 node pourvoi : 05-13699), qu'à défaut, la mise en demeure doit être déclarée nulle, qu'à cet égard, si la lettre d'observations produite fait état d'une réintégration dans l'assiette des cotisations de la somme de 18 488 euros au titre de la seule année 2007, la mise en demeure délivrée ensuite ne devait mentionner que l'année 2007.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
A titre liminaire :
Il importe de rappeler les éléments suivants :
Le 12 février 2010, la sarl SPRIMTOUR a fait l'objet l'objet d'un contrôle de l'application des législations sociales, de l'assurance chômage et de la garantie des salaires AGS à compter du 1er janvier 2007, dans les conditions prévues par les articles L. 243-7 à L. 243-12-3, L. 114-14 à L. 114-16 et R. 243-59, R. 243-59-1 et R. 243-59-2 du code de la sécurité sociale.
Une lettre d'observations comportant 19 points a été adressée à la société SPRIMTOUR.
Il est à noter que deux versions de ce document ont été versées au débat, celle de la CGSS comportant 18 points dont le point 17 intitulée dissimulation d'emploi salarié et celle de l'intimée comportant 19 points dont le point 18 intitulée dissimulation d'emploi salarié qui n'est pas strictement identique en son contenu.
Par lettre en date du 28 mai 2010, cette dernière ne contestait plus que le point no17 de sa version et notamment le redressement opéré sur les commissions versées aux agents commerciaux Z..., A... et B....
Par lettre du 30 juin 2010, la CGSS, écartait les sommes réclamées pour A... et B..., et maintenait le redressement global de 18 791 euros sur les trois années (2007, 2008 et 2009) pour Mme Sylvie Z..., au motif d'un travail dissimulé de salarié.
Le 26 juillet 2010, la sarl SPRIMTOUR a saisi la commission de recours amiable.
Une mise en demeure en date du 05 août 2010 a été délivrée à l'entreprise pour recouvrer la somme de 18 795 euros au titre des cotisations et majorations du régime général de sécurité social pour les années 2007, 2008 et 2009.
Par lettre du 12 octobre 2011, la CGSS a informé la société de la décision de la commission de maintenir le redressement opéré sur le statut de Mme Z... et les conséquences financières au titre des années 2007, 2008 et 2009 (cf 1er paragraphe).
Contestant cette décision, la sarl SPRIMTOUR a donc saisi, dans le délai imparti, le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale.

Sur le lien de subordination :

L'article L. 8221-6, I du code du travail instaure une présomption de non-salariat pour les personnes physiques inscrites aux différents registres et répertoires professionnels, notamment au registre du commerce et des sociétés. Cette présomption couvre les recours ouverts aux travailleur indépendants mais tombe lorsqu'il est démontré que les intéressés fournissent des prestations qui les placent dans un lien de subordination permanent caractérisant une activité salariée.
Le lien de subordination est constitué par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements du subordonné. La recherche de ce lien exclut que la qualification du contrat soit laissée à la seule volonté des parties en raison du caractère d'ordre public du droit du travail.
En l'espèce, il n'est nullement démontré par la CGSS un pouvoir de direction et de contrôle de la société SPRIMTOUR sur l'activité de Mme Z.... Aucun élément n'est rapporté sur une fourniture d'ordres, sur l'exigence de comptes rendus périodiques durant les période d'activité contrôlées. Le contrat d'agent commercial du 07 janvier 2002 donne mandat sans aucune délimitation de secteur, ni exclusivité. L'utilisation de l'enseigne SPRIMTOUR par Mme Z... et la rétrocession d'honoraire d'un montant moyen mensuel ne devant pas être inférieur à 1 220 euros TTC ne caractérisent pas davantage un pouvoir de direction de la société SPRIMTOUR sur l'activité de Mme Z... et ne prouvent pas la fixation d'un salaire. De plus, la recherche d'immeubles dans la zone géographique partant de Capesterre-Belle Eau à Deshaies n'est pas plus significative du pouvoir de direction de la société SPRIMTOUR, cette délimitation de zone ne concernant que le lieu de situation des immeubles et fonds de commerce recherchés.
L'attestation du centre de formalités des entreprises du 20 mai 2003, l ¿ extrait du registre du commerce et des sociétés délivré le 26 juillet 2006 confirmant une création d'activité individuelle de transactions immobilières au 20 mai 2003 au nom de Mme Z..., la mainlevée du 26 septembre 2006 de l'avis à tiers détenteur initié par Mme Z... à l'encontre de la société SPRIMTOUR, la facture du 19 juillet 2007 produite et le document de la RAM Antilles Guyane daté du 08 mars 2006 portant indication des droits ouverts au profit de Mme Z... suffisent largement à démontrer l'exercice du métier d'agent commercial indépendant de celle-ci, prévu au contrat d'agent commercial en date du 07 janvier 2002.

Le lien de subordination juridique n'étant pas établi par la CGSS, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris sur ce point mais de le réformer sur l'invalidation générale du redressement notifié à la société SPRIMTOUR, la contestation initialement portée au contrôle de la commission de recours amiable étant limitée à la somme globale de 18 795 euros au titre de l'activité de Mme Z....

Sur les frais irrépétibles :
L'équité commande de condamner la CGSS de la Guadeloupe, en la personne de son représentant légal, à payer à la société SPRIMTOUR la somme de 1 000 euros au titre de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort :
Confirme le jugement du 25 février 2014 sauf en ce qu'il a invalidé en son entier le redressement notifié à la sarl SPRIMTOUR ;
Le réforme sur ce point ;
Statuant à nouveau,
dit que l'invalidation du redressement ne porte que sur la somme de 18 795 euros ;
Rejette les demandes plus amples et contraires ;
Condamne la Caisse générale de sécurité sociale de la Guadeloupe, en la personne de son représentant légal, à payer à la société SPRIMTOUR la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14/00958
Date de la décision : 09/11/2015
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2015-11-09;14.00958 ?
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