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09/11/2015 | FRANCE | N°14/00089

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 09 novembre 2015, 14/00089


VS-BR

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 324 DU NEUF NOVEMBRE DEUX MILLE QUINZE

AFFAIRE No : 14/ 00089
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 18 décembre 2013- Section Activités Diverses.
APPELANT
Monsieur José X...... 97139 LES ABYMES Représenté par Maître Laurent HATCHI (Toque 44) substitué par Maître JABOULEY, avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉE

Association MAISON SAINT-VINCENT-DE-PAUL-CHRS 8, rue Abel-Libany 97139 LES ABYMES Représentée par Maître Jea

n-Michel GOUT (Toque 70) substitué par Maître CALONNE, avocat au barreau de la GUADELOUPE

COMPOSITION ...

VS-BR

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 324 DU NEUF NOVEMBRE DEUX MILLE QUINZE

AFFAIRE No : 14/ 00089
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 18 décembre 2013- Section Activités Diverses.
APPELANT
Monsieur José X...... 97139 LES ABYMES Représenté par Maître Laurent HATCHI (Toque 44) substitué par Maître JABOULEY, avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉE

Association MAISON SAINT-VINCENT-DE-PAUL-CHRS 8, rue Abel-Libany 97139 LES ABYMES Représentée par Maître Jean-Michel GOUT (Toque 70) substitué par Maître CALONNE, avocat au barreau de la GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 septembre 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, président, Madame Marie-Josée Bolnet, conseiller, Madame Françoise Gaudin, conseiller,

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 9 novembre 2015.
GREFFIER Lors des débats : Madame Valérie Souriant, greffier.
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Madame Valérie Souriant, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure :
M. José X...s'étant porté candidat au poste d'" animateur des activités de réadaptation sociale " au sein de l'Association Saint Vincent de Paul, il était engagé en premier lieu, à titre bénévole à compter du 1er août 2000 pour une période probatoire d'un mois.
À compter du 1er septembre 2000, il était engagé dans le cadre d'un contrat adulte-relais, pour une durée hebdomadaire de 39 heures moyennant le versement d'une rémunération équivalente au SMIC.
Dans le cadre d'un nouveau contrat adulte-relais souscrit le 1er octobre 2000, M. X...était engagé aux mêmes conditions pour une durée de 36 mois.
Le 1er octobre 2003, un nouveau contrat adulte-relais, à durée déterminée de 36 mois, était conclu par les parties pour une durée de travail hebdomadaire de 35 heures.
Le 1er octobre 2006, un contrat adulte-relais à durée indéterminée était conclu entre les parties.
Par lettre recommandée en date du 24 mars 2009, M. X...était convoqué à un entretien préalable en vue de son licenciement.
Par acte huissier en date du 19 mai 2009, M. X...se voyait signifier une lettre de licenciement pour motif personnel.
Le 16 septembre 2011, M. X...saisissait le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre pour contester son licenciement et obtenir paiement de rappels de salaires et de diverses indemnités.
Par jugement du 18 décembre 2013, la juridiction prud'homale déboutait M. X...de l'intégralité de ses demandes et le condamnait à payer à l'Association SAINT VINCENT DE PAUL la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration du 16 janvier 2014, M. X...interjetait appel de cette décision.
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Par conclusions notifiées à la partie adverse le 22 avril 2014, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, M. X...sollicite la condamnation de l'Association SAINT VINCENT DE PAUL à lui payer les sommes suivantes :-36 551, 52 euros pour licenciement abusif,-8000 eurosà titre de préjudice distinct,-3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

À l'appui de ses demandes, M. X...fait valoir que tous les faits antérieurs au 24 janvier 2009 sont prescrits. Il relève par ailleurs que l'Association SAINT VINCENT DE PAUL verse au débat des pièces relatives à un événement qui se serait déroulé le 17 avril 2009, à savoir l'agression de M. Z..., alors que la convocation à l'entretien préalable, en date du 24 mars 2009, est antérieure à ces faits. Il soutient en outre qu'il n'est nullement prouvé qu'il soit l'auteur de l'agression de M. Z....
Il expose par ailleurs que les faits reprochés dans la lettre de licenciement demeurent « très flous » et ne peuvent en aucun cas être vérifiés. Il explique que la véritable cause de son licenciement résulte dans le fait que lui et sa compagne Madame Katia A..., ont dénoncé de nombreux abus, notamment d'ordre financier, du président de l'Association SAINT VINCENT DE PAUL M. Henri B....
****
Par conclusions notifiées à la partie adverse le 16 septembre 2014, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, l'Association SAINT VINCENT DE PAUL sollicite la confirmation du jugement entrepris et le rejet de l'intégralité des demandes de M. X.... Elle réclame paiement de la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'Association SAINT VINCENT DE PAUL expose que les faits décrits dans la lettre de licenciement sont propres au fonctionnement de M. X...dans l'exécution de ces tâches et son absence totale de respect pour la hiérarchie, lesdits faits étant parfaitement objectifs et constitués. L'Association SAINT VINCENT DE PAUL indique que M. X...n'a pas été embauchée pendant plusieurs années en raison de ses qualités, mais qu'il a été gardé dans un esprit de bienfaisance, l'intéressé étant lui-même au départ un client du Centre d'Hébergement et de Réinsertion Sociale de SAINT-VINCENT DE PAUL.
L'Association SAINT VINCENT DE PAUL fait état également de l'agression violente d'un usager du centre d'hébergement, M. Z..., de la part de M. X..., le 17 avril 2009.
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Motifs de la décision :
Dans sa lettre de licenciement du 5 mai 2009, l'employeur expose les motifs de sa décision de la façon suivante :
« Vous refusez de vous plier aux consignes de l'Association vous employant comme animateur dans les activités sociales et de réinsertion, notamment en ce qui concerne la procédure de demande de congés annuels (refus de déposer vos dates de congés), la nécessité d'informer votre hiérarchie de vos absences, l'abandon régulier de votre poste de travail de manière intempestive sans prévenir l'encadrement (disparition du poste de travail sans aucune justification).
L'opposition systématique, dont vous faites preuve, entraîne des relations difficiles et un climat aggravé par une agressivité et une violence verbale et physique de votre part à l'encontre de vos collègues, du personnel encadrant et même à l'égard des usagers (injures, bousculades, refus d'approcher certains usagers de manière ostensible) ne permet pas d'envisager la poursuite des relations de travail avec vous.
En effet votre attitude de contestation et d'agressivité constante concernant l'exécution des tâches vous étant confiées par l'Association constitue une violation des obligations découlant de votre contrat de

travail dont les conséquences sont particulièrement dommageables pour l'Association parce qu'elle désorganise le service au sein duquel vous exercez.

Nous considérons que ces faits constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement conformément aux dispositions de l'article L. 1232-1 du code du travail. »
M. X...ne peut valablement soutenir que la véritable cause de son licenciement résiderait dans la dénonciation qu'il aurait faite de nombreux abus financiers, ne produisant aucun élément permettant de corroborer ses allégations. Il n'est en effet établi aucun fait d'abus financier de la part de la direction de l'association, ni de dénonciation de la part de M. X....
Dans un courrier du 5 février 2009, pas moins de 25 salariés de l'Association SAINT VINCENT DE PAUL faisaient savoir au président et aux membres du conseil d'administration de celle-ci, que depuis de nombreuses années, le climat et les conditions travail étaient mis à mal par le comportement irrationnel et irresponsable de deux membres du personnel à savoir M. José X..., employé à l'accueil de jour, et Madame Katia A..., employée à la cuisine.
Dans ce courrier, les signataires exposaient que malgré toute l'énergie et la bonne volonté ainsi que la conscience professionnelle déployée par la majorité des salariés et de la direction pour faire évoluer la structure, ils étaient acculés à remettre en question leurs conditions de travail devenues intolérables.
Après avoir évoqué les sanctions disciplinaires prises à l'égard des deux salariés cités, les signataires, faisaient valoir que le souci de conciliation et d'indulgence de la direction avait permis à cette situation de perdurer, laquelle n'avait que trop duré. Ils indiquaient que tous les moyens déjà mis en oeuvre n'avaient eu aucun effet sur le comportement et l'attitude des deux employés cités contre lesquels plusieurs plaintes et mains courantes avaient été déposées par certains membres du personnel.
Ils entendaient décrire leurs craintes et leur ras-le-bol face à cette situation, se décrivant comme étant les otages de ces deux individus qui menaçaient de mort régulièrement leurs collègues, leur encadrement et même la direction en promettant :- de mettre le feu au centre d'hébergement et à la cuisine,- d'empoisonner les repas servis aux usagers et aux employés,- de « piquer » ou d'égorger tel ou tel collègue, voir le président,- de se suicider sur le lieu de travail.

Ils exposaient que ces deux individus vociféraient et hurlaient l'un comme l'autre des injures à l'égard de tout ce qui ne se conformait pas leur volonté, affichant une attitude violente et menaçante en reversant le mobilier, et infligeant régulièrement ces comportements violents au voisinage du centre et de la cuisine ainsi qu'aux usagers présents.
Ils soulignaient que ces deux individus n'admettaient aucune autorité, aucune hiérarchie, menaçant de représailles tout ce qui pourrait les contrarier dans leurs desiderata, décidant ainsi que les règles institutionnelles ne leur étaient pas applicables telles que :- la prévision des congés annuels (demandée à tout le personnel)- des retenues sur salaire en cas d'arrêt maladie-le respect des tâches fixées dans leur contrat de travail-le signalement des absences-le départ de son poste de travail de manière intempestive irrégulière sans prévenir l'encadrement.

Ils leur reprochaient d'exiger et d'obtenir gain de cause à grand renfort de menaces d'hystérie.
Ils expliquaient que bon nombre de membres du personnel venaient travailler la peur au ventre, dans l'angoisse, certains collègues ayant des répercussions sur leur santé, la tension étant constante, surtout au sein des deux services ou sévissent ces deux membres du personnel, à savoir l'accueil de jour et la cuisine.
Ils relevaient que ces comportements s'appliquaient aussi aux usagers, personnes souvent fragiles sur tous les plans.
Ils rappelaient que les événements des jours précédents avaient accru la détermination du personnel à mettre un point d'arrêt à ces agissements, expliquant que le contexte actuel de conflit de grève que traverse le département de la Guadeloupe, avait exacerbé les comportements déviants de M. X...et de Madame Katia A...qui, sous couvert d'une revendication salariale infondée, ont réussi à faire fermer la structure le samedi 31 janvier dernier et surtout empêcher la distribution des repas de midi aux usagers.
Ils ajoutaient que le lundi 1er février 2009, toujours sur la même base de revendications infondées, Mme A...et M. X...avaient investi violemment la structure ainsi que le bureau du président et, comme d'habitude, avaient proféré des insultes, des menaces, des crises d'hystérie, maltraité le mobilier, tenu des propos diffamatoires et portant atteinte à la vie privée du personnel. Ils faisaient valoir que quelque soit la légitimité d'une revendication, il ne pouvait être toléré de telles pratiques.
Ils terminaient leur lettre en faisant valoir que devant la gravité de la situation où les valeurs et les fondements de l'Association SAINT VINCENT DE PAUL étaient bafoués, et devant l'impossibilité de la direction de résoudre ce problème, les membres du personnel se mobilisaient et exigeaient que des sanctions disciplinaires radicales soient prises à l'encontre de M. X...et Madame Katia A...en urgence dans le respect de la réglementation en vigueur.
La description du comportement de M. X..., et de sa compagne Mme Katia A..., dans ce courrier du 5 février 2009, par plus de la moitié du personnel de l'Association SAINT VINCENT DE PAUL, corrobore la réalité des griefs invoqués dans la lettre de licenciement.
Les pièces versées aux débats par l'Association SAINT VINCENT DE PAUL, montrent que M. X...a fait par le passé l'objet de plusieurs avertissements et rappels à l'ordre, pour des comportements injurieux à l'égard de l'encadrement, d'abandon de poste, d'indiscipline, d'agressivité tant verbale que physique auprès de collègues, mais aussi à l'égard d'usagers du centre d'hébergement.
Parmi les derniers faits reprochés à M. X...figure ceux dont Mme Christelle C..., coordinatrice, a été victime le 16 janvier 2009, celle-ci ayant fait l'objet d'agression et d'insultes verbales. Le docteur Philippe D..., qui a examiné le lendemain Mme C..., indiquait qu'il avait été lui-même gêné durant sa consultation au centre de santé Saint-Vincent-de-Paul, par la particulière grossièreté et l'extrême agressivité verbale, dénoncées par Mme Christelle C....
Si selon les dispositions de l'article L. 1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, ce dernier peut toutefois sanctionner un fait fautif qu'il connaît depuis plus de deux mois dans la mesure où le comportement du salarié s'est poursuivi dans ce délai.
Si en l'espèce l'employeur invoque à l'appui de sa décision de licenciement, l'indiscipline, le comportement injurieux à l'égard de l'encadrement, l'agressivité tant verbale et physique de M. X...auprès de ses collègues et des usagers, et si ce comportement a fait l'objet de plusieurs avertissements et rappels à l'ordre par le passé, il y a lieu de constater que le comportement de l'intéressé a perduré pendant le délai de deux mois précédant l'engagement de la procédure de licenciement, puisque il ressort des éléments fournis par les membres du personnel signataires du courrier du 5 février 2009, que par son comportement excessif, M. X...a réussi à fermer la structure le samedi 31 janvier 2009, empêchant la distribution des repas de midi aux usagers, et que le 1er février 2009, accompagné de Mme A..., il a investi violemment le bureau du président, proférant comme à l'accoutumé des insultes, des menaces, des crises d'hystérie, maltraitant le mobilier et tenant des propos diffamatoires et d'atteinte à la vie privée du personnel.
Compte tenu du comportement incontrôlable de M. X..., nuisant gravement au fonctionnement de l'institution, ce comportement s'étant poursuivi dans le délai de deux mois précédant le 24 mars 2009, date de la convocation à l'entretien préalable, l'employeur a pu à juste titre, procéder au licenciement de M. X...pour une cause qui doit être qualifiée de réelle et sérieuse.
En conséquence non seulement M. X...doit être débouté de sa demande d'indemnisation pour licenciement abusif, mais en outre il ne ressort d'aucun des éléments du débat que l'employeur ait entouré sa décision de circonstances vexatoires et brutales, la direction de l'institution ayant fait preuve d'une grande mansuétude à l'égard de M. X...au cours des mois et années antérieures.
Le jugement entrepris sera donc confirmé.
Comme il paraît inéquitable de laisser à la charge de l'intimée les frais irréductibles qu'elle a exposés, il lui sera alloué la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de celle déjà allouée par les premiers juges sur le même fondement.

Par ces motifs,

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement déféré,
Y ajoutant,
Condamne M. X...à payer à l'Association SAINT VINCENT DE PAUL la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que les entiers dépens sont à la charge de M. X...,
Déboute les parties de toutes conclusions plus amples ou contraires,

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14/00089
Date de la décision : 09/11/2015
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2015-11-09;14.00089 ?
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