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06/07/2015 | FRANCE | N°14/00566

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 06 juillet 2015, 14/00566


VF-FG

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 197 DU SIX JUILLET DEUX MILLE QUINZE
AFFAIRE No : 14/ 00566
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 25 février 2014- Section Encadrement.
APPELANTE
Madame Marie-Laure X... épouse Y...... 97014 SAINT-BARTHELEMY CEDEX Représentée par Maître Tania GALVANI (Toque 62), avocat au barreau de la GUADELOUPE
INTIMÉ
Monsieur Alain Z...... 97100 BASSE-TERRE Représenté par Maître Sandrine JABOULEY-DELAHAYE (Toque 13), avocat au barreau de la GUADELOUPE


COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 4 mai 2015, en audience publique, dev...

VF-FG

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 197 DU SIX JUILLET DEUX MILLE QUINZE
AFFAIRE No : 14/ 00566
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 25 février 2014- Section Encadrement.
APPELANTE
Madame Marie-Laure X... épouse Y...... 97014 SAINT-BARTHELEMY CEDEX Représentée par Maître Tania GALVANI (Toque 62), avocat au barreau de la GUADELOUPE
INTIMÉ
Monsieur Alain Z...... 97100 BASSE-TERRE Représenté par Maître Sandrine JABOULEY-DELAHAYE (Toque 13), avocat au barreau de la GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 4 mai 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Bernard Rousseau, Président de chambre, président, Madame Marie-Josée Bolnet, conseiller, Madame Françoise Gaudin, conseiller, qui en ont délibéré.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 6 juillet 2015.
GREFFIER Lors des débats : Madame Valérie Francillette, greffier.
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Madame Yolande MODESTE, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Mme Marie-Laure X... épouse Y... a été embauchée par l'Office Notarial SCP H... à compter du 2 mai 2002, selon contrat à durée indéterminée en qualité de clerc de notaire.
Son contrat de travail a été transféré en avril 2007 au successeur de l'Office, Maître Alain Z..., devenant l'Office Notarial Alain Z... puis depuis 2012, la SCP Z...- D.... L'Office Notarial est composé d'un siège social situé à BASSE TERRE et d'un bureau annexe situé à SAINT BARTHELEMY, au sein duquel travaillait Mme Y....
Mme Y... est convoquée par lettre du 12 octobre 2010, signifiée par voie d'huissier le 14 octobre, à un entretien préalable en vue de son licenciement fixé au 29 octobre 2010, avec mise à pied à titre conservatoire puis est licenciée pour fautes graves selon lettre datée du 13 novembre 2010.
Dans le dernier état de la relation contractuelle, Mme Y... était classée clerc de notaire « hors rang » coefficient 270 de la convention collective nationale du notariat et percevait un salaire mensuel brut de 6. 424, 30 ¿ pour 151, 67 heures de travail.
Contestant le bien-fondé de son licenciement, Mme Y... a saisi le 31 janvier 2011 le conseil des prud'hommes de BASSE-TERRE aux fins de s'entendre condamner l'Office Notarial de Maître Alain Z... et solidairement, M. Alain Z... à lui payer les sommes suivantes : 6. 424, 30 ¿ au titre d'indemnité pour irrégularité de la procédure, 6. 424, 30 ¿ au titre du salaire retenu durant la mise à pied à titre conservatoire, 535, 35 ¿ à titre d'incidence du 13ème mois y afférente, 19. 272, 90 ¿ au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 11. 765, 19 ¿ à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 3. 388, 56 ¿ à titre d'indemnité compensatrice de congés payés, 77. 091, 60 ¿ à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 167. 031, 80 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire et diffamatoire, 67. 000 ¿ à titre de dommages et intérêts pour préjudice financier, 11. 509, 68 ¿ à titre d'indemnité compensatrice de repas, 8. 723, 96 ¿ à titre de rappel de salaire suite à discrimination, de juillet 2008 à août 2009, 726, 99 ¿ à titre d'incidence du 13ème mois y afférente, 98. 673, 30 ¿ à titre de rappel de l'intéressement sur chiffre d'affaire à ST BARTHELEMY en 2008, 197. 346, 60 ¿ à titre de rappel de l'intéressement sur chiffre d'affaire à ST BARTHELEMY en 2009 et 2010, 1. 887, 60 ¿ à titre de rappel de salaire afférent aux cotisations de prévoyance, 6. 424, 30 ¿ à titre de dommages et intérêts pour retard dans la délivrance du certificat de travail et de l'attestation Pôle emploi, 3. 464, 85 ¿ au titre de l'indemnité en vertu de l'article 12-2 de la convention collective du Notariat, 4. 500, 43 ¿ à titre d'indemnité de formation en vertu de l'article L. 6321-1 du code du travail, 2. 500 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du 25 février 2014, le conseil a : dit qu'il n'y a pas lieu de surseoir à statuer, dit fondé sur une cause réelle et sérieuse, mais non sur une faute grave, le licenciement prononcé le 6 mars 20 à l'encontre de Mme Y..., condamné Maître Z... Alain à payer à Mme Marie-Laure X... épouse Y... les sommes suivantes : 19. 272, 90 ¿ au titre de l'indemnité de préavis, 11. 765, 19 ¿ au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, 1. 997, 50 ¿ au titre de l'indemnité de repas, 1. 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, déboutant les parties du surplus de leurs demandes.
Mme Y... a interjeté appel dudit jugement le 27 mars 2014.
Selon ses dernières écritures datées du 4 mai 2015 développées par son conseil devant la cour, Mme Y... conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a fait droit à ses demandes au titre des indemnités de rupture et de repas et sa réformation pour le surplus, sollicitant paiement des sommes suivantes : 6. 424, 30 ¿ au titre d'indemnité pour irrégularité de la procédure, 6. 959, 65 ¿ au titre du salaire retenu durant la mise à pied à titre conservatoire, 77. 091, 80 ¿ à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 9. 450, 95 ¿ à titre de rappel de salaire suite à discrimination, de juillet 2008 à août 2009, 296. 019, 90 ¿ à titre de rappel de l'intéressement sur chiffre d'affaire à ST BARTHELEMY de 2008 à 2010, 5. 000 ¿ à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Selon conclusions notifiées le 9 avril 2015 à l'appelante, auxquelles il a été fait référence lors des débats, l'Office Notarial Maître Alain Z..., devenu la SCP Z...- D..., demande à la cour in limine litis de rejeter des débats, pour appropriation frauduleuse, les pièces produites par l'appelante suivantes : la convocation de Mme A..., clerc rédacteur d'actes, à une visite médicale programmée le 7 avril 2011, le courrier adressé par Me Z... à Mmes G... ET I..., déléguées du personnel en date du 13 octobre 2010, le projet de mémoire en défense, établi par Maître Philippe J..., au profit de Me Z... en 2009 ; Au fond, il demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déqualifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse, condamné l'Office Notarial de Me Z... à verser à Mme Y... une indemnité de préavis, une indemnité conventionnelle de licenciement, une indemnité de repas et une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile, mais de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les autres demandes de Mme Y... et statuant à nouveau, de dire et juger le licenciement justifié par les fautes graves commises par Mme Y... et la débouter de toutes ses demandes, sauf à ramener l'indemnité pour irrégularité de procédure à la somme de l'euro symbolique. Il sollicite la condamnation de la salariée au paiement d'une indemnité de 4. 000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS
Sur l'irrecevabilité de pièces communiquées
Attendu qu'un salarié, lorsque cela est strictement nécessaire à l'exercice des droits de sa défense dans le litige l'opposant à son employeur, peut produire en justice des documents dont il a eu connaissance à l'occasion de ses fonctions ;
Que l'employeur conteste la production aux débats par Mme Y... des pièces suivantes : la convocation de Mme A..., clerc rédacteur d'actes, à une visite médicale programmée le 7 avril 2011, le courrier adressé par Me Z... à Mmes G... ET I..., déléguées du personnel en date du 13 octobre 2010, le projet de mémoire en défense, établi par Maître Philippe J..., au profit de Me Z... en 2009 ;
Que Mme Y... ayant été licenciée sans préavis en novembre 2010, ne pouvait avoir eu connaissance, ni avoir en sa possession durant l'exercice de ses fonctions, la convocation à la médecine du travail d'une autre salariée pour avril 2011 ; Que cette pièce sera donc écartée des débats ;
Que la salariée produit un échange de correspondance entre Me Z... et les déléguées du personnel, Mesdames G... et I..., en date du 13 et 14 octobre 2010 ;
Que Mme Y... a pu avoir connaissance de ces courriers en voulant préparer sa défense à l'entretien préalable et bien que couverts par le secret professionnel, ces documents étaient nécessaires au soutien de sa prétention d'irrégularité de la procédure de licenciement ; Qu'il n'y a pas lieu de l'écarter ;
Qu'en revanche, le mémoire personnel à Me Z..., couvert par le secret professionnel, ne peut constituer un document nécessaire à la défense de Mme Y... et soit être écarté des débats ;

Sur le bien-fondé du licenciement :
Attendu que la faute grave visée par les articles L 1234-1 et L 1234-5 du code du travail résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant de son contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.
Attendu que la charge de la preuve de cette faute incombe à l'employeur.
Attendu que la lettre de licenciement en date du 13 novembre 2010, qui fixe les limites du litige, contient des reproches concernant cinq dossiers qu'il y a lieu d'examiner successivement.
dossier THEBAULT
Attendu que l'employeur reproche à Mme Y... d'avoir fait à son insu une remise totale des émoluments et honoraires pour un acte de donation de parts sociales qu'elle a établi et régularisé avec retard ;
Que la matérialité de ce grief est établie par les pièces produites au dossier (facture no13621, liste des remises émoluments fixes clients, lettre de Me Z... du 18 août 2011) ;
Attendu qu'il est constant que Mme Y... était notaire assistant et avait reçu délégation de Me Z... de donner lecture des actes authentiques aux parties et de recueillir leurs signatures sur ces actes, elle se devait de solliciter l'accord du notaire en titre pour accorder une telle remise et surtout que les débours ne peuvent donner lieu à remise ; Que l'attestation du client, aux termes de laquelle Me Z... leur aurait consenti oralement la remise de ses émoluments, est sujette à caution, le client ayant ainsi bénéficié d'un acte authentique sans aucun honoraire ni frais ; Qu'il résulte en revanche des éléments produits que la salariée a entendu accorder une remise au client pour couvrir son erreur et le retard apporté dans la régularisation de l'acte ;
Que ce grief est donc établi et caractérise une faute professionnelle ;

dossier B.../ C...
Attendu que deux actes de vente consentis entre M. B... et les époux C..., rédigés au sein de l'Office de Me Z..., ont été requalifiés en donation selon jugements du TGI de BASSE TERRE en date du 9 septembre 2010 ; Que dans sa motivation, le juge pour établir l'intention libérale de M. B..., s'est appuyé sur une attestation rédigée par Mme Y..., le 16 mai 2009, indiquant clairement l'intention de M. B... de gratifier les époux C... ; Que Me Z... a toujours contesté avoir été informé de la délivrance de ladite attestation qui allait à l'encontre des intérêts de l'Office et décrédibilisé les actes authentiques établis en son sein ; Que l'avocat des époux C... a attesté du contraire mais son attestation est sujette à caution d'autant qu'il s'avère qu'il était également l'avocat personnel de Mme Y... ;
Que l'employeur justifie avoir pris connaissance de ladite attestation en suite de la correspondance de l'avocat et des jugements susvisés, soit début octobre et dès lors, le fait fautif de la salariée ne tombe pas sous le coup de la prescription prévue en matière disciplinaire à l'article L. 1332-4 du code du travail ;
Que ce grief est donc établi et caractérise une faute professionnelle ;
dossier de vente Consorts E.../ SARL OKILO
Attendu que Me Z... reproche à Mme Y..., d'avoir à son insu dépassé les règles déontologiques envers un autre notaire, prenant parti délibérément pour un client, en le traitant de « racketteur » ; Que les termes insultants adressés par Mme Y... à Maître K... François, notaire à Megève, en date du 3 mai 2010, ont donné lieu à la réponse de ce dernier en date du 5 mai 2010, relevant l'incrimination pénale de tels propos (outrage, menaces et actes d'intimidation contre les personnes exerçant des fonctions publiques et dénonciation calomnieuse) ;
Que bien qu'informée par son employeur de l'interdiction pour un notaire en titre de porter plainte contre un autre notaire en titre, la salariée a proposé à un client un modèle de courrier à adresser à la chambre des notaires (attestation L...) ;
Que les termes des correspondances échangées entre la salariée et Me K... n'ont été connus de Me Z... que le 5 octobre 2010, Me Z... ayant présenté ses excuses à Me K... le 7 octobre suivant ; Qu'en conséquence, le fait fautif de la salariée ne tombe pas sous le coup de la prescription prévue en matière disciplinaire à l'article L. 1332-4 du code du travail ;

Que dès lors, Mme Y... a commis une faute professionnelle en agissant à l'encontre de la réputation de l'Office Notarial ;
dossier F...
Attendu que l'employeur reproche à Mme Y... d'avoir agi en vue d'une vente immobilière à un prix modique, sur instructions du potentiel acheteur, sans avoir requis le consentement du propriétaire du bien (Mme F... âgée de 98 ans) ;
Que la salariée ne peut valablement soutenir qu'il ne s'agissait que d'un projet alors qu'elle avait tenté de purger le droit de préemption de la collectivité sur simple déclaration, sans compromis de vente signé par les parties ;
Que ce grief est donc établi et caractérise une faute professionnelle ;
dossier M...
Que l'employeur reproche à sa salariée d'avoir accepté de procéder à une vente de parcelle dite constructible sans avoir la certitude que ce terrain serait constructible ;
Que l'acte authentique n'a pas été signé mais la salariée aurait pu engager la responsabilité de l'Office, au final ladite parcelle n'ayant pas fait partie du plan d'urbanisme et donc n'étant pas constructible ;
Que ces faits, matériellement établis, représentent une violation de la réglementation de la profession et des instructions de l'employeur, outre que ceux-ci ont été commis à son insu ;
Que cependant, la mise en cause de la responsabilité de Me Z... n'ayant été que potentielle et non avérée, il y a lieu de dire et juger que les fautes commises par Mme Y... ne revêtaient pas une importance telle qu'ils rendaient impossible le maintien de la salariée dans l'Office durant la période de préavis ;
Qu'en outre, en neuf années d'ancienneté, Mme Y... n'a pas eu de remontrance sur son travail et l'employeur avait même prévu un projet d'association avec elle en 2008 ;
Que dès lors, la faute disciplinaire de Mme Y..., constituée en l'espèce, ne revêt pas les caractéristiques de la faute grave, privative des indemnités de rupture, dans la mesure où elle n'imposait pas le départ immédiat de la salariée de l'Office ;
Qu'il convient donc, en confirmation du jugement déféré, et de dire et juger qu'était fondé sur une cause réelle et sérieuse mais non sur une faute grave, le licenciement prononcé par lettre du 13 novembre 2010.
Que Mme Y... sera déboutée en conséquence de ses demandes liées à un licenciement sans cause réelle et sérieuse et abusif.
Qu'en l'absence de faute grave et sur les indemnités de rupture dues à Mme Y..., le jugement a parfaitement tenu compte des données de l'espèce, observation étant d'ailleurs faite que l'intimé ne formule dans ses conclusions aucune critique sur le quantum à ces titres.
Que cependant, en l'absence de faute grave, la mise à pied à titre conservatoire ne se justifiait pas et dès lors, Mme Y... est fondée à percevoir le salaire indûment retenu durant ladite période, soit la somme de 6. 959, 65 ¿ ;
Sur la régularité de la procédure
Attendu que Mme Y... invoque l'irrégularité de la procédure de licenciement, en faisant valoir que les termes mêmes de la lettre de convocation à l'entretien préalable démontrent que l'employeur avait déjà pris sa décision de la licencier, qu'en outre, ladite lettre ne contenait pas les mentions requises par l'article R. 1232-1 du code du travail.
Que dans sa lettre de convocation à entretien préalable, l'employeur a indiqué : « Au vu de ces différentes constatations et des conséquences extrêmement graves qui pourraient ou auraient pu résulter de vos agissements ci-dessus analysés, je ne vois aucune autre alternative que d'envisager votre licenciement pour faute grave ».
Que selon l'article susvisé, la lettre de convocation prévue à l'article L. 1232-2 indique l'objet de l'entretien entre le salarié et l'employeur ; elle précise la date, l'heure et le lieu de cet entretien, elle rappelle que le salarié peut se faire assister pour cet entretien par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise ou en l'absence d'institutions représentatives dans l'entreprise, par un conseiller extérieur ;
Que la convocation adressée à Mme Y... mentionnait sans équivoque qu'un licenciement était envisagé (mais non décidé), qu'il s'agissait d'un licenciement disciplinaire pour faute grave justifiant la mise à pied à titre conservatoire prononcée parallèlement ;
Que le fait que l'employeur ait précisé d'ores et déjà aux termes de ladite convocation les griefs reprochés à la salariée était de nature à permettre à celle-ci de préparer l'entretien à venir pour s'en expliquer et qu'un dialogue s'instaure entre les parties ;
Que pour ce motif, la procédure ne saurait être viciée ;
Que la salariée reproche également à son employeur d'avoir indiqué dans ladite lettre de convocation qu'elle avait la possibilité de se faire assister à l'entretien préalable par toute personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise, soit par un conseiller extérieur, alors qu'il existe dans l'Office notarial des déléguées du personnel.
Que Mme Y... ajoute que l'employeur savait parfaitement que lesdites déléguées (Mmes G... et I...) seraient absentes le jour fixé pour l'entretien préalable au vu des courriers qu'il leur avait adressés les 13 et 14 octobre 2010, ces dernières étant en formation durant toute la semaine ;
Attendu que l'Office notarial comptant des représentants du personnel, en l'occurrence des déléguées du personnel (Mmes G... et I...), la lettre de convocation ne pouvait offrir le choix à Mme Y... de se faire assister par un conseiller extérieur, option qui n'existait pas et qui ne pouvait être rajoutée par l'employeur pour compenser l'absence ce jour-là des déléguées du personnel, ce que Me Z... ne pouvait ignorer au vu du courrier sus-évoqué ;
Qu'il y a eu irrégularité de procédure et Mme Y... en a subi nécessairement un préjudice, même si elle n'a pas souhaité se rendre audit entretien préalable, lequel préjudice doit être indemnisé par l'attribution d'une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire ;
Qu'il convient de condamner l'Office Notarial Alain Z... devenu la SCP Z...- D... à payer à Mme Y... une somme de 5. 000 ¿, sur le fondement de l'article L. 1235-2 du code du travail.

Sur la discrimination salariale
Attendu qu'en vertu de l'article L 1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut faire notamment l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, en matière de rémunération, de formation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle.. en raison de son origine, de son appartenance, vraie ou supposée à une race ¿
Que par application de la règle « à travail égal, salaire égal » dont le respect est soumis au contrôle du juge, l'employeur doit assurer l'égalité de rémunérations entre tous les salariés placés dans une situation identique ;
Attendu qu'il appartient au salarié qui se prétend lésé par une mesure discriminatoire de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de caractériser une atteinte au principe d'égalité de traitement et il incombe à l'employeur qui conteste le caractère discriminatoire d'établir que la disparité de situation constatée est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination et tenant à la différence de travail fourni.
Que Mme Y... invoque une discrimination salariale sexiste et se prévaut, pour ce faire, de l'exercice de fonctions en tous points comparables à celles qu'a eues M. Michel D..., notaire assistant comme elle et à l'inverse d'une disparité de rémunération entre ce dernier et elle-même, qu'elle estime non justifiée par des éléments objectifs.
Qu'il est de jurisprudence établie que si le principe d'égalité de rémunération s'applique aux salariés qui sont placés dans une situation comparable, une disparité de traitement peut être cependant justifiée par des raisons objectives et pertinentes, matériellement vérifiables, étrangères à toute discrimination prohibée.
Que selon l'article L. 3221-4 du code du travail, sont considérés comme ayant une valeur égale, les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparables de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse.
Qu'il convient dès lors de contrôler d'ores et déjà l'identité des situations.
Que M. Michel D... est entré à l'Office Notarial de Me Z... le 1er juillet 2008 en qualité de notaire assistant, classification cadre, coefficient 270 ;
Que pour sa part, à cette date, Mme Y... était classée rédacteur d'actes, cadre C2, coefficient 270 ;
Qu'ayant le même coefficient, Mme Y... et M. D... percevaient le même salaire de base minima conventionnel de 3. 283, 20 ¿ mais si Mme Y... percevait un salaire complémentaire de 2. 423, 86 ¿, celui de M. D... était de 3. 050, 11 ¿ ;
Que selon l'employeur, cette différence au niveau du salaire complémentaire s'explique par les diplômes et l'expérience de M. D..., lequel avait 28 ans d'ancienneté en tant que clerc principal dans deux grosses études, contre 6 années de pratique pour Mme Y... au sein de l'Office ;
Qu'en outre, M. D... ayant travaillé au sein de la principale étude concurrente sur l'île de ST BARTHELEMY, avait un potentiel de travail connu et apportait un relationnel important susceptible de développer le chiffre d'affaires sur le bureau annexe de l'Office ; Qu'en outre, il était en cours d'association avec Me Z... et avait des responsabilités et attributions plus importantes que Mme Y... ;
Que selon les documents produits par l'employeur (lettre de Me Z... du 7 septembre 2011), M. D... a réalisé sur les années 2008 et 2009 65 % du chiffres d'affaires de ST BARTHELEMY pour 35 % pour Mme Y... et en 2010, 78 % pour 24 % ;
Qu'il en résulte qu'il existait des raisons objectives pouvant justifier une différence de traitement entre les deux salariés et dès lors, la demande de rappel de salaires suite à discrimination de Mme Y... sera rejetée ;
sur l ¿ intéressement
Attendu que Mme Y... soutient que M. D... aurait bénéficié, dès son engagement, d'un intéressement de 4, 5 % sur le chiffre d'affaires de ST BARTHEMEY jusqu'au 683. 000 ¿ et de 15 % pour le surplus et réclame également un intéressement sur les mêmes bases, sur le fondement d'un protocole d'accord signé le 19 décembre 2008 entre les parties, en qualité de future associée ;
Que cependant, l'accord du 19 décembre 2008 prévoyait un intéressement financier pour Mme Y..., dès la nomination de Me GAEL en tant que notaire associé de Me Z... sur BASSE TERRE et qui devait être déterminé d'un commun accord entre les parties ; Que de même, Mme Y... devait être nommée en qualité de notaire salariée puis associée dans le nouvel Office notarial créé à ST BARTHELEMY entre Me Z... et Me D..., avec un intéressement financier majoré en conséquence ;
Que cependant, lesdites conditions dudit accord ne se sont jamais réalisées et aucune négociation sur un intéressement financier au profit de Mme Y... n'a été négocié et conclu entre les parties ;
Qu'à l'inverse, Me Z... et Me D... ont conclu en mars 2008 un projet d'association qui a effectivement eu lieu puisque l'Office notarial est devenu en 2012 la SCP Z...- D... et que dans ce cadre, Me D... a reçu un intéressement partiel sur le chiffre d'affaires de ST BARTHELEMY qu'il a développé de façon importante à partir de 2009 jusqu'à sa nomination en qualité de notaire associé ;
Que dès lors, la demande de rappel d'intéressement formulée par Mme Y... n'est pas fondée et ce d'autant qu'elle calcule celui-ci sur le chiffre d'affaires global de l'Office annexe de ST BARTHELEMY, alors qu'il a été dit qu'elle ne concourait à celui-ci qu'à hauteur de 35 % ;
Que c'est à juste titre que le jugement a rejeté ces chefs de demandes et il y a lieu à confirmation en ce sens ;

sur l'indemnité de repas
Attendu que Mme Y... demande la confirmation du jugement en ce qu'il a dit qu'elle avait droit à une indemnité de repas et lui a alloué à ce titre une somme de 1. 997, 50 ¿ ;
Que la demande de la salariée à ce titre était fondée sur l'article 25 de la convention collective nationale du notariat, lequel énonce : «.. Un local doit être aménagé et agencé pour que le personnel puisse y prendre ses repas, dans les cas et conditions prévus par les règlements en vigueur, sauf remise aux salariés de titres-restaurants ou accès à un restaurant d'entreprise ».
Que l'employeur rétorque que sur le bureau annexe de ST BARTHELEMY, aucun des 4 salariés présents ne souhaitait prendre ses repas sur leur lieu de travail, préférant rentrer chez eux et qu'il n'avait donc pas l'obligation de mettre un emplacement à leur disposition ni de leur payer des tickets restaurants ;
Que cependant, il reconnait qu'il consentait des tickets restaurant à son personnel du bureau de BASSE TERRE ;
Que dès lors, compte tenu des dispositions conventionnelles susvisées, l'employeur se devait de prendre l'une ou l'autre de ces mesures, ce dont il ne justifie pas et sur le principe, la demande de Mme Y... est fondée ;
Que le juge ne pouvant statuer ultra petita, le quantum sera limité à celui de la condamnation du jugement à ce titre, laquelle sera confirmée ;
Sur les demandes annexes
Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Mme Y... la totalité des frais non compris dans les dépens qu'elle a dû exposer pour ladite instance. Qu'il convient de lui allouer la somme de 1. 500 ¿ en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Que l'intimée supportera les entiers dépens et sera déboutée de sa propre demande à ce titre.

PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Ecarte des débats les pièces suivantes : la convocation de Mme A..., clerc rédacteur d'actes, à une visite médicale programmée le 7 avril 2011, le projet de mémoire en défense, établi par Maître Philippe J..., au profit de Me Z... en 2009 ; Confirme le jugement déféré en ce qu'il a dit et jugé que le licenciement de Mme Marie-Laure Y... repose sur une cause réelle et sérieuse, mais non sur une faute grave et a condamné l'Office Notarial Alain Z..., devenu la SCP Z...- D... à lui payer les sommes de 19. 272, 90 ¿ au titre de l'indemnité de préavis, 11. 765, 19 ¿ au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement et1. 997, 50 ¿ au titre de l'indemnité de repas ;

Réformant pour le surplus,
Condamne l'Office Notarial Alain Z... devenu la SCP Z...- D... à payer à Mme Marie-Laure Y... les sommes suivantes :-6. 959, 65 ¿ au titre du salaire retenu durant la mise à pied à titre conservatoire,-5. 000 ¿ au titre de l'irrégularité de procédure, sur le fondement de l'article L. 1235-2 du code du travail.-1. 500 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Rejette toute autre demande.
Condamne l'Office Notarial Alain Z... devenu la SCP Z...- D... aux entiers dépens.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14/00566
Date de la décision : 06/07/2015
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2015-07-06;14.00566 ?
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