VF-FG
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 31 DU DEUX FEVRIER DEUX MILLE QUINZE
AFFAIRE No : 13/ 01549
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 29 janvier 2013- Section Industrie.
APPELANTE
SAS PETROLEUM TECHNICS Rue de l'Industrie BP 2109- ZI de Jarry 97193 JARRY CEDEX Représentée par Maître CESAR de la SELARL LACLUSE-CESAR (Toque 2), avocat au barreau de la GUADELOUPE
INTIMÉE
Mademoiselle Céline X...... 97122 BAIE-MAHAULT Comparante en personne Assistée de Monsieur Tony Y...(Délégué syndical ouvrier)
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 décembre 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, et Madame Françoise Gaudin, conseiller,
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, président, Madame Marie-Josée Bolnet, conseiller, Madame Françoise Gaudin, conseiller.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 26 janvier 2015, date à laquelle le prononcé de l'arrêt a été prorogé au 2 février 2015.
GREFFIER Lors des débats : Madame Valérie Francillette, greffier.
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Madame Valérie Francillette, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Mlle Céline X...a été engagée par la société SAS PETROLEUM TECHNICS CIE, aux termes d'un contrat de travail à durée indéterminée du 24 février 2005, en qualité de responsable qualité/ métrologie, moyennant un salaire mensuel brut de 1. 830 ¿ pour 151, 67 heures.
Après convocation à entretien préalable, fixé au 28 juin 2010, Mlle X...a été licenciée pour cause réelle et sérieuse, par courrier recommandé du 16 juillet 2010.
Mlle X..., contestant le bien-fondé de son licenciement, le 28 octobre 2010 a saisi le conseil des prud'hommes de POINTE A PITRE d'une demande en paiement de la somme de 23. 019, 75 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 14. 914, 50 ¿ à titre de dommages et intérêts pour préjudice matériel, 1. 198, 27 ¿ à titre de complément de préavis et celle de 1. 500 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement de départage en date du 27 novembre 2012, le conseil des prud'hommes de POINTE A PITRE a dit que le licenciement de Mlle X...est dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamné la société SAS PETROLEUM TECHNICS CIE à payer, avec exécution provisoire, à Mlle Céline X...la somme de 16. 000 ¿ à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et celle de 150 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, rejetant le surplus de ses demandes.
Le 7 février 2013, la société SAS PETROLEUM TECHNICS CIE a régulièrement formé appel de cette décision.
Elle demande la réformation du jugement déféré, de dire et juger que le licenciement prononcé à l'encontre de Mlle X...repose sur une cause réelle et sérieuse et de la débouter de sa demande tendant à l'octroi d'une indemnité pour licenciement abusif, outre sa condamnation au paiement de la somme de 2. 000 ¿ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile. Subsidiairement, la société appelante demande la limitation de l'indemnisation à la somme de 14. 914, 50 ¿ représentant six mois de salaire.
Mlle X...sollicite pour sa part la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions.
MOTIFS
Sur le bien-fondé du licenciement
Attendu que la juridiction prud'homale, saisie d'un litige relatif aux motifs d'un licenciement, doit apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur au vu des éléments fournis par les parties, étant précisé que les limites du litige sont fixées par la lettre de licenciement.
Attendu qu'en l'espèce, ladite lettre en date du 16 juillet 2010 est ainsi libellée :
« La mésentente caractérisant nos relations professionnelles s'est cristallisée. Elle s'est traduite par un véritable refus de votre part de communiquer et de rendre compte de l'exécution de vos tâches, par votre rudesse à l'endroit de la clientèle (certains clients s'en sont plaints à mon égard) et un refus délibéré d'accomplir entièrement les obligations découlant de votre fonction. Vous refusez de communiquer, de telle sorte que j'ai été constamment contraint de rechercher par moi-même certaines informations que vous étiez la seule à détenir, compte tenu de votre poste de travail, et ce notamment dans l'organisation des missions extérieures. Or, vous n'êtes pas sans savoir que j'effectue pour le compte de la société de fréquents déplacements et suis aux opérations techniques et commerciales, de sorte que l'information et la communication sont primordiales à la bonne marche du service.
Ainsi, dans le début du mois de juin 2010, vous aviez pour tâche d'organiser une mission à Marie-Galante et de vous assurer de l'acheminement de nos containers sur l'île. Vous avez volontairement passé sous silence la prétendue difficulté qui était la vôtre pour organiser cette mission et ne m'en avez informé qu'à mon retour d'un déplacement professionnel. En effet, à ma demande, sachant la date butoir d'acheminement proche et votre refus habituel de rendre compte de l'accomplissement de vos tâches, je me suis rapproché de vous pour m'enquérir de l'évolution de la mission. Vous m'avez alors informé de ce que notre container ne pouvait être chargé, faute de place sur le bateau. J'ai été contraint d'intervenir personnellement en prenant l'attache du transporteur. J'ai donc dû, in extremis, en vos lieu et place, piloter l'entière mission. Vous vous êtes délibérément abstenue de me rendre compte de l'organisation de cette mission qui, si je n'avais pas par moi-même recherché l'information, aurait sans aucun doute avorté et aurait entraîné une perte financière.
En outre, étant chargée de la gestion du courrier entrant et sortant, vous avez reçu un courrier de la plus haute importance, adressé par la COFRAC. Vous saviez l'importance dudit courrier pour la bonne marche du service et vous êtes cependant volontairement abstenue de m'informer de son arrivée.
Cette mésentente affecte l'organisation de l'ensemble des services. En effet, vous n'avez jamais assuré le suivi des missions effectuées par les techniciens lors de déplacements extérieurs dans le cadre d'opérations métrologiques. Or, vous avez en charge l'organisation de ces missions, en termes humains et matériels. Ainsi, vous avez organisé dans le courant du mois de juin 2010 une mission à SAINT BARTHELEMY. Interrogée sur le déroulement de cette mission, vous avez été incapable de m'en informer. Ce refus de rendre compte et d'assurer le suivi des missions nuisent au bon fonctionnement de nos services, puisqu'ils nous privent de la possibilité d'anticiper et de prévenir ia survenance de difficultés et nous contraignent à réagir au pied levé en cas de problème.
Pour finir, ce jour, vous avez délibérément et ouvertement refusé d'exécuter une mission découlant pourtant de vos fonctions (Responsable Technique EMLAE suivant certification LNE 5665). En effet, je vous ai sollicité afin d'effectuer, ponctuellement, une opération réglementaire sur le véhicule citerne d'un client. Je me suis proposé d'assurer le volet technique de l'opération en manipulant les appareillages, de sorte que vous puissiez vous livrer en toute quiétude et impartialité à votre jugement réglementaire. Contre toute attente, et en présence de deux salariés de l'entreprise, vous n'avez pas répondu aux engagements qui sont les vôtres vis à vis de votre contrat de travail, vous avez bafoué mon autorité en refusant expressément d'exécuter cette mission. Bien plus grave et immédiatement après votre refus illégitime, vous avez quitté votre poste de travail, abandonnant le standard, sans m'en prévenir ni me fournir le moindre justificatif. Cette position représente un écart grave vis-à-vis de votre contrat de travail.
Cet état de fait traduit notamment une véritable mésentente entre nous sur l'exécution de vos tâches. Elle constitue une mésentente, un défaut grave (votre position de ce jour), qui nuit au bon fonctionnement de l'entreprise.
Les explications recueillies auprès de vous lors de l'entretien du 28 juin 2010 ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation à ce sujet.
En conséquence, votre maintien dans l'entreprise est rendu impossible ».
Que l'employeur invoque une mésentente entre la salariée et sa direction, nuisant au bon fonctionnement de l'entreprise.
Que ce motif matériellement vérifiable correspond à l'énoncé du motif exigé par la loi.
Que la mésentente alléguée doit cependant résulter de faits objectifs imputables à la salariée. Qu'en l'espèce, l'employeur n'a jamais fait de reproches à Mlle X...sur la qualité de son travail et s'il donne des exemples précis dans ladite lettre, ne fournit aucune pièce corroborant la réalité de ceux-ci.
Que la salariée pour sa part a immédiatement contesté un à un les griefs invoqués, à savoir celui afférent à la mission à Marie-Galante, de même que le dossier COFRAC, celui de la mission à ST Barthélémy et de même, a justifié son refus d'exécuter une opération réglementaire concernant le véhicule citerne d'un client le 16 juillet 2010, jour de la lettre de licenciement.
Qu'en effet, il résulte d'un courriel du chef de projet certification (Mme A...) que Mlle X...n'avait pas la qualification nécessaire pour réaliser les VPRIM après réparation, n'ayant pas suivi le cursus de formation prévu par la procédure de qualité y afférente.
Que si l'employeur invoque des plaintes de clients de la société, aucune d'elles n'est produite à son dossier.
Qu'en revanche, il résulte des pièces du dossier que la salariée était enceinte et que l'employeur lui avait déjà proposé une rupture conventionnelle qu'elle avait refusée.
Qu'en conséquence, la réalité et le sérieux du motif invoqué ne sont pas établis et il y a lieu à confirmation du jugement sur le principe en ce qu'il a dit et jugé le licenciement de Mlle X...dénué de cause réelle et sérieuse.
Qu'il est constant que le salaire brut moyen brut de la salariée était d'une somme de 2. 485, 75 ¿, que l'entreprise employait moins de onze salariés et que Mlle X..., alors âgée de 35 ans, avait cinq ans d'ancienneté, ce dont il résulte que celle-ci a droit à des dommages et intérêts en réparation de son préjudice subi en application de l'article l. 1235-5 du code du travail.
Que compte tenu du fait que Mlle X...ne justifie pas de sa situation postérieurement à la rupture, il y a lieu de fixer à la somme de 14. 914, 50 ¿ le montant des dommages et intérêts réparant l'intégralité du préjudice subi par M. X..., en ce compris son préjudice matériel consécutif à la rupture.
Que le jugement déféré sera réformé de ce chef.
Qu'il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, compte tenu de la situation respective des parties.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a dit et jugé le licenciement de Mlle X...Céline dénué de cause réelle et sérieuse.
Réformant pour le surplus et statuant à nouveau,
Condamne la société SAS PETROLEUM TECHNICS CIE à payer à Mlle X...Céline la somme de 14. 914, 50 ¿ à titre de dommages et intérêts en réparation de son entier préjudice pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sur le fondement de l'article l. 1235-5 du code du travail.
Rejette toute autre demande.
Condamne la salariée aux dépens d'appel.
Le greffier, Le président,