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02/02/2015 | FRANCE | N°13/01465

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 02 février 2015, 13/01465


VF-FG

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 30 DU DEUX FEVRIER DEUX MILLE QUINZE

AFFAIRE No : 13/ 01465
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 29 août 2013- Section Commerce.
APPELANTE
LA POSTE DIRECTION DE LA GUADELOUPE Rue Victor Hugues 97109 BASSE-TERRE CEDEX Représentée par Maître André LETIN (Toque 60) substitué par Maître BOUYSSOU, avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉE

Madame Thania X...épouse Y...... 97111 MORNE-A-L'EAU Représentée par Maître Jérôme NIBE

RON de la SCP MORTON et ASSOCIES (Toque 104), avocat au barreau de la GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR ...

VF-FG

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 30 DU DEUX FEVRIER DEUX MILLE QUINZE

AFFAIRE No : 13/ 01465
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 29 août 2013- Section Commerce.
APPELANTE
LA POSTE DIRECTION DE LA GUADELOUPE Rue Victor Hugues 97109 BASSE-TERRE CEDEX Représentée par Maître André LETIN (Toque 60) substitué par Maître BOUYSSOU, avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉE

Madame Thania X...épouse Y...... 97111 MORNE-A-L'EAU Représentée par Maître Jérôme NIBERON de la SCP MORTON et ASSOCIES (Toque 104), avocat au barreau de la GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 décembre 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, et Madame Françoise Gaudin, conseiller,
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, président, Madame Marie-Josée Bolnet, conseiller, Madame Françoise Gaudin, conseiller.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 26 janvier 2015, date à laquelle le prononcé de l'arrêt a été prorogé au 2 février 2015.
GREFFIER Lors des débats : Madame Valérie Francillette, greffier.
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Madame Valérie Francillette, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Madame Thania X...épouse Y...a été embauchée par LA POSTE selon contrat de travail à durée déterminée du 15 mai au 30 août 2001, conclu au motif de l'accroissement temporaire d'activité en qualité d'agent des modules de type A.
20 contrats à durée déterminée se sont succédés à compter du 3 septembre 2001 jusqu'au 1er octobre 2004, conclus en remplacement de salariés absents ou pour accroissement d'activité, toujours au même poste et aux mêmes fonctions. A l'échéance du dernier contrat soit le 1er octobre 2004, LA POSTE a mis fin à la relation de travail.

Le 29 mai 2006, Mme Y...a saisi le conseil des prud'hommes de BASSE-TERRE d'une demande de requalification de ses contrats à durée déterminée en un contrat de travail à durée indéterminée et aux fins de faire analyser la rupture en un licenciement abusif, sollicitant sa réintégration au sein de LA POSTE et à défaut l'indemnisation de son préjudice.

Par jugement en date du 29 août 2013, le conseil des prud'hommes de BASSE-TERRE a :

- dit et jugé que le licenciement de Mme X...épouse Y...Thania est sans cause réelle et sérieuse,- requalifié les 21 contrats à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée,- condamné LA POSTE à payer à Mme X...épouse Y...les sommes suivantes :

. 21. 760, 41 ¿ au titre de l'article L. 1245-2 du code du travail,. 12. 434, 52 ¿ à titre de dommages et intérêt pour rupture abusive,. 1. 813, 78 ¿ au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,. 2. 072, 42 ¿ au titre de l'indemnité de préavis,. 207, 24 ¿ à titre de congés payés sur préavis,. 12. 434, 52 ¿ au titre de rupture brutale, discriminatoire et vexatoire,. 1. 500 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.- ordonné la remise des documents sociaux sous astreinte et l'exécution provisoire.

LA POSTE a régulièrement formé appel de ladite décision le 15 octobre 2013.
Aux termes de ses conclusions en date du 27 janvier 2014, régulièrement communiquées à l'intimée, et développées oralement auxquelles il est expressément fait référence, LA POSTE demande l'infirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions, de dire que la rupture du contrat se situe au 21 octobre 2004, de prendre acte de sa proposition de règlement de la somme de 1. 036, 21 ¿ à titre d'indemnité de requalification, de débouter Mme Y...de toutes ses demandes, en l'état de sa faute lourde, et de condamner Mme Y...au paiement de la somme de 4. 000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient que :
LA POSTE ne s'oppose pas au principe de la requalification de la relation de travail mais demande à la cour de ramener l'indemnité due en vertu de l'article L. 1245-2 du code du travail à la somme de 1. 036, 21 ¿, correspondant à un mois de salaire. la salariée porte l'entière responsabilité de la rupture du contrat de travail, ayant détourné une correspondance interne de LA POSTE et ayant été condamnée pénalement du chef d'atteinte au secret des correspondances. la faute grave de Mme Y...est bien établie et la rupture en date du 21 octobre 2004 est justifiée de ce chef. la salariée n'a subi aucune discrimination au sens de l'article L122-45 du code du travail.

Aux termes de conclusions en date du 23 mai 2014, régulièrement notifiées à LA POSTE, et développées oralement auxquelles il est expressément fait référence, Mme Y...demande à la cour de :

. confirmer le jugement déféré, en ce qu'il a débouté LA POSTE de toutes ses demandes,
. condamner LA POSTE à payer à Mme Y...les sommes suivantes :
. 21. 760, 41 ¿ au titre de l'article L. 1245-2 du code du travail,. 12. 434, 52 ¿ à titre de dommages et intérêt pour rupture abusive,. 1. 813, 78 ¿ au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,. 2. 072, 42 ¿ au titre de l'indemnité de préavis,. 207, 42 ¿ à titre de congés payés sur préavis,. 12. 434, 52 ¿ au titre de rupture brutale, discriminatoire et vexatoire,. 3. 500 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.. ordonner la remise des documents sociaux sous astreinte de 100 ¿ par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir.

Elle soutient en substance que :

son poste était lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise.
les règles relatives au renouvellement des contrats à durée déterminée ou à leur durée maximale ont été violées en l'espèce,

elle peut prétendre à autant d'indemnités de requalification que de contrats à durée déterminée,

la rupture de son contrat, intervenue sans lettre motivée de rupture, est abusive et lui ouvre droit au paiement d'indemnités de rupture et à des dommages et intérêts,
la brutalité de la rupture et l'acharnement judiciaire de LA POSTE à son encontre lui ont causé un préjudice distinct.
MOTIFS
Sur la qualification du contrat de travail
Attendu que Mme Y...a été employée par LA POSTE, selon 21 contrats successifs à durée déterminée à compter du 15 mai 2001 jusqu'au 1er octobre 2004, notamment pour « accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise » et « remplacement de salarié absent « dont elle demande la requalification pour non-respect des dispositions des articles L 1242-1 et suivants du code du travail.
Attendu qu'il résulte de ces dispositions que le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise.
Qu'en l'espèce, la salariée a travaillé durant quatre ans au même poste, dans les mêmes fonctions selon des contrats à durée déterminée, sans délai de carence entre certains contrats et au-delà de la durée de 18 mois.
Que LA POSTE ne conteste pas le principe de la requalification de la relation contractuelle en contrat de travail à durée indéterminée.
Que dès lors, c'est à juste titre que le premier juge a fait droit à ladite demande, sur le fondement de l'article L. 1242-1 du même code, de requalification de la relation contractuelle en un contrat à durée indéterminée liant Mme Y...à LA POSTE.
Qu'il y a lieu à requalification de la relation contractuelle de travail en contrat à durée indéterminée dès l'origine, soit à compter du 15 mai 2001, en confirmation du jugement déféré.
Que compte tenu de ladite requalification, la salariée est en droit de prétendre à une indemnité spécifique de ce chef, conformément à l'article L. 1245-2 du code du travail, laquelle ne peut être inférieure à un mois de salaire. Que nonobstant la succession de contrats à durée déterminée conclue avec Mme Y..., il ne peut lui être accordé qu'une seule indemnité et non une indemnité par contrat requalifié, comme elle le réclame et comme le lui a alloué à tort le jugement entrepris.

Qu'il y a lieu à réformation de ce chef et de ramener ladite indemnité à la somme de 1. 500 ¿, le dernier salaire de Mme Y...s'élevant à la somme de 1. 036, 21 ¿.
Sur la rupture du contrat de travail

Que compte tenu de la requalification de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée, la rupture de ce contrat était dès lors régie par les règles du licenciement.

Que l'employeur a écrit le 8 novembre 2004 à Mme Y...en ces termes : « En l'état actuel des effectifs de la Poste de la Guadeloupe, il ne m'est pas possible de donner une suite favorable à votre requête et de vous proposer un contrat à durée indéterminée ».

Que cette lettre faisant office de lettre de rupture ne répond pas aux exigences légales et ne contient aucun motif de licenciement matériellement vérifiable. Que l'employeur ne peut en conséquence, en cours de procédure, invoquer une faute grave de Mme Y..., de nature à justifier la rupture à ses torts.

Que dès lors, il y a lieu de constater que la rupture du contrat à l'initiative de l'employeur, sans convocation à un entretien préalable, tel que prévu par les articles L. 1232-2 et suivants du code du travail, et sans lettre de licenciement motivée, s'analyse en un licenciement irrégulier en la forme et dénué de cause réelle et sérieuse.
Sur les demandes pécuniaires de Mme Y...
Que compte tenu de son ancienneté (3ans) et de l'effectif de l'entreprise occupant habituellement plus de onze salariés, Mme Y...Thania est fondée à réclamer l'indemnité prévue par l'article L. 1235-3 du code du travail en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, laquelle sera fixée en l'espèce la somme de 8. 000 ¿.
Que par ailleurs, la rupture brutale sans préavis alors qu'elle était exclue du régime de l'assurance chômage caractérisent des circonstances vexatoires de nature à faire doit à la demande de la salariée à hauteur de la somme de 1. 000 ¿, réformant le jugement entrepris de ce chef. Que la salariée ne peut en revanche pas reprocher à LA POSTE d'avoir engagé à son encontre une procédure pénale puisque celle-ci a abouti à sa condamnation pénale pour violation du secret des correspondances.

Attendu que Mme Y..., ayant plus de deux ans d'ancienneté, a droit, en application des dispositions de l'article l. 1234-1 du code du travail, à une indemnité compensatrice de préavis équivalente à 2 mois de salaire. Qu'il lui a été justement alloué la somme réclamée à ce titre, soit celle de 2. 072, 42 ¿, outre son incidence congés payés de 207, 24 ¿.

Que selon les dispositions de l'article 70 de la convention collective commune à LA POSTE à France TELECOM, régulièrement produite aux débats, Mme Y...a droit, ayant plus de deux ans d'ancienneté, à la moitié du salaire mensuel brut pour chacune des douze premières années, soit en l'occurrence à la somme de 1. 813, 78 ¿.

Que le jugement sera confirmé en ce qu'il a ordonné la remise des documents légaux de rupture sous astreinte.

Attendu qu'enfin il parait inéquitable de laisser à la charge de Mme Y...les frais qu'elle a exposés tant en première instance qu'en cause d'appel, et il convient de condamner la société appelante à payer à l'intimée une somme de 2. 000 ¿ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens de première instance et d'appel ;
Que l'intimée, succombant, supportera les entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort,
Confirme le jugement en ce qu'il a dit et jugé le licenciement de Mme X...épouse Y...Thania sans cause réelle et sérieuse, requalifié les 21 contrats à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, condamné LA POSTE à payer à Mme X...épouse Y...les sommes suivantes :
. 1. 813, 78 ¿ au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,. 2. 072, 42 ¿ au titre de l'indemnité de préavis,. 207, 24 ¿ à titre de congés payés sur préavis, et ordonné la remise des documents sociaux.

Réformant pour le surplus et statuant à nouveau,

Condamne LA POSTE à payer à Mme X...épouse Y...les sommes suivantes :
1. 500 ¿ à titre d'indemnité de requalification, 8. 000 ¿ à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1. 000 ¿ à titre de dommages et intérêts pour brusque rupture, 2. 000 ¿ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Ordonne la remise des documents sociaux dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et passé ce délai, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.

Rejette toute autre demande.
Condamne LA POSTE aux entiers dépens.
Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/01465
Date de la décision : 02/02/2015
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2015-02-02;13.01465 ?
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