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26/01/2015 | FRANCE | N°13/01530

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 26 janvier 2015, 13/01530


VF-BR

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE ARRET No 16 DU VINGT SIX JANVIER DEUX MILLE QUINZE

AFFAIRE No : 13/ 01530
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 22 octobre 2013- Section Encadrement.
APPELANTE
Madame GITA X...... 97115 SAINTE-ROSE Représentée par Maître Sully LACLUSE de la SELARL LACLUSE-CESAR (Toque 2), avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉE
SA BANQUE FRANCAISE ET COMMERCIALE GUADELOUPE ZAC Moudong Sud 97122 BAIE-MAHAULT Représentée par Maître Pascale BERTE, avocat a

u barreau de FORT-DE-FRANCE substituée par Maître Philippe LOUIS, avocat au barreau de la Guade...

VF-BR

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE ARRET No 16 DU VINGT SIX JANVIER DEUX MILLE QUINZE

AFFAIRE No : 13/ 01530
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 22 octobre 2013- Section Encadrement.
APPELANTE
Madame GITA X...... 97115 SAINTE-ROSE Représentée par Maître Sully LACLUSE de la SELARL LACLUSE-CESAR (Toque 2), avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉE
SA BANQUE FRANCAISE ET COMMERCIALE GUADELOUPE ZAC Moudong Sud 97122 BAIE-MAHAULT Représentée par Maître Pascale BERTE, avocat au barreau de FORT-DE-FRANCE substituée par Maître Philippe LOUIS, avocat au barreau de la Guadeloupe.

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 décembre 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre et Madame Françoise Gaudin, conseiller,
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, président, Madame Marie-Josée Bolnet, conseiller, Madame Françoise Gaudin, conseiller,

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 26 janvier 2015.

GREFFIER Lors des débats : Madame Valérie Francillette, greffier.

ARRET :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Madame Marie-Luce Kouamé, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

******

Faits et procédure :

Mme Gita X...a été recrutée par la Banque Française Commerciale par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er janvier 1980.
Mme X... a par la suite été élue membre du comité d'établissement, statut qu'elle a cumulé avec celui de délégué du personnel suppléant.
Le 23 mars 2012 elle saisissait le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre devant lequel elle devait former des demandes aux fins d'obtenir :- son reclassement professionnel en classe IV, niveau G, avec un salaire annuel de 35 612 ¿ sur 14, 5 mois,- le paiement d'une prime de caisse avec effet rétroactif au 1er janvier 1999,- l'annulation d'une sanction disciplinaire en date du 10 octobre 2011,- le paiement de six mois de salaire mensuel brut au titre de la discrimination salariale,- le paiement de six mois de salaire mensuel brut au titre de la discrimination d'évolution de carrière,- le paiement de 12 mois de salaire mensuel brut au titre du harcèlement moral,-25 ¿ en remboursement de frais de mission,-5000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 22 octobre 2013, la juridiction prud'homale condamnait la banque à payer à Mme X... la prime de caisse avec effet rétroactif au 23 mars 2007, ainsi que la somme de 1000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile. La requérante était déboutée du surplus de ses demandes.
Par déclaration du 24 octobre 2013, Mme X... interjetait appel de cette décision.
****
Par conclusions notifiées à la partie adverse le 3 octobre 2014, lesquelles ont été exposée lors de l'audience des débats, Mme X... sollicite l'infirmation du jugement déféré sauf en ce qu'il a condamné la banque au paiement de la prime de caisse.
Elle réitère l'ensemble des demandes qu'elle avait formulées devant les premiers juges.
Elle reproche aux premiers juges d'avoir réduit leur analyse à une simple situation de discrimination syndicale, alors que ses demandes reposent sur la dénonciation de faits fautifs imputables à l'employeur, à savoir :- la violation du principe d'égalité professionnelle caractérisée par une situation de discrimination salariale et une situation de discrimination d'évolution carrière puisant leur origine dans son statut de représentante et d'élue du personnel qui ne saurait se limiter à l'aspect syndical,- la violation de l'obligation d'adaptation à l'emploi et de sécurisation de son poste de travail,

- un acte caractérisé de harcèlement moral au travail.
**** Par conclusions notifiées à la partie adverse le 13 août 2014, et exposées à l'audience des débats, la Banque Française et Commerciale sollicite le rejet des demandes de Mme X... et paiement par celle-ci de la somme de 2500 ¿ en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La banque fait valoir qu'aucun élément n'est susceptible de caractériser une discrimination syndicale, et qu'il n'est pas rapporté la preuve d'une différence de traitement entre Mme X... et les autres salariés de la banque placés dans une situation comparable. Elle fait état du ralentissement de carrière de Mme X... depuis 1989 en raison de son insuffisance et de son comportement, ne permettant pas de lui attribuer un poste à responsabilité. Elle soutient que de nombreux incidents expliquent de manière objective que le passage à un coefficient plus élevé entraînant des responsabilités supérieures, ne pouvait être envisageable.
Elle indique que Mme X... n'exerce pas et n'a jamais exercé les fonctions correspondant au niveau de reclassement qu'elle revendique.
La banque entend voir constater l'absence de violation de son obligation d'adaptation à l'emploi et de sécurisation du poste de travail. Elle conteste les faits de harcèlement moral qui lui sont reprochés.
****

Motifs de la décision :

Sur la demande d'indemnisation au titre de la discrimination salariale :
Mme X... explique que la violation du principe d'égalité professionnelle est notamment caractérisée par une situation de discrimination salariale qui puise son origine dans son statut de représentante et d'élue du personnel.
Elle fait état de son statut d'élue au sein du comité d'établissement et de déléguée du personnel suppléant.
Il résulte des dispositions de l'article L. 1132-1 du code du travail, qu'aucune personne ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l'article 1er de la loi 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, en particulier en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, en raison notamment de ses activités syndicales.
Par ailleurs l'article L. 1134-1 du même code dispose que lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance du texte suscité le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, et qu'au vu de ces éléments il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, le juge formant sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
Mme X... soutient qu'après 32 ans d'ancienneté elle n'a bénéficié que d'une seule augmentation de salaire de 405, 69 euros en valeur absolue, et ce malgré l'accumulation de demandes d'augmentations formulées tant par elle-même que par son avocat.
Elle entend voir comparer l'évolution de son salaire mensuel de base avec celle d'autres collègues de travail de sa promotion ou recrutés après elle, faisant référence à l'évolution salariale et statutaire des collègues suivants :- concernant des salariés recrutés un peu avant ou en même temps qu'elle :- Mme A...Marie-Madeleine, devenue gestionnaire des comptes du personnel (cadre),- Mme B...Maryvonne, devenue directrice d'agence (cadre),- concernant des salariés recrutés après elle :- Mme Z...Gervaise : cadre-conseiller professionnel,- Mme D...Raymonde : cadre responsable d'agence,- Mme E...Nadia : cadre-directrice d'agence,- Mme C...Marguerite : cadre-conseiller professionnel,- M. F...Edouard : directeur commercial (cadre),- Mme G...Sonia : Responsable espace entreprise (cadre),- Mme H...Marie-Laure : responsable d'agence de Grand-Bourg,- Mme I...Marie-Line : directrice d'agence,- M. J...Philippe : directeur de groupe,- Mme K...Catherine : Conseiller prof. Haut de gamme.

Mme X... reproche à l'employeur de ne fournir aucun élément de comparaison relatif à la rémunération actuelle des personnes cibles, afin de permettre d'apprécier l'inégalité de traitement.
La Cour constate que la comparaison de la rémunération mensuelle de Mme X..., avec celles des personnes qu'elle cite, n'est pas de nature à mettre en évidence une discrimination salariale puisque ces dernières occupent des niveaux d'emplois supérieurs, et qu'ainsi la différence de rémunération est justifiée objectivement par la différence de catégories d'emplois.
Il ressort de ces constations qu'en réalité le grief invoqué par Mme X... relèverait d'une discrimination dans l'évolution de sa carrière, ce qui rejoint son deuxième moyen invoqué à l'appui de sa demande d'indemnisation pour discrimination d'évolution de carrière.

Sur la demande d'indemnisation au titre de la discrimination d'évolution de carrière :

Mme X... entend comparer le niveau d'emploi qu'elle a obtenu après 32 ans d'ancienneté avec celui de collègues qui ont accédé à la catégorie d'emploi de cadre.
Il convient de relever que l'accession à l'emploi de cadre ne relève pas d'une progression automatique de carrière, mais dépend essentiellement des compétences et du comportement du salarié, c'est-à-dire de son aptitude à assurer des fonctions d'autorité, d'étude, de conseil ou de contrôle par délégation d'un cadre de niveau plus élevé, ou à assurer la gestion d'un établissement distinct du siège de l'entreprise dans lequel sont employées

plusieurs personnes, comme cela était défini de façon générale dans la convention collective du travail du personnel des banques de la Guadeloupe du 11 mai 1977, cette définition des fonctions de cadre étant reprise de façon plus détaillée à l'article 39-2 de la convention collective du personnel des banques de la Guadeloupe, de Saint-Martin et de Saint Barthélémy du 19 décembre 2007, mais retenant les mêmes critères essentiels.

Ainsi le fait que des collègues recrutés à la même époque que Mme X..., ou postérieurement, aient accédé à des fonctions de cadres, n'implique pas en lui-même, la preuve d'une discrimination d'évolution de carrière.
Mme X... qui reconnaît dans ses conclusions que l'analyse faite par la banque de sa situation sur la période 1980 à 2006, " met en exergue une évolution régulière et plutôt soutenue ", fait valoir que celle-ci " s'est nettement estompée depuis le 19 octobre 2006 ", date à laquelle elle a accédé à des fonctions représentatives dans l'entreprise.
Mme X... qui est née le 17 septembre 1954 était, lors de son recrutement par la banque, titulaire d'un certificat de formation professionnelle de stenodactylographe-correspondancière, délivré en 1978 par un centre de formation pour adulte, et du diplôme du baccalauréat, mention passable, délivré en 1979.
Selon l'attestation établie par l'employeur 11 mai 2009 et les bulletins de salaires produits au débat, Mme X... a occupé les fonctions suivantes :-1980-1983 : attachée de direction,-1983-1985 : agent au service du personnel,-1985-1992 : agent au service juridique et contentieux,-1993-1995 : agent au service contrôle rapprochement,-1996-1998 : en congé individuel de formation,-1998-2010 : chargée d'accueil,-2011-2012 : chargée d'appui commercial.

Il résulte des pièces versées au débat, en particulier des notifications faites par l'employeur et des bulletins de salaires qu'il a établis, que le niveau de rémunération de Mme X... a évolué, soit en nombre de points, soit en montant brut mensuel de la façon suivante :
date coefficient de rémunérationmontant brut mensuel 01/ 01/ 1980 306 01/ 09/ 1980 367 01/ 01/ 1982 387 01/ 01/ 1983 405 01/ 01/ 1985 468 01/ 06/ 1986 511 01/ 07/ 1987 530 01/ 03/ 1989 561 01/ 01/ 1999 658 01/ 01/ 2001 662 12979 fr. (1978 ¿) 01/ 01/ 2002 681 2036, 03 ¿ 01/ 01/ 2003 685 2049, 94 ¿ 01/ 01/ 2004 1821, 29 ¿ 01/ 01/ 2005 698 2087, 62 ¿ 01/ 01/ 2006 735 2199, 15 ¿ 01/ 01/ 2007 760 228913 ¿ 01/ 01/ 2008 2422, 90 ¿ 01/ 01/ 2009 2351, 63 ¿ 01/ 01/ 2010 2 362, 39 ¿ 01/ 11/ 2011 2371, 79 ¿ 01/ 03/ 2012 2381, 23 ¿ Certes le rythme de progression du niveau de son salaire de base a diminué au cours des 6 dernières années, mais il convient d'observer que le rythme de l'inflation a considérablement diminué au cours de ces dernières années, et si de 2006 à 2012 la progression du salaire de base n'a atteint que 8, 27 %, la progression de son salaire de base au cours des 6 années précédentes (2001-2006) n'avait atteint que 11, 02 %, encore faut-il tenir du compte du fait qu'à partir de 2008, il a été ajouté au salaire de base diverses primes telles que prime de transport, primes au titre des NAO, prime salariale, gratification exceptionnelle (500 euros attribués selon courrier du 30 avril 2007, quelques mois après l'élection de Mme X... au comité d'entreprise).

Ces constatations montrent que l'évolution de la rémunération de Mme X..., n'a pas sensiblement été modifiée à la suite de son élection le 19 octobre 2006 au comité d'entreprise.
Par ailleurs la comparaison de l'évolution de carrière des personnels ayant quasiment la même ancienneté que Mme X..., et l'évolution des niveaux respectifs de leurs rémunérations, montre qu'une bonne partie de ces personnels ont atteint en décembre 2012, le même niveau que celui de l'intimée (pièces 36 à 48 de l'appelante).
Ainsi sur dix salariés recrutés entre 1978 et 1982, à des niveaux correspondant aux coefficients les plus bas à l'époque (entre 270 et 345, Mme X... ayant été recrutée en 1980 au niveau 306), six d'entre eux avaient le même niveau E de classification déterminant le montant de la rémunération, et une qualification équivalente (chargé d'appui commercial ou pour deux d'entre eux, conseiller commercial).
Il ressort de ces constatations que l'évolution de carrière et du niveau de rémunération de Mme X... est analogue à celle de collègues placés dans la même situation. La discrimination invoquée n'est donc caractérisée.
Certes certains de ses collègues ont pu atteindre la catégorie " cadre ", mais cette promotion, comme il a été expliqué ci-avant dépend des qualités personnelles du salarié, ainsi que de son comportement.
La cour relève qu'à plusieurs reprises (lettres recommandées avec avis de réception des 9 juillet 2010, 24 août 2010, 18 août 2011), l'employeur a reproché à Mme X... des absences non justifiées, ou une demande présentée la veille de l'absence et non validée (LR du 23 juillet 2010).
Par ailleurs Mme X..., ayant une estime affirmée de ses aptitudes professionnelles, a fait intervenir dès mars 2004 son avocat, Maître Sully LACLUSE, pour obtenir une revalorisation de sa classification et de sa rémunération (courriers de Me LACLUSE des 4 mars 2004, 10 janvier 2005, 24 février 2005, 19 avril 2005, 2 juillet 2008, 28 juin 2011).
Il ressort de ces éléments qu'en raison du manque d'assiduité et du non respect de la justification indispensable et préalable de ses absences, mais aussi du conflit permanent que Mme X... entretient avec la direction en faisant intervenir son avocat personnel au sujet de ses objectifs de promotions, ne permet pas de lui accorder les nécessaires délégations d'autorité, de responsabilité et d'encadrement qu'implique le statut de cadre, ni même un niveau supérieur dans la catégorie de technicien des métiers de la banque.

Sur la demande d'indemnisation au titre de la violation de l'obligation de non adaptation à l'emploi :

A l'appui de ses demandes, Mme X... invoque une demande non satisfaite par l'employeur, tendant à lui permettre de suivre une formation à l'Université Antilles-Guyane en vue d'une " Lycence Professionnelle " (sic), au cours de l'année 2004-2005, pour un coût de 2630 euros. S'il ne ressort pas des pièces versées au débat que l'employeur ait donné suite à cette sollicitation, ce dernier a cependant, selon les pièces versées au débat, informé la salariée des possibilités de formation qui s'offraient à elle, en particulier dans le cadre du DIF (courriels du 23 juillet 2007, du 5 mai 2008) et a satisfait au moins à certaines de ses demandes, notamment en souscrivant à des conventions avec l'institut de formation I. F. P. S. pour la réalisation :- d'une action de validation des acquis de l'expérience (VAE) au profit de Mme X..., pour une durée totale de 24 heures qui s'est étendue du 29 mars au 15 novembre 2010, pour le diplôme de BTS Banque,- d'une formation de remise à niveau en anglais d'une durée totale de 40 heures sur la période du 12 avril 2010 au 28 juin 2010.

Il est également justifié du suivi d'un stage de perfectionnement en comptabilité, effectué du 2 avril au 2 août 1985, auprès de la Chambre de commerce et d'industrie de Pointe à Pitre.
Il ne ressort pas des pièces versées par Mme X... que l'employeur se soit opposé de façon réitérée à des demandes de formation.
Auparavant Mme X... avait bénéficié d'un congé individuel de formation de 1996 à 1998.

Il ressort de ces constatations que les éléments fournis au débat, ne caractérisent pas une violation de l'obligation d'assurer l'adaptation de la salariée à son poste de travail, telle que prévue par l'article L. 6321-1 du code du travail.

Accessoirement Mme X... invoque également une violation de l'obligation de sécurité en citant l'article L. 4121-1 du code du travail, en reprochant à l'employeur l'installation de lampes caméras sans information préalable du personnel au niveau de l'agence d'affectation, Mme X... expliquant dans une lettre de contestation en date du 5 janvier 2008 que depuis une année des lampes caméras sont installées dans le hall de l'agence de Grand-Camp, que s'agissant de mesure de sécurité, elle ne voyait pas d'inconvénient pour cette installation, mais qu'elle a constaté que les lampes installées à l'arrière guichet balayaient les faits et gestes des personnes y travaillant.
Il résulte de ce courrier que l'installation des lampes caméras a été effectuée au vu et au su de tous, et dans un but de sécurité pour l'agence, et qu'ainsi cette installation ne saurait être considérée comme une violation par l'employeur de son obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité des travailleurs.
Au titre de la violation par l'employeur de son obligation de sécurité, Mme X... invoque le refus de mettre à sa disposition, malgré les recommandations de la médecine du travail d'un fauteuil adapté au niveau de son poste de travail.
La cour constate qu'à la suite du seul courriel de réclamation en date du 12 décembre 2008 adressé à ce sujet par Mme X... à son employeur, celui-ci, dans une réponse en date du 17 décembre 2008, a fait savoir à Mme X... qu'un siège ergonomique réglable en hauteur avec contact permanent, devait être commandé et livré sous quinzaine.
Compte tenu de la prise en compte de la demande de Mme X..., 5 jours seulement après sa formulation, une violation de l'obligation de sécurité telle qu'invoquée par la salariée, n'est pas caractérisée. Au demeurant Mme X... n'a versé au débat aucun certificat médical justifiant sa demande.
De même le blocage accidentel du poste de travail de Mme X... pendant près d'une matinée, ne saurait être considéré comme une atteinte aux conditions de sécurité.
Sur la demande d'indemnisation au titre du harcèlement moral :
Pour caractériser le harcèlement moral dont elle se dit victime, Mme X... invoque une sanction disciplinaire, en l'occurrence un blâme notifié par lettre recommandée du 10 octobre 2011, en faisant valoir que cette sanction est non motivée et injustifiée.
Dans la lettre de notification de cette sanction, l'employeur invoque le " non respect des règles et procédures en vigueur relatives au traitement des remises de chèques de la clientèle, ainsi que l'exposition de la banque à des risques d'image, financier, commercial et juridique ".

La cour constate qu'il n'est allégué aucun fait précis permettant de connaître les caractéristiques de la faute ou du comportement de la salariée qui constituerait une violation des " règles et procédures " en matière traitement de remise de chèques. Le grief sur laquelle s'appuie la sanction disciplinaire de blâme est d'autant plus flou et imprécis, que les tentatives d'explications fournies à posteriori par l'employeur, dans ses conclusions, ne correspondent pas véritablement à la violation de règles ou de procédures, mais portent sur un retard dans le traitement des remises de chèques au cours des journées des 24 au 27 août 2011, ce qui apparaît sans rapport avec la violation de règles et de procédures.

La notification du blâme n'ayant pas permis à la salariée de connaître les faits reprochés, et de lui permettre d''apporter toutes explications utiles, voire formuler toute contestation éventuelle, affecte d'irrégularité la sanction ainsi prononcée.
La sanction de blâme doit donc être annulée, dans la mesure où elle n'est pas justifiée par des faits correspondant aux griefs qu'elle entend sanctionner.
Par ailleurs, à l'appui de sa demande d'indemnisation pour harcèlement moral, Mme X..., invoque le refus par l'employeur de lui octroyer une prime de caisse.
Elle invoque à ce titre un accord d'entreprise en date du 17 juillet 1990, désignant les bénéficiaires d'une telle prime, de la façon suivante : " La prime est payée uniquement aux caissiers. Toutefois le terme de Caissier est assimilé à celui de manipulateur d'argent au sens large, qu'il soit ou non en contact avec la clientèle. En conséquence, la prime est servie aussi bien aux guichetiers payeurs qu'aux manipulateurs exerçant en arrière guichet, ou en salle de coffres. Elle est également réglée aux Responsable de caveau. "

Pour s'opposer au paiement de cette prime en faveur de Mme X..., la banque fait valoir que celle-ci n'est pas caissière, mais doit procéder au chargement du guichet automatique de la banque " GAB ", ce qui ne suppose pas la manipulation d'argent, mais consiste à positionner dans le " GAB " les billets pré-conditionnés remis par la société de transport, la salariée n'étant pas contrainte de compter les différentes coupures placées dans l'appareil.
Toutefois Mme X... produit au débat plusieurs dizaines de fiches journalières (figurant en pièce 32 de l'intimée), dites " ARRETE GAB ", chacune datée, numérotée, portant les initiales de l'agent qui l'a établie, en l'occurrence Mme X..., et sa signature, et mentionnant à chaque fois le solde précédent, un décompte de billets retirés, et un nouveau solde, l'instruction suivante étant portée sur lesdites fiches : " Tout montant ou différence non régularisé dans les 2 jours suivant l'arrêté doit être signalé au siège... ".
Il est en outre versé au débat des fiches dites " procès-verbal de contrôle de caisse GAB ", établies par un contrôleur, en présence à chaque fois de Mme X..., co-signées par celle-ci et le contrôleur, et comportant le dénombrement de billets de banque avec la somme correspondante, et faisant apparaître à chaque fois une encaisse et un solde comptable, avec éventuellement une différence de caisse.
Il ressort de ces documents que le rôle de Mme X... ne se borne pas à disposer des liasses dans le GAB, mais à contrôler les mouvements de billets dans le cadre du fonctionnement de l'appareil, et à établir des soldes, lesquels sont soumis à contrôle, la responsabilité de Mme X... pouvant être ainsi mise en cause.

Mme X... qui est ainsi chargée de décomptes de billets de banque, à la suite de retraits, est fondée à se prétendre " manipulateur d'argent " au sens de l'accord d'entreprise sus-citée, et à solliciter le bénéfice de la prime correspondante.

Il doit donc être fait application des dispositions de l'accord d'entreprise du 17 juillet 1990, qui prévoit que la prime de caisse est équivalente à un mois de salaire brut sur la base du salaire servi au mois de décembre, avec un abattement directement proportionnel aux erreurs de caisse constatées au moment de son règlement.
Aucune erreur de caisse n'ayant été relevée à l'encontre de Mme X..., et compte tenu de la prescription quinquennale soulevée par la banque, relevant que la demande en paiement remontait au 23 mars 2012, date de la saisine du conseil de prud'hommes, le montant des primes de caisse dues à la salariée depuis décembre 2007 jusqu'à décembre 2011, s'élève à la somme de 11 696, 39 euros (Cf. pièce 27 de l'intimée), à charge pour l'employeur de servir à Mme X... ses primes de caisse pour les années suivantes.
Selon l'article L 1152-1 du code du travail, le harcèlement se caractérise par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Tant la sanction de blâme irrégulière, que le refus d'octroyer la prime de caisse à Mme X..., même s'ils révèlent des erreurs de la direction de la banque dans son pouvoir de contrôle du travail de l'agent, et dans l'interprétation d'un accord d'entreprise ancien, dont il avait manifestement perdu de vue les conditions d'application qu'il contenait, ne peuvent être considérés comme des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail, s'agissant de litiges ponctuels sur la réglementation à respecter. Au demeurant ni la dignité, ni la santé physique de Mme X... ne se sont trouvées altérées par ces erreurs de l'employeur.
Mme X... attribue l'altération de sa santé, à l'accident du travail dont elle a été victime en tombant de son siège, le 3 octobre 2014, date à partir de laquelle elle a cessé son travail. Cette chute, ni même sa cause ne peuvent être assimilées à des agissements constitutifs de harcèlement moral imputables à l'employeur, même si Mme X... invoque une faute de celui-ci, pour avoir refusé de mettre à sa disposition un fauteuil adapté au niveau de son poste de travail suivant la recommandation de la médecine du travail.
En réalité il résulte des pièces versées au débat et des explications fournies par les parties, que si effectivement Mme X... a sollicité dès le 12 décembre 2008, le remplacement du fauteuil de son poste de travail, il a été passé commande d'un siège ergonomique, réglable en hauteur, avec contact permanent, dès le 17 décembre 2008, et si après livraison dudit fauteuil, Mme X... a estimé que celui-ci, qu'elle aurait elle-même choisi, ne lui convenait pas, une nouvelle commande a dû être passée. Il n'est donc pas établi de carence de l'employeur, ayant une incidence sur l'accident du travail dont Mme X... a été victime.
Mme X... reproche encore à son employeur le non remboursement de frais de missions. Cependant il résulte de la réclamation formée par Mme X... à ce titre par courriel du 2 février 2011 qu'elle aurait adressé à son employeur des justificatifs de remboursement pour des indemnités non perçues pour le dernier CEE en Guyane ainsi que pour ses frais de séjour du 17 novembre 2010, relatifs à son déplacement sur Marie-Galante dans le cadre d'une délégation prévue par le protocole pré-électoral des élections du 28/ 11/ 2010. Or l'intéressée reconnaît d'une part, dans le même courriel, le paiement des indemnités relatives au CEE, et d'autre part verse au débat un ticket de parking daté du 3 juillet 2012, lequel ne peut correspondre à une quelconque mission effectuée en 2010. C'est donc à juste titre que l'employeur a pu refuser la prise en charge du remboursement de ce ticket de parking.
Enfin il ne résulte d'aucune des pièces versées au débat, que l'employeur se soit livré à un quelconque dénigrement de la personne de Mme X..., comme celle-ci le prétend, et même si les services de la banque ont tardé à répondre à la dernière demande d'octroi de prêt personnel présentée par Mme X... le 11 juillet 2014, aucun agissement de nature à constituer des faits de harcèlement moral n'est établi.
Les demandes de Mme X... étant partiellement fondée, il paraît inéquitable de laisser à sa charge les frais irrépétibles qu'elle a exposés. Il lui sera alloué en conséquence la somme de 2500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs,

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il a débouté Mme X... de ses demandes d'annulation de la sanction disciplinaire du 10 octobre 2011, et de paiement de primes de caisse et d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Le réformant sur ces chefs de demandes, et statuant à nouveau,
Ordonne l'annulation de la sanction de blâme notifiée à Mme X... le 10 octobre 2011,
Condamne la Banque Française Commerciale à payer à Mme X... les sommes suivantes :
-11 696, 39 euros de rappel de primes de caisse au titre des années 2007 à 2011, à charge pour la banque de payer le montant des primes relatives aux années suivantes,

-2 500 euros d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que les entiers dépens sont à la charge de la Banque Française Commerciale,

Déboute les parties de toute conclusions plus amples ou contraires,

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/01530
Date de la décision : 26/01/2015
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2015-01-26;13.01530 ?
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