VF-BR
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 11 DU VINGT SIX JANVIER DEUX MILLE QUINZE
AFFAIRE No : 13/ 01123
Décision déférée à la Cour : Jugement de départage du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 18 juin 2013- Section Activités Diverses.
APPELANTE
SARL NATURE EXPERIENCE ...97110 POINTE-A-PITRE Représentée son gérant, Monsieur Gerson X...
INTIMÉE
Madame Christiane Y...... 97190 LE GOSIER Comparante en personne Assistée de Maître Socrate-pierre TACITA (Toque 91), avocat au barreau de la GUADELOUPE (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2014/ 000405 du 29/ 04/ 2014 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASSE-TERRE)
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 décembre 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, et Madame Françoise Gaudin, conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, président, Madame Marie-Josée Bolnet, conseiller, Madame Françoise Gaudin, conseiller,
Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 26 janvier 2015.
GREFFIER Lors des débats : Madame Valérie Francillette, greffier.
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Madame Marie-Luce Kouamé, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
Faits et procédure :
Par contrat de travail à durée indéterminée, conclu dans le cadre des contrats d'accompagnement dans l'emploi, Mlle Y...a été engagée par la Société NATURE EXPERIENCE en qualité de chef de produits.
Par lettre du 2 septembre 2011, Mme Y...a été convoquée à un entretien préalable fixé au 7 septembre 2011.
Par courrier en date du 15 septembre 2011, la salariée a demandé un report de l'entretien préalable.
Mme Y...était licenciée pour faute lourde par courrier daté du 23 septembre 2011, motivé de la façon suivante :
« Suite à l'entretien préalable en date du vendredi 16 septembre, auquel vous n'avez pas daigné vous présenter ni vous excuser dans les délais, nous vous demandons de vous expliquer sur les agissements dont vous avez été l'auteur à savoir : Vous persistez à faire une concurrence déloyale à notre entreprise en proposant vos services en tant qu'indépendante aux divers clients dont les nôtres. De plus, vous vous permettez d'utiliser sans aucune autorisation notre base de données clientèle à vos fins personnelles. Vous avez également porté atteinte à l'intégrité de votre employeur par l'envoi de courriers désobligeants, à la limite de la diffamation. Ces faits constituent une faute lourde. Nous sommes donc contraints de mettre fin à votre contrat de travail, votre attitude rendant impossible la poursuite de votre activité professionnelle au sein de notre entreprise. Par la présente, il vous est donc notifié votre licenciement sans préavis ni indemnité de rupture. »
Le 30 septembre 2011, Mme Y...saisissait le conseil de prud'hommes aux fins de contester son licenciement.
Par jugement du 18 juin 2013, le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre, en formation de départage, jugeait que le licenciement de Mme Y...était dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamnait la Société NATURE EXPERIENCE à payer à cette dernière les sommes suivantes :-4158 ¿ à titre d'indemnité compensatrice de préavis,-1990 ¿ à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,-3000 ¿ à titre d'indemnité pour licenciement abusif. Il était en outre ordonné la remise d'un bulletin de paye tenant compte de l'indemnité de préavis et de l'indemnité de congés payés, d'un certificat de travail et d'une attestation ASSEDIC rectifiée dans le mois de la notification de la présente décision. Mme Y...était déboutée de ses autres demandes.
Par déclaration adressée le 16 juillet 2013, la Société NATURE EXPERIENCE interjetait appel de cette décision qui lui avait été notifiée le 28 juin 2013.
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Par conclusions en date du 6 mars 2014, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, la Société NATURE EXPERIENCE sollicite le rejet de l'ensemble des demandes de Mme Y..., faisant valoir que le licenciement de celle-ci était pourvu d'une cause réelle et sérieuse eu égard aux nouveaux éléments accablants apportés à son encontre.
À l'appui de ses prétentions, la Société NATURE EXPERIENCE explique que Mme Y...a contacté en secret, entre autres, le centre de formation IFACOM, afin qu'elle intervienne pour des missions de formation sur l'île de Saint-Martin, dans le cadre d'une formation à l'hôtel Radisson.
La Société NATURE EXPERIENCE accuse aussi Mme Y...d'avoir établi une fausse déclaration d'accident du travail, et d'avoir falsifié la déclaration d'un témoin en usurpant sa signature, et ce pour conforter sa déclaration d'accident dans les locaux de l'entreprise.
Selon la Société NATURE EXPERIENCE, Mme Y...aurait abusé de sa position de tutrice auprès d'un jeune stagiaire pour lui ordonner de subtiliser et recopier la base de données clientèle de l'entreprise et de la lui transmettre à son adresse e-mail personnelle, alors qu'elle était en arrêt maladie.
La Société NATURE EXPERIENCE sollicite le paiement de la somme de 500 ¿ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et de celle de 3000 ¿ à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi, sur le fondement des dispositions des articles 1153, 1135 et 1378 du Code civil.
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Par conclusions signifiées à la partie adverse le 26 août 2014, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, Mme Y...sollicite la confirmation en toutes ses dispositions du jugement entrepris, et réclame en outre paiement de la somme de 2000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
À l'appui de ses demandes Mme Y...fait savoir qu'elle conteste fermement avoir commis les faits qui lui sont reprochés, au demeurant sans preuve.
Elle explique qu'elle s'est trouvée dans la nécessité de poursuivre une activité de formatrice indépendante, compte tenu du versement tardif et irrégulier de ses salaires, à raison de quelques heures par mois pour l'ASFO, bien avant son recrutement par la Société NATURE EXPERIENCE. Elle fait valoir qu'il n'est pas soutenu ni démontré en quoi cette activité de formatrice était concurrente à celle de la Société NATURE EXPERIENCE. Par ailleurs elle relève qu'il n'est pas démontré de détournement de clientèle. Elle relève ne outre qu'il n'a jamais été demandé par lettre simple ou par lettre recommandée de cesser la brève formation qu'elle dispensait occasionnellement.
Elle indique enfin que si l'employeur a cru bon d'exposer dans ses conclusions qu'elle était coupable d'une fausse déclaration d'accident de travail, la lettre de licenciement ne fait aucune mention de ce grief.
Motifs de la décision :
Comme l'a rappelé le premier juge dans sa décision, la lettre de licenciement fixe les limites du litige.
Ainsi il ne peut être pris en considération les faits de faux en écriture et d'usage invoqués par l'employeur pour justifier le licenciement de Mme Y..., puisque ce grief ne figure pas dans la lettre de licenciement.
Par ailleurs il n'est nullement établi que Mme Y..., se soit livrée à une activité de formation concurrençant l'entreprise qui l'employait.
Le seul élément de preuve fournie par la Société NATURE EXPERIENCE consiste en une attestation sur l'honneur de Mlle Véronique A..., de laquelle il résulte que lors des interventions de celle-ci, pour le compte de l'organisme SERVICE-EMPLOI-FORMATION, dans le cadre de la formation du personnel de l'hôtel RADISSON dans l'île de Saint-Martin, de juin à novembre 2011, elle a travaillé avec Mme Y...qui intervenait pour le compte du centre IFACOM, l'hôtel RADISSON ayant fait appel, pour une formation touristique, à plusieurs centres de formation.
Il ne ressort pas de ces éléments que Mme Y...ait assuré une formation entrant en concurrence avec l'activité de la Société NATURE EXPERIENCE, laquelle, selon la documentation qu'elle produit elle-même, est spécialisée dans la découverte de la nature et du patrimoine de la Guadeloupe, proposant animations, loisirs et détente, à travers des activités de découverte écotouristiques de pleine nature, et proposant l'édition de supports pédagogiques, touristiques et de formation.
Si M. Borys B..., stagiaire au sein de la Société NATURE EXPERIENCE, ayant comme tutrice Mme Y..., a indiqué dans son attestation, que cette dernière lui avait ordonné de recopier toute la base de données clientèle de l'entreprise et de la lui transmettre par courriel à son adresse e-mail personnelle durant sa période d'arrêt maladie, il n'est pas démontré qu'il ait été fait usage par Mme Y..., de cette base de données à des fins personnelles et concurrentes à l'activité de la Société NATURE EXPERIENCE.
En ce qui concerne l'atteinte à l'intégrité de l'employeur par l'envoi de courriers désobligeants, qui auraient été à la limite de la diffamation, en l'absence de tels courriers produits au débat, le grief invoqué par l'employeur ne peut être considéré comme justifié.
C'est donc à juste titre que le premier juge a considéré que le licenciement de Mme Y...n'était pas justifié par une cause réelle et sérieuse.
Il a été procédé à une juste estimation du préjudice subi par Mme Y...en lui allouant en première instance la somme de 3000 ¿ d'indemnité pour licenciement abusif, ce montant devant être confirmé.
Par ailleurs comme il a été rappelé dans le jugement entrepris, il résulte des dispositions de l'article 37 de la convention collective régionale du commerce et des services de la Guadeloupe, en date du 25 mai 1982, et de son annexe I, que ces textes ont consacré l'usage selon lequel après un an de présence, le délai de préavis est fixé, dans le ressort du conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre, à trois mois dans le commerce et les services. C'est pourquoi la condamnation de l'employeur au paiement de la somme de 4158 ¿ à titre d'indemnité compensatrice de préavis doit être confirmée.
Le montant de l'indemnité compensatrice de congés payés alloué par le premier juge n'est pas discuté par la société appelante. Ce montant sera donc confirmé.
Mme Y...bénéficiant de l'aide juridictionnelle totale, et son conseil n'ayant pas demandé l'application à son profit des dispositions de l'article 700- 2o du code de procédure civile, il ne sera pas fait application des dispositions dudit article.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme le jugement déféré,
Dit que les entiers dépens sont à la charge de la Société NATURE EXPERIENCE,
Déboute les parties de toutes conclusions plus amples ou contraires,
Le Greffier, Le Président,