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26/05/2014 | FRANCE | N°13/00510

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 26 mai 2014, 13/00510


BR-VF

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE CHAMBRE SOCIALE ARRET No 180 DU VINGT SIX MAI DEUX MILLE QUATORZE AFFAIRE No : 13/ 00510

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 13 avril 2010- Section Encadrement.

APPELANT Monsieur Cyrille X...

... 76220 CUY SAINT FIACRE Représenté par Maître Florence BARRE-AUJOULAT (Toque 1) substituée par Maître BEJJA, avocat au barreau de la Guadeloupe

INTIMÉE CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA GUADELOUPE Petit Pérou 97139 ABYMES Représentée par Maître Sandrine

LOSI de la SCP CAPSTAN AVOCATS substituée par Maître TACHELLA, avocat au barreau de PARIS
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BR-VF

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE CHAMBRE SOCIALE ARRET No 180 DU VINGT SIX MAI DEUX MILLE QUATORZE AFFAIRE No : 13/ 00510

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 13 avril 2010- Section Encadrement.

APPELANT Monsieur Cyrille X...

... 76220 CUY SAINT FIACRE Représenté par Maître Florence BARRE-AUJOULAT (Toque 1) substituée par Maître BEJJA, avocat au barreau de la Guadeloupe

INTIMÉE CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA GUADELOUPE Petit Pérou 97139 ABYMES Représentée par Maître Sandrine LOSI de la SCP CAPSTAN AVOCATS substituée par Maître TACHELLA, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 7 avril 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Bernard ROUSSEAU, président de chambre et Madame Françoise GAUDIN, conseiller,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, Mme Claire Prigent, conseiller, Mme Françoise Gaudin, conseiller,

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 26 mai 2014 GREFFIER Lors des débats : Madame Marie-Luce Kouamé, greffier.

ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard Rousseau, président de chambre, président, et par Madame Valérie Francillette, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
Faits et procédure :
Embauché en qualité de chef comptable par la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Guadeloupe le 5 septembre 1988, M. Cyrille X... a été licencié par lettre du 24 avril 2009, alors qu'il occupait les fonctions de chef du département financier avec le statut de cadre. Il avait saisi auparavant le Conseil de Prud'hommes de Pointe-à-Pitre le 24 janvier 2007 aux fins d'obtenir la condamnation de son employeur au versement d'un rappel de salaire à partir de décembre 2005, de dommages et intérêts à hauteur de 20 000 euros pour résistance abusive et de la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Cette affaire appelée à l'audience de jugement du 11 septembre 2007 avait été mise en délibéré au 11 mars 2008, pour le jugement être rendu en définitive le 9 septembre 2008 après prorogations successives du délibéré, M. X... étant débouté de toutes ces demandes. Le 15 janvier 2008, M. X... saisissait à nouveau le Conseil de Prud'hommes de Pointe-à-Pitre, devant lequel il devait solliciter le paiement de rappel de primes pour les années 2000 à 2005, avantages en nature au titre de l'année 2005, indemnité de logement au titre des années 2006 et 2007, des dommages intérêts pour résistance abusive, un rappel de salaire au titre du mois de février 2009, la liquidation d'une astreinte prononcée par ordonnance du Conseil de Prud'hommes du 8 juin 2009, les salaires de mars, avril mai et juin 2009, ainsi que diverses indemnités liées au licenciement qu'il estimait sans cause réelle et sérieuse. Par jugement du 13 avril 2010, la juridiction prud'homale déboutait M. X... de l'ensemble de ses demandes et le condamnait aux dépens. Sur appel de M. X... en date du 15 avril 2010, la cour de céans, par arrêt du 2 mai 2011, réformait le jugement déféré, et jugeait que le licenciement prononcé à l'encontre de M. X... le 24 avril 2009 étaient sans cause réelle et sérieuse. La Caisse de Crédit Agricole était condamnée à payer à M. X... les sommes suivantes :-9 750, 72 euros au titre du salaire de février 2009,-19 501, 44 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,-1 950 euros au titre de l'indemnité correspondant aux congés payés afférents,-170 634, 10 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,-200 000 euros au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,-4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Il était en outre ordonné à la Caisse de Crédit Agricole de rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées à M. X... à la suite de son licenciement et ce dans la limite de 6 mois d'indemnités de chômage, sur le fondement de l'article L. 1234-5 du code du travail. Les autres demandes étaient rejetées.

Saisie de pourvois par chacune des parties, la Cour de Cassation, dans un arrêt du 13 septembre 2012, cassait et annulait l'arrêt du 2 mai 2011, en ce qu'il rejetait les demandes de M. X... en paiement des sommes de 58 504, 132 euros représentant 6 mois de salaire brut au titre du rappel de primes pour les années 2000 à 2005, d'une somme équivalente au titre des avantages en nature inclus dans le contrat travail au titre de l'année 2005 et de la somme de 9384 euros correspondant au montant de l'indemnité de logement au titre des années 2006 et 2007, ainsi que la demande de condamnation de l'employeur à lui remettre les bulletins de salaire de l'année 2006 sous astreinte de 1000 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir. La Cour de Cassation disait n'y avoir lieu à renvoi sur la recevabilité de ces demandes, disait ses demandes recevables, et renvoyait pour le surplus devant la cour d'appel de Basse-Terre, autrement composée, étant relevé que cette cassation était prononcée au motif que la cour d'appel avait violé les dispositions des articles R. 1452-6 et R. 1452-7 du code du travail, en rejetant lesdites de demandes comme se heurtant au principe de l'unité d'instance. Par déclaration du 28 septembre 2012, M. X... saisissait la cour de céans en qualité de cour de renvoi. Les parties étaient régulièrement convoquées à l'audience du 11 mars 2013, par lettres recommandées dont les avis de réception étaient retournés signés par leurs destinataires. Cependant à cette audience aucune des parties n'ayant comparu, l'affaire faisait l'objet d'une radiation du rôle de la cour le 11 mars 2013. L'affaire devait être réinscrite au rôle le 8 avril 2013.

**** Par conclusions signifiées à la partie adverse le 20 décembre 2012, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, M. X... sollicite la condamnation de la Caisse de Crédit Agricole à lui payer les sommes suivantes :-19 501, 14 euros correspondants au montant de la prime de sujétion au titre des années 2000 et 2001,-97 507, 20 euros représentant 10 mois de salaire brut, à titre de rappel de primes pour les années 2000 à 2009,-3 438 euros représentant le total des avantages en nature non justifiés et déclarés au titre de l'année 2005,-50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive dans le litige lié au paiement de « la prime de 35 heures »,-190 000 euros au titre des dépenses engagées pour assurer sa défense dans le cadre de la procédure pénale qui l'a visé entre 2005 et 2006,-20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et manquement au devoir de loyauté,-1 215, 07 euros représentant les dépens de Me Yvan Z..., huissier de justice, que l'appelant a été obligé de commettre pour obtenir la réalisation du titre exécutoire dont il bénéficiait suite à l'arrêt du 2 mai 2011,-500 000 euros en réparation du préjudice moral,-500 000 euros en réparation de la perte de subsides sur la période de décembre 2005 à janvier 2009,-2 700 000 euros en réparation de la perte de chance de devenir un jour cadre dirigeant d'une structure bancaire,-10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile. À l'appui de ses demandes M. X... invoque une convention, selon laquelle il aurait été instauré une prime annuelle, dite « prime 35H », équivalente à un mois de salaire contre le consentement du plafonnement à 34 jours, des droits à congés annuels, lesquels, par convention du 17 juillet 2000, avaient été auparavant fixés à 59 jours. Se prévalant d'un courrier du 24 mai 2006 du directeur général la Caisse de Crédit Agricole, selon lequel le montant des avantages en nature accordés en 2005 s'élèverait à 8130 euros, M. X... sollicite le paiement de la différence entre ce montant et la somme de 4 692 euros correspondant à l'indemnité logement, les autres avantages en nature qui lui auraient été qui accordés, n'étant pas justifiés. Au soutien de sa demande de remboursement des dépenses engagées pour assurer sa défense durant la procédure pénale qui l'a visé de 2005 à 2010, et obtenir indemnisation des préjudices résultant de cette procédure, à savoir préjudice moral, perte de subsides et perte de chance de devenir un jour cadre dirigeant d'une structure bancaire, M. X... rappelle que sur plainte de la Caisse de Crédit Agricole en date du 6 décembre 2004, il a été poursuivi pour abus de confiance portant sur le détournement d'une somme de 400 000 dollars, qu'il a été placé sous contrôle judiciaire le 23 novembre 2005 et mis en disponibilité sans solde par son employeur à compter du 1er décembre 2005. Il ajoute que le 16 mars 2009, le juge instruction a rendu une décision de non-lieu, confirmée par la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Basse-Terre dans un arrêt du 8 octobre 2009 qui a fait l'objet d'un pourvoi formé par la Caisse de Crédit Agricole, lequel a été rejeté par arrêt du 8 septembre 2010 de la chambre criminelle de la Cour de Cassation, et qu'ainsi il a été injustement dépossédé de son salaire de décembre 2005 jusqu'à la levée de son contrôle judiciaire le 9 février 2009, soit pendant 49 mois. Il indique qu'après deux années de détachement auprès de deux caisses régionales de crédit agricole de la métropole et l'obtention d'évaluation positive, la commission nationale du Crédit Agricole devait l'inscrire sur la liste des cadres dirigeants en 2005, mais qu'il a été décidé d'un sursis à statuer sur son cas, ayant été informé par la Caisse de Crédit Agricole de la Guadeloupe de son implication dans le détournement de fonds.

Il précise qu'âgé de 48 ans à l'époque des faits, il aurait pu finir sa carrière professionnelle à 63 ans avec un salaire moyen sur la période à hauteur de 15 000 euros par mois, et que le comportement fautif de la Caisse de Crédit Agricole lui a fait perdre la chance de bénéficier de ce salaire sur une période de 15 ans. **** Par conclusions notifiées à la partie adverse le 13 septembre 2013, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, la Caisse de Crédit Agricole soulève l'irrecevabilité de la demande de rappel de prime de sujétion pour cause de prescription.

À titre subsidiaire la Caisse de Crédit Agricole conclut au rejet de cette demande de rappel de primes de sujétion pour les années 2000 et 2001, en faisant valoir que M. X... reconnaît qu'il ne peut fonder sa demande au titre de la délibération du bureau du conseil d'administration du 24 octobre 2007, s'agissant d'un aveu judiciaire, et à défaut elle entend voir juger qu'il a été rempli de ses droits au cours de l'année 2001 et de l'année 2002. Sur la demande de rappel de primes pour les années 2000 à 2009, la Caisse de Crédit Agricole soulève également la prescription en se fondant sur l'article L. 3245-1 ancien du code du travail pour la période 2000 à 2003. Pour la période non soumise à la prescription entre 2003 et 2009, elle fait valoir que la demande de M. X... est indéterminée. Elle ajoute que M. X... a été rempli de ses droits au titre des congés payés des exercices 2003 et 2004, et qu'il ne peut se prévaloir d'un rappel de primes pour la période comprise entre novembre 2005 et avril 2009 pour cause de suspension de son contrat de travail, cette période de suspension ne pouvant être assimilée à du temps de travail effectif au sens de la loi ou de la convention collective. À titre subsidiaire, au cas où la cour ne retiendrait pas la fin de non-recevoir tirée de la prescription quinquennale pour la période comprise entre 2000 et 2009, la Caisse de Crédit Agricole entend voir juger que sur la période comprise entre 2000 et 2003 M. X... a été rempli de ses droits en bénéficiant d'un logement de fonction et de billets d'avion. La Caisse de Crédit Agricole conteste avoir opposé une résistance abusive dans le litige lié au paiement de la prime de 35 heures et conclut au rejet de la demande de dommages et intérêts à hauteur de 50 000 euros présentée par M. X.... L'intimée demande qu'il soit jugé qu'elle a fait une juste appréciation de l'avantage en nature de l'année 2005, et qu'ainsi M. X... a été rempli de ses droits, la demande formée à ce titre devant être rejetée. La Caisse de Crédit Agricole conteste la demande de prise en charge des frais de défense pénale de M. X..., et fait valoir que ce dernier ne satisfait pas à ses obligations probatoires telles que prévues par les articles 6 et 9 du code de procédure civile. La Caisse de Crédit Agricole soutient qu'elle n'a fait preuve d'aucune résistance abusive et d'aucun manquement à l'obligation de loyauté et de bonne foi. Elle conclut en conséquence au rejet de la demande de paiement à hauteur de 20 000 euros formée par M. X.... La Caisse de Crédit Agricole fait valoir que la demande de remboursement des frais exposés par M. X... aux fins d'exécution de l'arrêt de la cour d'appel en date du 2 mai 2011 a déjà fait l'objet d'un jugement définitif non frappé d'appel rendu par le juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de Pointe-à-Pitre en date du 15 mai 2012, et conclut en conséquence à l'irrecevabilité de cette demande de remboursement. À titre subsidiaire elle explique qu'elle s'est acquittée des dépens mis à sa charge et qu'en conséquence M. X... doit être débouté de sa demande. La Caisse de Crédit Agricole expose que M. X... avait formulé devant la cour d'appel, avant cassation, une demande d'indemnisation visant à réparer son préjudice moral, la perte de subsides sur la période de décembre 2005 à janvier 2009 et la perte de chance de devenir un jour cadre dirigeant, et qu'il ne peut formuler les mêmes demandes devant la cour d'appel de renvoi au regard des dispositions de l'arrêt de cassation. Elle entend en conséquence voir déclarer irrecevables les demandes en paiement des sommes de 500 000 euros en réparation du préjudice moral, de 500 000 euros en réparation de la perte de subsides sur la période de décembre 2005 à janvier 2009, et de 2 700 000 euros en réparation de la perte de chance de devenir un jour cadre dirigeant d'une structure bancaire. À titre subsidiaire elle fait valoir que M. X... est défaillant dans la démonstration de la réalité et de l'étendue de son préjudice, et qu'il ne satisfait pas à ses obligations procédurales probatoires ; elle conclut en conséquence au rejet de ses demandes. La Caisse de Crédit Agricole réclame paiement de la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. ****

Motifs de la décision :
Dans son arrêt du 13 septembre 2012, la Cour de Cassation a cassé partiellement l'arrêt de la cour de céans en date du 2 mai 2015, au motif que celle-ci a déclaré irrecevables, en raison du principe de l'unicité d'instance, diverses demandes formées par M. X..., en exposant que le conseil de prud'hommes était déjà saisi lorsque le salarié a formulé cette autre série de demandes et qu'il n'avait pas encore prononcé de jugement. Dans la mesure où le deuxième série de demandes a été formée par requête introductive d'instance le 15 janvier 2008, alors que le premier jugement de la juridiction prud'homale était en cours de délibéré depuis le 11 septembre 2007, date de l'audience de jugement comme mentionné dans l'arrêt du 2 mai 2011, la Cour de Cassation admet que le requérant puisse saisir le juge de demandes nouvelles pendant le cours du délibéré, le premier jugement n'ayant été rendu que le 9 septembre 2008 après prorogations successives du délibéré.

Sur la demande de rappel de primes de sujétion à hauteur de 19 501, 14 euros au titre des deux années 2000 et 2001, et à hauteur de 97 507, 20 euros pour les années 2000 à 2009 : A l'appui de sa demande de primes, M. X... invoque deux conventions. La première, effectivement versée aux débats, en date du 17 juillet 2000, signée par le directeur général de la Caisse de Crédit Agricole et par M. X..., stipule que compte tenu des responsabilités professionnelles particulières de l'intéressé, et du fait qu'il dispose d'un degré élevé d'autonomie dans l'organisation de son temps de travail et dans l'initiative de son emploi du temps, il ne saurait être assujetti à des horaires quotidiens, précis et déterminés, et qu'en conséquence la durée de son temps de travail est exprimé en jours sur l'année dans la limite de 202 jour par an, compte tenu d'un droit à congés payés complet. Il est précisé que l'intéressé bénéficie au delà de deux jours hebdomadaires, de 59 jours de congés dans l'année. La seconde convention instaurerait selon M. X... une prime annuelle dite " prime 35 H ", équivalente à un mois de salaire brut, payable en janvier de l'année N + 1, contre le consentement au plafonnement à 34 jours, des droits à congés annuels. Cette convention n'a pas été versée au débat, M. X... expliquant qu'elle n'aurait été établie qu'en un seul exemplaire, lequel a été conservé par la direction en raison de son caractère confidentiel.

Dans ses écritures la Caisse de Crédit Agricole reconnaît l'existence de cette convention visant à réduire les congés payés à 34 jours, mais fait savoir qu'en revanche elle ne confirme nullement le principe du versement de l'équivalent d'un mois de salaire par année civile comme contrepartie à la réduction des jours de congés (page 18, dernier paragraphe des conclusions de la Caisse de Crédit Agricole). Par acte d'huissier en date du 23 juin 2006, M. X... a fait sommation à la Caisse de Crédit Agricole de produire notamment la deuxième convention qu'il soutient avoir signé avec le directeur général, M. Bernard Y.... La cour constate que si la Caisse de Crédit Agricole reconnaît l'existence d'une deuxième convention se rapportant à la réduction des congés payés à 34 jours, elle s'est toujours abstenue de produire celle-ci. La cour constate également que la Caisse de Crédit Agricole est défaillante à justifier que la convention portant sur la réduction des congés payés, dont elle reconnaît l'existence, ne comporte pas de contrepartie.

En conséquence la cour en déduit qu'effectivement la deuxième convention comportait la contrepartie pécuniaire invoquée par M. X.... Au demeurant il apparaît non crédible que le salarié ait conclu avec sa direction, une convention portant réduction de ses congés payés, sans aucune contrepartie, la Caisse de Crédit Agricole ne faisant état, pour sa part, d'aucune contrepartie, quelle qu'elle soit, à cette réduction. M. X... a donc droit au paiement de la prime invoquée à hauteur d'un mois de salaire par année, dans la limite de la prescription et pour la seule période qui correspond à un travail effectif ou équivalent. Selon les dispositions l'article L. 143-5 ancien du code du travail, toujours en vigueur lors de la saisine de la juridiction prud'homale, le 15 janvier 2008, l'action en paiement de la rémunération salariale se prescrivait par cinq ans. La prime sollicitée ayant pour objet de compenser la réduction du nombre de jours de congés payés annuels, ladite prime était payable, selon M. X... en janvier de l'année N + 1, c'est-à-dire au 31 janvier de l'année N + 1, la Caisse de Crédit Agricole ne rapportant pas la preuve contraire, par la production de la convention en cause. L'échéance des primes réclamées pour les années 2000 et 2001 devant, dans ces conditions, être fixée au 31 janvier des années 2001 et 2002, la demande correspondant à ces rappels était prescrite au 15 janvier 2008, date de la demande introductive d'instance devant le conseil des prud'hommes, ces échéances étant antérieures de plus de 5 ans au premier acte interruptif de prescription. Par contre la demande de paiement de la prime réclamée au titre de l'année 2002, étant échue au 31 janvier 2003, n'est pas prescrite, ni les demandes de paiement des primes des années suivantes.

Toutefois pour les années suivantes, il y a lieu de relever que l'exécution du contrat travail a été suspendue en raison du placement sous contrôle judiciaire de M. X....
A la suite de l'ordonnance de placement sous contrôle judiciaire en date du 23 novembre 2005, faisant interdiction à M. X... de se livrer à son activité professionnelle au sein de la banque, la Caisse de Crédit Agricole, par lettre du 6 décembre 2005, faisait savoir au salarié qu'en raison de cette mesure, il était placé en disponibilité sans solde à compter du 1er décembre 2005. Si par arrêt en date du 6 mars 2008, la Chambre de l'Instruction de la Cour d'Appel de Basse-Terre, statuant sur l'appel interjeté à l'encontre de la décision de refus du juge d'instruction de modifier le contrôle judiciaire de M. X..., faisait droit à la demande de celui-ci et décidait qu'il ne serait plus soumis à l'interdiction d'exercer la profession d'employé de banque, ce n'est que le 17 mars 2009, que le salarié s'est présenté sur son lieu de travail pour reprendre ses fonctions, comme en atteste le procès-verbal de constat établi à cette date par huissier de justice, étant observé que l'ordonnance de non-lieu dont a bénéficié M. X..., pour cause de prescription de l'action publique, n'est intervenu que le 16 mars 2009, ladite ordonnance ayant été confirmée par la Chambre de l'Instruction par arrêt du 8 octobre 2009. M. X... ayant fait l'objet d'un licenciement pour faute grave par décision du 24 avril 2009, il est fondé à réclamer paiement de la prime annuelle sollicitée pour les années 2002, 2003 et 2004, pour l'année 2005 calculée prorata temporis sur 11 mois et pour l'année 2009, calculée prorata temporis du 17 mars à juin 2009, compte tenu du préavis. Même si M. X... a pu bénéficier de deux primes, dite " prime divers " pour l'une, d'un montant de 4 798, 16 euros et appelée " prime de bilan " pour la seconde, à hauteur de 7 413, 75 euros pour l'année 2002, aucun des éléments versés au débat ne permet, contrairement à ce que soutient la Caisse de Crédit Agricole, de constater que le salarié a perçu au titre de l'année 2002 une prime équivalente à un mois de salaire, correspondant à la prime conventionnelle pour réduction de la durée des congés payés. Sur la base d'une prime annuelle de 9 750, 72 euros, dont le montant n'est pas contesté, il est dû à M. X... au titre du rappel des primes sollicitées, la somme de 41 034, 26 euros. La Caisse de Crédit Agricole s'étant refusée de produire la deuxième convention sus-citée, dont elle a reconnu pourtant l'existence, afin notamment de résister aux demandes de rappel de primes de M. X..., la résistance abusive de l'employeur est caractérisée. M. X... sera indemnisé à ce titre par l'octroi d'une somme de 2 000 euros.

Sur la demande en paiement de la somme de 3 438 euros au titre des avantages en nature de l'année 2005 : Après a voir notifié par courrier du 4 mai 2006, à M. X... que sa rémunération brute imposable pour l'année 2005 s'élevait à 104 913, 43 euros, dont 15 586, 95 euros sous forme d'avantages en nature, l'employeur, par lettre du 24 mai 2006 faisait savoir au salarié que le montant de ces avantages en nature ne s'élevait qu'à 8 130 euros, correspondant à l'indemnité logement et aux billets d'avion pour sa famille. M. X... admet que l'indemnité logement s'élève à 4 692 euros pour l'année 2005. Pour la Caisse de Crédit Agricole, la différence entre cette somme avec le montant 8 130 euros est composée de :-533, 02 euros d'assurance habitation,-1 318, 40 euros au titre du billet d'avion aller-retour Paris-Pointe à Pitre, émis le 18 juillet 2005,-1 586, 97 euros au titre des billets d'avion aller-retour Paris-Pointe à Pitre pour les enfants du salarié, en date du 18 juillet 2005. M. X... ne conteste pas ne pas avoir supporté la charge de son assurance habitation pour l'année 2005, le décompte produit par la Caisse de Crédit Agricole faisant apparaître que cette charge a été réglée en février 2005 à hauteur de 533, 02 euros. Par ailleurs il est démontré par la production d'un courriel en date du 12 juillet 2005 émanant de M. X..., que celui-ci a lui-même procédé à la réservation de billets d'avion pour des voyages effectués par lui-même les 26 juillet et 17 août 2005, et par les membres de sa familles les 26 juillet et 25 septembre 2005. Les bons de prise en charge par la Caisse de Crédit Agricole des billets d'avion correspondant à ces vols, versés au débat, mentionnent les tarifs appliqués, et le règlement par M. X..., par un chèque de 517 euros, d'un supplément qu'il a entendu prendre à sa charge. Ainsi le montant des avantages en nature déclarés par l'employeur, est suffisamment justifié. M. X... sera débouté de la demande qu'il a formée à ce titre.

Sur les demandes de M. X... fondées sur la responsabilité de la Caisse de Crédit Agricole du fait de la plainte pénale et de dénonciations téméraires : M. X..., citant les articles 1382 et 1384 du code civil, entend voir engager la responsabilité délictuelle de la Caisse de Crédit Agricole, et demande paiement des sommes suivantes :-500 000 euros en réparation du préjudice moral,-477 785 euros en réparation de la perte de subsides sur la période de décembre 2005 à janvier 2009,-2 700 000 euros en réparation de la perte de chance de devenir cadre dirigeant du crédit agricole. Dans ses conclusions initiales auxquelles la cour a répondu par son arrêt du 2 mai 2011, M. X... demandait déjà paiement d'une somme de 500 000 euros en réparation d'un préjudice moral. Au soutien de cette demande il invoquait notamment une atteinte à la présomption d'innocence caractérisée par le fait que l'employeur avait notamment porté à la connaissance du personnel des informations relatives aux motifs de l'engagement de la procédure disciplinaire. Certes M. X... a bénéficié d'une décision de non-lieu à poursuivre sur les faits de détournement de la somme de 400 000 dollards qui lui étaient reprochés. Toutefois ce non lieu a été obtenu en raison de la prescription de l'action publique que les juridictions d'instruction ont constatée. Il n'en demeure pas moins qu'il résulte de l'arrêt du 6 mars 2008 de la Chambre de l'Instruction, que de nombreux éléments à charge ont été relevés à l'encontre de M. X..., en particulier :- les sommes détournées avaient été commandées à la demande de M. X...,

- l'argent avait été déposé dans un compartiment spécial de la salle forte dont seuls M. X... et le service de sécurité avaient la clé,- M. X... a donné des explications confuses et contradictoires à l'audit du crédit agricole, indiquant dans un premier temps que ces fonds étaient destinés à l'agence de Saint Barthélémy, alors que cette agence était, compte tenu du contexte local, suffisamment approvisionnée,- l'agence de Saint Barthélémy indiquait d'ailleurs qu'elle n'avait pas besoin d'autant de devises et qu'habituellement elle commandait directement elle-même au change manuel,- M. X... orientait les recherches vers le fournisseur, vers qui l'argent avait pu être retourné, allant jusqu'à précisé que les fonds avaient été retournés en une seule fois au fournisseur, ce qui s'avérait faux,- des dépôts de chèques et d'espèces étaient constatés sur trois comptes de M. X...,- l'examen de ces comptes faisait apparaître que M. X... remboursait de nombreux emprunts, l'intéressé paraissant avoir un train de vie élevé, ses comptes étant souvent déficitaires malgré un salaire confortable, alors qu'il soutenait que les sommes importantes versées sur ses comptes provenaient de ses économies, d'autres versements auraient été effectués par des rencontres féminines,- M. X... était amené à contester les déclarations qui lui étaient prêtés par divers témoins, le mettant en cause. Au regard des éléments à charge résultant de l'information pénale, la plainte pénale de la Caisse de Crédit Agricole, ne saurait être considérée comme une faute, et ce d'autant moins qu'il ne ressort pas des pièces pénales versées au débat, que le juge d'instruction ait été saisi sur plainte avec constitution de partie civile, une enquête préliminaire ayant précédé l'ouverture par le ministère public de l'information pénale. Par ailleurs compte tenu des mêmes éléments à charge, même si la régularité du licenciement a été affectée par un vice de procédure, et si en conséquence M. X... a pu être indemnisé par le précédent arrêt en date du 2 mai 2011, des conséquences de ce licenciement, sanctionné pour être considéré comme étant sans cause réelle et sérieuse, ledit licenciement ne saurait causé un préjudice distinct, tant sur le plan moral qu'économique. Il y a lieu de relever en effet que la cour dans son arrêt du 2 mai 2011, pour fixer à 200 000 euros le montant de l'indemnisation de M. X... pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et pour rejeter la demande de dommages et intérêts au titre d'un préjudice distinct, a pris en considération les arguments du salarié tenant au non-respect par l'employeur de la présomption d'innocence, la mise en disponibilité sans solde du salarié, l'atteinte à l'évolution de sa carrière, l'impossibilité de retrouver un emploi dans le secteur bancaire en raison des agissements de la Caisse de Crédit Agricole et de l'opprobre jetée sur lui (cf. motifs de l'arrêt suscité page 10). Il convient en conséquence de rejeter les demandes de M. X... quant au paiement des sommes suivantes :-500 000 euros en réparation du préjudice moral,-477 785 euros en réparation de la perte de subsides sur la période de décembre 2005 à janvier 2009,-2 700 000 euros en réparation de la perte de chance de devenir cadre dirigeant du crédit agricole. Sur la demande de remboursement des dépenses engagées par M. X... pour assurer sa défense durant la procédure pénale dont il a fait l'objet : Certes selon les dispositions de l'article 1135 du code civil, les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l'équité, l'usage ou la loi donnent à l'obligation d'après sa nature, et l'employeur est tenu de garantir ses salariés à raison des actes ou faits qu'ils passent ou accomplissent en exécution du contrat de travail, mais ces principes invoqués par M. X..., s'ils permettent de mettre à la charge de l'employeur les frais exposés par le salarié en raison de litiges avec des tiers, nés dans le cadre de l'exécution du contrat de travail, ils ne sauraient permettre la prise en charge de tels frais pour des procédures engagées à la suite d'agissements reprochés au salarié, ayant porté préjudice à l'employeur. Au regard des charges sérieuses réunies contre M. X..., ni l'équité, ni l'usage, ni la loi n'impliquent la prise en charge par l'employeur des frais exposés par le salarié pour assurer sa défense pénale, étant relevé qu'il ne peut être considéré qu'en portant plainte contre lui, la Caisse de Crédit Agricole ait commis une faute l'obligeant à assurer cette prise charge. L'examen des pièces de l'information pénale, montre que la seule erreur de la Caisse de Crédit Agricole a été de ne pas réagir avec célérité aux indices comptables faisant apparaître des " suspens ", et en ne déclenchant pas assez tôt un contrôle suffisamment efficace, cette seule erreur ne portant préjudice qu'à elle-même. En conséquence M. X... doit être débouté de sa demande de remboursement des dépenses engagées pour assurer sa défense pénale. La demande de remboursement de M. X... n'étant pas fondée, aucune résistance abusive de la part de la Caisse de Crédit Agricole à l'égard de cette demande de remboursement, ne saurait être caractérisée.

Sur la demande de remboursement des frais d'huissier exposés par M. X... aux fins d'exécution de l'arrêt du 2 mai 2011 : Par l'arrêt du 2 mai 2011, les dépens ont été mis à la charge de la Caisse de Crédit Agricole, lesdits dépens comportant notamment le coût des actes d'exécution dudit arrêt, le coût des différents actes figurant d'ailleurs dans ceux-ci et étant compris dans les sommes à recouvrer, notamment dans le procès-verbal de saisie-attribution du 26 octobre 2011. Il n'y a donc pas lieu de condamner à nouveau la Caisse de Crédit Agricole au paiement de ces dépens.

Sur les autres demandes de M. X... : L'exécution du contrat de travail ayant été suspendue à compter du 1er décembre 2005, en raison d'une mesure de contrôle judiciaire, décidée par l'autorité judiciaire, et M. X... ne justifiant s'être présenté pour reprendre son poste de travail que le 17 mars 2009, il n'y a pas lieu d'ordonner la remise de bulletins de paie pour la période de mai 2006 à janvier 2009, comme demandé par le salarié. M. X... s'étant déjà vu attribuer par arrêt du 2 mai 2011, une indemnité de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, l'équité n'impose pas qu'il soit fait droit à une nouvelle demande sur le même fondement.

Par ces motifs,
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et dernier ressort, Vu l'arrêt en date du 2 mai 2011 de la cour de céans, Vu l'arrêt en date du 13 septembre 2012 de la Cour de Cassation,

Condamne la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Guadeloupe à payer à M. X... les sommes suivantes :-41 034, 26 euros au titre de rappel de prime conventionnelle relative à la réduction de la durée des congés payés annuels,-2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive au paiement cette prime,

Dit que les dépens sont à la charge de la Caisse de Crédit Agricole, Déboute les parties de toute conclusion plus ample ou contraire.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/00510
Date de la décision : 26/05/2014
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2014-05-26;13.00510 ?
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