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07/04/2014 | FRANCE | N°13/00558

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 07 avril 2014, 13/00558


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 132 DU SEPT AVRIL DEUX MILLE QUATORZE

AFFAIRE No : 13/ 00558
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes BASSE-TERRE du 28 janvier 2013- Section Activités Diverses.
APPELANTE
EURL Z... SUN ...97150 SAINT MARTIN Représentée par Me PIERRE-LOUIS, substituant Me Jan-marc FERLY, (26), avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉ
Monsieur Renold X...... 97150 SAINT MARTIN Représenté par Me BANGOU, substituant Me Harry DURIMEL de la SELARL DURIMEL et BANGOU, (56), avocat au barreau de GU

ADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 03 Février 2014, en a...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRÊT No 132 DU SEPT AVRIL DEUX MILLE QUATORZE

AFFAIRE No : 13/ 00558
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes BASSE-TERRE du 28 janvier 2013- Section Activités Diverses.
APPELANTE
EURL Z... SUN ...97150 SAINT MARTIN Représentée par Me PIERRE-LOUIS, substituant Me Jan-marc FERLY, (26), avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉ
Monsieur Renold X...... 97150 SAINT MARTIN Représenté par Me BANGOU, substituant Me Harry DURIMEL de la SELARL DURIMEL et BANGOU, (56), avocat au barreau de GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 03 Février 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, Mme Marie-Josée BOLNET, conseillère, Mme Françoise GAUDIN, Conseillère. qui en ont délibéré.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 24mars 2014, prorogé au 31 mars 2014, prorogé au 07 AVRIL 2014
GREFFIER Lors des débats Mme Valérie FRANCILLETTE, Greffière.
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Madame Marie-Luce KOUAME, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE
Monsieur Renold X... a été embauché par contrat de travail à durée indéterminée du 1er février 2001 par monsieur Stephen Z... et madame Tomisue Z..., de nationalité américaine, en qualité d'homme d'entretien et de maintenance pour leur villa située au ...à SAINT-MARTIN 97150, qu'ils occupent comme résidence secondaire.
Un salaire mensuel brut de 12 250 francs a été retenu. Il est indiqué dans le contrat de travail que l'employeur insiste sur le sens des responsabilités du salarié, celui-ci devant veiller à entretenir de bonnes relations avec ses collègues de travail, à effectuer sa tâche avec conscience professionnelle, quand bien même l'employeur ne serait pas régulièrement sur le site de travail. Il est également dit que le salarié est tenu de respecter les consignes données par le supérieur hiérarchique qui lui sera désigné, comme s'il s'agissait de l'employeur.
Une entreprise à responsabilité limitée à la dénomination sociale de Z... SUN EURL a été créée le 1er janvier 2007 par madame Tomisue Z... pour la maintenance de la résidence ainsi que de l'exploitation d'installations hôtelières ou d'hébergement se trouvant sur le site. Le siège social de cette société est sis ... 97150 SAINT-MARTIN. Monsieur Ian Y..., de nationalité britannique, en a été désigné le gérant.
Les bulletins de paie délivrés à monsieur Renold X... à partir de cette date comportent l'indication que l'employeur de celui-ci est désormais la société Z... SUN EURL.
Par lettre du 12 février 2010, monsieur Renold X... a été convoqué à un entretien préalable de licenciement prévu au 20 février suivant, avec mise à pied conservatoire avec effet immédiat.
Par lettre recommandée avec avis de réception du 26 février 2010, celui-ci a été informé de son licenciement pour comportement d'incurie et d'insubordination persistante.
Contestant cette mesure, monsieur X... a saisi le conseil de prud'hommes de Basse-Terre aux fins de juger sans cause réelle et sérieuse son licenciement, de condamner son employeur au paiement de diverses sommes et de lui enjoindre la rectification de l'attestation Assedic sous astreinte.
Par jugement du 28 janvier 2013, la juridiction prud'homale a jugé sans cause réelle et sérieuse le dit licenciement, a également dit que ce licenciement est intervenu dans des circonstances abusives et vexatoires, et a condamné L'EURL Z... SUN, en la personne de son représentant légal, à payer à l'intéressé les sommes suivantes :-155, 41 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,-11 349, 68 euros pour circonstances abusives et vexatoires,-5 662, 48 euros au titre de la réparation du préjudice du fait de l'erreur sur l'attestation ASSEDIC,-22 699, 68 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il a débouté la société défenderesse de toutes ses demandes et a condamné celle-ci aux dépens.
Par déclaration du 15 avril 2013, l'EURL Z... SUN a relevé appel de cette décision.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par conclusions no 2 notifiées à l'intimé le 27 novembre 2013 et réitérées à l'audience des plaidoiries du 3 février 2014, l'EURL Z... SUN, représentée, demande à la cour, au visa des articles L. 1232-1 et suivants, L. 1234-5 et suivants, L. 1235-3 et suivants du code du travail, et de l'article 1382 du code civil, de :
- réformer le jugement du 28 janvier 2013 en toutes ses dispositions,- dire et juger que le licenciement de monsieur X... est pourvu d'une cause réelle et sérieuse,- dire et juger que ce licenciement est intervenu en dehors de toute circonstance abusive et vexatoire,- débouter monsieur X... de l'ensemble de ses demandes, fins et écritures,- prendre acte qu'elle lui a remis une attestation Pôle Emploi régularisée,- dire et juger que les propos tenus par l'intéressé sont de nature à lui causer un préjudice,- condamner celui-ci à réparer son préjudice à concurrence de la somme de 20 000 euros,- le condamner au paiement de la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Elle rappelle d'abord que jusqu'en 2006, les époux Z... ont embauché des salariés en tant qu'employeurs particuliers, qu'en janvier 2007, date de la création de l'EURL Z... SUN pour gérer leur propriété le Château des Palmiers, leurs salariés ont été affectés au service de la société, sans changement dans leur statut, ni dans leur emploi, qu'en revanche, monsieur Mike A... et madame Haether B... sont restés employés des époux Z... à titre personnel, que par ce rattachement direct, ceux-ci ne sont amenés à intervenir que très rarement auprès des salariés de l'EURL HILBET SUN et exclusivement lorsque ceux-ci organisent la venue de leurs employeurs ou des invités de ceux-ci, qu'à l'époque des faits, c'est exclusivement madame Nadège C... qui occupait les fonctions de gérante après le départ de Monsieur Ian Y..., également chef cuisinier du Château des Palmiers, qu'en 2007, le contrat de travail de monsieur X... a été transféré à L'EURL Z... SUN, l'intéressé occupant toujours les fonctions d'homme d'entretien et de maintenance, avec une dernière rémunération brute de 1 867, 50 euros.
Elle déclare que presque 18 mois après les faits, monsieur X... a entrepris de contester les motifs de son licenciement.
Elle fait ensuite remarquer que le conseil de prud'hommes de Basse-Terre n'a pas motivé sa décision pour qualifier le licenciement de monsieur X... sans cause réelle et sérieuse, qu'il n'a procédé à la vérification d'aucun des motifs mentionnés dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, et a rendu une décision dépourvue de toute motivation en contravention des articles L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail.
Elle précise que le licenciement pour motif personnel doit être fondé sur des éléments objectifs imputables au salarié, vérifiables par des éléments extérieurs, qu'à cet égard, l'exécution défectueuse du travail, les manquements délibérés et réitérés aux règles de sécurité, les sorties ou l'abandon des fonctions sans l'autorisation de l'employeur durant le temps de travail sans motif légitime, le refus de respecter les jours et heures de travail, l'insubordination et le refus de collaborer constituent des causes réelles et sérieuses de licenciement, qu'en l'espèce, monsieur X... a refusé à plusieurs reprises d'exécuter les instructions de son supérieur hiérarchique, lequel l'invitait à nettoyer le hall de la villa du lot 42b et de prendre en charge le transport du linge de la buanderie à la villa (cf pièces no7 et no8), que monsieur Ian Y..., était contraint de lui rappeler ses différentes tâches, que ses collègues de travail se trouvaient obligés de faire le travail à sa place, qu'il n'était pas plus respectueux de ses horaires de travail, arrivant à 9 heures et commençant de travailler à 10 heures/ 11 heures, qu'il n'observait pas davantage les consignes de sécurité alors que celles-ci lui ont été prescrites par le médecin du travail, qu'il ne faisait nullement cas des ordres de son supérieur hiérarchique de l'époque, monsieur Ian Y....
Elle ajoute que monsieur X... est bien en mal de prouver que c'est en raison de son état de santé qu'il a été licencié, que son comportement a fait l'objet d'observations réitérées de la part de madame Nadège C..., succédant à Ian Y..., alors qu'il travaillait dans la propriété la plus luxueuse de Saint-Martin où une nuit au Château des Palmiers coûte entre 7 572 dollars et 10 572 dollars, soit entre 5 646, 80 euros et 7 900 euros, qu'au surplus, cette propriété accueille des personnalités du monde entier telles que Donatella D... ou des princes d'Arabie (pièce no 5 : programme du réveillon et liste des invités 2010-2011), que par conséquent, tous les postes occupés par les salariés de L'EURL Z... SUN, y compris celui de monsieur X..., ne peuvent souffrir la moindre défaillance, qu'il ne peut être admis que le jardinier d'un hôtel 5 étoiles vocifère publiquement contre ses employeurs ou qu'il aie des colères hystériques à la limite de la violence, que depuis le départ de monsieur E... du domaine, les salariés sont unanimes à dire qu'ils travaillent en paix.
Elle soutient que c'est sur la base des salaires qu'il aurait perçus durant le préavis que l'indemnité compensatrice doit se calculer et non sur celle d'un salaire moyen des trois derniers mois, qu'en supposant que le licenciement soit dépourvu d'une cause réelle et sérieuse, eu égard aux dispositions de l'article L. 1235-5 du code du travail, l'entreprise ayant moins de 11 salariés, monsieur X... ne peut obtenir qu'une indemnité en réparation du préjudice réel subi et démontré, que s'agissant des circonstances vexatoires de la rupture, celui-ci doit justifier d'un préjudice distinct dont la réparation ne peut trouver son fondement dans l'application de l'article L. 1235-5 du code du travail, ce qu'a ignoré la juridiction prud'homale en allouant à l'intéressé la somme de 11 349, 68 euros (6 mois de salaires) au vu d'un prétendu comportement fautif de l'employeur qui n'est d'ailleurs pas caractérisé, que de plus, l'attestation Pôle Emploi, étant quérable, il appartenait à monsieur X... de solliciter la rectification de celle-ci, la somme élevée de 5 662, 48 euros, allouée par les premiers juges, n'étant justifiée d'aucune manière pour une simple erreur de date relevée.
Elle conclut que le conseil de prud'hommes de Basse-Terre a statué infra petita en omettant de répondre à certaines de ses demandes, et notamment à celle des dommages-intérêts en réparation de fausses accusations portées à son encontre, lesquelles laissent entendre que les salariés étaient à la merci de " Mike et Heather " lesquels se comportaient en vrais maîtres de plantation, alors que c'est monsieur X... qui manquait de respect aux autres salariés, à Mike et Heather et surtout à l'égard de ses supérieurs hiérarchiques comme en attestent les autres employés.
Par conclusions notifiées à l'appelante le 9 septembre 2009, et soutenues à l'audience des plaidoiries, monsieur Renold X..., représenté, demande à la cour, au visa des articles L. 1232-1 et 2, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail, L. 1235-1 et 3 et R. 1234-2 du code du travail, de :
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,- débouter la société Z... SUN EURL de toutes ses demandes,- condamner la même au paiement de la somme de 5 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens à recouvrer par la SELARL DURIMEL et BANGOU conformément à l'article 699 du même code.

Il explique tout d'abord que monsieur Stéphen Z... n'est pas présent sur le site et il en a confié la gérance à madame Nadège C... laquelle est très peu présente sur les lieux, laissant ainsi les salariés à la merci de " Mike et Heather ", lesquels se comportent comme de vrais maîtres de plantation, qu'eu égard à leurs conditions difficiles de travail, certains salariés ont eu à s'en plaindre auprès de l'inspection et la médecine du travail, qu'il n'a pas non plus échappé aux services de police et des contrôleurs du travail de Saint-Martin que monsieur Z... ne respectait pas la législation sociale française, ce qui lui a valu d'être inquiété à ce titre et que s'estimant trahi par ses subordonnés, celui-ci a entrepris d se débarrasser de certains témoins gênants.
Il soutient ensuite que les motifs invoqués ne sont ni établis, ni exacts, qu'en effet, la lettre de licenciement fixe les limites du débat, que les éléments invoqués par l'employeur ont été purement et simplement inventés et ne sont d'ailleurs pas étayés par le moindre commencement de preuve, ni par aucun témoigne de personnes censées avoir été ennuyées par son comportement, que les attestations versées aux débats sont toutes inéluctablement de complaisance, madame C... étant elle-même la gérante de L'EURL Z... SUN et les autres salariés ayant fait leurs déclarations sous la pression de l'employeur.
Il dit aussi que le vrai motif de licenciement vient de la dénonciation des conditions de travail et des visites chez le médecin du travail successivement en 2004 et 2005 en raison des conséquences sur sa santé de l'utilisation de produits physosanitaires mis à sa disposition pour l'accomplissement de ses tâches quotidiennes, malgré le port régulier du masque respiratoire.
Il dit pour finir que c'est à bon droit que la juridiction de premier degré lui a accordé l'indemnité compensatrice de préavis calculée à partir du salaire brut moyen des trois derniers mois, l'indemnité pour licenciement pour absence de cause réelle et sérieuse déterminée sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail, des dommages-intérêts pour rupture vexatoire et abusive au regard de l'article L. 1235-5 du code du travail, alors que son état de santé s'est dégradé du fait d'un déficit respiratoire, des dommages-intérêts de 5 662, 48 justifiés par l'observation rigoureuse de l'article R 1234-9 du code du travail, l'attestation Pôle Emploi devant faire apparaître sa qualité de salarié de la société Z... SUN EURL depuis le 1er février 2001.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère expressément à leurs conclusions écrites et à la décision des premiers juges.
MOTIFS DE LA DÉCISION
SUR LA CAUSE RÉELLE ET SÉRIEUSE DU LICENCIEMENT
Les termes de la lettre de licenciement fixent les limites du litige.
En l'espèce, la lettre de licenciement du 26 février 2010 est rédigée en ces termes :
" Nous faisons suite à l'entretien préalable qui s'est déroulé au siège de notre société le mardi 23 février dernier à 10 h et à l'occasion duquel vous étiez assisté.
Les explications que vous nous avez fournies à cette occasion ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation des faits qui vous sont reprochés.
En effet, et malgré les observations réitérées qui vous ont été faites, vous persistez :
- à ne pas exécuter les instructions qui vous ont été données et les tâches qui vous incombent en vertu de votre contrat de travail (vous êtes par exemple, chargé de nettoyer le hall de la villa du lot 42b, or il faut constamment que ce soit une des femmes de ménage qui le fasse, soit parce que vous ne faites pas, soit car vous y mettez une mauvaise volonté particulière en prétextant d'autres tâches ; vous n'assumez pas non plus, ou incomplètement selon le cas, le transport du linge depuis la buanderie jusqu'à la villa,
- ou à les exécuter sciemment d'une manière incomplète ou non conforme, ce qui entraîne un surcroît de travail pour les autres employés de l'entreprise,
- à ne pas respecter les horaires de travail en vigueur, prenant sans prévenir des pauses déjeuner qui excèdent souvent jusqu'à 1 heure le temps imparti, et partant régulièrement en avance sans autorisation (15 h au lieu de 16),- à avoir un comportement d'insubordination qui entraîne dans le fonctionnement de l'entreprise des difficultés constantes.

Votre supérieur hiérarchique est souvent contraint de vous rappeler les tâches à accomplir et malgré cela c'est votre collègue Steve F... qui est contraint d'achever votre travail à votre place.
Vous avez indiqué lors de l'entretien que vos initiatives n'étaient pas appréciées à leur juste valeur : à cet égard, nous ne vous demandons pas de prendre des initiatives mais simplement d'accomplir les tâches qui vous ont été confiées, de la manière qui est demandée. Vous refusez de porter le matériel de protection respiratoire qui vous est préconisé, or il nous appartient de veiller à la sécurité des salariés et nous ne pouvons l'admettre.
Le matin du 9 février 2010, lors d'une réunion en votre présence, l'attention du gérant a à nouveau été attirée par plusieurs salariées sur le fait que vous n'exécutiez pas votre travail ou faisiez preuve d'une mauvaise volonté qui les contraignait à le reprendre après vous.
Ce même 9 février 2010, vous avez contacté le gérant Monsieur Ian Y... en lui tenant des propos incohérents sur un ton irrité voire hystérique. Celui-ci est alors venu vous voir sur votre lieu de travail afin de comprendre quel était le problème. Vous êtes à ce moment là sorti de vos gonds, lui tenant des propos véhéments et incompréhensibles, vous plaignant avec virulence de prétendues pressions de la part de Monsieur A..., dans un état d'agitation manifeste et portant des accusations qui sont au demeurant infondées.
Vous avez d'ailleurs vous-même convenu lors de l'entretien préalable que l'entreprise se montrait compréhensible en matière de gestion du
personnel et notamment que les absences demandées vous ont été accordées chaque fois que c'était possible.
Vous avez alors quitté la propriété à nouveau sans autorisation ; Monsieur Y... vous a suivi et téléphoné afin de pouvoir poursuivre la discussion et élucider le problème, mais vous avez continué de vous emporter.
Votre attitude depuis un an perturbe considérablement la bonne marche de l'entreprise et accroît et complique le travail de ceux qui vous entourent.
Ce comportement d'incurie et d'insubordination persistantes, ajouté à celui que vous avez eu le 9 février dernier consistant à hurler sur la propriété en portant des accusations incompréhensibles à l'encontre de vos responsables, rendent impossible votre maintien dans l'entreprise dans ces conditions.
Nous nous voyons donc contraints de vous notifier par la présente votre licenciement pour cause réelle et sérieuse (...).
Les principaux griefs faits à monsieur X... portent sur la mauvaise exécution et l'exécution incomplète des tâches attribuées qui sont en définitive accomplies par d'autres salariés de l'entreprise. Ces faits sont prouvés notamment par madame Amorelle G... et monsieur Steve F... qui le confirment par déclarations du 02 février 2012 traduites de l'anglais au français. D'autres portent également sur le non-respect des horaires au travail. Ce non-respect est également rapportés par ces mêmes salariés.
Leurs déclarations ne peuvent être qualifiées de complaisantes au profit de l'employeur car ces manquements avaient déjà été portés à la connaissance du gérant par monsieur F..., comme il est indiqué dans la lettre de licenciement.
Le 11 février 2010, monsieur Ian Y..., gérant de l'époque, établissait un rapport sur les faits survenus le 9 février précédant, provoqués par monsieur X... et à l'occasion desquels, il était confirmé que celui n'avait pas effectué sa part de travail sur la propriété et que les femmes de ménage se plaignaient d'avoir à faire une partie de ses tâches à sa place. Il terminait son propos en signalant que monsieur X... était devenu incontrôlable pour l'entreprise.
La cour relève que ce rapport d'incident (document no18 de l'appelante) et son long contenu n'ont pas été discutés par l'intimé, sans doute que la véracité des faits rappelés ne peut être contestée.
Pour sa part, monsieur X... soutient que c'est le fait d'avoir dénoncé les conditions de travail au médecin du travail et l'usage des produits phytosanitaires toxiques que l'employeur a décidé de le licencier,
souffrant d'un réel déficit respiratoire. Pour prouver cette allégation, véritable motif du licenciement selon lui, il verse alors aux débats deux bons de visites au centre interprofessionnel de santé. L'examen de ces documents quasi illisible pour le second, datés de 2004 et 2005 font
apparaître que monsieur X... était suivi par le médecin du travail quant à l'utilisation appropriée du masque respiratoire utilisé dans le cadre de ses fonctions et qui préconisait en 2005 la reprise de l'intéressé au même poste tout ordonnant un changement des valves respiratoires de l'appareil de protection.
Aucun document faisant état du suivi médical de l'intéressé n'est produit pour la période de 2005 à 2010, la cour a donc peine à croire que la procédure de licenciement a pour seul motif légitime l'état de santé de monsieur X..., qui dit souffrir d'un déficit respiratoire du fait de ses conditions de travail sans d'ailleurs en apporter la preuve.
Les bons de visite du centre interprofessionnel de santé au travail de 2008, 2009 et 2010 (pièce no3 de l'intimé) versés aux débats ne concernent pas monsieur X..., mais madame H..., une autre salariée également en conflit avec l'employeur.
Les jugements du tribunal correctionnel produits sont sans rapport avec la procédure de licenciement engagée contre monsieur X....
L'examen des directives écrites données par monsieur Mike A... à monsieur X... (document no20 de l'intimé) permet de constater que celles-ci ne comportent pas de dates. Il est ainsi difficile pour la cour de les rattacher à une quelconque période de travail de l'intimé, celle d'avant la création de la société Z... SUN EURL ou celle d'après.
Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, la cour juge caractérisés l'inexécution des tâches attribuées à monsieur Renold X..., le non-respect des horaires et l'insubordination de ce dernier et dit en conséquence que son licenciement est pourvu d'une cause réelle et sérieuse. Le jugement querellé sur ce point et sur les chefs financiers subséquents est infirmé.
SUR L'INDEMNITÉ COMPENSATRICE DE PRÉAVIS
Lorsque le salarié n'exécute pas le préavis, il a droit, sauf s'il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice. Celle-ci est déterminée en fonction de l'ancienneté dans l'entreprise. Si le salarié justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus d'au moins deux ans, celui-ci a droit à un préavis de deux mois.
L'indemnité due au salarié est égale au salaire brut, assujetti au paiement par l'employeur des cotisations sociales, que le salarié aurait touché s'il avait travaillé pendant la durée du préavis.
Il est établi que monsieur Renold X... justifie d'une ancienneté de plus de deux ans au sein de la société Z... SUN EURL, étant précisé qu'il est tenu compte de son ancienneté lorsqu'il était directement au service de monsieur et de madame Z....
Il ressort de l'annexe du solde de tout compte que l'indemnité compensatrice de préavis a été versée à l'intéressé à concurrence de la somme de 3 735 euros, correspondant à deux mois de salaires bruts (1867, 50 euros x 2 mois).
Le jugement entrepris est donc infirmé sur ce point.
SUR L'INDEMNITÉ POUR DÉFAUT DE MENTION EXACTE SUR L'ATTESTATION PÔLE EMPLOI ET LA DEMANDE DE RECTIFICATION DE CETTE ATTESTATION SOUS ASTREINTE
L'employeur doit délivrer au salarié, lorsqu'il quitte l'entreprise une attestation destinée à lui permettre de faire valoir ses droits à l'assurance chômage. Cette délivrance s'impose quel que soit le motif du départ, et en l'occurrence le licenciement.
La non-remise de l'attestation Pôle Emploi ou une attestation comportant des indications erronées entraînent nécessairement pour le salarié un préjudice, lui ouvrant droit à réparation. Le salarié n'a donc pas à rapporter la preuve du préjudice.
La société Z... SUN EURL ne peut prétendre avoir remis l'attestation Pôle Emploi rectifiée alors que le document no20 dont elle fait état, fait apparaître des caches noirs sur les signatures et le cachet de l'entreprise.
C'est donc à bon droit que les premiers juges ont accepté la demande de réparation. La cour confirme le jugement sur le principe mais fixe les dommages-intérêts à hauteur de la somme de 4 000 euros.
Aucune astreinte n'est prononcée à ce stade, L'EURL Z... SUN ne contestant pas l'erreur affectant la première attestation.
SUR LES DOMMAGES-INTÉRÊTS POUR PRÉJUDICE SUBI PAR L'EURL Z... SUN
Aux termes de l'article 6 du code de procédure civile, à l'appui de leurs prétentions, les parties ont la charge d'alléguer les faits propres à les fonder.
La société Z... SUN EURL sollicite des dommages-intérêts de 20 000 euros en réparation de son préjudice moral au motif que monsieur X... a porté de fausses accusations à son égard portant atteinte à son image, son sérieux et à son intégrité. Elle dit que ces accusations sont à peine voilées de racisme ou d'informations relatives aux pathologies médicales qu'elle aurait laissé se développer chez ses employés avant de s'en débarrasser.
Les faits allégués par monsieur X... sont ceux qu'il estime être utiles pour voir aboutir ses prétentions. Cette démarche est légitime au regard de l'article précité et ne peut être constitutive d'un dommage.
La demande est rejetée et le jugement est confirmé sur ce point.
SUR LES FRAIS IRREPETIBLES
L'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société Z... SUN EURL.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :
Déclare l'appel recevable ;
Infirme le jugement du 28 janvier 2013 sauf en ce qu'il a reconnu le principe de la réparation du préjudice résultant de l'erreur affectant l'attestation ASSEDIC (Pôle Emploi),
Et statuant à nouveau,
Dit que le licenciement de monsieur Renold X... a été prononcé pour une cause réelle et sérieuse ;
Rejette en conséquence les demandes financières afférentes au caractère sans cause réelle et sérieuse du licenciement ;
Condamne la société Z... SUN EURL, en la personne de son représentant légal, à payer à monsieur Renold X... la somme de 4 000 euros en réparation de l'erreur affectant l'attestation Pôle Emploi ;
Rejette le surplus des demandes ;
Condamne monsieur Renold X... aux éventuels dépens ;
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/00558
Date de la décision : 07/04/2014
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2014-04-07;13.00558 ?
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