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24/03/2014 | FRANCE | N°13/00667

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 24 mars 2014, 13/00667


FG-VF
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 110 DU VINGT QUATRE MARS DEUX MILLE QUATORZE

AFFAIRE No : 13/ 00667
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 24 septembre 2009- Section Commerce.
APPELANTE
SARL COSMEGUA, 5, Impasse Jacquart-Rue de la Chapelle-ZI de Jarry 97122 BAIE MAHAULT Représentée par Maître Brigitte WINTER-DURENNEL de la SCP WINTER-DURENNEL et PREVOT (Toque 83) substituée par Maître Philippe LOUIS, avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉE
Madame Maud X... ... ...

97122 Baie-Mahault Représentée par Maître Frederic FANFANT de la SELARL EXCELEGIS (Toque 82...

FG-VF
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 110 DU VINGT QUATRE MARS DEUX MILLE QUATORZE

AFFAIRE No : 13/ 00667
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 24 septembre 2009- Section Commerce.
APPELANTE
SARL COSMEGUA, 5, Impasse Jacquart-Rue de la Chapelle-ZI de Jarry 97122 BAIE MAHAULT Représentée par Maître Brigitte WINTER-DURENNEL de la SCP WINTER-DURENNEL et PREVOT (Toque 83) substituée par Maître Philippe LOUIS, avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉE
Madame Maud X... ... ...
97122 Baie-Mahault Représentée par Maître Frederic FANFANT de la SELARL EXCELEGIS (Toque 82), avocat au barreau de la GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 3 février 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, président, Mme Marie-Josée BOLNET, conseiller, Mme Françoise GAUDIN, conseiller, qui en ont délibéré.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 24 mars 2014
GREFFIER Lors des débats : Mme Valérie FRANCILLETTE, greffier.
ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, président, et par Mme Valérie FRANCILLETTE, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure :

Mme Maud Y... a été engagée par la SARL COSMEGUA le 6 mai 1993 par contrat à durée indéterminée en qualité d'assistante au directeur commercial. Elle a été promue au poste de chef de département à compter du 1er janvier 2000, moyennant un salaire brut fixe de 8. 000 francs assorti d'un intéressement et d'une participation sur le chiffre d'affaires réalisé de 0, 50 % sur les marques représentées, avec le statut cadre, niveau VIII ¿ échelon 2 de la convention collective du commerce de gros.

Après convocation à entretien préalable fixé au 4 juillet 2005, Mme Y... Maud a été licenciée pour faute grave par courrier recommandé du 9 juillet 2005.
Contestant le bien-fondé de son licenciement, Mme Y... a saisi le 12 octobre 2005 le conseil de prud'hommes de Pointe à Pitre en paiement d'indemnités de rupture et dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieux et abusif.

Par jugement du 24 septembre 2009, la juridiction prud'homale a dit et jugé le licenciement de Mme Maud Y... dépourvu de cause réelle et sérieuse et l'a qualifié d'abusif, condamné la SARL COSMEGUA à payer à Mme Y... les sommes suivantes :

1. 48. 114 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, 2. 21. 000 ¿ au titre de l'indemnité spéciale des dispositions de l'article L. 1235-2 du code du travail, 3. 12. 028 ¿ au titre de l'indemnité de préavis, 4. 15. 000 ¿ au titre du préjudice moral pour circonstances abusives, 5. 1. 000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, rejetant le surplus des demandes des parties.

Par déclaration du 16 octobre 2009, la SARL COSMEGA saisissait la cour d'appel de Basse-Terre, laquelle, par arrêt du 3 octobre 2011, infirmait le jugement qui lui était déféré, sauf en ce qu'il a condamné la société COSMEGUA au paiement de la somme de 12. 028 ¿ au titre de l'indemnité de préavis et a dit que le licenciement de Mme Y... Maud avait une cause réelle et sérieuse, déboutant la salariée de ses demandes et disant n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Cet arrêt du 3 octobre 2011 était cassé et annulé, sauf en ce qu'il a débouté la salariée de ses demandes de dommages et intérêts au titre des circonstances vexatoires de la rupture, par arrêt du 17 janvier 2013 de la Cour de Cassation, aux motifs suivants :
« Qu'en statuant ainsi, alors que l'employeur s'étant placé sur le terrain disciplinaire en prononçant le licenciement pour faute grave, la cour d'appel, qui ne pouvait requalifier le licenciement en licenciement pour insuffisance professionnelle sans caractériser une faute imputable à la salariée, n'a pas donné de base légale à sa décision »
Par déclaration du 13 mai 2013, la SARL COSMEGUA saisissait la cour d'appel de Basse-Terre, désignée comme cour de renvoi par l'arrêt de cassation.
****
Par conclusions notifiées à la partie adverse le 14 octobre 2013, à laquelle il a été fait référence lors de l'audience des débats, la société COSMEGUA sollicite l'infirmation du jugement entrepris et demande à la cour de dire et juger que le licenciement disciplinaire de Mme Y... est fondé sur une faute simple lui donnant une cause réelle et sérieuse, de débouter Mme Y... de ses demandes et de la condamner au paiement de la somme de 4. 000 ¿ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

Par conclusions notifiées à la partie adverse le 13 janvier 2014, à laquelle il a été fait référence lors de l'audience des débats, Mme Y... sollicite la confirmation du jugement rendu par le conseil des prud'hommes du 24 septembre 2009 en toutes ses dispositions et la condamnation de l'employeur au paiement d'une somme de 3. 000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Motifs de la décision :

sur le bien-fondé du licenciement :

Attendu que la faute grave visée par les articles L 1234-1 et L 1234-5 du code du travail résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant de son contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise
Attendu qu'en outre, aucune sanction n'est plus justifiée si les poursuites disciplinaires ne sont pas engagées dans un délai de 2 mois à compter du jour où l'employeur a eu une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l'importance des faits fautifs du salarié en vertu de l'article L 1332-4 du code du travail.
Attendu que la lettre de licenciement en date du 9 juillet 2005 énonce comme motif du licenciement :
« A la suite de notre entretien du 4 juillet 2005, nous sommes contraints de vous licencier pour faute grave.
Depuis déjà un certain temps nous vous avons fait part du disfonctionnement au sein de votre équipe commerciale et des répercussions négatives que cela entraînaient tant au sein de l'entreprise, que chez nos Clients et chez nos Fournisseurs.
Nous nous sommes rencontré sur ce sujet en mars 2004 avec M Z.... Nous nous sommes revu en décembre 2004, avec toute votre équipe de façon à redéfinir les rôles et les attentes de chacun. Lors de la venue du responsable de zone de L'Oréal en mars 2005. nous nous sommes à nouveau réunis et celui-ci vous a fait part de son mécontentement.

Chaque fois nous vous avons demandé de réagir afin de rétablir rapidement la situation.
Force est de constater qu'à ce jour vous n'avez pris aucune mesure en vue de renverser la tendance. Pire, nous constatons aujourd'hui une dégradation de vos rapports avec votre force de vente qui vous reproche votre manque de communication, de concertation et d'animation, malgré de nombreuses demandes de leur part, qui se traduit ipso facto par une exclusion de l'équipe. Cette attitude a pour conséquence une dégradation de l'esprit d'entreprise, de notre dynamique de vente et de notre capacité à satisfaire nos clients.

La dégradation de votre relation avec votre équipe a également des répercutions graves avec nos Clients qui ne comprennent pas vos discours divergents et encore moins vos altercations avec nos commerciaux, en leur présence. Là encore, cette attitude a pour conséquence une dégradation de l'image de notre Société et des Marques dont elle a la charge ; ceci est inacceptable.

Enfin, nos Fournisseurs et tout particulièrement L'Oréal se plaignent de votre travail, notamment dans le domaine du merchandising car aucune réimplantation correcte n'a été réalisée depuis votre retour.

Vous comprendrez facilement que l'insatisfaction manifestée de notre Fournisseur principal (représentant 90 % de notre Chiffre d'affaires) nous inquiète. Sur ce point, nous n'acceptons pas de continuer à prendre le risque, de quelque manière que ce soit et de perdre l'un de nos Fournisseurs ; notre société ne s'en remettrait pas.
Aussi nous considérons que ses faits constituent une faute grave mettant enjeu l'avenir de notre Entreprise et des 26 emplois qu'elle comporte.. »

Que le licenciement prononcé pour faute grave est de nature disciplinaire alors que l'insuffisance professionnelle, sauf mauvaise volonté délibérée du salarié, ne constitue pas une faute.

Qu'en l'espèce, l'employeur reproche à Mme Y... des échecs, des erreurs ou dysfonctionnements qui relèvent de l'inaptitude de la salariée à exécuter son travail de façon satisfaisante aux yeux de l'employeur et qui se rattachent à l'insuffisance professionnelle ou incompétence de cette dernière, sans pour autant revêtir un caractère fautif. Qu'en outre, l'employeur n'établit pas que le grief de dégradation des relations avec son équipe de vente et avec les fournisseurs dont le principal, L'OREAL, est imputable à Mme Y..., alors que cette dernière s'est plaint, par lettre du 25 avril 2005 adressée au directeur de la société COSMEGUA, d'une mise à l'écart, d'un retrait de ses attributions et responsabilités depuis son retour de congé de maternité en décembre 2004, d'une rétention d'informations à son encontre et surtout d'être victime d'agressions verbales de la part des commerciaux, lettre à laquelle l'employeur n'a pas répondu, sauf par la convocation à entretien préalable au licenciement.

Que les attestations (A..., B..., C...) émanent de commerciaux travaillant avec Mme Y... et se plaignant de faits tous antérieurs à ladite lettre du 25 avril 2005.
Que Mme Y... a exercé ses fonctions pendant plus de dix ans sans remarque ni avertissement quelconque et a perçu en mars 2005 une prime exceptionnelle de 1. 757, 88 ¿, pour objectifs atteints sur les produits L'OREAL.
Que dès lors, l'employeur n'établit pas d'erreurs commises par la salariée relevant d'une mauvaise volonté délibérée de sa part et les griefs invoqués ne sauraient revêtir un caractère fautif, à fortiori caractériser une faute grave de Mme Y....
Qu'en l'absence de faute à la charge de la salariée, le licenciement de Mme Y... prononcé sur un terrain disciplinaire n'a pas de cause réelle et sérieuse.
Que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a dit et jugé dénué de cause réelle et sérieuse le licenciement de Mme Y.... Que sur l'indemnité de préavis due à Mme Y..., le jugement a parfaitement tenu compte des données de l'espèce, observation étant d'ailleurs faite que la société appelante ne formule dans ses conclusions aucune critique à ce titre.

Que la somme ainsi allouée de 12. 028 ¿ au titre du préavis sera confirmée.

Sur l'indemnisation de la rupture du contrat de travail

Attendu que Mme Y... Maud, alors âgée de 37 ans, avait au moment de la rupture du contrat de travail 12 ans d'ancienneté et percevait un salaire moyen de 4. 000 ¿ par mois ;
Qu'elle ne justifie pas de sa situation professionnelle postérieurement à la rupture.

Que sur l'indemnité due pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail, il convient de retenir que compte tenu des éléments ci-dessus, l'évaluation faite par le premier juge, à hauteur de 48. 114 ¿, correspond à une indemnisation appropriée de ce préjudice ;

Qu'il n'y a pas lieu à indemnité sur le fondement de l'article L. 1235-2 du code du travail, la procédure ayant été respectée.
Que la cour de cassation n'a pas cassé la disposition rejetant la demande de dommages et intérêts au titre des circonstances vexatoires de la rupture. Qu'il paraît inéquitable de laisser à la charge de Mme Y... Maud les frais irrépétibles qu'elle a exposés et il lui sera alloué la somme de 2. 000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Que l'employeur, succombant, sera débouté de sa propre demande à ce titre et supportera les entiers dépens.

Par ces motifs,

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Vu l'arrêt de la cour de cassation en date du 17 janvier 2013, Dans les limites de sa saisine, sur les points restant en litige,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a dit le licenciement de Mme Maud Y... dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamné la SARL COSMEGUA à payer à Mme Maud Y... les sommes de 48. 114 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de 12. 028 ¿ à titre d'indemnité de préavis.

Statuant à nouveau sur le surplus,

Rejette toute autre demande ou plus ample.
Y ajoutant, Condamne la SARL COSMEGUA à payer à Mme Maud Y... la somme de 2. 000 ¿ d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que les entiers dépens tant de première instance que d'appel sont à la charge de la société COSMEGUA.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/00667
Date de la décision : 24/03/2014
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2014-03-24;13.00667 ?
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