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24/02/2014 | FRANCE | N°12/00341

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 24 février 2014, 12/00341


VF-BR
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 82 DU VINGT QUATRE FEVRIER DEUX MILLE QUATORZE

AFFAIRE No : 12/ 00341
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 27 janvier 2012- Section Agriculture.
APPELANT
Monsieur Elie X......97139 Abymes Représenté par Maître Sully LACLUSE de la SELARL LACLUSE-CESAR (Toque 2), avocat au barreau de la Guadeloupe

INTIMÉE
CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA G UADELOUPE (CRCAM GUADELOUPE) Petit-Pérou 97139 Abymes Représentée par Maître Jean-marc

DERAINE de la SELARL DERAINE JEAN-MARC (Toque 23) substitué par Maître MATRONE, avocat au ...

VF-BR
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 82 DU VINGT QUATRE FEVRIER DEUX MILLE QUATORZE

AFFAIRE No : 12/ 00341
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 27 janvier 2012- Section Agriculture.
APPELANT
Monsieur Elie X......97139 Abymes Représenté par Maître Sully LACLUSE de la SELARL LACLUSE-CESAR (Toque 2), avocat au barreau de la Guadeloupe

INTIMÉE
CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE LA G UADELOUPE (CRCAM GUADELOUPE) Petit-Pérou 97139 Abymes Représentée par Maître Jean-marc DERAINE de la SELARL DERAINE JEAN-MARC (Toque 23) substitué par Maître MATRONE, avocat au barreau de la Guadeloupe

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 6 janvier 2014, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, et Madame Françoise GAUDIN, conseiller.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, président, Mme Marie-Josée BOLNET, conseiller, Mme Françoise GAUDIN, conseiller.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 17 février 2014, date à laquelle le prononcé de l'arrêt a été prorogé au 24 février 2014
GREFFIER Lors des débats : Madame Juliette GERAN, adjointe administrative principale, faisant fonction de greffier.
ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, président, et par Mme Valérie FRANCILLETTE, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire. Faits et procédure :

M. Elie X...exerce les fonctions d'assistant de clientèle au sein de la Caisse Régionale du Crédit Agricole Mutuel de la Guadeloupe, depuis le 2 juillet 1984. Dans le cadre de cette entreprise il exerce plusieurs fonctions représentatives du personnel, notamment en tant que membre élu du comité d'entreprise, de représentant du comité d'entreprise auprès du conseil d'administration et membre élu du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions travail.
Après convocation à un entretien préalable à une mesure disciplinaire, fixé au 11 août 2009, M. X...se voyait notifier par courrier recommandé avec avis de réception un blâme pour des faits qualifiés de faute professionnelle. Il était reproché à Monsieur X...un comportement violent lors de la séance du comité d'entreprise du 16 juin 2009.
Le 27 octobre 2009, M. X...saisissait le Conseil de Prud'hommes de Basse-Terre aux fins, dans un premier temps, de voir juger que les agissements du Crédit Agricole à son encontre devaient être qualifiés de délits d'entrave à l'exercice de sa fonction élective, de harcèlement moral et de discrimination syndicale. Il devait par la suite solliciter devant cette même juridiction la condamnation de la Caisse Régionale de Crédit Agricole à lui payer les sommes suivantes :-2 341, 17 euros à titre d'indemnité pour non respect de la procédure,-14 047, 02 euro à titre d'indemnité pour sanction sans cause réelle et sérieuse,-15 000 euros à titre de dommages et intérêts,-500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 27 janvier 2012, le Conseil de Prud'hommes de Basse-Terre, en formation de départage, déboutait M. X...de l'ensemble de ses demandes et le condamnait à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration du 13 février 2012, M. X...interjetait appel de cette décision.
****
Par conclusions déposées au greffe de la cour le 4 avril 2013, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, M. X...sollicite l'infirmation du jugement déféré et entend voir déclarer nul et de nul effet le blâme disciplinaire qui lui a été notifié le 14 septembre 2009. Il réitère ses demandes d'indemnités et de dommages et intérêts tels que formulées devant les premiers juges.
À l'appui de ses prétentions, M. X...explique qu'il serait un agent qui serait jugé indésirable par la direction de la Caisse Régionale de Crédit Agricole, s'estimant victime d'agissements fautifs, constitutifs du délit d'entrave, de discrimination syndicale et de harcèlement moral.
Il invoque le caractère abusif de la sanction prononcée à son égard et relève l'irrégularité de la convocation à l'entretien préalable en raison de l'inobservation d'un délai raisonnable prévu entre la convocation et l'entretien.
L'illégalité de la sanction serait caractérisée selon lui par l'absence de justification suffisante de cette sanction. Il conteste l'application de l'article 12 de la convention collective, s'agissant de faits contestés et survenus dans l'exercice de son mandat de représentation.
Il invoque le défaut d'avis préalable du responsable hiérarchique prévu par l'article 12 de la convention collective et le défaut de preuves tangibles en ce qui concerne le déroulement des faits reprochés.
Il soulève également le défaut pouvoir de sanctionner du signataire de la notification.
Oralement, le conseil de M. X...demande que la pièce no 27 dont fait état la Caisse Régionale de Crédit Agricole, soit écartée des débats, pour ne pas avoir été communiquée.
**** Par conclusions notifiées la partie adverse le 16 décembre 2013, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, la Caisse Régionale de Crédit Agricole sollicite la confirmation du jugement entrepris et le rejet de l'ensemble des demandes de M. X.... Elle réclame paiement de la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

À l'appui de ses demandes, la Caisse Régionale de Crédit Agricole régionale entend voir constater que M. X...s'est rendu coupable d'actes de violence sur la personne de Mme Y...lors du comité d'entreprise en date du 16 juin 2009 et que l'ensemble des pièces versées aux débats démontrent l'abus de M. X...dans l'exercice de son mandat. Elle fait valoir que le blâme notifié à M. X...est motivé par des griefs sérieux et d'une gravité certaine. Elle ajoute que M. X...ne justifie en rien ces affirmations selon lesquelles il serait victime de discrimination syndicale, de harcèlement moral ou d'entrave.
**** Motifs de la décision :

La pièce no 27 de l'intimée, dont il est demandé par le rejet par l'appelant, lui a été communiquée le 16 décembre 2013, selon bordereau de communication de pièces. En outre l'appelant a critiqué, dans ses conclusions, de façon détaillée, cette pièce, constituée par un procès-verbal d'huissier en date du 1er octobre 2010. Il ne sera donc pas fait droit à sa demande tendant à voir ladite pièce écartée des débats.

C'est par des motifs justes et pertinents que la cour adopte, que le premier juge a rejeté les demandes de M. X....
En effet, en ce qui concerne la régularité de la procédure, le premier juge rappelle que la loi ne fixe pas de délai minimum entre la date de la convocation et celle de l'entretien préalable à la mesure disciplinaire, le salarié devant être averti suffisamment à l'avance afin de préparer son entretien.
L'examen des pièces versées aux débats montre que le courrier recommandé portant convocation à l'entretien préalable, a été présenté par les services de la Poste le 4 août 2009 au domicile de M. X..., celui-ci ne l'ayant retiré que le 13 août 2009 (pièce 3 de l'intimée).
Dans la mesure où il peut être constaté que M. X...a été convoqué par lettre recommandée avec avis de réception présentée le 4 août 2009 pour un entretien fixé au 11 août suivant à 11 heures, aucun grief ne peut être retenu à l'encontre de l'employeur, le délai laissé au salarié étant suffisant pour préparer sa défense ; le fait que le salarié n'est allé chercher ce courrier que le 13 août est sans incidence sur la régularité de procédure.
Par ailleurs au terme de l'article 12 de la convention collective nationale, applicable aux salariés de la Caisse Régionale de Crédit Agricole, l'avertissement et le blâme sont pris par la direction après avis du responsable hiérarchique du salarié en cause.
Contrairement à ce que soutient M. X..., il résulte de l'examen des pièces versées, que le directeur général adjoint a bien sollicité, préalablement à la sanction notifiée par courrier du 10 septembre 2009, l'avis de Mme Z..., directrice de l'agence de Capesterre Belle Eau, supérieure hiérarchique de M. X..., d'une part par courrier du 7 septembre, et d'autre part par courriel de la même date adressé à 15 heures 35, auquel Mme Z...a répondu par courriel 10 septembre 2009 adressé au directeur général adjoint à 10 heures 19 (pièces 4, 5, 26 et 27 de l'intimée).
La trace de ces messages horodatés a été constatée dans le cadre des recherches effectuées sur la messagerie du directeur général adjoint, le 1er octobre 2010, par M. Thierry A..., responsable technologie informatique de la Caisse Régionale de Crédit Agricole, en présence de Me Valérie E..., Huissier de Justice à Pointe-à-Pitre, le serveur de la messagerie examinée étant géré par le groupement informatique ATLANTICA, à Gradignan en Gironde, et les collaborateurs de la Caisse Régionale de Crédit Agricole régionale n'ayant pas d'habilitation d'administration de ce serveur.
À la suite de la réception de l'avis de Mme Z..., supérieur hiérarchique de M. X..., le directeur général adjoint a notifié un blâme à M. X..., le 10 septembre 2009, pour les motifs suivants :
« Vous avez été l'auteur, lors de la séance du comité d'entreprise du 16 juin 2009, d'un comportement totalement anormal. En effet, le 16 juin 2009, à l'occasion d'un comité d'entreprise, vous vous êtes livré à des violences sur la personne de Madame Marie-Christine Y.... Refusant que soit examiné l'ordre du jour tel qu'il avait été élaboré conjointement avec le secrétaire du comité d'entreprise, vous avez tout d'abord éteint de force à plusieurs reprises le rétro projecteur aux fins d'empêcher tout examen des dossiers. Une collaboratrice choquée par votre comportement a quitté la séance du comité d'entreprise. Mme Y...ayant tenté de poursuivre le débat à l'oral à l'aide de documents papiers malgré ces violences, vous lui avez alors arraché ses dossiers des mains. Mme Y...indique dans sa plainte à votre égard avoir été frappée au bras gauche. Cette dernière, se risquant à accéder de nouveau au rétroprojecteur aux fins de poursuivre sa mission sans lesdits dossiers, s'est alors vu interdire l'accès à l'appareil. Essayant alors de faire une présentation du sujet de l'ordre du jour sans support aucun, qu'il soit de papier ou informatique, vous avez alors de nouveau agressé Madame Marie-Christine Y...: vous levant de votre siège, vous l'avez poursuivie de façon très rapprochée, lui hurlant aux oreilles. Mme Y...tentant de se dégager et de faire cesser toute promiscuité, vous vous êtes rapproché au plus près d'elle et l'avez poursuivie de vos vociférations, lui disant " qu'elle allait avoir mal aux oreilles ". D'autres élus ont déploré aussi votre comportement et le vacarme ambiant que vous avez généré pour empêcher cette présentation. Épuisée et très choquée, Mme Y...a dû alors quitter la séance du comité d'entreprise. Elle s'est vue prescrire par le docteur B...Sandra un arrêt de travail du 17 au 26 juin 2009 inclus, prolongé jusqu'au 10 juillet 2009. Par ailleurs, la médecine du travail ayant été saisie, a conclu à une inaptitude temporaire. Lors du comité d'entreprise du 30 juillet 2009, vous m'avez indiqué, en ma qualité de Président du comité, avoir bien éteint le projecteur, avoir vociféré et hurlé au sein de l'enceinte. Ces faits tels que décrits ont été confirmés par le secrétaire adjoint du comité d'entreprise, présent lors de la séance du 16 juin 2009 avec le qualificatif suivant : " il s'agissait d'une situation insupportable, d'une véritable agression à l'encontre de Madame Y.... " Ces comportements, ce niveau de violence, ne sont pas acceptables dans une entreprise. Ces faits constituent une faute professionnelle et nous amènent en conséquence à vous notifier un blâme. »

Les agissements de M. X...ainsi évoqués, sont décrits dans le procès-verbal de la séance du 16 juin 2009 du comité d'entreprise. Ce procès-verbal a été approuvé par un vote constaté lors de la séance plénière du 30 juillet 2009 du comité d'entreprise, lui-même approuvé le 24 septembre 2009, étant relevé que sur six votants, deux syndicalistes ont voté pour, deux se sont abstenus, et deux n ¿ ont pas pris part au vote
Par ailleurs les faits tels que relatés dans la lettre du 10 septembre 2009, sont corroborés par les certificats médicaux et l'avis d'inaptitude temporaire qui ont été établis à la suite du comité d'entreprise du 16 septembre 2009, ces documents médicaux faisant état de choc émotionnel, d'anxiété et de douleurs au bras gauche.
Les constatations qui précèdent suffisent à établir la violence du comportement de M. X...qui empêchait le déroulement de la réunion de la séance du comité d'entreprise, en s'en prenant de façon agressive et réitérée à la personne de Mme Y..., directrice des ressources humaines, pour laquelle il est résulté des préjudices psychologiques.
Comme l'a indiqué le premier juge, qui a relevé que les faits reprochés à M. X...étaient constitutifs d'un abus dans l'exercice de son mandat, le comportement de ce dernier ne saurait s'inscrire dans le cadre normal de l'exercice de ses fonctions de membres élus du comité d'entreprise. En tout état de cause, les violences illégitimes exercées à l'encontre de la directrice des ressources humaines, constitue une faute professionnelle, passible des dispositions de l'article 12 de la convention collective applicable à l'entreprise, laquelle prévoit notamment la sanction de blâme à titre disciplinaire, cette sanction étant justifiée au regard de la gravité des faits reprochés.
Enfin le moyen tiré du défaut de pouvoir du signataire de la notification de la sanction disciplinaire ne peut être retenu, puisque le premier juge a pu relever que la Caisse Régionale de Crédit Agricole avait versé aux débats la délégation de pouvoir donnée à M. C...Jean-Marc par M. D..., directeur général de la Caisse Régionale de Crédit Agricole, permettant à M. C...de procéder à l'embauche, à la titularisation, à la promotion, l'avancement, aux mutations du personnel et à son licenciement, M. C...ayant de ce fait qualité pour exercer le pouvoir disciplinaire dévolu à l'employeur. En outre il est versé aux débats un acte notarié en date du 1er juillet 2008, par lequel le conseil d'administration de la Caisse Régionale de Crédit Agricole donne pouvoir au directeur général, M. D...,
En conséquence la demande d'annulation du blâme infligé M. X...sera rejetée.
La sanction infligée à M. X...ne saurait constituer ni un fait de harcèlement, ni une discrimination syndicale, puisque la dite sanction est justifiée par le comportement violent et agressif de M. X....
Elle ne saurait non plus constituer un fait d'entrave, puisqu'au contraire, c'est M. X...qui a fait obstacle, par son comportement anormalement violent, aux travaux du comité d'entreprise.
L'équité n'implique pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civil.

Par ces motifs,

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et dernier ressort,
Confirme le jugement déféré,
Dit que les entiers dépens sont à la charge de M. X...,
Déboute les parties de toutes conclusions plus ample ou contraire.

Le greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/00341
Date de la décision : 24/02/2014
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2014-02-24;12.00341 ?
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