La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/01/2014 | FRANCE | N°13/00165

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 13 janvier 2014, 13/00165


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 11 DU TREIZE JANVIER DEUX MILLE QUATORZE
AFFAIRE No : 13/ 00165
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 10 décembre 2012- Section Activités diverses.
APPELANTE
Madame Jeannette X...... 97123 BAILLIF Représentée par Monsieur Ernest Y... (Délégué syndical ouvrier)
INTIMÉ
Monsieur Serge Z... ... 97120 SAINT CLAUDE Représenté par Maître Marc MOREAU (Toque 107), avocat au barreau de la GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositio

ns de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 novembre 20...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 11 DU TREIZE JANVIER DEUX MILLE QUATORZE
AFFAIRE No : 13/ 00165
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 10 décembre 2012- Section Activités diverses.
APPELANTE
Madame Jeannette X...... 97123 BAILLIF Représentée par Monsieur Ernest Y... (Délégué syndical ouvrier)
INTIMÉ
Monsieur Serge Z... ... 97120 SAINT CLAUDE Représenté par Maître Marc MOREAU (Toque 107), avocat au barreau de la GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 novembre 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, président, Madame Françoise Gaudin, conseiller, Madame Marie-Josée Bolnet, conseiller,
Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 13 janvier 2014
GREFFIER Lors des débats : Madame Valérie Francillette, greffier.
ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par Monsieur Bernard Rousseau, président de chambre, président et par Madame Valérie Francillette, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure :
Il ressort des pièces versées aux débats et des explications fournies par les parties, que Mme Jeannette X... a travaillé comme employée de maison au service de M. Serge Z... à compter de juillet 1997.
Des bulletins de salaires lui ont été délivrés faisant apparaître des horaires mensuels très variables pouvant aller de 131 heures en mars 2004 à 25 heures en décembre 2008.
Dans une attestation du 20 juin 2008, M. Z... certifiait que Mme X... travaillait à son domicile pour effectuer du ménage et du repassage, le mardi et le mercredi de 8h à 13h30, ce qui correspond à un horaire hebdomadaire de 11 heures.
Mme X... saisissait le Conseil de Prud'hommes de Basse-Terre en référé le 9 septembre 2008, puis au fond le 13 octobre 2008 pour voir prononcer la résiliation de son contrat de travail.
Dans divers courriers adressés à Mme X... au cours de la période du 15 juillet 2008 au 7 janvier 2009, M. Z... reprochait à Mme X... des absences et retards répétés notamment certains mardis, parfois sans justification, et sans prévenir, ce qui entraînait des difficultés pour le repas des enfants et dans l'organisation du travail de Mme Z....
Il était également reproché à Mme X... de ne pas accomplir les tâches qui lui étaient confiées. Il était en outre évoqué dans l'un de ces courriers, daté du 5 décembre 2008, que Mme X... aurait travaillé depuis plusieurs années chez son employeur de 8h à 14h30 le mardi, le mercredi, le vendredi et le samedi, et qu'elle entendait ne plus venir travailler le samedi, M. Z... lui proposant de ne plus venir le vendredi mais de continuer à exercer ses tâches le samedi, jour où les époux Z... travaillaient jusqu'à 14 heures, ce qui ne leur permettait pas de préparer le repas de leurs enfants.
Après réitération de cette proposition par courrier du 28 juillet 2009 du conseil de M. Z..., celui-ci, par courrier du 31 juillet 2009, faisait savoir à Mme X..., que suite à leur entretien préalable, il lui proposait, en vu d'un " licenciement amiable ", un transaction consistant à lui verser deux mois de salaire en plus des indemnités de licenciement et du préavis.
Par courrier du 4 août 2009, M. Z... " confirmait " à Mme X... son licenciement en exposant que celle-ci avait décidé de ne plus travailler le samedi, qu'une personne avait été recrutée pour cette journée, mais que celle-ci ne souhaitait pas poursuivre ce travail, faisant valoir qu'il était difficile de recruter une employée qui accepte de travailler uniquement le samedi.
Les instances prud'homales engagées par Mme X... ayant fait l'objet de radiations en raison de sa non comparution, celle-ci demandait le 29 novembre 2010, la réinscription de l'affaire au fond, au rôle de la juridiction prud'homale.
Par jugement du 10 décembre 2012, Mme X... était déboutée de l'ensemble de ses demandes.
Par déclaration du 14 janvier 2013, Mme X... interjetait appel de cette décision.
Par conclusions notifiées à la partie adverse le 11 mars 2013, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, Mme X... sollicite le prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de M. Z... et à titre subsidiaire entend voir juger que son licenciement ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse.
Elle demande en conséquence la condamnation de M. Z... à lui payer les sommes suivantes :-50 385, 60 euros à titre de rappel de salaire pour la période de novembre 2003 à décembre 2007,-31 045, 03 euros à titre de rappel de salaire pour la période de janvier 2008 à octobre 2009,-8 143, 06 euros à titre de congés payés sur des rappels de salaire,-35 281, 62 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,-5 444, 69 euros d'indemnité légale de licenciement,-11 764, 14 euros d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,-2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme X... demande en outre d'ordonner à M. Z... de régulariser sa situation auprès des organismes sociaux et de lui remettre de nouvelles fiches de paie ou attestations de salaire pour la période de juillet 1997 à octobre 2009 et une nouvelle attestation Pôle Emploi.
À l'appui de ses demandes Mme X... expose que dès le début de la relation de travail elle n'a jamais perçu les salaires correspondant à l'horaire qu'elle effectuait effectivement, assurant un temps de présence beaucoup plus important que " la durée légale du travail effectif " et ce jusqu'à janvier 2008, date à partir de laquelle son employeur a décidé de réduire son temps de travail.
Elle explique qu'elle ne pouvait quitter son travail qu'entre 17 h et 18 h, après avoir effectué l'ensemble des tâches ménagères, lessive, repassage, nettoyage, vaisselle, préparatifs des repas, amener les enfants au sport avec sa propre voiture, les époux Z... travaillant tous deux comme chirurgiens-dentistes.
Elle soutient qu'elle effectuait au moins 51 heures 30 par semaine, à savoir du lundi au vendredi de 8 h à 17 h, et le samedi de 8 h à 14 h 30, soit 222 heures 30 par mois.
Mme X... fait valoir que plusieurs motifs justifient sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, à savoir :- le non paiement de la totalité des salaires dus puisqu'elle a effectué un horaire supérieur à celui figurant sur ses bulletins de salaire,- la modification orale du contrat travail, laquelle n'a pas été acceptée par la salariée comme le montre sa lettre du 2 septembre 2008,- le non respect des règles régissant les visites médicales telles que prévues par les articles L. 7221-2 et L. 7214-1 du code du travail.
Par conclusions notifiées à la partie adverse le 3 juillet 2013, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, M. Z... sollicite la confirmation du jugement entrepris et le rejet de l'ensemble des demandes formées par Mme X....
M. Z... explique que non seulement Mme X... n'établit pas avoir travaillé plus d'heures que celles qui furent rémunérées, mais en outre celle-ci travaillait moins d'heures que celles contractuellement prévues.
Il expose qu'aucun des éléments du travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié n'est constitué, Mme X... n'établissant pas que les heures de travail payées ne correspondaient pas aux horaires réalisés.
Pour s'opposer à la demande de résiliation judiciaire, M. Z... fait valoir que le contrat de travail a été rompu le 4 août 2009, et que faute d'un contrat à résilier, la demande ne peut être accueillie. En outre il indique que la salariée n'établit aucun manquement grave et réitéré de la part de son employeur à ses obligations fondamentales.

Motifs de la décision :
Sur les horaires de travail de Mme X... :
Au soutien de sa demande de paiement d'heures de travail accomplies mais non rémunérées, Mme X... produit une seule attestation émanant de Mme Pauline A..., laquelle, sans donner de précision de date, de période ni de durée, indique qu'elle a croisé plusieurs fois Mme X... avec les enfants dans sa voiture pour les emmener à la piscine et à la danse le mercredi, et que plusieurs fois, Mme X... sortant tard, elle a été obligée de l'attendre 30 minutes à une heure quand elles avaient rendez-vous.
Ce seul élément produit par Mme X... ne peut constituer la base d'un indice pouvant laisser penser qu'elle a effectué plus d'heures de travail qu'il ne lui a été payé. En effet l'examen de l'ensemble des bulletins de paie produits par Mme X... montre que celle-ci, à diverses périodes, a été rémunérée bien au-delà d'un horaire se limitant au mardi, mercredi, vendredi et même samedi, de 8 h à 14 h 30, s'agissant d'un horaire ressortant des courriers échangés entre les parties, en particulier celui du 5 décembre 2008 de M. Z..., soit 26 heures par semaine, Mme X... ayant souvent perçu des rémunérations mensuelles correspondant à plus de 110 heures de travail par mois et jusqu'à 131 heures, ce qui montre qu'elle était rémunérée aussi pour des prestations effectuées l'après-midi.
Aucun élément des débats ne permet donc de faire droit à la demande de Mme X... tendant au paiement d'un rappel de rémunération correspondant à des heures de travail effectuées mais non payées.
Par ailleurs il résulte de l'article L. 7221-2 du code du travail que les dispositions relatives à la durée légale du travail ne sont pas applicables aux employés de maison qui travaillent au domicile privé de leur employeur, et qu'en conséquence une employée de maison, engagée à temps partiel selon un contrat verbal, n'est pas fondée à réclamer des rappels de salaire sur la base d'un temps plein au seul motif que son contrat ne contient pas les mentions imposées par l'article L. 3123-14 du code du travail relatif notamment à l'indication de la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail et aux modalités de modifications éventuelles de la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine.
Mme X... sera donc déboutée de sa demande de rappel de salaire.
Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat travail :
Comme il vient d'être expliqué, Mme X... ne peut invoquer à l'appui de sa demande de résiliation, le non paiement de la totalité des salaires qui lui seraient dus.
Par contre elle est fondée à invoquer la modification de son contrat de travail, dans la mesure où l'employeur a reconnu dans son courrier du 5 décembre 2008 que Mme X... travaillait depuis plusieurs années selon l'horaire suivant :- de 8 h à 14 h 30 le mardi, le mercredi, le vendredi et le samedi, et qu'il a considérablement réduit les heures de travail confiées à Mme X..., puisque dans son attestation du 26 juin 2008 il certifie que cette dernière travaille à son domicile le mardi et le mercredi de 8 h à 13 h 30. Au demeurant dans l'attestation ASSEDIC qu'il a délivrée à la salariée, il est mentionné au titre de l'année 2009 des horaires mensuels variant de 27, 25 heures à 62, 5 heures de travail.
Dans son courrier du 2 septembre 2008, produit par l'employeur, Mme X... reproche à celui-ci d'avoir depuis le mois de janvier 2008 réduit son horaire de travail à une trentaine d'heures mensuelles, ce qui a considérablement réduit sa rémunération. Mme X... demandait le rétablissement de son horaire de travail.
Manifestement l'employeur n'a pas recueilli l'accord de la salariée pour effectuer cette importante réduction de la durée mensuelle de travail.
Par ailleurs, c'est à juste titre que Mme X... reproche à son employeur un manquement à ses obligations quant à la surveillance médicale due au salarié. En effet l'article L. 7221-2 du code du travail, déjà cité, précisait, dans sa version applicable lors de l'exécution du contrat de travail, que devait être appliquée à l'employée de maison, la surveillance médicale prévue à l'article L. 7214-1 du code du travail, duquel il résultait que le salarié devait être soumis à un examen médical au moment de l'embauche, mais aussi à des visites médicales périodiques renouvelées à intervalles n'excédant pas 2 ans (selon la périodicité fixée par le décret 2004-760 du 28 juillet 2004.
Les manquements ainsi reprochés à l'employeur par Mme X... sont suffisamment graves pour fonder la résiliation judiciaire du contrat de travail, laquelle ne peut prendre effet qu'au 1er novembre 2009, date de la fin du préavis faisant suite au licenciement de Mme X....
Mme X... ne fournissant aucun élément permettant d'apprécier l'étendue du préjudice résultant de la rupture du contrat travail, puisqu'elle n'a pas précisé la durée de la période de chômage qu'elle a pu subir, ni fourni aucune justification d'une telle période, son indemnisation sera fixée à la somme de 2 500 euros.
Mme X... ne pouvant prétendre à une rémunération à temps complet, comme il est expliqué ci-avant, il ne peut être fait droit à sa demande d'indemnité légale de licenciement calculé sur une telle rémunération.
Comme le montre le reçu pour solde de tout compte signé par Mme X..., et l'attestation ASSEDIC, l'employeur a versé à la salariée une somme de 2 216 euros à titre d'indemnité légale de licenciement, calculée en fonction d'une ancienneté de 12 ans et 4 mois (2 juillet 1997 à octobre 2009), et conformément aux dispositions de l'article R. 1234-2 du code du travail. Mme X... a donc été remplie de ses droits et doit être déboutée de sa demande au titre de l'indemnité légale de licenciement.
Sur l'indemnité pour travail dissimulé :
Il résulte des explications fournies ci-avant, qu'il n'est pas établi que Mme X... ait effectué des heures de travail non rémunérées et non portées sur les bulletins de salaire. En conséquence les faits de travail dissimulé n'étant pas caractérisés, Mme X... ne peut prétendre à l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L. 8223-1 du code du travail.
Comme il paraît inéquitable de laisser à la charge de Mme X... les frais irrépétibles qu'elle a exposés, il lui sera alloué la somme de 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs,
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Réforme le jugement entrepris,
Et statuant à nouveau,
Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail conclu entre M. Z... et Mme X..., à effet du 1er novembre 2009,
Condamne M. Z... à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros de dommages et intérêts pour rupture du contrat de travail imputable à l'employeur,
Condamne M. Z... à payer à Mme X... la somme de 300 euros d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que les dépens sont à la charge de M. Z...,
Déboute les parties de toute conclusion plus ample ou contraire.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13/00165
Date de la décision : 13/01/2014
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2014-01-13;13.00165 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award