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16/12/2013 | FRANCE | N°11/01576

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 16 décembre 2013, 11/01576


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COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 449 DU SEIZE DECEMBRE DEUX MILLE TREIZE

AFFAIRE No : 11/ 01576
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 10 novembre 2011- Section Commerce.
APPELANT
Monsieur Claude X......97115 SAINTE-ROSE Représenté par Maître Charles-henri COPPET (Toque 14), avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉE
SA AIR FRANCE 45, rue de Paris 95747 ROISSY CDG CEDEX Représentée par Maître Florence BARRE-AUJOULAT (Toque 1), avocat au barreau de la GUADELOUPE
r>COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 4 novembre 2013, en audience publique, de...

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COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 449 DU SEIZE DECEMBRE DEUX MILLE TREIZE

AFFAIRE No : 11/ 01576
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 10 novembre 2011- Section Commerce.
APPELANT
Monsieur Claude X......97115 SAINTE-ROSE Représenté par Maître Charles-henri COPPET (Toque 14), avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉE
SA AIR FRANCE 45, rue de Paris 95747 ROISSY CDG CEDEX Représentée par Maître Florence BARRE-AUJOULAT (Toque 1), avocat au barreau de la GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 4 novembre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, président, Mme Françoise GAUDIN, conseiller, Mme Marie-Josée BOLNET, conseiller, qui en ont délibéré.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 16 décembre 2013
GREFFIER Lors des débats : Madame Valérie FRANCILLETTE, greffier.
ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, président, et par Madame Valérie FRANCILLETTE, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

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Procédure et prétentions des parties :
Par jugement en date du 10 novembre 2011, le Conseil de Prud'hommes de Pointe-à-Pitre :- a dit qu'au moment où la procédure de licenciement a été initiée, M. Claude X...ne bénéficiait pas du statut de salarié protégé, que son licenciement reposait sur la faute grave, que le harcèlement moral invoqué n'était nullement constitué, que M. X...n'avait fait l'objet d'aucune mesure discriminatoire,- a débouté M. X...de l'intégralité de ses prétentions,- l'a condamné à payer à la Société AIR FRANCE la somme de 700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et à supporter les dépens de l'instance.

Par déclaration en date du 18 novembre 2011, le conseil de M. X...a interjeté appel de cette décision,
Par déclaration en date du 21 novembre 2011, le même conseil a réitéré son appel,
Par décision en date du 13 février 2012 les deux procédures d'appel ont été jointes,
Par conclusions no 2, notifiées le 3 janvier 2013, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, et auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé complet des moyens invoqués par M. X..., celui-ci sollicite l'infirmation du jugement déféré.
A titre principal il entend voir juger nulle la mise à pied conservatoire notifiée par courrier du 10 octobre 2009 et nulle la procédure de licenciement poursuivie en violation du statut protecteur, et voir condamner la Société AIR FRANCE à le réintégrer sous astreinte dans son emploi.
Il demande paiement par la Société AIR FRANCE des sommes suivantes :
-40 800 euros au titre de la protection spécifique, en réparation du préjudice né de la procédure de licenciement,
-172 751 euros correspondant au montant des salaires bruts augmentés de la rémunération complémentaire et de la contribution à la protection sociale primes qui auraient dû être versées depuis le licenciement, arrêtés au mois d'août 2012, actualisés à la date de l'arrêt à intervenir et augmentés des intérêts au taux légal à compter du licenciement en date du 28 décembre 2009,
-6 469, 62 euros correspondant à la prime de fin d'année de décembre 2009, 2010 et 2011 actualisée à la date de l'arrêt à intervenir et augmentée des intérêts au taux légal à compter du licenciement en date du 28 décembre 2009,
-4 200 euros correspondant à la prime uniforme annuelle de juin 2010, 2011 et 2012 actualisée à la date de l'arrêt à intervenir et augmentée des intérêts au taux légal à compter du licenciement en date du 28 décembre 2009,

-2 311 euros correspondant au montant des primes de transfert, actualisé à la date de l'arrêt à intervenir et augmenté des intérêts au taux légal à compter du licenciement en date du 28 décembre 2009,

-53 010 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement prévue par la convention collective du transport aérien augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir,
-210 048 euros au titre de l'indemnisation du licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir.
À titre subsidiaire M. X...invoque le caractère tardif de la notification du licenciement, l'absence de faute et le caractère imprécis des motifs invoqués dans la lettre de licenciement. Il entend voir juger que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et demande paiement des sommes suivantes :
-53 010 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement prévue par la convention collective du transport aérien augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir,
-210 048 euros au titre de l'indemnisation du licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir.
A titre encore plus subsidiaire il entend voir juger que le licenciement pour faute grave doit être requalifié en licenciement pour faute simple, et demande que la Société AIR FRANCE soit condamnée à lui payer les sommes suivantes :
-53 010 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement prévue par la convention collective du transport aérien augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir,
Il sollicite en tout état de cause paiement des sommes suivantes :
-10 602 euros au titre de l'indemnité de préavis augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir,
-10 200 euros au titre des heures supplémentaires non réglées augmentées des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir,
-3534 euros au titre des congés payés pour l'année 2010 augmentés des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir,
-2 156, 54 euros au titre de la prime annuelle de fin d'année non réglée en 2009, augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir,
-3400 euros au titre du droit individuel à la formation augmenté des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir,
-25 000 euros d'indemnité au titre des circonstances vexatoires ayant entouré le licenciement, augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir,

-42 408 euros d'indemnité en réparation du préjudice résultant du harcèlement moral, augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir,

-533, 16 euros au titre du remboursement des frais médicaux, augmenté des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir,
-10 000 euros en réparation du préjudice né de la perte des billets d'avion,
-42 408 euros au titre de l'indemnisation pour discrimination augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir.
M. X...entend également voir condamner la Société AIR FRANCE à le rétablir :
- dans son droit de se voir attribuer des billets d'avion à tarif réduit R1 et R2, et ce sous astreinte de 300 euros par jour de retard à compter de la demande non satisfaite de M. X...,- dans son droit de se voir attribuer un quota de 4 billets compagnon non pris en 2009, et ce sous astreinte de 300 euros par jour de retard à compter de la demande non satisfaite de M. X...,- dans son droit de se voir attribuer un quota de 4 billets compagnon non pris en 2010, et ce sous astreinte de 300 euros par jour de retard à compter de la demande non satisfaite de M. X....

M. X...demande la condamnation de la Société AIR FRANCE au paiement de la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens comprenant notamment les frais de constat d'huissier et de sommation interpellative pour un total de 440 euros.
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Par conclusions en date du 25 juillet 2013, notifiées le jour même, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, et auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé complet des moyens de la Société AIR FRANCE, celle-ci sollicite la confirmation en toutes ses dispositions du jugement entrepris et entend voir débouter M. X...de ses prétentions subsidiaires tendant à faire qualifier son licenciement en licenciement pour faute simple, de sa demande d'indemnité au titre de licenciement pour faute simple, de ses prétentions au titre des indemnités de préavis, congés payés et primes annuelles comme étant injustifiées et mal fondées, et de ses demandes au titre des circonstances vexatoires de la rupture comme étant mal fondées et injustifiées.
La Société AIR FRANCE réclame paiement de la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
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Motifs de la décision :
Sur la demande de nullité du licenciement en raison du statut protecteur invoqué par M. X...:
M. X..., rappelant qu'il avait exercé des activités syndicales tout au long de sa carrière, explique que s'il a été désigné comme délégué syndical conventionnel par l'organisation SNGAF-CFTC, par courrier du 17 septembre 2009, soit postérieurement à l'envoi de la convocation du 11 septembre 2009 pour un entretien préalable au licenciement, il fait valoir que la protection (prévue par l'article L. 2411-3 du code du travail) s'applique au salarié dont la candidature est imminente, et soutient que l'employeur avait eu connaissance de sa désignation imminente en qualité de délégué syndical conventionnel. À ce titre il invoquait les attestations de Mme Y...et de M. Z....
Il y a lieu de relever que si M. X...invoque une désignation en qualité de délégué syndical conventionnel par l'organisation SNGAF-CFTC, par courrier du 17 septembre 2009, il n'en est nullement justifié. En effet il n'est pas versé aux débats, un tel courrier.
Par contre il peut seulement être relevé que M. X...a été désigné en qualité de membre représentant le Syndicat SNGAF-CFTC au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, par courrier 24 septembre 2009 adressé au Délégué Régional Caraïbes d'Air France.
En tout état de cause les attestations produites par M. X...ne permettent pas d'établir la connaissance par la hiérarchie de celui-ci, de l'imminence de sa désignation en qualité de délégué syndical conventionnel.
Ainsi dans son attestation M. Dominique Z...indique que le 24 août 2009, il a appris au cours d'une discussion avec d'autres agents, que M. X...devait être désigné en qualité de délégué syndical. Il ne résulte cependant pas de cette attestation que l'employeur ait eu connaissance d'un tel projet de désignation.
Dans son attestation Mme Éliane A...déclare qu'en août 2009, alertés par un projet de suppression de postes dans l'entreprise, elle s'était opposée à ce projet avec M. X...en leur « qualité de délégué syndical devant être désignés à la rentrée de septembre 2009 ». Il n'est cependant pas établi que leur interlocuteur, M. Marcel D...(responsable des ressources humaines), ait été informé de ce projet de désignation.
Dans la mesure où l'engagement de la procédure de licenciement, par convocation en date du 11 septembre 200 à l'entretien préalable, n'a pas été précédé d'une désignation de M. X...à une fonction lui permettant de bénéficier de la protection instituée par les articles L. 2411-1 et suivants du code du travail, et où il n'est pas établi que l'employeur ait eu connaissance de l'imminence d'une telle désignation, le licenciement de M. X...ne peut être déclaré nul en application de ces textes.
Sur la notification tardive de la décision de licenciement :
A la suite de l'entretien préalable, l'employeur entendant faire application des dispositions du règlement intérieur, a décidé de réunir un conseil de discipline. Se prévalant de ce règlement intérieur, l'employeur, par courrier du 2 octobre 2009, a indiqué à M. X...qu'il pouvait lui faire savoir qu'il ne souhaitait pas que le conseil de discipline soit réuni.
En l'absence de réponse de M. X...à ce sujet, le président du conseil de discipline, par courrier du 19 octobre 2009, faisait savoir à M. X...que ledit conseil se réunirait le 9 novembre 2009, à Roissy afin d'émettre un avis sur la proposition de licenciement pour faute grave le concernant, et qu'il avait la possibilité de se faire assister par un défenseur choisi parmi le personnel de l'entreprise.
Entre temps, par courrier du 10 octobre 2009, l'employeur, faisant valoir qu'il avait eu connaissance de faits graves, avait notifié à M. X...une mesure de mise à pied à titre conservatoire avec solde à compter du 13 octobre 2009.
Ce courrier était complété par celui du 23 octobre 2009, dans lequel il était indiqué qu'à la suite de nouveaux faits graves intervenus le 9 octobre 2009 sur le vol AF625 et similaires à ceux pour lesquels le salarié avait fait l'objet d'une procédure disciplinaire engagée à son encontre le 11 septembre 2009, il était décidé une mise à pied à titre conservatoire. Il était précisé que compte tenu de l'arrêt maladie transmis pour la période du 12 au 31 octobre 2009, cette mise à pied ne deviendrait effective qu'à l'issue de l'arrêt maladie.
Par courriers du 19 octobre 2009, le président du conseil de discipline demandait aux délégués du personnel basés à la Délégation Régionale Guadeloupe à Pointe à Pitre, de désigner trois représentants pour participer au conseil de discipline. Malgré la protestation des délégués du personnel exprimée dans un courrier du 23 octobre 2009, dans lequel ils critiquaient la réunion du conseil de discipline à Roissy, comme étant contraire aux usages et faisant peser une contrainte sur les délégués du personnel au risque de provoquer un absentéisme, le président du conseil de discipline réitérait par courrier du 28 octobre 2009 sa demande de désignation de représentants du personnel pour le conseil de discipline qui devait se tenir le 9 novembre 2009 à Roissy.
Par courrier du 3 novembre 2009, M. X...faisait savoir au président du conseil de discipline qu'il désignait M. Christophe E..., délégué syndical ULTEA-UGTG pour le représenter lors de la procédure disciplinaire engagée à son encontre.
Dans son attestation, M. E...déclarait non seulement que depuis quarante ans il était d'usage que tous les conseils de discipline se tiennent en Guadeloupe, et que cet usage n'avait pas été dénoncé, mais qu'il n'avait jamais reçu de convocation, ni de réservation d'hôtel, ni de billet d'avion pour se rendre au conseil de discipline.
Par courrier du 30 novembre 2009, l'employeur notifiait à M. X...son licenciement pour faute grave, après avoir rappelé qu'à la suite de nouveaux faits graves intervenus le 9 octobre 2009, sur le vol AF625, une mise à pied conservatoire avec solde avait été décidée, et en précisant que la décision de licenciement reposait sur le non respect délibéré des procédures du manuel Généralités Sûreté et des consignes générales d'exploitation relatives aux règles de sûreté concernant l'enregistrement individuel et nominatif des bagages, ainsi que la taxation des excédents de bagages lors du traitement du vol du AF-625 du 4 septembre 2009.
M. X...entend se prévaloir des dispositions de l'article L. 1332-2 alinea 3 du code du travail prescrivant notamment que la sanction disciplinaire ne peut intervenir plus d'un mois après le jour fixé pour l'entretien.
Il se réfère à la convention collective du transport aérien, laquelle dans son article 19 relatif au conseil de discipline, prévoit qu'à l'issue de l'entretien préalable, toute proposition de licenciement pour faute constituant une infraction à la discipline, à l'exclusion du licenciement pour faute grave ou pour faute lourde justifiant une rupture immédiate du contrat de travail prononcée par l'employeur, est soumise pour avis à un conseil de discipline, lorsque l'intéressé en fait expressément la demande.
Il en déduit que le conseil de discipline ne pouvant être réuni qu'à la demande du salarié, et étant exclu en cas de faute grave, la réunion du conseil de discipline imposée par l'employeur le 9 novembre 2009, ne saurait justifier la prorogation du délai d'un mois pour notifier le licenciement.
Il y a lieu de constater que le règlement intérieur de l'entreprise, dans ses dispositions relatives au personnel au sol, prévoit des dispositions différentes puisque dans son article 6. 1, il est indiqué que le conseil de discipline est chargé d'examiner les propositions de sanctions du 2nd degré (telles que les licenciements pour faute simple, pour faute grave ou pour faute lourde) présentées par le chef d'établissement à l'encontre d'un salarié d'une ancienneté égale ou supérieure à 3 ans. Il est précisé que le salarié peut demander à ce que le conseil de discipline ne soit pas réuni. Il est également mentionné qu'en tout état de cause le directeur général peut de sa propre initiative demander au chef d'établissement la comparution d'un salarié devant le conseil de discipline.
Selon l'article L. 1321-3 du code du travail, le règlement intérieur ne peut contenir des dispositions contraires aux stipulations des conventions et accords collectifs de travail applicables dans l'entreprise ou l'établissement.
En l'espèce les dispositions du règlement intérieur sont contraires à celles de la convention collective en ce qui concerne l'initiative de la saisine et la nécessité d'un conseil de discipline.
Il ne peut être valablement soutenu que l'application du règlement intérieur ait été en l'espèce plus favorable aux droits du salarié.
En effet, il y a lieu de constater que sous couvert de garantie des droits du salarié, l'employeur a, en l'espèce, pris l'initiative de réunir un conseil de discipline en métropole à Roissy, sans proposer au salarié ni à la personne devant l'assister, lesquels résident et travaillent en Guadeloupe, de prendre en charge leurs frais, notamment d'hébergement, ni d'avancer leurs frais de transport.
En fixant le conseil de discipline en métropole et non au lieu de l'établissement guadeloupéen de l'entreprise, l'employeur a procédé à un détournement de la procédure telle qu'elle résulte de son règlement intérieur.
En effet il résulte des dispositions de celui-ci, que ;- le président du conseil de discipline et les membres représentant la direction sont désignés par le chef d'établissement ou son représentant,- les membres délégués du personnel devant composer le conseil de discipline sont désignés par l'ensemble des délégués de l'établissement appartenant au groupe et au collège du salarié en cause.

Il s'en déduit que le conseil de discipline doit se tenir au niveau de l'établissement dans lequel travaille le salarié en cause.
Les dispositions prises par l'employeur, en prenant l'initiative de réunir un conseil de discipline, alors que sa tenue n'est pas prévue par la convention collective, et en en fixant la tenue en métropole, ce qui a eu pour effet de faire obstacle à tout exercice effectif des droits du salarié, ont eu pour conséquence de mettre artificiellement en place une procédure non impérative, n'étendant nullement les garanties offertes au salarié pour la défense de ses droits, et d'allonger abusivement le délai séparant l'engagement de la procédure de licenciement, de la notification de la décision de licenciement, laquelle est intervenue en l'espèce plus d'un mois après l'entretien préalable.
Le dépassement de ce délai a pour conséquence de priver le licenciement de cause réelle et sérieuse.

Sur les demandes pécuniaires de M. X...résultant de la rupture du contrat de travail :

Le licenciement de M. X...n'étant pas déclaré nul, celui-ci doit être débouté des demandes ayant trait à sa réintégration et au paiement :- d'une indemnité au titre de la protection spécifique, en réparation du préjudice résultant de la procédure de licenciement,- du montant des rémunérations réclamées pour la période postérieure au licenciement, telles que salaires, primes de fin d'année, primes uniformes annuelles, primes de transfert, congés payés.

Il doit être également débouté de ses demandes de rétablissement, pour la même période, de ses avantages en nature, tels que l'octroi de billets d'avion.
Il ressort du relevé de carrière de M. X...qu'il est entré au service de l'entreprise le 9 juillet 1985. En prenant pour base un salaire moyen de 3 462, 62 euros sur les six derniers mois, et compte tenu de son ancienneté et des dispositions conventionnelles telles qu'applicables à l'époque du licenciement, il sera fait droit à sa demande de paiement d'une indemnité conventionnelle de licenciement à hauteur de 53 010 euros.
Par contre en ce qui concerne l'indemnité compensatrice de préavis, M. X...n'étant pas cadre, cette indemnité n'est due qu'à hauteur de deux mois de salaire, soit la somme de 6 925, 24 euros.
L'examen des bulletins de salaire de M. X...ne fait pas apparaître qu'il ait pris des congés payés sur ceux acquis pendant la période de référence postérieure au 31 mai 2009, en conséquence il sera fait droit à sa demande de paiement d'indemnité compensatrice de congés, laquelle sera limitée à 2 019, 86 euros compte du fait que le préavis a expiré à la fin du mois de janvier 2010.
Il ne ressort pas non plus des bulletins de paie de M. X...que celui-ci ait reçu paiement de la prime de fin d'année pour 2009, il lui est donc dû à ce titre la somme de 2 115, 27 euros.
M. X...ayant plus de 24 ans d'ancienneté dans l'entreprise et étant âgé de 52 ans au moment de son licenciement, et justifiant être resté au cours de l'année 2010 demandeur d'emploi, et avoir connu pendant cette période et jusqu'en 2012 des difficultés récurrentes avec divers organismes financiers, le préjudice résultant de son licenciement sans cause réelle et sérieuse sera indemnisé par l'octroi d'une somme de 52 000 euros correspondant à 15 mois de salaires.
Hormis les faits retenus ci-après dans le cadre du harcèlement moral allégué par M. X..., et reprochés à certains agents d'encadrement lors des dernières semaines d'exécution du contrat de travail de M. X..., la procédure de licenciement dont il a fait l'objet n'est nullement caractérisée par des circonstances brutales, vexatoires ou humiliantes. Contrairement à ce que soutient M. X..., la convocation à un conseil de discipline, ne saurait caractériser de telles circonstances, et les conditions de " tortures mentales " qu'il allègue et qui entoureraient le licenciement, ne sont nullement établies. M. X...doit donc être débouté de sa demande d'indemnisation à ce titre.
Contrairement aux dispositions de l'article L. 6323-19 du code du travail, l'employeur n'a porté dans la lettre de licenciement du 30 novembre 2009, aucune mention concernant le droit individuel à la formation dont pouvait bénéficier M. X.... S'il fait état d'un tel droit à hauteur de 93, 56 heures dans le certificat de travail remis le 1er février 2010, force est de constater que l'intéressé n'a pu en faire la demande avant la fin de son préavis. M. X...sera indemnisé à hauteur de : 9, 15 ¿ X 93, 56 = 856, 07 ¿.

Le décompte de l'épargne annuelle d'heures payables ou compensables pour l'exercice 2009, fait ressortir un total de 89, 58 heures, ce qui donne un solde cumulé de 224, 34 heures outre 6 h43 au titre de la contrepartie obligatoire en repos. M. X...ayant perçu, selon le bulletin de salaire du 31 janvier 2010 une somme de 3 287, 01 euros outre 908, 71 euros de majoration DOM pour un solde de 231, 17 heures, a été rempli de ses droits. Il doit donc être débouté de sa demande de paiement d'heures supplémentaires.

Sur le harcèlement moral allégué par M. X...:

Dès l'année 2005, dans plusieurs courriers adressés à sa hiérarchie, M. X...s'est plaint de faits de harcèlement moral. Ainsi dans un courrier du 17 septembre 2005, il fait savoir qu'à la suite d'une erreur de frappe lors d'un enregistrement, son supérieur, M. F..., a tenu à son égard des propos suspicieux et n'a cessé de faire des réflexions dévalorisant son travail, après lui avoir fait savoir qu'il " allait se faire un plaisir de s'occuper " de lui.
Dans un courrier en date du 20 mai 2005, adressé par l'avocat de M. X..., Maître Gérard B..., au Délégué Régional d'Air France, il est fait état d'une plainte du salarié selon laquelle celui-ci se serait fait traiter de chien par M. Marcel D..., responsable des ressources humaines, ce dernier lui ayant demandé de " cesser d'aboyer ".
M. X...devait relater cet incident dans un courrier adressé le 29 avril 2005 à l'inspecteur du travail en expliquant que le 25 avril 2005, étant intervenu avec des camarades délégués, auprès du chef d'escale et de M. Marcel D..., celui-ci, exaspéré, lui a tenu, devant témoins, des propos désobligeants, discourtois et méprisants, en lui interdisant de sourire, en le traitant de chien et en lui demandant de " cesser d'aboyer ". Cet incident est confirmé par l'attestation de M. Marc G..., responsable clientèle.
Dans le même courrier M. X...expose que la direction générale des ressources humaines et des relations de travail de Paris ayant demandé à ce qu'il soit libéré afin de participer à un congrès syndical, le responsable du service a catégoriquement refusé, sans qu'il y ait nécessité pour le service.
Ainsi il ressort des pièces versées aux débats, que par courrier du 1er décembre 2004, il a été fait savoir à M. X...qu'après avis de son responsable hiérarchique, il ne pouvait être libéré pour participer au congrès syndical Force Ouvrière du 12 au 15 décembre 2004 en métropole, alors que par des courriers adressés le même jour à onze autres syndicalistes, il était fait savoir à ceux-ci qu'ils pouvaient participer au même congrès, en leur indiquant les modalités d'obtention de facilités de transport.
En juillet 2007, M. X...ayant obtenu dans un premier temps le bénéfice d'une journée de récupération pour les obsèques d'un oncle, s'est vu refuser dans un deuxième temps cette récupération, alors qu'il avait des heures à compenser. Un courrier du 3 juillet 2006 du responsable des ressources humaines, montrait que M. X...accumulait les heures supplémentaires pour atteindre à cette époque un nombre supérieur à 100.
Dans un courrier du 16 septembre 2009, M. X...se plaint du comportement excessif de Mme Mylène H..., " Leader responsable " pour l'enregistrement des vols au cours de la journée du 3 septembre 2009, reprochant notamment à cette dernière de l'avoir traité de " taré ", en le rendant responsable du retard d'un vol à cause d'un client qui a dû faire vérifier le poids excédentaire d'un bagage.
Dans un courrier du même jour, adressé à Mme Marie-Ange I..., agent de maîtrise exploitation, M. X...se plaint d'être, depuis 2005, traqué comme un animal, épié, harcelé sur les moindres petits détails, faisant l'objet d'un traitement particulier, devant occuper les postes les plus ingrats.
Dans l'attestation du 22 octobre 2009, de Mme Eliane A..., il est rapporté qu'à l'issue d'une réunion du 19 octobre 2009, organisée par la direction d'Air France, afin de recevoir les organisations syndicales, M. D..., responsable des ressources humaines, a déclaré que M. X..." était un emmerdeur et que quoiqu'il en soit il aura sa peau avant son départ de la compagnie ".
L'ensemble des faits ainsi rapportés, dont la plupart sont suffisamment précis et circonstanciés et corroborés soit par des courriers, soit par des attestations, démontrent suffisamment l'existence d'agissements répétés à l'égard de M. X..., ayant pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité.
Toutefois le suivi médical de M. X...au cours de l'année 2008, jusqu'au début de l'année 2009, ne pouvant se rattacher à des faits précis et caractérisés de harcèlement moral pendant cette période, ne peut être considéré comme une conséquence du harcèlement subi. En conséquence son indemnisation sera limitée à la somme de 2 500 euros.

Sur les faits de discrimination :

Les faits de discriminations invoqués par M. X...sont résumés dans un courrier adressé le 29 décembre 2006 à l'inspection du travail, dans lequel il expose qu'il n'a été présenté à aucune promotion interne à compter de 2002, alors que deux de ses collègues répondant aux mêmes compétences et grades, étaient présentés et bénéficiaient d'avancement.
Il précise qu'il a été discriminé par rapport à ses autres collègues, citant M. J...et Mme K...qui ont bénéficié tous deux de promotions qu'il qualifie d'éclair, sous les seuils minimaux de durée prévus par la convention collective, alors qu'il a dû attendre plus de six ans, et un long et difficile combat pour obtenir ce qui aurait dû lui être accordé il y a bien longtemps.
Il résulte cependant des pièces versées au débat, qu'il a été embauché en qualité de manutentionnaire au coefficient 169 en 1985, qu'il a accédé à la qualification de manutentionnaire spécialisé en 1987 au coefficient 179, puis a occupé un emploi d'agent de service en 1992 au coefficient 193, puis a accédé à un emploi d'agent d'escale commercial en 1995 au coefficient 208, niveau A04. Il a par la suite, par obtention de points, bénéficié d'avancements successifs pour atteindre le coefficient 243, dans un emploi d'agent d'escale commercial, niveau A 09. Il a ensuite bénéficié avec l'octroi de points, d'avancements successifs, pour atteindre le coefficient 271 au 1er décembre 2006, avant d'être promu au niveau B01 de l'emploi de technicien d'escale commercial le 1er janvier 2007.
Contrairement à ce que soutient M. X..., si pour passer du niveau A09 au niveau B01 la durée minimale est bien de 24 mois, il n'est nullement prescrit que ce passage doit intervenir dans un délai de 36 mois, une durée de référence étant fixée à 48 mois.
En ce qui concerne M. X..., son passage du niveau A09 au niveau B01 est intervenu au bout de 56 mois (du 1/ 5/ 2001 au 1/ 1/ 2007).
Toutefois il résulte des dispositions régissant la filière commerciale escale, que si une durée de référence de 48 mois est indiquée, le passage du niveau A09 au niveau B01 implique la validation de degrés de compétence complémentaires dans l'activité d'origine, ou dans une activité nouvelle.
Or la fiche de validation des compétences établie le 17 février 2006, fait apparaître que pour M. X...toutes les compétences requises pour le 3 ème degré n'étaient alors pas validées. M. X...n'a émis aucune observation à ce sujet.
L'employeur précise qu'au cours de l'année 2006, M. X...a été formé à deux nouvelles activités : bagages et salon Air France. Des fiches intermédiaires établies les 22 juillet et 26 juillet 2006 confirmant ces formations dans ces nouvelles activités, l'accord du chef de service pour validation du 3 ème degré intervenant le 1er janvier 2007, permettant l'accès au niveau B01.
La différence d'évolution de carrière avec M. J...et Mme K...s'explique par la nécessité de validation de degrés de compétence.
En tout état de cause M. X...ne justifie pas qu'il soit victime d'une discrimination dans l'évolution de sa carrière en raison de ses activités syndicales, étant observé que Mme K...et M. J...exercent eux-mêmes des activités syndicales en tant que représentant de section syndicale et délégué du personnel (pièces 18 et 31 de M. X...).
En conséquence M. X...doit être débouté de sa demande d'indemnisation pour discrimination.
****
Comme il paraît inéquitable de laisser à la charge de M. X...les frais irrépétibles qu'il a exposés, tant en première instance qu'en cause d'appel, il lui sera alloué la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en ce compris les frais de sommation interpellative du 24 novembre 2009 relative à la demande de prise en charge de soins proposés par le responsable des ressources humaines, étant précisé que le procès-verbal de constat du 30 juin 2010 n'étant pas utile à la solution du litige ne peut être pris en compte ni dans les dépens, ni au titre des frais irrépétibles.
Par ces motifs,
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il dit qu'au moment où la procédure de licenciement a été initiée, M. X...ne bénéficiait pas du statut de salarié protégé, et en ce qu'il a dit que M. X...n'a fait l'objet d'aucune mesure discriminatoire,
Le réforme pour le surplus,
Et statuant à nouveau,
Condamne la Société AIR FRANCE AIR FRANCE à payer à M. X...les sommes suivantes :
-53 010 euros d'indemnité conventionnelle de licenciement,
-6 925, 24 euros d'indemnité compensatrice de préavis,
-2 019, 86 euros d'indemnité compensatrice de congés payés,
-52 000 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-2 115, 27 euros de prime de fin d'année pour 2009,
-856, 07 euros pour le droit individuel de formation,
-2 500 euros d'indemnité pour harcèlement moral,

Dit que lesdites sommes produiront intérêts au taux légal à compter de la notification du présent arrêt,

Condamne en outre la Société AIR FRANCE AIR FRANCE à payer à M. X...la somme de 4 000 euros d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que les dépens sont à la charge de la Société AIR FRANCE,
Déboute les parties de toute conclusion plus ample ou contraire.
Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/01576
Date de la décision : 16/12/2013
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2013-12-16;11.01576 ?
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