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18/11/2013 | FRANCE | N°10/00273

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 18 novembre 2013, 10/00273


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 380 DU DIX HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE TREIZE

AFFAIRE No : 10/ 00273
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes POINTE A PITRE du 10 décembre 2009- Section Commerce.
APPELANTS
Maître Marie Agnès X..., es qualité de mandataire liquidateur de la Société SYNAXIS PARTNER SAS dont le siège est ...à BAIE MAHAULT 97122 ......97190 GOSIER Représentée par Me Thierry AMOURET, (TOQUE 3), avocat au barreau de GUADELOUPE

Monsieur Osinde Y... ...... 97180 SAINTE-ANNE Représenté par Me Kari

ne LINON, (TOQUE 9), avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉE

L'A. G. S. Immeuble Eur...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 380 DU DIX HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE TREIZE

AFFAIRE No : 10/ 00273
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes POINTE A PITRE du 10 décembre 2009- Section Commerce.
APPELANTS
Maître Marie Agnès X..., es qualité de mandataire liquidateur de la Société SYNAXIS PARTNER SAS dont le siège est ...à BAIE MAHAULT 97122 ......97190 GOSIER Représentée par Me Thierry AMOURET, (TOQUE 3), avocat au barreau de GUADELOUPE

Monsieur Osinde Y... ...... 97180 SAINTE-ANNE Représenté par Me Karine LINON, (TOQUE 9), avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉE

L'A. G. S. Immeuble Eurydice-Route de Pointe Sables Centre DILLON VALMENIERE 97200 FORT DE FRANCE (MARTINIQUE) Représentées par Me Isabelle WERTER-FILLOIS, (TOQUE 8), avocat au barreau de GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 07 Octobre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, Mme Marie-Josée BOLNET, conseillère, Mme Françoise GAUDIN, Conseillère. qui en ont délibéré.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 18 NOVEMBRE 2013
GREFFIER Lors des débats Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative Principale, fft de greffière, serment préalablement prêté.

ARRET :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Madame Marie-Luce KOUAME, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédures :
M. Y... a été embauché en qualité d'analyste d'exploitation par la Société SYNAXIS PARTNER le 26 mars 2006.
La Société SYNAXIS PARTNER affectait M. Y... à la Société ORANGE CARAÏBES aux fins d'assurer des opérations techniques sur le logiciel et le réseau informatique utilisés par cette dernière société, outre une assistance technique informatique et un développement d'applications informatiques.
À compter de janvier 2007, la Société ORANGE CARAÏBES décidait de mettre fin aux prestations assurées par la Société SYNAXIS PARTNER.
Par courrier du 12 mars 2007, la Société SYNAXIS PARTNER notifiait à M. Y... son licenciement pour motif économique.
La Société SYNAXIS PARTNER faisait l'objet d'un jugement en date du 21 août 2007 du Tribunal mixte de commerce de Pointe-à-Pitre, prononçant l'ouverture d'une liquidation judiciaire.
Le 31 mars 2008, M. Y... saisissait le Conseil de Prud'hommes de Pointe-à-Pitre afin de contester son licenciement.
Par jugement du 10 décembre 2009 la juridiction prud'homale disait que le licenciement pour motif économique était sans cause réelle et sérieuse et condamnait la Société SYNAXIS PARTNER ainsi que Maître Marie-Agnès X..., liquidateur judiciaire, à payer à M. Y... la somme de 14 820 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et celle de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration du 14 janvier 2010, M. Y... interjetait appel de cette décision.
Par déclaration du 15 janvier 2010, Maître Marie-Agnès X..., ès qualités de mandataire liquidateur de la Société SYNAXIS PARTNER, interjetait également appel de cette décision.
Les deux instances d'appel étaient jointes.
**** Par conclusions notifiées aux parties adverses le 14 novembre 2011, auxquelles il était fait référence lors de l'audience des débats, M. Y... soulève l'irrecevabilité de l'appel interjeté par le mandataire liquidateur de la Société SYNAXIS PARTNER.

Sur le fond il demande l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il a réduit le montant des dommages et intérêts sollicités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Il sollicite la condamnation de la Société SYNAXIS PARTNER représentée par son mandataire liquidateur, à lui payer la somme de 29 640 euros à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il réclame enfin paiement par la Société SYNAXIS PARTNER de la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

****
Par conclusions notifiées aux parties adverses le 20 avril 2012, auxquelles il a été fait référence à l'audience des débats, la Société SYNAXIS PARTNER représentée par son liquidateur sollicite l'infirmation en toutes ses dispositions du jugement déféré et sollicite paiement de la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
En ce qui concerne l'irrecevabilité de son appel, elle indique que s'agissant d'une procédure sans représentation obligatoire, elle peut former un appel incident à l'audience des débats, ce qu'elle fait en confirmant verbalement à cette audience les conclusions écrites qu'elle a prises.
Répondant à l'argumentation de M. Y... lui reprochant l'absence de proposition de reclassement, la Société SYNAXIS PARTNER explique qu'elle n'appartenait pas à un groupe de sociétés et qu'elle ne pouvait donc rechercher des solutions de reclassement qu'en son sein ; ayant été privé de moyens de poursuivre son activité, à la suite de la rupture brutale du bénéfice du contrat qui la liait à ORANGE CARAÏBES, elle ne pouvait pas disposer de la moindre possibilité de reclassement.
**** Par conclusions notifiées aux parties adverses le 9 septembre 2011, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, l'AGS sollicite la réformation du jugement entrepris et entend voir faire une stricte application des dispositions de l'article L 1235-5 du code du travail après avoir constaté que le demandeur a moins de deux ans d'ancienneté et ne verse aux débats aucune preuve de préjudice lui ouvrant droit à des dommages et intérêts.

L'AGS demande qu'il soit jugé que l'indemnité prévue par l'article 700 du code de procédure civile ne rentre pas dans le cadre de sa garantie, qu'aucune condamnation directe ne saurait intervenir à son encontre, et qu'elle peut tout au plus être amenée à prendre en charge les créances éventuellement fixées et ce dans les limites de sa garantie.
**** Motifs de la décision :

Sur l'irrecevabilité de l'appel interjeté par le liquidateur de la Société SYNAXIS PARTNER :
Le liquidateur de la Société SYNAXIS PARTNER a formé appel le 15 janvier 2010 auprès du greffe de la cour d'appel, du jugement du 10 décembre 2009 du Conseil de Prud'hommes de Pointe-à-Pitre, lequel lui avait été notifié le 14 décembre 2009 comme le montre la mention manuscrite figurant sur l'avis de réception signé par le liquidateur.
Il y a lieu de constater que cet appel principal du liquidateur a été formé le lendemain du jour de l'expiration du délai d'un mois prescrit par l'article R. 1461-1 du code du travail.
En conséquence l'appel principal du liquidateur doit être déclaré irrecevable.
Cependant, compte tenu de la recevabilité de l'appel du salarié, le liquidateur a pu valablement former appel incident jusqu'à l'audience des débats, s'agissant d'une procédure non soumise aux dispositions de l'article 909 du code de procédure civile. Les demandes et moyens du liquidateur tendant à la réformation du jugement déféré sont donc recevables.
Sur l'indemnisation du préjudice résultant de la rupture du contrat de travail :
Il résulte des explications orales et des pièces produites que sur poursuites du Ministère Public, M. Y... s'est constitué partie civile à l'audience du 25 mai 2010 du tribunal correctionnel de Pointe-à-Pitre, lequel par jugement du 10 août 2010 a condamné la Société ORANGE CARAÏBES sur l'action publique des chefs de marchandage, prêt illicite de main-d'oeuvre et travail dissimulé, ce qui impliquait que cette société s'est vue reconnaître la qualité d'employeur de M. Y....
La juridiction pénale ayant retenu dans son jugement du 10 août 2010 que : « Orange Caraïbes étant l'employeur par personne interposée des salariés de son sous-traitant Synaxis, le délit, dès lors, de travail dissimulé se trouve établi à l'encontre d'Orange au regard des conditions réelles d'emploi, de recrutement de ces prétendus salariés de Synaxis dans la mesure où ce ne sont pas les apparences formelles qui déterminent le statut véritable des travailleurs. Et ce, alors que les dispositions du droit du travail et de la sécurité sociale ont un caractère d'ordre public qui s'oppose à toute volonté de se soustraire par des moyens artificiels visant à éluder les règles fondamentales de la protection sociale des travailleurs.

Cette fraude sophistiquée a permis à Orange d'utiliser une main-d'oeuvre bon marché, qui plus est sans avoir à en subir les contraintes. La requalification de cette relation commerciale de sous-traitance en relation de salariat permet de considérer le bénéficiaire de la prestation comme l'employeur de ceux qui l'ont exécutée, avec toutes les conséquences qui en découlent...................................................................................................................... Enfin, il a été établi que le lien de subordination juridique unissant les salariés de Synaxis à leur entreprise a été totalement transféré sur l'utilisateur à savoir Orange. »

L'analyse des relations commerciales entre SYNAXIS PARTNER et ORANGE CARAÏBES, telles qu'elles ressortent des constatations effectuées par le contrôleur du travail (figurant en pièce no 13 de M. Y...), montre que le contrat de prestations de service passé entre les deux entités, est un montage juridique et commercial mis en place de manière délibérée permettant notamment de ne pas avoir à supporter les obligations sociales et fiscales, et en éludant les lois et règlements, conventions et accords collectifs qui en découlent.
On relèvera par exemple que M. Patrick Z...est à la fois décideur et prescripteur, en sa qualité de directeur des systèmes d'information d'ORANGE CARAÏBES, et fournisseur en tant que gérant du groupe NT GROUP et actionnaire de SYNAXIS PARTNER.
Ainsi il peut être valablement reproché à SYNAXIS PARTNER, une absence de recherche de reclassement de ses salariés licenciés, auprès d'ORANGE CARAÏBES, les deux entités devant être considérées comme ayant des liens de " groupe " au sens de l'article L 1233-4 du code du travail, étant relevé qu'il n'est pas démontré que le poste occupé par M. Y... au sein de la Société ORANGE CARAÏBES ait été supprimé.
Il y a lieu de relever que la lettre du 31 août 2007 adressée par le liquidateur de la Société SYNEXIS PARTNER à la Société ORANGE CARAÏBES aux fins de recherche d'une perspective de reclassement du salarié au sein de cette dernière, est bien postérieure au licenciement.
En outre la Société SYNAXIS PARTNER ayant été le fournisseur de la main-d'oeuvre prêtée de façon illicite à la Société ORANGE CARAÏBES, et ayant permis de ce fait le travail dissimulé pour lequel cette dernière a été condamnée pénalement, est co-responsable de l'illicéité des conditions juridiques dans lesquelles M. A...a été employé. Cette illécéité a été la cause de la cessation de son emploi. En conséquence le licenciement pour motif économique initié par la Société SYNAXIS PARTNER doit être considéré comme étant sans cause réelle et sérieuse.
A l'appui de sa demande de dommages et intérêts M. Y... invoque qu'il serait resté sans emploi, et qu'il aurait été " radié par les ASSEDIC " en raison d'un problème de carte de séjour compte tenu de sa nationalité haïtienne. Toutefois l'intéressé ne produit aucun document permettant d'apprécier la réalité de sa situation personnelle professionnelle, matérielle et financière à la suite de son licenciement. En conséquence aucun élément ne permet de lui allouer une somme supplémentaire par rapport à celle accordée à juste titre par les premiers juges pour l'indemniser du préjudice résultant de la perte de son emploi et de ses revenus professionnels.
Comme il paraît inéquitable de laisser à la charge de M. Y... les frais irrépétibles qu'il a exposés, tant en première instance qu'en cause d'appel, il lui sera alloué la somme de 2 000 euros d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs,

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et en dernier ressort,
Déclare recevable l'appel interjeté par M. Y...,
Déclare irrecevable l'appel principal interjeté le 15 janvier 2010 par Me Marie-Agnès X..., ès qualités de mandataire liquidateur de la Société SYNAXIS PARTNER,
Déclare recevable son appel incident formé par voie de conclusions à l'audience des débats du 7 octobre 2013, mais le dit mal fondé,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a dit que le licenciement prononcé à l'encontre de M. Y... est sans cause réelle et sérieuse,
Le réformant pour le surplus et statuant à nouveau,
Fixe les créances de M. Y... au passif de la Société SYNAXIS PARTNER aux sommes suivantes :
-14 820 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-2 000 euros d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que les entiers dépens sont à la charge de la Société SYNAXIS PARTNER,
Déboute les parties de toute conclusion plus ample ou contraire.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/00273
Date de la décision : 18/11/2013
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2013-11-18;10.00273 ?
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