FG-MLK
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE
ARRET No 149 DU VINGT NEUF AVRIL DEUX MILLE TREIZE
AFFAIRE No : 12/ 00469
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 27 janvier 2012- Section Encadrement.
APPELANT
Monsieur Gérard X...
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97170 PETIT BOURG
Comparant en personne et assisté de Me Anis MALOUCHE (TOQUE 26), avocat au barreau de la GUADELOUPE
INTIMÉS
Maître Marie-Agnès Y..., liquidateur judiciaire de a SARL TOP ONE SURETE AERIENNE
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97190 LE GOSIER
Représentée par la SCP CAMENEN-SAMPER (TOQUE 9), avocats au barreau de la GUADELOUPE, dispensé de comparaître en application des dispositions des articles 446-1 alinéa 2 et 946 du code de procédure civile.
AGS CGEA DE FORT DE FRANCE
Lotissement Dillon Stade
10 rue des Arts et Métiers
97200 FORT DE FRANCE
Représentées par Me Isabelle WERTER-FILLOIS (TOQUE 8), avocat au barreau de la GUADELOUPE
Maître Alain Z..., administrateur judiciaire de la SARL TOP ONE SURETÉ AÉRIENNE
...
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97190 GOSIER
Représenté par Me Jérôme NIBERON de la SCP MORTON et ASSOCIES (TOQUE 104), avocats au barreau de la GUADELOUPE
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 04 Mars 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président,
Mme Marie-Josée BOLNET, Conseillère,
Mme Françoise GAUDIN, Conseillère.
qui en ont délibéré.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 29 AVRIL 2013
GREFFIER Lors des débats Mme Valérie FRANCILLETTE, Greffière.
ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC.
Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Madame Marie-Luce KOUAME, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
M. Gérard X... a été désigné gérant statutaire de la société SARL TOP ONE SÛRETÉ AÉRIENNE, au capital de laquelle il était associé minoritaire.
Il a mis fin à son mandat de gérant le 12 décembre 2008.
Par ordonnance en date du 16 décembre 2008, M. le Président du Tribunal mixte de commerce de Basse Terre a désigné Maître Z...Alain en qualité d'administrateur ad hoc de la société TOP ONE SÛRETÉ AÉRIENNE pour une durée de trois mois.
Par jugement en date du 12 mars 2009, le Tribunal mixte de commerce de Pointe à Pitre a prononcé le redressement judiciaire de ladite société et a désigné Maître Alain Z...en qualité d'administrateur judiciaire.
Par jugement du 11 juin 2009, le Tribunal mixte de commerce de Pointe à Pitre a arrêté le plan de cession de la société TOP ONE SÛRETÉ AÉRIENNE au profit des sociétés GALEA GUYANE et TIKITO SÉCURITÉ, mis fin à la période d'observation, prononcé la liquidation judiciaire de la société TOP ONE SÛRETÉ AÉRIENNE, nommé Maître Marie-Agnès Y..., ès qualités de liquidateur de ladite société, et ordonné une mesure d'expertise comptable de ladite société.
Par courrier du 3 juillet 2009, Maître Z...a notifié à M. X... son licenciement pour motif économique, sous réserve de la validité, non établie selon lui, du contrat de travail de ce dernier.
Le 16 novembre 2009, prétendant avoir été salarié, M. X... a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la condamnation du mandataire liquidateur au paiement de créances au titre d'un rappel de salaires (postérieurs au redressement judiciaire) et d'indemnités de rupture.
Par jugement de départage en date du 16 décembre 2011, le Juge départiteur du conseil des prud'hommes de Basse Terre a :
- écarté des débats les pièces numéros 20, 21 et 22 correspondant au contrat de travail du 1er décembre 2007, l'arrêt rendu le 6 avril 2009 par la cour d'appel de Basse Terre et une lettre datée du 18 mars 2009 de Me Z...,
- déclaré le conseil des prud'hommes de Basse Terre matériellement incompétent au profit du tribunal mixte de commerce de Basse Terre pour connaître du litige qui lui est soumis et dit qu'à défaut de recours, le dossier lui sera transmis.
M. Gérard X... a formé contredit à cette décision par déclaration du 10 février 2012.
Il demande à la cour d'infirmer le jugement déféré, de dire le conseil des prud'hommes compétent pour connaître du litige et d'évoquer au fond, sollicitant la condamnation de Me Y..., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société TOP ONE SÛRETÉ AÉRIENNE à lui payer les sommes suivantes :
. 2. 032, 51 € au titre du salaire impayé du 12 au 31 mars 2009,
. 9. 146, 61 € au titre des salaires impayés d'avril à juin 2009,
. 692, 92 € à titre de salaire du 1er au 7 juillet 2009,
. 233, 44 € à titre de primes de transport impayées de mars à juin 2009,
. 13, 17 € au titre de la prime de transport du 1er au 7 juillet 2009,
. 6. 097, 74 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
. 609, 77 € à titre de congés payés y afférents,
. 4. 456, 04 € à titre d'indemnité de congés payés,
. 3. 000 € à titre de dommages et intérêts pour remise tardive de l'attestation destinée à l'Assedic,
Outre la délivrance sous astreinte par le liquidateur judiciaire des documents de rupture rectifiés sous astreinte,
M. X... demande à la cour de déclarer l'arrêt à intervenir opposable à l'AGS-CGEA de Fort de France, laquelle devra garantir les créances ci-dessus fixées et sollicite la condamnation solidaire de Mes Z...et Y..., ès qualités, à lui payer une somme de 3. 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre leur condamnation aux dépens.
A l'appui, il fait valoir qu'il est titulaire d'un contrat de travail signé le 1er décembre 2007, en tant que directeur technique, parallèlement à son mandat social de gérant minoritaire et qu'il a continué à exercer ses fonctions salariées postérieurement à sa démission de gérance, sous la subordination de l'administrateur judiciaire et de l'associé majoritaire, en produisant notamment des bulletins de salaire antérieurs au redressement judiciaire portant mention de ladite qualification, sa lettre de licenciement et son certificat de travail.
Maître Y...Marie-Agnès, ès qualités de mandataire liquidateur de la société TOP ONE SÛRETÉ AÉRIENNE SARL, demande la confirmation du jugement déféré en ce que le conseil des prud'hommes de Basse Terre s'est déclaré incompétent pour connaître du litige au profit du tribunal mixte de commerce de basse Terre.
Elle conclut au débouté à titre principal de l'intégralité des demandes de M. X... et à titre subsidiaire, au débouté des demandes de condamnation à quelque titre que ce soit à son encontre ès qualités de liquidateur de la société TOP ONE SÛRETÉ AÉRIENNE et sollicite la condamnation de M. X... à lui payer, ès qualités, une somme de 1. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient que M. X... ne justifie pas de sa qualité réelle de salarié de la société TOP ONE SÛRETÉ AÉRIENNE et de l'existence d'un lien de subordination à l'égard de cette société.
Elle ajoute que l'administrateur judiciaire ne se substitue pas au chef d'entreprise et n'a vocation à le remplacer et à créer un lien de subordination.
La SELARL MICHEL – Z...-A..., administrateur judiciaire, a demandé à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de dire et juger que M. Gérard X... ne peut se prévaloir d'aucun contrat de travail l'unissant à la SARL TOP ONE SÛRETÉ AÉRIENNE en qualité de salarié, de débouter en conséquence M. X... de toutes ses demandes et de le condamner au paiement d'une somme de 5. 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
A titre infiniment subsidiaire, il demande le renvoi de l'affaire sur le fond à une autre audience pour conclusions.
Le CGEA de FORT DE FRANCE, délégation régionale de l'AGS, conclut à titre principal à la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et au débouté de toutes les demandes de M. X....
Il conteste la qualité de salarié de M. X..., sur qui repose la charge de la preuve de l'existence d'un contrat de travail et rappelle que ce dernier ne démontre pas avoir été subordonné à un supérieur hiérarchique, étant le seul représentant de la société vis-à-vis des tiers.
Subsidiairement, si l'existence d'un contrat de travail devait être retenue, le CGEA indique que M. X..., compte tenu de ses fonctions de mandataire social, associé au capital, avait intérêt à la poursuite de l'activité de la société TOP ONE SÛRETÉ AÉRIENNE et a renoncé volontairement au paiement de ses congés payés, que sur le rappel de salaire réclamé, il ne démontre pas avoir réellement travaillé durant cette période.
Le CGEA ajoute qu'aucune condamnation directe ne saurait intervenir à son encontre, les créances ne pouvant être qu'éventuellement fixées et prises en charge dans les limites de sa garantie et sollicite la condamnation de M. X... au paiement d'une somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS
Sur la compétence de la juridiction prud'homale
Attendu qu'en présence d'un contrat de travail apparent, il appartient à celui qui invoque son caractère fictif d'en apporter la preuve et d'autre part, la qualité d'associé ou de dirigeant social d'une société à responsabilité limitée n'est pas nécessairement exclusive de celle de salarié.
Que M. X..., tout en étant associé minoritaire dans la SARL TOP ONE SÛRETÉ AÉRIENNE, se prévaut d'un contrat de travail et verse en cause d'appel, un contrat à durée indéterminée en date du 1er décembre 2007, des bulletins de salaire y afférents et une lettre de licenciement le concernant.
Attendu que l'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu'elles ont données à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité.
Que le lien de subordination, élément caractéristique du contrat de travail, est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.
Qu'en premier lieu, le contrat de travail produit est conclu entre la société TOP ONE SÛRETÉ AÉRIENNE, représentée par son gérant statutaire, M. X... et ce dernier en qualité de salarié, pour un emploi de directeur technique au sein de ladite société.
Que ce contrat conclu par le gérant n'a pas été soumis à l'assemblée générale des associés, conformément à l'article L. 223-19 du code du commerce.
Qu'il est en contradiction avec la date d'ancienneté remontant au 1er décembre 2006, figurant sur certains des bulletins de salaire produits par M. X....
Que dès lors que ce dernier qui se prétend salarié exerçait un mandat social, un tel contrat de travail irrégulier assorti de bulletins de salaire, de même que la notification d'une lettre de licenciement par l'administrateur judiciaire sont des éléments insuffisants à créer l'apparence d'un contrat de travail.
Qu'il appartient en conséquence à M. X... d'apporter la preuve de l'existence d'un contrat de travail avec la société TOP ONE SÛRETÉ AÉRIENNE.
Qu'il ne justifie pas en l'espèce avoir exercé effectivement des fonctions techniques distinctes de celles d'administration et de gestion inhérentes aux fonctions de gérant d'une SARL, alors que les activités de sécurité privée nécessitent plus de la gestion de personnel ou des fonctions commerciales que des fonctions techniques.
Que le courrier qu'il a adressé le 2 janvier 2009 à Maître Z..., alors administrateur ad hoc de la société, ne saurait établir un lien de subordination à l'égard de l'administrateur ou révéler l'existence de fonctions salariées subordonnées, M. X... s'y plaignant de l'absence de reconnaissance par la secrétaire de sa qualification de directeur technique.
Que M. X..., qui ne justifie pas, antérieurement à l'ouverture de la procédure collective de l'employeur, avoir été soumis à des instructions précises émanant de l'associé majoritaire par exemple, avoir dû tenir des comptes rendus d'activité, avoir justifié de ses horaires, de ses absences ou de ses congés, ni avoir été sanctionné durant ladite période, ne peut valablement soutenir qu'à partir de la désignation de Maître Z..., il s'est trouvé placé sous la subordination de ce dernier.
Que certes, si Maître Z...a été désigné dès le 16 décembre 2009 pour « gérer tant activement que passivement la société sur le plan administratif et financier », il n'en est pas devenu pour autant l'employeur et les salariés restaient sous l'autorité directe et la responsabilité du chef d'entreprise, ainsi que le rappelait Me Z...à Messieurs X... et B..., associés de la société TOP ONE SÛRETÉ AÉRIENNE, dans un courrier du 18 mars 2009.
Qu'en effet, la nomination d'un administrateur ad hoc, voire ensuite d'un administrateur judiciaire dessaisit nécessairement l'employeur de certains de ses pouvoirs, elle ne crée pas pour autant un lien de subordination entre cet administrateur et le mandataire social ou ancien mandataire social.
Qu'enfin, le maintien de la rémunération antérieurement perçue en qualité de gérant durant les mois de janvier et février 2009 ne peut être retenu, à lui seul, en l'absence d'exercice effectif de fonctions techniques distinctes, pour établir la validité du cumul de fonctions et ce, alors qu'il résulte du dossier que M. X... aurait rétracté sa démission de gérant le 7 janvier 2009.
Que dès lors, la preuve d'un contrat de travail n'étant pas rapportée en la cause, il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré le conseil des prud'hommes de Basse Terre incompétent au profit du tribunal de commerce de Basse Terre.
Sur l'évocation
Attendu que la cour d'appel, investie de la plénitude de juridiction, n'est pas saisie en l'espèce par l'effet dévolutif de l'appel et la dévolution ne s'opère pas, même si elle est juridiction d'appel relativement au tribunal mixte de commerce de Basse Terre compétent pour connaître du litige ;
Qu'il y a lieu de rejeter la demande d'évocation formée par M. X....
Que ce dernier, succombant, supportera les frais de contredit, sans qu'il y ait lieu, compte tenu de sa situation économique, de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Me Y..., ès qualités, de la SELARL MICHEL – Z...-A..., ès qualités et du CGEA de Fort de France.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Déclare régulier et recevable en la forme le contredit formé par la M. Gérard X... à l'encontre du jugement de départage du Conseil des prud'hommes de Pointe à Pitre du 16 janvier 2012.
Confirme le jugement entrepris en ce que le conseil des prud'hommes s'est déclaré incompétent en raison de la matière, au profit du tribunal mixte de commerce de Pointe à Pitre et a renvoyé l'affaire devant ladite juridiction.
Rejette toute autre demande.
Dit que M. X... supportera les frais du-dit contredit.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,