La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/04/2013 | FRANCE | N°11/014931

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, 04, 22 avril 2013, 11/014931


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE CHAMBRE SOCIALE

ARRET No 142 DU VINGT DEUX AVRIL DEUX MILLE TREIZE
AFFAIRE No : 11/ 01493
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 21 septembre 2011, section activités diverses.
APPELANTE
ASSOCIATION LE MONDE DE L'ENFANT, 20 avenue de l'Ouest-Raizet 97139 LES ABYMES Représentée par Me WERTER substituant Me Charles NICOLAS (TOQUE 69) avocat au barreau de GUADELOUPE
INTIMÉE
Madame Anecy X... épouse Y... ... 97115 SAINTE ROSE Représentée par Me FANFANT de la SELARL EXCELEGIS (TOQUE

82) avocats au barreau de GUADELOUPE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des ...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE CHAMBRE SOCIALE

ARRET No 142 DU VINGT DEUX AVRIL DEUX MILLE TREIZE
AFFAIRE No : 11/ 01493
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 21 septembre 2011, section activités diverses.
APPELANTE
ASSOCIATION LE MONDE DE L'ENFANT, 20 avenue de l'Ouest-Raizet 97139 LES ABYMES Représentée par Me WERTER substituant Me Charles NICOLAS (TOQUE 69) avocat au barreau de GUADELOUPE
INTIMÉE
Madame Anecy X... épouse Y... ... 97115 SAINTE ROSE Représentée par Me FANFANT de la SELARL EXCELEGIS (TOQUE 82) avocats au barreau de GUADELOUPE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 décembre 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre et Mme Marie-Josée BOLNET, conseillère
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, M. Jean DE ROMANS, Conseiller, Mme Marie-Josée BOLNET, Conseillère,
Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 4 février 2013 puis le délibéré a été successivement prorogé jusqu'au 22 avril 2013
GREFFIER Lors des débats Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative Principale, faisant fonction de greffière, serment préalablement prêté.
ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative Principale, fft de greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE :
Mme Anecy Y..., née X..., a été embauchée par l'Association le MONDE DE L'ENFANT, gérant une crèche, par contrat de travail à durée déterminée sous forme d'un contrat d'Accompagnement dans l'Emploi (C. A. E.) pour une période de 24 mois à compter du 1er août 2008 jusqu'au 31 juillet 2010.
Le 14 novembre 2009, l'employeur adressait à la salariée un avertissement lui reprochant son comportement irrespectueux du vendredi 13 novembre 2009 à l'égard de la directrice de l'établissement et la mise en danger de l'équilibre psychologique des autres salariés et des enfants pris en charge par la structure.
Le 25 novembre 2009, Mme Anecy Y... recevait une lettre de son employeur l'informant de sa mise à pied temporaire à titre de mesure conservatoire.
Par lettre du 7 décembre 2009, elle était convoquée à un entretien préalable à une éventuelle procédure de licenciement pour faute.
Madame Anecy Y... recevait le 24 décembre 2009 la notification de la rupture anticipée de son contrat de travail pour faute grave.
Contestant cette rupture, elle saisissait le conseil de prud'hommes de Pointe – à – Pitre aux fins d'obtenir diverses sommes.
Par jugement contradictoire du 21 septembre 2011, la juridiction prud'homale a :- jugé que le licenciement opéré n'est pas constitutif d'une faute grave,- condamné l'Association le MONDE DE L'ENFANT, en son représentant légal, à verser à Mme Y... les sommes suivantes : · 10 707, 95 € au titre des salaires de décembre 2009 à juillet 2010 (151, 67 € x 80 % x 11, 0313/ taux horaire x 8 mois), · 200 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- rappelé que les rémunérations et indemnités mentionnées à l'article R. 1454-14 du code du travail, dans la limite de 9 mois de salaire calculés sur la moyenne des 3 derniers mois, sont de droit exécutoire en application de l'article R1454-28 du code du travail, la moyenne des trois deniers mois de salaires s'élevant à 1673, 41 €,- débouté Mme Y... du surplus de ses demandes,- débouté l'Association le MONDE DE L'ENFANT de sa demande reconventionnelle au titre de 700 du code de procédure civile,- condamné la même aux éventuels dépens.
Par déclaration enregistrée le 13 octobre 2011, l'Association le MONDE DE L'ENFANT interjetait appel de cette décision.
Par ordonnance du 16 janvier 2012, le président de la chambre sociale a déclaré irrecevable l'appel de l'Association au visa des articles 1635 bis Q du code général des impôts et des articles 62-5 et 963 du code de procédure civile.
Par ordonnance du 17 février 2012, l'ordonnance précitée était rétractée et l'appel déclaré recevable.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Par conclusions écrites soutenues à l'audience du 3 décembre 2012, l'Association, représentée, demande à la Cour de :- déclarer recevable son appel,- Infirmer le dit jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer à Mme Y... les sommes de 10 707, 95 € au titre des salaires de décembre 2009 à juillet 2010 et de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- statuer à nouveau en jugeant que la rupture du contrat de travail était justifiée par la faute grave commise par Mme Y...,- condamner celle-ci à lui payer la somme de 1200 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens dont distraction au profit de Maître Charles J. NICOLAS pour ceux dont il a fait l'avance.
Elle fait d'abord observer qu'il existe une contradiction entre le dispositif du jugement du 21 septembre 2011 et les motifs qui y sont exposés ; que considérant que le licenciement opéré ne constitue pas une faute grave, le conseil de prud'hommes a ainsi jugé que la rupture du contrat de travail de Mme Y... ne constitue pas une faute de l'employeur et que dans ces conditions, elle ne peut être condamnée à verser les salaires dus jusqu'au terme du CDD.
Elle soutient ensuite que si la Cour décidait de ne pas réformer le jugement sur ce point, il fallait qu'elle procède à une analyse objective des faits reprochés à Mme Y... lesquels caractérisent bel et bien la faute grave ; qu'en effet, cette personne s'est emportée sans commune mesure lorsqu'il lui a été présenté un avenant à son contrat de travail, d'ailleurs sollicité par elle dans le cadre d'une demande de passage à temps partiel afin de bénéficier d'un congé PAJ ; que le 13 novembre 2009, pendant plus de 30 minutes, Mme Y... a insulté sa supérieure hiérarchique en français et en créole, l'a menacée et a vociféré au point que les enfants de la crèche se sont réveillés et se sont mis à pleurer ; que les propres collègues de la salariée ont été choqués par ses hurlements et menaces ; que le Docteur Z..., en charge du suivi médical des enfants de la structure et présent dans les locaux ledit jour, indiquait qu'il a été contraint d'examiner certains membres du personnel présentant des troubles anxieux, pleurant, et stressés, et « qu'une telle situation était inadmissible car elle touche le fondement et le principe de la crèche qui doit assurer la sécurité et le calme des enfants » ; que tout le personnel de la crèche reconnait que Mme Y... est d'humeur changeante et a un caractère impulsif qui s'oppose à son maintien au sein de la structure ; que ces faits caractérisent très clairement la faute grave, ce que les premiers juges ont refusé d'admettre en considérant que son comportement s'expliquait par un accouchement récent ; que cet argument est loin d'être convainquant dans la mesure où l'avenant au contrat de travail de l'intéressée tenait compte de ses demandes ; qu'en outre, seul aurait pu être opposée à l'employeur la protection particulière accordée à la salariée ayant accouché, ce qui n'est pas le cas car l'employeur justifie d'une faute non liée à l'état de grossesse de la salariée.
Par conclusions notifiées à l'appelante le 25 mai 2012 et reprises à l'audience des plaidoiries, Mme Y..., valablement représentée, demande à la Cour de confirmer le jugement du 21 septembre 2011 en toutes ses dispositions, de condamner l'Association LE MONDE DE L'ENFANT à lui payer la somme de 2 676, 99 € à titre de reliquats de salaire de décembre 2009 à juillet 2010, la somme de 1 544, 38 € à titre d'indemnité de congés payés et la somme de 1500 € à titre de dommages et intérêts pour non-conformité des documents légaux, d'ordonner la remise des documents légaux (bulletins de paie, attestation de travail, attestation Assedic) conformes, sous astreinte de 30 € par jour de retard à compter de l'arrêt et la condamner à lui payer la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens dont distraction au profit de la SELARL EXCELEGIS.
Elle expose qu'eu égard aux articles L. 1243-1 et L. 1243-2 du code du travail, la rupture anticipée d'un contrat de travail à durée déterminée ne peut intervenir à l'initiative de l'employeur qu'en cas de faute grave du salarié et que c'est à bon droit que l'Association LE MONDE DE L'ENFANT a été condamnée à lui verser l'intégralité de ses salaires, puisque la faute grave n'a pas été retenue contre elle ; qu'en outre, l'employeur ne peut pas sanctionner deux fois un salarié pour les mêmes faits, y compris par un avertissement ; que par courrier du 14 novembre 2009, l'Association LE MONDE DE L'ENFANT lui a adressé un avertissement pour conduite irrespectueuse à la suite des évènements du 13 novembre 2009 ; qu'elle ne pouvait voir rompre son contrat pour les mêmes faits et qu'ainsi, la rupture de son CDD est donc nulle ; que son comportement ne peut en aucun cas être considéré comme une faute grave, alors qu'elle a tout simplement perdu son calme face à la directrice de la crèche lorsqu'il lui a été demandé de signer l'avenant de son contrat qui portait sur une diminution de son temps de travail sur 30 heures au lieu de 28 heures et que l'Association du MONDE DE L'ENFANT considérait le lendemain comme un fait justifiant d'un simple avertissement ; qu'en outre, le docteur Z... n'était pas présent le 13 novembre 2009 et n'a eu qu'une version rapportée du déroulement des faits.
Elle précise que pour déterminer le montant des salaires, le Conseil de prud'hommes de Pointe – à – Pitre a pris comme base de référence les salaires du temps partiel de 80 % estimant que le complément était payé par la PAJE ; qu'étant mise à pied à compter du 1er décembre 2009 et privée d'emploi, elle n'a pas perçu ce complément ; que de fait, la base de calcul aurait dû être réalisée sur un temps plein ce qui justifie sa demande de 2676, 99 €.
Elle dit également qu'elle est en droit de percevoir les congés payés jusqu'à la fin de son CDD, soit le 31 juillet 2010, à concurrence de 1544, 38 € pour 20 jours supplémentaires (2, 5 x8 mois) à temps plein au taux horaire de 11, 033 € ; qu'enfin, le certificat de travail ainsi que l'attestation Assedic ne sont pas conformes car la lettre de la rupture est du 24 décembre 2009, ce qui lui a causé un dommage qui mérite réparation à hauteur de 1500 €.

MOTIFS DE LA DECISION :
SUR L'AVERTISSEMENT DU 14 NOVEMBRE 2009 ET LA LETTRE DE RUPTURE DU 24 DECEMBRE 2009
Attendu que par lettre du 14 novembre 2009, Mme Y... a fait l'objet d'un avertissement au sens de l'article L. 1331-1 du code du travail pour des faits d'insultes et de menaces vis-à-vis de sa directrice et d'hystérie sur le lieu de travail en présence de ses collègues et des enfants pris en charge par la structure, lesquels sont intervenus le 13 novembre 2009 ; que dans cette lettre d'avertissement, il était demandé à la salariée de fournir un certificat médical attestant qu'elle était en état de reprendre le travail « dans les meilleures conditions de travail sans stress, nervosité et états migraineux ou de se rapprocher du médecin de la crèche le docteur Z... » ; qu'il était également question pour la direction de réévaluer ses horaires de travail et sa fiche de poste ;
Attendu que les faits reprochés à Mme Y... dans la lettre de rupture du contrat de travail du 24 décembre 2009 et constitutifs de la faute grave pour l'employeur sont principalement ceux du 13 novembre 2009 ;
Attendu qu'une même faute ne peut faire l'objet de deux sanctions successives et le fait que la première sanction n'ait pas été suivie d'effet n'autorise pas à appliquer une nouvelle sanction aux même faits ;
Attendu que les autres faits invoqués dans la lettre de rupture du 24 décembre 2009 (la recherche du conflit et l'insubordination de la salariée) ne sont pas suffisamment caractérisés pour être retenus à eux seuls comme une faute grave ;
Qu'il convient dès lors de confirmer le jugement entrepris sur l'absence de faute grave.
SUR LE RELIQUAT DU SALAIRE DE DECEMBRE 2009 A JUILLET 2010
Attendu que Mme Y... est remplie de ses droits salariaux par la présente décision reconnaissant que la rupture du contrat de travail ne lui est pas imputable pour faute grave ;
Attendu que bénéficiaire de l'allocation PAJE, elle ne rapporte pas la preuve des modalités de versement de celle-ci qui ont été retenues dans son cas et qui la priveraient d'une partie de ses droits ;
Qu'il convient alors de confirmer le jugement entrepris sur ce chef.
SUR L'INDEMNITE DE CONGES PAYES
Attendu que le salarié sous contrat de travail à durée déterminée a droit à une indemnité compensatrice de congés payés acquis à la date de la rupture du contrat suivant les dispositions de l'article L. 1242-16 du code du travail ; qu'en cas de rupture anticipée abusive du contrat par l'employeur, le salarié ne peut bénéficier d'une indemnité de congés payés entre la rupture anticipée et le terme du contrat dans la mesure où aucune disposition légale n'assimile cette période à du temps de travail effectif ;
Attendu que Mme Y... sollicite ses congés jusqu'à la fin de son contrat de travail, soit le 10 juillet 2010, à concurrence de la somme de 1544, 38 € ;
Attendu qu'eu égard au principe précité, sa demande ne peut être que rejetée.
SUR LA DEMANDE DE DOMMAGES ET INTERÊTS
Attendu que Mme Y... ne verse aucun document de Pôle EMPLOI justifiant un mauvais calcul de ses droits aux indemnités-chômage et le versement de dommages et intérêts en réparation du préjudice en résultant ;
Que dès lors, sa demande est rejetée.
SUR LA REMISE DE DOCUMENTS CONFORMES (bulletins de paie, attestation de travail, attestation Assedic)
Attendu que cette demande est partiellement justifiée ; qu'en effet, les bulletins de paie ne seront pas délivrés car il n'y a pas eu de travail effectif sur la période de décembre 2009 à juillet 2010 ;
Qu'en revanche, il y a lieu d'ordonner à l'Association LE MONDE DE L'ENFANT la remise à Mme Y... d'une attestation de travail et d'une attestation Pôle EMPLOI conformes au présent arrêt, sans pour autant assortir cette délivrance d'une quelconque astreinte ;
PAR CES MOTIFS :
La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort :
Déclare l'appel recevable ;
Confirme le jugement du 21 septembre 2011 ;
Y ajoutant,
Ordonne à l'Association LE MONDE DE L'ENFANCE la remise à Mme Anecy Y... de l'attestation Pôle EMPLOI et l'attestation de travail conformes au présent arrêt ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette les autres demandes ;
Condamne l'Association LE MONDE DE L'ENFANCE, en la personne de son représentant légal, au paiement des éventuels dépens sont distraction au profit de la SELARL EXCELEGIS ;
Le greffier Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : 04
Numéro d'arrêt : 11/014931
Date de la décision : 22/04/2013
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2013-04-22;11.014931 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award