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11/03/2013 | FRANCE | N°12/00232

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 11 mars 2013, 12/00232


VF-BR

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 79 DU ONZE MARS DEUX MILLE TREIZE

AFFAIRE No : 12/ 00232
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 18 novembre 2008, section activités diverses.
APPELANTE
ASSOCIATION GUADELOUPEENNE POUR LA SAUVEGARDE DE L'ENFANCE A L'ADULTE (AGSEA), anciennement dénommée Association Départementale pour la Sauvegarde de l'Enfance et de l'Adolescence de Guadeloupe (ADSEA 97) Institut Médico-Educatif " Les Gommiers " Blanchet 97113 GOURBEYRE Représentée par Me BERLET subs

tituant Me Lise CORNILLIER, (avocats au barreau de PARIS)

INTIMÉE
Madame Claire ...

VF-BR

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 79 DU ONZE MARS DEUX MILLE TREIZE

AFFAIRE No : 12/ 00232
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 18 novembre 2008, section activités diverses.
APPELANTE
ASSOCIATION GUADELOUPEENNE POUR LA SAUVEGARDE DE L'ENFANCE A L'ADULTE (AGSEA), anciennement dénommée Association Départementale pour la Sauvegarde de l'Enfance et de l'Adolescence de Guadeloupe (ADSEA 97) Institut Médico-Educatif " Les Gommiers " Blanchet 97113 GOURBEYRE Représentée par Me BERLET substituant Me Lise CORNILLIER, (avocats au barreau de PARIS)

INTIMÉE
Madame Claire Y...... 97113 GOURBEYRE Comparante en personne assistée de Me EZELIN de la SCP EZELIN-DIONE (TOQUE 96) avocats au barreau de la GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Janvier 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre et Mme Marie-Josée BOLNET, conseiller,
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, M. Jean de Romans, Conseiller, Mme Marie-Josée BOLNET, conseiller

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 4 mars 2013 puis le délibéré a été prorogé au 11 mars 2013.
GREFFIER Lors des débats Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative Principale, faisant fonction de greffier, serment préalablement prêté.
ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC.

Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Valérie FRANCILLETTE, Greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure :

Par jugement du 18 novembre 2008 no 08/ 00145, le Conseil de Prud'hommes de Basse-Terre, jugeant que la prime de technicité sollicitée par Mme Y..., salariée de l'Association Départementale pour la Sauvegarde de l'Enfance et de l'Adolescence de la Guadeloupe, devenue Association Guadeloupéenne pour la Sauvegarde de l'Enfance et de l'Adolescence, ci-après désignée AGSEA, devait lui être versée, a condamné ladite association à lui payer la somme de 24 768, 50 euros à titre de rappel de salaire outre 950 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'association était condamnée aux entiers dépens de l'instance.
Sur appel interjeté par l'Association AGSEA, la Cour d'appel de Basse-Terre, par arrêt du 17 mai 2010, a confirmé la décision entreprise sauf en ce qu'elle avait accordé à la salariée la somme de 950 euros au titre de l'article 700 du code de procédure, déboutant celle-ci de sa demande de paiement de ladite somme, et précisant que le rappel de salaire fixé par le premier juge correspondait à un usage mis en oeuvre unilatéralement par l'Association AGSEA au bénéfice de la salariée et devait s'analyser en une prime de « vie chère ».
Par arrêt du 9 novembre 2011, la Cour de Cassation cassait et annulait en toutes ses dispositions l'arrêt du 17 mai 2010 et renvoyait les parties devant la Cour d'appel de Basse-Terre autrement composée.
Par plis recommandé du 20 décembre 2011, l'Association AGSEA saisissait la Cour d'appel de Basse-Terre suite au renvoi ordonné par l'arrêt du 9 novembre 2011 de la Cour de Cassation.
Par conclusions reçues le 14 septembre 2012, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, l'Association AGSEA expose qu'elle gère des établissements et services recevant et prenant en charge des enfants et des adolescents qui lui sont confiés par l'aide sociale à l'enfance, le juge des enfants ou la sécurité sociale, et que les missions de service public qui lui sont confiées, sont financées à 100 % par des fonds publics, attribués par arrêtés de tarification annuels. L'Association AGSEA indique disposer ainsi de budgets déterminés par les pouvoirs publics au travers des arrêtés tarification annuels et par le Ministère chargé des affaires sociales qui doit agréer l'ensemble des dispositions applicables en matière de salaire et avantages sociaux afin que ces derniers prennent effet, conformément aux dispositions de l'article L314-6 du code de l'action sociale et des familles.
L'Association AGSEA explique qu'au cours des années 70, le secteur médico-social privé non lucratif en plein développement en Guadeloupe fut confronté à une importante pénurie de personnel qualifié dans le secteur de l'éducation spécialisée, et que face à ce problème les pouvoirs publics ont décidé de financer une gratification supplémentaire équivalente à 30 % du salaire mensuel de base afin d'attirer du personnel éducatif et para-médical qualifié ainsi que des cadres de direction, les autorités de tarification ayant programmé pendant plusieurs années cette majoration de rémunération des salariés qualifiés dans les budgets de l'ensemble des établissements et services sociaux et médico-sociaux à but non lucratif comme l'Association AGSEA.
Elle précise que cette gratification ne fit l'objet d'aucun accord collectif et ne fut jamais agréée par le ministre compétent, en violation de la loi du 30 juin 1975. Toutefois recevant le financement de cette prime, l'Association AGSEA l'a versée aux salariés remplissant les conditions de qualification.
L'Association AGSEA indique qu'en 1990, l'objectif de rattrapage du déficit en personnel ayant été atteint, les autorités de tutelle ont gelé le niveau de majoration salariale au montant perçu au 31 décembre 1993, et que les salariés des services administratifs et des services généraux n'ayant jamais perçu de prime de technicité, puisque ne remplissant pas les conditions pour en bénéficier, ont sollicité des rappels de salaire en arguant d'une discrimination à leur égard par rapport aux catégories de personnel visées par la prime de technicité, ajoutant que depuis l'entrée en vigueur d'un accord conventionnel applicable dans toute la Guadeloupe, le 1er janvier 2006, tous les salariés, sans distinction, bénéficient d'une prime de vie chère de 20 % qui s'est substituée à toutes les primes, de toute nature, auparavant versées.
L'Association AGSEA qui sollicite l'infirmation du jugement déféré, ainsi que le rejet des demandes de la requérante, soutient qu'elle pouvait valablement réserver le versement d'une gratification aux catégories des personnels éducatif, de direction et para-médical, et que la requérante qui ne fait pas partie de ces catégories professionnelles n'est pas victime de discrimination.
Elle entend voir juger qu'à défaut d'agrément ministériel, le versement de la prime de 30 % ne peut donner lieu à aucun rappel de salaire car il ne vaut pas usage et donc engagement de la part de l'Association AGSEA, et qu'en l'absence de financement des autorités publiques, les conditions de l'usage d'un maintien de la prime de technicité à hauteur de 30 % ne sont pas remplies.
Elle relève que la prime de 30 % a été valablement substituée par l'entrée en vigueur à compter du 1er janvier 2006 de l'accord collectif conventionnel en date du 3 novembre 2005, et qu'en tout état de cause la demande portant sur la période postérieure au 31 décembre 2005 est mal fondée, ajoutant que les demandes de rappel de salaire correspondant à la période antérieure au 14 mai 1999 sont prescrites par l'effet de l'article 2224 du Code civil.

L'Association AGSEA demande paiement par l'intimée, de la somme de 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

****
Mme Y..., représentée par son conseil, sollicite la confirmation du jugement entrepris.
À l'appui de ses demandes elle soutient que la prime de 30 % attribuée à une partie du personnel est bien une prime de vie chère liée, non à la qualification du personnel, mais à la situation économique et au niveau des prix en Guadeloupe, et que si la prime a pris le caractère de prime de vie chère, aucun principe ne peut s'opposer à son octroi.
En particulier il ne saurait être payé à l'intérieur d'une entreprise une prime de vie chère à une seule catégorie de salariés, les salariés administratifs et des services généraux ne pouvant en être exclus.
En ce qui concerne les salariés n'appartenant pas à cette dernière catégorie, leur prime ne pouvait être ni gelée, ni supprimée sans leur accord, s'agissant d'avantages contenus dans les contrats de travail individuels. Invoquant le principe « à travail égal salaire égal » il est fait valoir que tous les salariés qui exercent les mêmes métiers, les mêmes fonctions et les mêmes responsabilités doivent être traités de la même manière.
****
Motifs de la décision :
Il résulte des pièces versées aux débats, que Mme Y...occupe au sein de l'Association AGSEA un poste d'agent de service.
Cette salariée n'a pas été bénéficiaire de la prime de technicité de 30 %.
Le principe « à travail égal, salaire égal, » implique, selon les dispositions de l'article L3221-4 du code du travail, que doivent être considérés comme ayant une valeur égale, les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charges physiques ou nerveuses.
En réservant l'attribution de la prime de technicité au personnel éducatif et paramédical qualifié ainsi qu'aux cadres de direction, le principe sus énonçé a été respecté dans la mesure où ce personnel avait des connaissances et une pratique professionnelle particulières, ainsi que des capacités et des responsabilités les distinguant du personnel éducatif moins qualifié et du personnel administratif et des services généraux.
Les critères d'attribution de la prime de technicité, visant un personnel à compétence particulière, afin de rendre plus attractif ce type d'emploi pour satisfaire les besoins de l'Association AGSEA, sont étrangers à la notion de « prime de vie chère », laquelle a été instituée à compter du 1er janvier 2006, dans le cadre de considérations économiques propres à la Guadeloupe, et appliquée de façon générale à l'ensemble des salariés de l'Association AGSEA.
En conséquence l'intimée qui ne remplissait pas, de par ses fonctions, les conditions d'attribution de la prime de technicité, doit être déboutée de sa demande de rappel de salaire à ce titre. Le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu'il lui a alloué la prime de 30 %.
Par ailleurs dans la mesure où dans un établissement privé gérant un service médico-social à but non lucratif, dont les dépenses de fonctionnement sont, comme en l'espèce, supportées directement par une personne morale de droit public, un accord collectif à caractère salarial ne peut légalement prendre effet qu'après agrément ministériel, un usage est soumis aux mêmes conditions.
Ainsi le versement de la prime de technicité accordée au personnel qualifié éducatif, para-médical et de direction, qui n'a été soumis à aucun agrément ministériel, ne peut avoir valeur d'usage engageant l'employeur à l'égard de ses salariés, ladite prime ne pouvant être considérée comme un avantage acquis collectif.
L'équité n'implique pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs,

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et en dernier ressort,
Infirme le jugement no 08/ 00145 en date du 18 novembre 2008 du Conseil de Prud'hommes de Basse-Terre,
Et statuant à nouveau,
Déboute la requérante de sa demande de paiement de prime de technicité,
Dit que les dépens sont à la charge de l'intimée,
Déboute l'association de toute conclusion plus ample ou contraire.
Le Greffier, Le Président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12/00232
Date de la décision : 11/03/2013
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2013-03-11;12.00232 ?
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