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04/03/2013 | FRANCE | N°11/01471

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 04 mars 2013, 11/01471


FG-VF
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 68 DU QUATRE MARS DEUX MILLE TREIZE
AFFAIRE No : 11/ 01471
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 6 septembre 2011- Section Industrie.
APPELANTE
EURL PRADEL DOMINIQUE Dugommier 97120 SAINT-CLAUDE/ GUADELOUPE Représentée par Maître Vathana BOUTROY-XIENG (Toque 117) substituée par Maître CHERY, avocat au barreau de la Guadeloupe
INTIMÉ
Monsieur Victor X... ... 97114 TROIS-RIVIERES Représenté par M. Ernest DAHOME (Délégué syndical ouvrier)

C

OMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procéd...

FG-VF
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 68 DU QUATRE MARS DEUX MILLE TREIZE
AFFAIRE No : 11/ 01471
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 6 septembre 2011- Section Industrie.
APPELANTE
EURL PRADEL DOMINIQUE Dugommier 97120 SAINT-CLAUDE/ GUADELOUPE Représentée par Maître Vathana BOUTROY-XIENG (Toque 117) substituée par Maître CHERY, avocat au barreau de la Guadeloupe
INTIMÉ
Monsieur Victor X... ... 97114 TROIS-RIVIERES Représenté par M. Ernest DAHOME (Délégué syndical ouvrier)

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 janvier 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Françoise GAUDIN, conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, Mme Marie-Josée BOLNET, conseiller, Mme Françoise GAUDIN, Conseiller,
Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 4 mars 2013
GREFFIER Lors des débats Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative Principale, faisant fonction de greffier,
ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Valérie FRANCILLETTE, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
******

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Monsieur X... Victor a été engagé par la société EURL DP Dominique PRADEL, dite ci-après DP, dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 3 mars 2008 en qualité de chauffeur d'engins, moyennant une rémunération mensuelle de 1. 781, 38 € pour 151, 67 heures mensuelles.
La relation contractuelle, qui avait débuté de fait le 1er février 2008, était régie par les dispositions de la convention collective des ouvriers du Bâtiment et des Travaux Publics de la Guadeloupe.
M. X... a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur, par courrier recommandé en date du 10 août 2009.
Considérant que la rupture du contrat de travail était imputable à son employeur, M. X... a saisi le 12 août 2009 le Conseil des prud'hommes de Basse-Terre, en paiement d'indemnités liées à la requalification de la prise d'acte de rupture en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et en paiement de salaires et primes de transport.
Par jugement en date du 6 septembre 2011, le Conseil des prud'hommes a : dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par M. X... s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, condamné l'EURL D. P à payer à M. X... Victor les sommes suivantes : 6. 000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive, 1. 908, 64 € à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure, 1. 908, 64 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 604, 40 € à titre d'indemnité légale de licenciement, 1. 113, 43 € au titre de rappel de salaire de février 2009, 714, 73 € au titre de la prime de transport, 302, 20 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés, 1. 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ordonné la remise par l'EURL D. P d'un nouveau certificat de travail et d'une attestation Pôle Emploi conforme aux dispositions du présent jugement, sous astreinte.
L'EURL D. P a régulièrement formé appel de ladite décision et demande à la cour de réformer le jugement entrepris, de juger que la rupture du contrat de travail à l'initiative du salarié s'analyse en une démission du salarié, les griefs allégués n'étant pas fondés, les retenues sur salaire correspondant à des absences injustifiées, le salarié ayant eu un comportement fautif en prenant des congés et en s'absentant sans autorisation. Elle conclut au débouté des demandes de M. X..., à titre subsidiaire au bien fondé de son licenciement et à sa condamnation au paiement d'une somme de 1. 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
M. X... fait valoir que l'employeur a commis des manquements graves et répétés, en pratiquant abusivement des retenues injustifiées sur salaire et en ne lui réglant pas sa prime de transport prévue par la convention collective.
Il conclut à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a constaté que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par M. X... devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et sur les sommes qui lui ont été allouées en conséquence.

MOTIFS
Sur la rupture du contrat de travail
Attendu que M. X... a écrit le 10 août 2009, à son employeur en ces termes : « Je vous demande de bien vouloir prendre en compte l'acte de rupture de mon contrat de travail étant entendu que cette situation ne peut plus durer et s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Je vous ai expliqué dans un précédent courrier les raisons pour lesquelles je ne peux plus respecter le contrat de travail (..). En effet, depuis quelques mois, j'ai remarqué que le montant du salaire stipulé dans le contrat n'était pas respecté ; je ne perçois pas la somme qu'il faut. J'ai donc l'honneur de vous demander une dispense de préavis donc je quitterais l'entreprise EURL DP le 24 août 2009.. »
Que cette lettre, aux termes de laquelle le salarié formule des reproches à son employeur le plaçant dans l'impossibilité de poursuivre sa collaboration et justifiant son départ, constitue une prise d'acte par M. X... de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur.
Attendu que lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison des faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission.
Qu'en outre, la lettre de prise d'acte ne lie pas le débat et le salarié peut faire état d'autres griefs qu'il impute à son employeur non mentionnés dans sa lettre de prise d'acte.
Que le juge saisi de la légitimité d'une telle prise d'acte de rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur, doit examiner l'ensemble des griefs formulés par le salarié, fussent-ils développés postérieurement à ladite prise d'acte ;
- non paiement du salaire contractuel
Attendu que selon le salarié, le salaire brut prévu à son contrat de travail, soit 1. 781, 38 € pour 151, 67 heures, soit un temps complet, ne lui a pas été payé régulièrement, ce à quoi l'employeur oppose des retenues pour absences injustifiées du salarié.
Que si effectivement, M. X... fait l'objet d'un avertissement en date du 17 mars 2009, pour absence injustifiée du 9 au 17 mars 2009, avertissement qu'il n'a pas contesté et qui peut justifier le paiement de 84 heures mensuelles au lieu des 152 heures habituelles sur le bulletin de salaire du mois correspondant, en revanche les retenues effectuées sur le salaire des mois de février 2009, avril 2009 et juin 2009, ne sont pas justifiées par l'EURL DP. Qu'il résulte des bulletins de salaire produits au dossier qu'en février 2009, 63 heures de travail ont été payées au lieu de 152, en avril 2009, 84 heures payées au lieu de 152 et en juin 2009, seules 119 heures ont été réglées au salarié au lieu des 152 heures prévues, alors que l'employeur ne donne aucune explication plausible pour expliquer ce non paiement.
Que l'EURL DP soutient que M. X... a pris des congés sans autorisation en juillet 2009 alors qu'il avait droit à 35 jours de congé, lesquels lui ont été payés sur le bulletin de salaire du mois de juillet.
Que ce grief de non paiement du salaire convenu est donc établi et le salarié peut prétendre à un rappel de salaire à hauteur de 1. 113, 43 € pour le mois de février 2009, outre son incidence congés payés y afférente, confirmant le jugement de ce chef.
Qu'en outre, d'autres manquements de l'employeur ont été mis en évidence, tels le non paiement de la prime de transport prévue par la convention collective applicable, ce qui représente sur la période contractuelle un solde de 714, 73 €, justifié par les pièces produites et au paiement duquel sera condamnée la société D. P, en confirmation du jugement déféré.
Attendu que M. X... peut dès lors invoquer un comportement fautif de l'employeur de nature à lui rendre imputable la rupture du contrat de travail qu'il a lui-même initiée.
Que les manquements de la société D. P à ses obligations sont suffisamment graves pour justifier la rupture du contrat de travail à ses torts.
Que c'est à bon droit que le premier juge a considéré que la rupture du contrat de travail de M. X... produit les effets d'un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse. Qu'il y a lieu à confirmation et de dire que la rupture s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Sur l'indemnisation de la rupture du contrat de travail
Attendu que le salarié, ayant 19 mois d'ancienneté dans l'entreprise, a droit selon la convention collective applicable, à un préavis d'un mois, et compte tenu de son salaire mensuel moyen, il lui est dû la somme de 1. 908, 64 €, outre l'incidence congés payés de 190,. 242 €.
Qu'il peut également prétendre à une indemnité légale de licenciement, justement calculée par le jugement à hauteur de 604, 40 € ;
Attendu que le salarié avait au moment de la rupture du contrat de travail 19 mois d'ancienneté et l'employeur occupait habituellement moins de onze salariés. Qu'en conséquence, compte tenu de son salaire moyen et du fait qu'il ne justifie pas de sa situation professionnelle et de sa situation actuelle, il convient de lui allouer la somme de 5. 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sur le fondement de l'article L1235-5 du code du travail.
Sur l'indemnité pour irrégularité de procédure
Attendu que la prise d'acte de rupture est un mode de rupture autonome, non régi par la procédure légale de licenciement et dès lors, M. X... ne peut revendiquer une indemnité pour non-respect de ladite procédure.
Que sa demande en paiement d'une telle indemnité sera rejetée, réformant le jugement entrepris sur ce point.
Sur les demandes annexes
Que la délivrance des documents légaux de rupture rectifiés en conséquence sera confirmée.
Qu'il paraît équitable que la société appelante participe à concurrence de 1. 500 € aux frais exposés par M. X... et non compris dans les dépens en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS, LA COUR
Confirme le jugement en ce qu'il a dit et jugé la rupture du contrat de travail imputable à l'employeur et que ladite rupture emporte les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et a condamné la société EURL Dominique PRADEL à payer à Monsieur X... Victor les sommes suivantes : 1. 908, 64 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 604, 40 € à titre d'indemnité légale de licenciement, 1. 113, 43 € au titre de rappel de salaire de février 2009, 714, 73 € au titre de la prime de transport, 302, 20 € au titre des congés payés y afférents, 1. 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et ordonné la remise par l'EURL D. P d'un nouveau certificat de travail et d'une attestation Pôle Emploi conformes.

Réforme le jugement déféré sur le quantum des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et sur l'indemnité pour procédure irrégulière,
Statuant à nouveau des seuls chefs réformés,
Condamne l'EURL D. P à payer à M. X... la somme de 5. 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Rejette le surplus des demandes.
Condamne la société appelante à supporter les entiers dépens de première instance et d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/01471
Date de la décision : 04/03/2013
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2013-03-04;11.01471 ?
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