BR-JG
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 24 DU VINGT HUIT JANVIER DEUX MILLE TREIZE
AFFAIRE No : 11/ 00506
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 16 mars 2011, section activités diverses.
APPELANT
Monsieur Bernard X......97180 SAINTE-ANNE Représenté par Me ZOPPI substituant Me Jean-Michel GOUT (TOQUE 9) avocat au barreau de GUADELOUPE
INTIMÉ
Monsieur Fred Z...exerçant sous l'enseigne ...... 97139 LES ABYMES Représenté par Me Marc MOREAU (TOQUE 107) avocat au barreau de GUADELOUPE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Novembre 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, Mme Marie-Josée BOLNET, conseillère, M. Jean DE ROMANS, Conseiller.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 28 janvier 2013
GREFFIER Lors des débats Mme Valérie FRANCILLETTE, Greffière.
ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Valérie FRANCILLETTE, Greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.
Faits et procédure :
M. Bernard X...a été engagé par contrat à durée indéterminée à temps complet, par la Société LOUP NOIR SECURITE, à compter du 1er mars 2003, en qualité d'agent de sécurité.
Par jugement en date du 12 mars 2009 la Société LOUP NOIR SECURITE a été mise en liquidation judiciaire, Maître Marie-Agnès B...a été désignée en qualité de mandataire liquidateur de ladite société.
Le gardiennage et la surveillance du site de l'Hôtel La Créole Beach, sur lequel était affecté M. X..., était repris par M. Fred Z...exploitant une entreprise de surveillance et gardiennage.
Par courrier du 24 mars 2009, Me B...faisait savoir à M. X...qu'elle était contrainte, sous réserve de la reprise de son contrat de travail dans le cadre des dispositions de l'accord du 5 mars 2002 de la convention collective des entreprises de prévention et de sécurité, de procéder à son licenciement pour motif économique.
Par courrier des 16 avril et 8 juillet 2009, M. X...rappelait à M. Fred Z...ses obligations de reprise du contrat de travail en vertu de l'accord du 5 mars 2002.
M. X...recevait par courrier du 25 août 2009, la réponse M. Fred Z...qui rappelait que les dispositions de l'article L 1224-1 du code du travail relatives au transfert du contrat de travail, n'avaient pas vocation à s'appliquer.
Le 2 février 2010, M. X...saisissait le Conseil de Prud'hommes de Pointe-à-Pitre aux fins de contester son licenciement économique, d'obtenir de la part de M. Fred Z...sa réintégration et paiement de dommages intérêts pour rupture abusive.
Par jugement du 16 mars 2011 la juridiction prud'homale déboutait M. X...de l'ensemble de ses demandes.
Par déclaration du 21 mars 2011, M. X...interjetait appel de cette décision.
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A l'audience des débats, M. X...sollicitait l'infirmation du jugement déféré, et la condamnation de M. Fred Z...au paiement de 30 000 euros de dommages intérêts sur le fondement des dispositions de l'accord du 5 mars 2002 annexé à la convention collective des entreprises de prévention de sécurité. Il réclame en outre paiement de la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
À l'audience des débats, M. Fred Z...entendait voir constater le défaut de communication de pièces relatives aux prétentions et moyens de fait et de droit du demandeur, et en conséquence l'impossibilité de débattre contradictoirement de ses prétentions. M. Fred Z...concluait au rejet des débats des pièces non communiquées, et de l'ensemble des demandes de M. X.... Il sollicitait paiement de la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
M. Fred Z...contestait le transfert du contrat de travail de M. X...en faisant valoir qu'il n'y avait pas eu succession de 2 entreprises de sécurité sur le marché, et en expliquant que le contrat de prestations concernant son entreprise avait pour objet principal la sécurité incendie de l'établissement. Il ajoutait que M. X...n'offrait aucune compétence légalement exigée pour travailler dans son entreprise, spécialisée dans la sécurité incendie.
M. Fred Z...faisait valoir également que l'application de l'accord collectif du 5 mars 2002 était contestable dans la mesure où, si dans le délai de 8 jours imparti, l'entreprise " sortante " ne communiquait pas à l'entreprise " entrante " la liste du personnel affecté au marché, le transfert des salariés ne s'opèrait plus de plein droit lorsque ce retard avait mis l'entreprise " entrante " dans l'impossibilité d'organiser le chantier, relevant qu'il n'était pas établi que l'obligation de communication ait été satisfaite par l'entreprise " sortante " ou par l'administrateur judiciaire.
Subsidiairement M. Fred Z...exposait que les différents chefs de préjudice n'étaient pas établis que la passivité du demandeur concourait à leur aggravation persistante, l'indemnisation, le cas échéant accordée, devant être ramenée à de plus justes proportions.
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Motifs de la décision :
La demande M. Fred Z...tendant à voir rejeter les pièces et conclusions adverses, sera écartée, dans la mesure où il résulte des pièces de la procédure que lesdites pièces et conclusions ont été notifiées à Maître MOREAU, conseil de l'intimé, le 27 juillet 2012.
Le contrat de service de surveillance et gardiennage conclu le 1er avril 2009, entre d'une part l'entreprise de M. Fred Z...et d'autre part la société en nom collectif CREOLE BEACH HÔTEL, stipule dans son article 1er, que cette convention a pour objet de « définir les conditions dans lesquelles le prestataire (en l'occurrence l'entreprise de M. Fred Z...) assurera au client, qui accepte, la sécurité et le gardiennage de l'hôtel la Créole Beach ».
Il résulte des dispositions de l'article 3 relatives aux obligations du prestataire, qu'il s'agit bien d'une surveillance et du contrôle du site, du personnel et des clients, et de la prévention d'intrusion d'intrus au sein de l'hôtel.
Il en résulte que, si d'après ce contrat, l'entreprise de M. Fred Z...conserve l'exécution de la surveillance incendie, qui lui était déjà précédemment confiée, il n'en demeure pas moins que le marché de surveillance et de gardiennage qui avait été confié à la Société LOUP NOIR SECURITE, a été confié, après la mise en liquidation judiciaire de celle-ci, à l'entreprise de M. Fred Z....
Dans ces conditions la convention collective nationale du 15 février 1985, des entreprises de prévention et de sécurité, étendue par arrêté du 25 juillet 1985, applicable, selon son article premier, aux départements d'outre-mer, s'impose à M. Fred Z....
Il en est de même de l'accord du 5 mars 2002, dont les dispositions ont été étendues par arrêté du 10 décembre 2002 (à l'exception de certaines clauses relatives aux clients des entreprises de gardiennage), ledit accord prévoyant expressément dans son article premier que ses dispositions s'appliquent à l'ensemble des salariés affectés exclusivement sur le site des entreprises exerçant une activité entrant dans le champ d'application de la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité.
L'article 2 de l'accord du 5 mars 2002 stipule que l'entreprise entrante doit se faire connaître à l'entreprise sortante par lettre recommandée avec avis de réception, étant relevé que M. Fred Z...qui assurait déjà une prestation de sécurité incendie pour l'hôtel la Créole Beach, connaissait l'entreprise qui assurait précédemment la prestation de gardiennage et de sécurité, puisqu'il a demandé à la Société la Créole Beach, de succéder à la précédente société de gardiennage.
M. X...ayant plus de 6 mois d'ancienneté sur le site de l'hôtel la Créole Beach, devait bénéficier du transfert des contrats travail auprès de l'entreprise « entrante ».
Il résulte par ailleurs des dispositions de l'accord du 5 mars 2002, que l'entreprise " sortante " communique à l'entreprise " entrante " la liste du personnel transférable dans les 8 jours ouvrables à compter de la date où l'entreprise " entrante " se fait connaître. Il est prévu que dès réception de la liste, l'entreprise " entrante " convoque les salariés à un entretien individuel dans un délai maximum de 10 jours par lettre recommandée avec avis de réception ou remise en main propre contre décharge, l'entreprise " entrante " devant par la suite communiquer à l'entreprise " sortante ", par lettre recommandée avec avis de réception, la liste du personnel qu'elle propose de reprendre, ces propositions devant correspondre au minimum à 85 % de la liste du personnel transférable.
En l'espèce la procédure de transfert du contrat de travail de M. X...telle que prévue par l'accord du 5 mars 2002, n'a pu être mise en oeuvre, du seul fait que l'entreprise « entrante », contrairement aux dispositions de l'article 2. 1 du dit accord ne s'est pas fait connaître à l'entreprise « sortante ». Ainsi le liquidateur n'a pu, comme le prescrit l'article 2. 5 du même accord, communiquer à l'entreprise « entrante » la liste du personnel transférable dans les 8 jours ouvrables à compter de la date où l'entreprise « entrante » se serait fait connaître.
Il en est résulté pour M. X..., l'impossibilité de poursuivre l'exécution de son contrat de travail. M. X...ayant, selon les dispositions de l'accord collectif, 85 % de chances de pouvoir poursuivre l'exécution de son contrat de travail, le préjudice qu'il a subi du fait du non respect, par M. Fred Z..., des dispositions de l'accord du 5 mars 2002, sera fixée à la somme de 8000 euros.
Comme il paraît inéquitable de laisser à la charge de M. X...les frais irrépétibles qu'il a exposés, tant en première instance qu'en cause d'appel, il lui sera alloué la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ces motifs,
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Infirme le jugement déféré, et statuant à nouveau,
Condamne M. Fred Z...à payer à M. X...les sommes suivantes :
-8000 euros à titre de dommages intérêts pour non-respect des dispositions de l'accord collectif du 5 mars 2002,
-1 500 euros d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que les entiers dépens tant de première instance que d'appels sont à la charge de M. Fred Z...,
Déboute les parties de toute conclusion plus ample ou contraire.
Le Greffier, Le Président.