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03/12/2012 | FRANCE | N°11/01324

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 03 décembre 2012, 11/01324


BR-JG

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRET No 414 DU TROIS DECEMBRE DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 11/ 01324

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 15 septembre 2011, Section Commerce.

APPELANTE

SARL S. F. M
Rue Pierre et Marie Curie-BP 2053 JARRY
97122 BAIE MAHAULT
Représentée par Me URGIN substituant la SCP CHEVRY-VALERIUS (TOQUE 97) avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉ

Monsieur Martin Alex Z...
...
...
97180 SAINTE ANNE
ReprésentÃ

© par Me WINTER-DURENNEL substituant la SELARL LACLUSE-CESAR (TOQUE 2) avocat au barreau de GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :...

BR-JG

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRET No 414 DU TROIS DECEMBRE DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 11/ 01324

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 15 septembre 2011, Section Commerce.

APPELANTE

SARL S. F. M
Rue Pierre et Marie Curie-BP 2053 JARRY
97122 BAIE MAHAULT
Représentée par Me URGIN substituant la SCP CHEVRY-VALERIUS (TOQUE 97) avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉ

Monsieur Martin Alex Z...
...
...
97180 SAINTE ANNE
Représenté par Me WINTER-DURENNEL substituant la SELARL LACLUSE-CESAR (TOQUE 2) avocat au barreau de GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Octobre 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, rapporteur,
M. Jean DE ROMANS, Conseiller,
Mme Marie-Josée BOLNET, conseillère.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 03 décembre 2012

GREFFIER Lors des débats Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative Principale faisant fonction de greffière, serment préalablement prêté.

ARRET :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC.
Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative Principale, fft de greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure :

Par contrat de travail à durée indéterminée, M. Z...était embauché par la SARL EIB en qualité d'électricien-mécanicien à compter du 18 janvier 1994. Cette société mettait un terme à sa branche d'activité flexible à laquelle était attaché M. Z..., et la transférait à la Société de Fournitures et de Maintenance, dite S. F. M.. En application des dispositions de l'article L 1224-1 du code du travail, le contrat de Monsieur Z...était transféré à la Société S. F. M..

Après convocation de M. Z...par lettre du 5 juin 2008, à un entretien préalable, la Société S. F. M. notifiait à celui-ci son licenciement par un courrier du 17 juin 2008.

Le 8 juin 2009, M. Z...saisissait le Conseil de Prud'hommes de Pointe-à-Pitre, auprès duquel il sollicitait la condamnation de son employeur à l'indemniser pour son licenciement sans cause réelle et sérieuse, et pour non-respect de la procédure de licenciement.

Par jugement du 15 septembre 2011, la juridiction prud'homale, retenant que le licenciement de M. Z...était irrégulier et dépourvu de cause réelle et sérieuse, condamnait la Société S. F. M. à lui payer la somme de 1796, 51 euros pour irrégularité de la procédure de licenciement, celle de 10   779, 06 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 3 octobre 2011, la Société S. F. M. interjetait appel de cette décision.

****

Par conclusions régulièrement notifiées à la partie adverse le 12 juillet 2012, auxquelles il était fait référence lors de l'audience des débats, la Société S. F. M. sollicite l'infirmation du jugement déféré et entend voir déclarer justifié par une cause réelle et sérieuse le licenciement de M. Z.... Elle demande qu'il soit jugé que la procédure de licenciement est régulière, et quand tout état de cause les indemnités au titre de l'irrégularité de la procédure ne sont pas cumulables avec les autres chefs d'indemnités, le préjudice de M. Z...au titre de l'irrégularité de la procédure ne pouvant excéder la somme de un euro à titre symbolique. La Société S. F. M. réclame paiement de la somme de 3000 euros au titre de la titre 700 du code de procédure civile.

****

Par conclusions notifiées à la partie adverse le 7 mai 2012, M. Z..., demandant qu'il soit constaté que son licenciement est irrégulier et sans cause réelle et sérieuse, sollicite la confirmation de la décision entreprise et réclame paiement de la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Au titre de l'irrégularité de la procédure de licenciement, M. Z...relève que la convocation à l'entretien préalable ne précise pas les adresses de la mairie et de l'inspection du travail auprès desquelles il aurait pu consulter la liste des conseillers habilités à l'assister lors de cet entretien.

Par ailleurs M. Z...conteste le caractère réel et sérieux des fautes qui lui sont reprochées, dans la mesure où il apparaît que ces fautes avaient déjà été sanctionnées.

***

Motifs de la décision :

Sur la procédure de licenciement :

Certes l'employeur admet avoir omis dans sa lettre de convocation, de préciser l'adresse des services auprès desquels le salarié pouvait consulter la liste des conseillers habilités à l'assister lors de l'entretien préalable au licenciement. Toutefois M. Z...ne conteste pas qu'il n'a pas retiré à la poste cette convocation adressée par courrier recommandé avec avis de réception.

Dès lors l'absence dans la lettre de convocation à l'entretien préalable, de la mention des adresses des services auprès desquels le salarié pouvait consulter la liste des conseillers pouvant l'assister lors de cet entretien, n'a pu causer aucun préjudice à M. Z..., qui s'est abstenu de prendre connaissance de cette convocation en ne la retirant pas auprès des services de la poste. En conséquence il sera débouté de sa demande d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement.

Sur la cause du licenciement :

Le 11 mars 2008, M. Z...a fait l'objet d'un avertissement par lettre recommandée avec avis de réception pour avoir été « surpris le 28 février 2008 en train de procéder à des réparations sur un matériel de manutention (poste à soudure) » à titre de service personnel pour un employé d'une société tierce SOPIMAT, cette découverte ayant conduit le salarié à avoir un « comportement plus qu'agressif envers la direction, assorti de propos insultants proférés devant témoins … ». Il était précisé à la fin de ce courrier « vous vous voudrez bien considérer la présente comme valant lettre de dernier avertissement ».

Dans un courrier du 7 mai 2008, le directeur commercial de l'entreprise, M. Gérard B..., faisait état du « comportement violent » de M. Z..., à l'égard de sa collègue Mme Gladys C..., lors d'un incident survenu le 5 mai, au cours duquel M. Z...avait proféré des insultes à caractère racial, et exprimé des menaces de sanctions avec le concours du syndicat UGTG. M. B...rappelait qu'il avait l'habitude de constater que M. Z...faisait preuve d'irrespect, que le scandale dans le magasin était régulier à cause de celui-ci, et que cette violence pourrait se concrétiser par une violence physique à l'encontre des autres salariés et même de la direction. Il précisait que s'il se taisait sur cet incident marquant du 5 mai 2008, cela voudrait dire qu'il se refusait de porter son soutien à une personne en danger.

Les faits ainsi dénoncés sont confirmés par l'attestation établie le 13 mai 2008 par Mlle Gladys C...elle-même, laquelle explique que M. Z...a proféré des propos insultants à son égard, à savoir " viégen qualité merin », « espèce de ti négresse », ceci en créole et en présence d'autres collègues.

Dans un courrier adressé le 13 mai 2008 par lettre recommandée avec avis de réception, la gérante de la société faisait savoir à M. Z...qu'elle avait cru naïvement que son avertissement du 11 mars précédent « aurait mis fin à (ses) agissements qui finissent par nous exaspérer et entretenir des perturbations aussi nocives qu'inutiles dans nos services ».

Elle lui reprochait de faire feu de tout bois et de ne jamais manquer l'occasion de se faire mal voir, non seulement par sa direction mais également par ses collègues.

Elle faisait état de son insubordination consistant à refuser de remplir les fiches journalières d'activité, annoncées par note de service, et mises en place le 1er février précédent, que le salarié devait remettre chaque fin de mois, ces fiches étant indispensables à la bonne gestion du SAV, mais également au respect des obligations de l'entreprise envers la DRIRE,

Outre cette insubordination, l'employeur reprochait à M. Z...de s'en être pris, non pas cette fois à la direction, mais à sa collègue le 5 mai 2008, indiquant que, comme à l'accoutumé il s'était énervé, avait crié et insulté cette personne, précisant : ". Nous avons tous entendu des insultes à caractère racial. Vous avez également laissé clairement entendre que vous sauriez déclencher, sans la moindre difficulté, les représailles de votre syndicat qui pourrait pour la circonstance s'occuper de votre collègue et de SFM ».

Il était indiqué par l'employeur, à la fin de cette lettre, qu'il étudiait la sanction correspondant à ces agissements.

Dans sa lettre de licenciement du 17 juin 2008, l'employeur rappelait d'abord que M. Z...s'était livré abusivement à une intervention sur un matériel qui n'avait fait l'objet d'aucun ordre de réparation, et qu'à la suite de la découverte de cette supercherie, il avait eu un comportement agressif envers sa direction, ces faits ayant fait l'objet de la lettre d'avertissement du 11 mars 2008.

L'employeur faisait état du refus de M. Z...de remplir les fiches journalières d'activité mises en place le 1er février 2008, annoncées par note de service, permettant une bonne gestion du SAV, l'intéressé ayant cru bon de demander à la responsable de « l'assurance qualité », Mlle Gladys C..., de ne remplir que les fiches laissant apparaître un léger dépassement de son temps de présence, permettant ainsi à M. Z...de prétendre à des retards pour motif personnel, lesquels se sont transformés en absences non autorisées.

L'employeur ajoutait que l'insubordination de M. Z...l'avait conduit une fois de plus à un comportement agressif, allant jusqu'à insulter sa collègue en proférant des insultes à caractère racial à son encontre, lesquelles avaient été entendues par les collègues présents, ces faits ayant été relatés dans son courrier recommandé du 13 mai 2008.

L'employeur terminait la lettre de licenciement en indiquant que le comportement irrespectueux et injurieux de M. Z...déstabilisait le service, et que de plus, ses scandales menaçants et réguliers dans le magasin donnaient une mauvaise image de l'entreprise auprès des clients, et était hautement préjudiciable aux intérêts de la société. Il était rappelé à M. Z...qu'à plusieurs reprises la direction avait dû intervenir pour faire cesser ses agissements et le rappeler à l'ordre verbalement.

Contrairement à ce qu'a retenu la juridiction prud'homale, il ne peut être considéré que les faits énoncés dans la lettre de licenciement, aient déjà tous fait l'objet de sanctions sous la forme d'avertissements.

En effet s'il est rappelé dans cette lettre de licenciement l'intervention effectuée à titre personnel par M. Z...sur un matériel qui n'avait fait l'objet d'aucun ordre de réparation, en fait pour rendre service à un tiers, ce que visait la lettre d'avertissement du 11 mars 2008, les autres faits relatifs à l'insubordination de M. Z...quant à la tenue des fiches journalières d'activité, et à son comportement agressif et insultant à l'égard d'une collègue de travail, ne peuvent être considérés comme ayant déjà été sanctionnés dans le cadre du courrier adressé au salarié le 13 mai 2008, puisque justement ce courrier, après avoir évoqué ces faits, précise à l'attention de M. Z..., que la gérante étudie la sanction correspondant à ces agissements. En conséquence le courrier du 13 mai 2008 ne peut être considéré comme comportant lui-même une sanction.

Par ailleurs il est versé aux débats une attestation de Monsieur Fred D..., représentant légal de la société SMEGE, se présentant comme " client historique " de la SARL SFM, lequel déclare que durant le second semestre 2008, il a été témoin de plusieurs incidents qui ont eu lieu au sein de l'entreprise SFM, dont l'auteur était M. Z.... Il précise qu'il a pu constater la capacité de la dirigeante de cette société, Mme Caroline E..., à faire face aux réactions violentes de M. Z...qui affrontait de manière injurieuse ses collègues et certains clients comme lui.

M. D...explique que M. Z...n'a jamais accepté que Mme E..., en sa qualité de gérante de la SARL SFM, soit son nouvel employeur, déclarant régulièrement celle-ci comme étant « la maquerelle des LEMAISTRES » lesquels étaient les anciens dirigeants de l'entreprise.

M. D...indique que M. Z..., adoptant le même ton méprisant l'égard de ses collègues, considérait que ceux-ci n'avaient pas l'autorisation de lui adresser la parole, et acceptait encore moins un ordre provenant du responsable technique ou de la secrétaire, sans que ces derniers ne fassent l'objet d'une insulte, déversant ses propos même en présence de clients de passage au magasin. Il précise qu'il a constaté plusieurs refus de M. Z...d'exécuter des travaux qui lui étaient demandés, et qu'il a été témoin de la colère et de la violence verbale manifestées par M. Z...à l'égard de sa collègue Mlle Gladys C..., et de l'insulte raciale dont il l'a accablée.

Il résulte de l'ensemble de ces constatations concordantes, que l'insubordination répétée, et le comportement agressif et dans certain cas insultant de M. Z...justifiaient le licenciement de celui-ci.

En conséquence, le licenciement de M. Z...étant justifié par une cause réelle et sérieuse, celui-ci sera débouté de sa demande d'indemnisation fondée sur son licenciement.

Comme il paraît inéquitable de laisser à la charge de l'appelante les frais irrépétibles qu'elle a exposés, il lui sera alloué la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs,

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement déféré,

Et statuant à nouveau,

Déboute M. Z...de ses demandes,

Condamne M. Z...à payer à la Société SFM la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de toute conclusion plus ample ou contraire.

Le Greffier, Le Président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/01324
Date de la décision : 03/12/2012
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2012-12-03;11.01324 ?
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