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03/12/2012 | FRANCE | N°11/01166

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 03 décembre 2012, 11/01166


BR-JG
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 412 DU TROIS DECEMBRE DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 11/ 01166
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 5 avril 2011, section Industrie.
APPELANTE
LA MICHE BOREALE, 2 rue de la République 97100 BASSE TERRE Représentée par Me Jacques URGIN (TOQUE 122) avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉ
Monsieur Willy X......97130 CAPESTERRE BELLE EAU Représenté par M. Ernest DAHOME, délégué syndical ouvrier.

COMPOSITION DE LA COUR :

En appli

cation des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 ...

BR-JG
COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 412 DU TROIS DECEMBRE DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 11/ 01166
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de BASSE-TERRE du 5 avril 2011, section Industrie.
APPELANTE
LA MICHE BOREALE, 2 rue de la République 97100 BASSE TERRE Représentée par Me Jacques URGIN (TOQUE 122) avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉ
Monsieur Willy X......97130 CAPESTERRE BELLE EAU Représenté par M. Ernest DAHOME, délégué syndical ouvrier.

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Octobre 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, rapporteur, M. Jean DE ROMANS, Conseiller, Mme Marie-Josée BOLNET, conseillère.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 03 décembre 2012
GREFFIER Lors des débats Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative Principale, faisant fonction de greffière, serment préalablement prêté.
ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative Principale, fft de greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure :
M. Willy X...a été engagé par la Société LA MICHE DE BOREALE par contrat de travail à durée déterminée en qualité d'ouvrier boulanger pour la période s'étendant du 22 novembre 2006 au 22 novembre 2008.
Par un second contrat de travail à durée déterminée en date du 1er octobre 2008, M. X...était engagé par la même société, pour exercer le même emploi, pour la période du 23 novembre 2008 au 22 novembre 2009.
Le 23 novembre 2009, l'employeur délivrait à M. X...un certificat travail, une attestation ASSEDIC et un reçu pour solde de tout compte.
Le 11 janvier 2010, M. X...saisissait le Conseil de Prud'hommes de Basse-Terre, aux fins d'obtenir paiement de dommages intérêts pour rupture abusive, ainsi que diverses indemnités de fin de contrat.
Par jugement du 5 avril 2011, la juridiction prud'homale condamnait la Société LA MICHE DE BOREALE à payer à M. X...les sommes suivantes :-1773, 28 euros à titre d'indemnité de requalification du contrat de travail en contrat à durée indéterminée,-1773, 28 euros à titre d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement-10 639, 68 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,-3546, 56 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,-354, 65 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,-2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Il était en outre ordonné la remise à M. X...d'un nouveau certificat travail ainsi que d'une attestation Pôle Emploi conformes aux dispositions du jugement.

Par déclaration du 5 août 2011, la Société LA MICHE DE BOREALE interjetait appel de cette décision qui lui avait été notifiée le 12 juillet 2011.
****
Par conclusions notifiées à la partie adverse le 6 mars 2011, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, la Société LA MICHE DE BOREALE sollicite l'infirmation du jugement déféré et le rejet de toutes les demandes de M. X....
Elle entend voir constater que par courrier en date du 29 novembre 2009, M. X...a décidé de mettre fin à son contrat de travail et qu'il ne peut s'agir d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée.
Elle relève que la demande initiale de M. X...avait pour objet une prime de précarité, et que cette demande a été transformée en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Elle sollicite paiement de la somme de 20 000 euros de dommages intérêts à titre de procédure abusive, et de celle de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

****
Par conclusions notifiées à la partie adverse le 20 avril 2012, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, M. X...sollicite la confirmation du jugement entrepris, sauf à y ajouter la condamnation de la Société LA MICHE DE BOREALE au paiement de la somme de 1123, 08 euros à titre d'indemnité légale de licenciement et à porter le montant de l'indemnité réclamée au titre de l'article 700 du code de procédure civile à la somme de 2500 euros.
À l'appui de sa demande de requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, M. X...invoque dispositions des articles L 1242-2, L1244-3 et L 1245-1 du code du travail en faisant valoir que les prescriptions légales en matière de conclusion de contrat à durée déterminée n'avaient pas été respectées.
En ce qui concerne la rupture du contrat de travail, M. X...explique que le courrier du 22 décembre 2009 qu'il a signé, a été rédigé par l'employeur, et qu'il lui a été présenté à la signature alors qu'il était en plein travail et avait à peine pris connaissance de l'attestation en question. Il fait observer que dans l'attestation Pôle Emploi établie le 23 novembre 2009, l'employeur spécifie bien qu'il s'agit d'une fin de contrat à durée déterminée.
M. X...fait valoir que l'employeur n'a justifié la rupture du contrat de travail que par la seule échéance de son prétendu terme, et qu'en conséquence la rupture était abusive et ne procède pas d'une cause réelle et sérieuse.
****

Motifs de la décision :

Sur la demande de requalification du contrat de travail :
Selon les dispositions de l'article L 1242-12 du code du travail, le contrat de travail à durée déterminée, établi par écrit, doit comporter la définition précise de son motif. À défaut il est réputé conclu pour une durée indéterminée.
Il y a lieu de constater qu'aucun des deux prétendus contrats de travail à durée déterminée conclus par les parties ne comporte la définition précise de son motif.
En outre il convient d'observer que ces contrats à durée déterminée, ont été établis en violation des dispositions de l'article L 1242-8 du code du travail dans la mesure ils ont été conclus pour une période supérieure à 18 mois.
En conséquence, et en application des dispositions de l'article L 1245-1 du code du travail, il y a lieu de considérer que M. X...a été engagé par la Société LA MICHE DE BOREALE par un contrat à durée indéterminée à compter du 22 novembre 2006 et que la relation de travail s'est poursuivie jusqu'en novembre 2009.
Par application des dispositions de l'article L 1245-2 du code du travail, il est dû à M. X...une indemnité de précarité, qui sera fixée à la somme de 1773, 28 euros, compte tenu du préjudice subi par le salarié qui a été maintenu durablement et de façon injustifiée et illégale, pendant trois ans, dans une situation de précarité.
La somme de 1 773, 28 euros correspond au montant du salaire mensuel, après rectification prenant en compte la durée mensuelle de travail fixée contractuellement à 169 heures, ce qui implique une durée hebdomadaire de 39 heures, dont 4 heures supplémentaires majorées de 25 %.

Sur la rupture du contrat de travail :

La Société LA MICHE DE BOREALE entend se prévaloir d'un document dactylographié, daté du 22 novembre 2009 portant la signature de M. X..., et dont le texte est le suivant :
« Je soussigné Willy X...demeurant ... à CAPESTERRE-BELLE-EAU, atteste ne plus vouloir poursuivre mon contrat de travail à durée indéterminée dans les mêmes conditions que le précédent. »
Alors que M. X...avait mis en demeure, par lettre du 4 décembre 2009, son employeur, de lui payer la somme de 6666, 19 euros à titre d'indemnité de fin de contrat telle que prévue par l'article L 1243-10 du code du travail, la Société LA MICHE DE BOREALE lui répondait par courrier du 14 décembre 2009 que sa demande n'était pas recevable en lui opposant le document du 22 novembre 2009 sur lequel le salarié avait apposé sa signature.
Dans un courrier du 22 décembre 2009 adressé à son employeur, M. X...dénonçait les conditions dans lesquelles ce document avait été signé, faisant valoir que l'employeur avait profité de son manque d'attention en plein travail pour lui demander de signer une attestation dont il avait à peine pris connaissance.
Il convient de rappeler qu'il existait entre les parties un contrat de travail à durée indéterminé, comme il a été démontré ci-avant, et que ce contrat ne pouvait être rompu par le salarié qu'en faisant connaître à son employeur, de façon claire et non équivoque, qu'il démissionnait de son emploi.
Le document du 22 novembre 2009, signé par M. X..., ne peut être considéré comme un acte clair et non équivoque de démission dans la mesure où l'employeur a abusivement imposé au salarié, au cours des années écoulées, une relation de travail dans le cadre de contrats successif à durée déterminée, que le terme de « contrat de travail à durée indéterminée » mentionnée par l'employeur dans le document litigieux, ne correspondait pas à la situation qui avait été portée à la connaissance du salarié, et que l'utilisation de ce terme, ainsi que les conditions dans lesquelles l'employeur a fait signer ledit document, le salarié étant accaparé alors par son travail, constituent un subterfuge qui n'a pas permis à M. X...d'exprimer de façon claire et non équivoque une quelconque intention de démissionner.
En outre, comme l'explique M. X..., ce sont " les conditions " dans lesquels était exécuté le contrat de travail au cours des périodes précédentes, qu'il n'entendait pas voir poursuivre, dans la mesure où de nombreuses heures supplémentaires effectuées n'étaient pas réglées, ce qui n'impliquait pas une volonté de rompre le contrat de travail.
En conséquence il y a lieu de constater que l'employeur, qui a délivré le 23 novembre 2009, à la fois un certificat travail, un solde de tout compte et une attestation ASSEDIC, a entendu lui-même rompre le contrat de travail, alors qu'il n'a pas mis en oeuvre de procédure de licenciement, ni notifié de lettre de licenciement.
Dans ces conditions ce licenciement ne peut être considéré comme justifié par une cause réelle et sérieuse.
M. X..., qui avait 3 ans d'ancienneté à la date de la rupture du contrat de travail, est en droit, en application des dispositions de l'article L 1234-1 du code du travail, de réclamer à titre d'indemnité compensatrice de préavis la somme de 3546, 56 euros correspondant à 2 mois de salaires.
M. X..., qui à la fin du préavis avait une ancienneté de 3 ans et 2 mois, est également en droit d'obtenir, en application des dispositions de l'article L 1234-9 du code du travail, paiement d'une indemnité légale de licenciement d'un montant de 1123, 08 euros.
Compte tenu de la perte injustifiée de ses ressources salariales, alors qu'il apparaissait occuper un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, le préjudice subi par M. X...sera indemnisé par l'octroi d'une somme équivalente à 6 mois de salaire soit 10 639, 68 euros.
La procédure de licenciement telle que prévue par les articles L 1232-2 et suivants du code du travail n'ayant pas été respectée par l'employeur, il sera alloué à M. X...une somme de 1773, 28 euros en réparation du préjudice subi, dans la mesure où il n'a pu faire valoir ses droits dans le cadre d'un entretien préalable au licenciement.
Le certificat de travail n'apparaît pas devoir être modifié, dans la mesure où il mentionne la période d'exécution du contrat de travail. Par contre l'attestation ASSEDIC devra être modifiée en ce qu'elle fait référence à un contrat à durée déterminée, et ne précise pas les sommes qui doivent être versées au salarié à l'occasion de la rupture du contrat de travail.
Enfin comme il paraît inéquitable de laisser à la charge de M. X...les frais irrépétibles qu'il a exposés il lui sera alloué la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs,

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qui concerne le montant de l'indemnité allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et sauf à rectifier les dispositions relatives à la remise de documents,
Et statuant à nouveau sur ces deux chefs de demandes,

Condamne la Société LA MICHE DE BOREALE à payer à M. X...la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Ordonne à la Société LA MICHE DE BOREALE de remettre à M. X...dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt, une nouvelle attestation pôle emploi conforme aux dispositions du présent arrêt, chaque jour de retard passé le délai imparti étant assorti d'une astreinte de 50 euros,
Y ajoutant,
Condamne la Société LA MICHE DE BOREALE à payer à M. X...la somme de 1123, 08 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,
Dit que les entiers dépens tant de première instance que d'appel sont à la charge de la Société LA MICHE DE BOREALE,
Déboute les parties de toute conclusion plus ample ou contraire.
Le Greffier, Le Président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/01166
Date de la décision : 03/12/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2012-12-03;11.01166 ?
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