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15/10/2012 | FRANCE | N°11/01107

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 15 octobre 2012, 11/01107


BR-JG

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE ARRET No 373 DU QUINZE OCTOBRE DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 11/ 01107
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de FORT DE FRANCE du 6 mars 2008, section encadrement.
APPELANTE
Madame Marie Michèle X...... 97220 LA TRINITE Représentée par Me NABAB substituant Me Socrate-Pierre TACITA (TOQUE 91) avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉ
CREDIT MUTUEL ANTILLES GUYANE Rue du Professeur Raymond Garcin-BP 920 97200 FORT DE FRANCE Représenté par Me WERTER-FILLOIS substitua

nt Me Jean MACCHI, avocat au barreau de FORT DE FRANCE

COMPOSITION DE LA COUR :

En applica...

BR-JG

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE ARRET No 373 DU QUINZE OCTOBRE DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 11/ 01107
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de FORT DE FRANCE du 6 mars 2008, section encadrement.
APPELANTE
Madame Marie Michèle X...... 97220 LA TRINITE Représentée par Me NABAB substituant Me Socrate-Pierre TACITA (TOQUE 91) avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉ
CREDIT MUTUEL ANTILLES GUYANE Rue du Professeur Raymond Garcin-BP 920 97200 FORT DE FRANCE Représenté par Me WERTER-FILLOIS substituant Me Jean MACCHI, avocat au barreau de FORT DE FRANCE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Septembre 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, et Mme Marie-Josée BOLNET, conseillère.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, rapporteur, M. Jacques FOUASSE, conseiller, Mme Marie-Josée BOLNET, conseillère.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 15 octobre 2012
GREFFIER Lors des débats Mme Valérie FRANCILLETTE, Greffière.
ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative Principale, fft de greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE :

Mme Marie – Michèle X...a été engagée par la Caisse Fédérale de Crédit Mutuel Antilles – Guyane le 2 juin 1986 et a été nommée au poste de directrice de la Caisse de Crédit Mutuel Nord Atlantique à compter du 25 janvier 2001.
Un avenant au contrat de travail établi le 22 décembre 2001 a inséré une clause de « mobilité tant géographique que fonctionnelle » précisant que « l'affectation ne constitue pas un élément déterminant dans la conclusion du présent contrat » et que la salariée serait donc susceptible d'exercer ses fonctions dans tout autre établissement du groupe « Crédit Mutuel ».
Victime d'un accident vasculaire cérébral le 26 janvier 2005 ayant donné lieu à un arrêt de travail pour maladie, Mme X...a repris son poste à mi-temps thérapeutique à l'issue d'une visite de reprise intervenue le 12 décembre 2005 dont l'employeur n'a pas contesté les conclusions.
Informée dès le 24 novembre de sa nouvelle affectation à compter du 20 février 2006 à la direction du Crédit Mutuel Accueil, ce que confirmait son employeur par lettre du 16 février 2006 en indiquant que le « mi-temps thérapeutique prescrit était incompatible avec la direction d'une caisse de crédit mutuel », la salariée a pris acte de la rupture de son contrat de travail, par lettre du 13 février 2006, au motif que sa nouvelle affectation ne correspondait en rien à sa qualification et qu'elle constituait une modification unilatérale de son contrat de travail, puis a saisi la juridiction prud'homale.
Par arrêt du 25 juin 2009, la cour d'appel de Fort-de-France a confirmé le jugement de départage du 6 mars 2008 lequel a prononcé l'annulation de la mise à pied de Mme Marie – Michèle X..., condamné la Caisse Fédérale de Crédit Mutuel Antilles-Guyane à verser à celle-ci la somme de 591, 40 €, outre les primes et congés payés afférents, le tout assorti de l'intérêt au taux légal, ordonné la suppression de cette sanction dans le dossier de l'intéressée, dit que le directeur de la caisse lui délivrera une attestation sur l'honneur d'avoir à procéder à cette suppression dans le mois suivant la signification de la présente décision sous astreinte de 30 € par jour de retard, ordonné l'exécution provisoire de la décision, débouté les parties de leurs autres demandes, condamné la Caisse Fédérale de Crédit Mutuel au paiement de la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, en y ajoutant sa condamnation au paiement de la somme de 500 € sur ce même fondement ainsi qu'aux dépens de l'instance d'appel.
Le 30 mars 2011, la cour de cassation a cassé et annulé, mais seulement en ce qu'il a débouté Mme X...de ses demandes liées à la rupture de son contrat de travail, l'arrêt rendu le 25 juin 2009, au motif que la cour d'appel de Fort – de – France a violé l'article L. 1123-1 du code du travail alors qu'elle avait constaté que le changement d'affectation avait été décidé en raison de l'état de santé de Mme Marie – Michèle X..., et a remis, en conséquence sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant le dit arrêt.
Par déclaration enregistrée le 26 juillet 2011, Mme Marie – Michèle X...a saisi la cour d'appel de Basse – Terre en application de l'article 1032 du code de procédure civile.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Suivant conclusions remises le 22 août 2012 et soutenues à l'audience des plaidoiries du 10 septembre, Mme Marie – Michèle X..., représentée, demande à la cour de la déclarer recevable en son appel, réformer le jugement querellé, de dire que la rupture du contrat de travail est imputable exclusivement à l'employeur et de condamner en conséquence le Crédit Mutuel Antilles-Guyane à lui verser les sommes suivantes : 15007, 34 € au titre de l'indemnité de préavis, 34107, 60 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, 54572, 16 € au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, 10000 € au titre de l'indemnité de licenciement abusif, 4000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Au soutien de ses demandes et au regard du point de droit sur lequel a été cassé l'arrêt de la cour d'appel de Fort – de – France, elle se prévaut du contenu de la lettre de licenciement rédigée en ces termes « … … …. Je vous confirme ma décision de vous affecter à compter du 20 février 2006 à la direction de CREDIT MUTUEL ACCUEIL aux lieu et place de la direction de la C. C. M NORD ATLANTIQUE ; En effet, le mi-temps thérapeutique prescrit est incompatible avec la direction d'une Caisse de CREDIT MUTUEL » et fait valoir le caractère discriminatoire du motif de la rupture du contrat, résultant du mi-temps qui lui a été prescrit à la suite d'un accident vasculaire cérébral survenu le 26 janvier 2005, donc en raison de son état de santé, alors que l'article L. 1132-1 du code du travail précise qu'aucun salarié ne peur faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte, en matière d'affectation, de qualification, de mutation, en raison de son état de santé, et qu'à cet égard, elle est bien fondée à prendre acte de la rupture de son contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur et à demander que le jugement du 6 mars 2008 soit réformé.
Elle fait observer que selon une jurisprudence bien établie, aucun salarié ne peut se voir unilatéralement imposer un changement total de ses attributions et dans le niveau de ses responsabilités (soc. 28 janvier 2005 bull no35) et que de surcroît, l'avenant dont fait état l'employeur, prévoyait que la mise en œ uvre de la mobilité devait lui permettre d'exercer ses fonctions dans tout autre établissement du groupe, que ce qui lui a été proposé, était de tenir le rôle d'un super opérateur téléphonique alors que jusque là, elle dirigeait les activités d'une caisse et mettait en œ uvre les décision du conseil d'administration, en présentant des mesures destinées à améliorer le fonctionnement de l'établissement ; que par ailleurs, le Crédit Mutuel a agi avec une précipitation blâmable contrairement à son obligation de bonne foi car il ne lui avait laissé que deux jours pour exécuter la mutation, en dépit du principe bien affirmé en la matière par la cour de cassation selon lequel une mutation imposée précipitamment dans un bref délai caractérise la faute de l'employeur dans la mise en œ uvre de la clause de mobilité (soc. 18 sept. 2002- bull. No273).
Elle conclut enfin que la cour ne manquera de noter que les propres allégations de l'employeur révèlent elles-mêmes que la mesure de mutation est en rapport avec son état de santé et que force est de constater que tous ces points justifient le paiement des différentes sommes demandées.
Par conclusions no2 remises le 10 septembre 2012 et soutenues oralement, la Caisse Fédérale de Crédit Mutuel Antilles – Guyane, dénommée le CREDIT MUTUEL, représentée, demande à la Cour de confirmer le jugement de départage du Conseil de prud'hommes de Fort – de-France du 06 mars 2008 en ce qu'il a débouté Mme Marie – Michèle X...du surplus de ses demandes, de statuer à nouveau, de dire et juger que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de l'intéressée a produit les effets d'une démission, de débouter Mme X...de l'ensemble de ses moyens, fins et conclusions, de la condamner à lui verser la somme de 15007, 34 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ainsi qu'à la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Elle rappelle en premier lieu que depuis une série d'arrêt du 25 juin 2003, la cour de cassation considère que lorsqu'un salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison des faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit dans le cas contraire, d'une démission et qu'en cas de prise d'acte de la rupture du contrat de travail, c'est au salarié et à lui seul qu'il incombe d'établir les faits allégués à l'encontre de l'employeur, que s'il subsiste un doute sur la réalité de ces faits, la prise d'acte produit les effets d'une démission (Cass. soc du 19 décembre 2007 no06-44. 754 ; Cass. soc du 9 avril 2008 no06-44. 191).
Elle fait observer ensuite que Mme X...ne revient plus sur l'argument de la modification unilatérale de son contrat de travail car ce moyen n'a pas été retenu par la cour de cassation, les premiers juges et la cour d'appel ayant également considéré que le changement d'affectation ne modifiait pas le contrat de travail ; qu'en outre, Mme X...qui signait l'avenant au contrat, avait clairement accepté, à compter de la prise d'effet de cet avenant le 15 janvier 2001, le principe que la mobilité fonctionnelle ne constituait pas un élément déterminant dans la conclusion de son contrat de travail et qu'aucune précipitation blâmable ne pouvait être retenue contre elle puisque la salariée était informée dès le 24 novembre 2005 de sa nouvelle affectation ; que dès lors, celle-ci est mal fondée à justifier la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur au seul motif qu'il y aurait eu modification de son contrat de travail, alors qu'il n'a été question d'aucun changement dans la qualification, dans le positionnement hiérarchique et dans la rémunération.
Elle soutient également que la nouvelle affectation n'avait nullement été prise sur la base d'une quelconque discrimination ; qu'au contraire, dans la lettre envoyée à la salariée, elle se borne à manifester son souci de confier à la salariée un poste mieux adapté à son état de santé, et que le fait pour l'employeur de tenir compte de l'état de santé de ses salariés ne saurait être érigé en faute ; que de plus, les articles L. 4121-1 et suivants du code du travail obligent l'employeur à prendre toutes mesures pour protéger la santé physique et mentale des salariés et adapter le travail à l'homme ; qu'il est évident que les 4475 clients gérés, ne pouvaient l'être par une directrice de caisse présente à mi-temps à son poste ; que l'importance et la diversité des tâches et responsabilités qu'occupait Mme X...étaient incompatibles avec un mi-temps, thérapeutique ou non, sur une période prolongée alors que le poste de directeur du Crédit Mutuel Accueil comportait des tâches plus ciblées mais de même niveau de responsabilité qui pouvaient être réparties plus aisément entre deux personnes ; que la cour n'est pas sans savoir que selon l'article L. 1123-1 du code du travail, la discrimination consiste à traiter une personne de manière moins favorable qu'une autre pour un motif prohibé, tel que l'état de santé, ce qui n'est pas le cas en l'occurrence ; que de plus, selon l'article L. 1134-1 du code du travail, c'est au salarié de présenter des éléments de fait ou de droit laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte ; que Mme X...ne démontre nullement que sa situation professionnelle nouvelle lui était plus défavorable que la précédente ; que pour l'ensemble de ces raisons, elle n'a pas méconnu l'article L. 1132-2 du code de travail ; que les demandes d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de dommages et intérêts pour licenciement abusif, d'indemnité de préavis ne peuvent prospérer en l'absence de préjudice, de conditions vexatoires et en cas de démission, ce qui est le cas de l'intéressée, seul auteur de la rupture du contrat de travail produisant les effets d'une démission.
La Caisse Fédérale de Crédit Mutuel Antilles – Guyane précise enfin qu'elle n'est pas régie par la convention collective du personnel des banques mais par la convention collective de Crédit Mutuel Antilles – Guyane, et que la salariée ne pouvait l'ignorer car la mention de cette convention apparaît sur ses propres bulletins de paie ; que de surcroît, cette convention n'a prévu aucune indemnité conventionnelle de licenciement et qu'elle est elle-même en revanche fondée à réclamer le paiement de l'indemnité compensatrice de préavis conformément au principe retenu par la cour de cassation dans son arrêt du 08 juin 2011.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions écrites des parties et aux décisions antérieures.

MOTIFS DE LA DECISION :

SUR LA RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL

Attendu que le salarié peut prendre acte de la rupture du contrat de travail en raison des faits qu'il reproche à son employeur et que cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission ;
Attendu, par ailleurs, qu'aux termes de l'article L. 1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte telle que définie à l'article 1er de la loi no2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affection, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non – appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap ;
Attendu qu'en l'espèce, Mme Marie – Michèle X...occupait jusqu'à son accident vasculaire cérébral survenu le 26 janvier 2005 le poste de directrice de la caisse du Crédit Mutuel Nord Atlantique ; que le docteur Y..., médecin du travail, a établi, le 12 décembre 2005, au profit de la salariée une fiche d'aptitude l'autorisant à reprendre le travail, au poste de directeur, (sans contre-indications précises) selon les seules modalités d'un mi-temps thérapeutique et ce en application de l'article R. 4624-22 du code du travail sans autres indications de mesures particulières ;
Attendu que dès le 24 novembre 2005, l'employeur informait Mme Marie – Michèle X...de sa décision de l'affecter, en raison de son état de santé, à compter du 20 février 2006, laquelle décision sera confirmée le 16 février 2006 dans les termes suivants : « Suite à notre entretien dans votre bureau le 24 novembre dernier, et votre visite médicale à la Médecine du travail du 12 décembre 2005, je vous confirme ma décision de vous affecter à compter du 20 février 2006 à la direction du Crédit Mutuel Accueil aux lieu et place de la Direction de la CCM Nord Atlantique. En effet, le mi temps thérapeutique prescrit est incompatible avec la direction d'une Caisse Crédit Mutuel, surtout sur une si longue période. Je ne souhaite pas voir votre état de santé se dégrader sous la pression d'une responsabilité que vous ne pouvez exercer à mi-temps. J'estime par contre que la direction de CMA sera mieux adaptée à votre état de santé et vous permettra de travailler sereinement sans vous imposer de charge de travail que vous ne seriez pas en mesure d'assumer. Je suis également convaincu que vous avez toutes les qualités pour mener à bien cette mission. Je reste à votre entière disposition pour tout renseignement complémentaire. Veuillez agréer, Madame, mes salutations les meilleures. » ;
Attendu qu'ainsi, le Crédit Mutuel a procédé au changement de poste de Mme X...sans se fonder sur une recommandation médicale spécifique du médecin du travail qui, d'ailleurs, autorisait la reprise du travail de l'intéressée au même poste selon la seule condition d'un mi-temps thérapeutique ;
Attendu que la période de mi-temps ne semblait pas excessive comme le signale l'employeur puisque celle-ci prenait fin en avril 2006 ;

Attendu, en outre, que si la Caisse Fédérale de Crédit Mutuel Antilles – Guyane allègue que la fonction de directeur qu'occupait Mme Marie – Michèle X...était incompatible avec un mi-temps, thérapeutique ou pas, il n'en fait pas la démonstration car aucun document n'est produit pour étayer cette incompatibilité liée à la charge importante des tâches et responsabilités du poste litigieux ; qu'il n'est pas davantage prouver de compatibilité d'un travail à mi-temps avec le nouveau poste de directeur de Crédit Mutuel Accueil dont la fiche no7 versée aux débats n'en fait qu'une description, et surtout lorsqu'il est soutenu, paradoxalement, que « le poste de directeur du Crédit Mutuel Accueil comportait des tâches plus ciblées mais de même niveau de responsabilité qui pouvaient être réparties plus aisément entre deux personnes » ; qu'à cet égard, la Caisse Fédérale de Crédit Mutuel Antilles – Guyane n'a d'ailleurs pas envisagé un possible renfort d'une personne sur le premier poste en raison du mi-temps thérapeutique prévu, alors qu'elle semblait préconiser cette solution pour le poste de directeur du Crédit Mutuel Accueil plus allégé ;

Que dès lors, sans qu'il soit besoin d'argumenter sur la modification unilatérale du contrat de travail, la cour considère que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur est justifiée sur le fondement d'une mobilité fonctionnelle imposée à la salariée en raison de son état de santé, constituant une discrimination au sens de l'article précité, et que cette rupture produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
SUR L'INDEMNITE CONVENTIONNELLE DE LICENCIEMENT
Attendu que Mme Marie – Michèle X...fait la demande d'une indemnité de 34107 € en invoquant la convention collective du personnel des Banques, mais sans rapporter la preuve de son application à son contrat de travail ;
Attendu que pour sa part, la Caisse Fédérale de Crédit Mutuel Antilles – Guyane rappelle qu'elle n'est pas assujettie à ce texte mais à la convention collective du Crédit Mutuel Antilles – Guyane dont il est fait mention sur le bulletin de paie des salariés, et que Mme X...ne pouvait ignorer tant en qualité de directrice qu'en qualité de salariée ;
Qu'il doit être alors admis que le contrat de travail de Mme X...était soumis à la seule convention collective du Crédit Mutuel Antilles – Guyane, laquelle ne prévoit d'indemnité conventionnelle de licenciement au vu de ses pages no38 et 39 et de rejeter en conséquence la demande formulée de ce chef.
SUR L'INDEMNITE POUR LICENCIEMENT SANS CAUSE REELLE ET SERIEUSE ET LES DOMMAGES ET INTERÊTS POUR LICENCIMENT ABUSIF
Attendu que l'indemnité due en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois ;
Attendu que Mme X...sollicite, à ce titre, la somme de 54572, 16 € sans se prévaloir d'arguments particuliers justifiant une telle somme ;
Qu'il convient en conséquence de faire partiellement droit à sa demande et de fixer l'indemnité à la somme de 27 712, 08 € (salaire brut de 4547, 68 € + prime de transport de 44 € X 6 mois) ;
Attendu, cependant, qu'aucune démonstration pertinente de faits vexatoires n'est possible dans la présente espèce car non seulement, dès le 24 novembre 2005, Mme X...était informée de sa nouvelle affectation prenant effet en février 2006, ce qui est de loin de la révélation d'une mise en œ uvre brutale de la clause de mobilité, mais également, l'employeur ne s'était nullement inscrit dans un processus de rupture du contrat de travail ;
Que dans ces conditions, la demande de dommages et intérêts est rejetée.
SUR L'INDEMNITE COMPENSATRICE DE PREAVIS
Attendu que l'indemnité compensatrice de préavis est due par l'employeur lorsque l'inexécution du préavis lui est imputable ;
Attendu que l'article 11 de la convention collective du Crédit Mutuel Antilles – Guyane prévoit un préavis de trois mois pour le personnel des cadres ;
Qu'il convient dans ces conditions de faire partiellement droit à la demande de Mme X...et de condamner la Caisse Fédérale de Crédit Mutuel Antilles – Guyane à payer à cette dernière la somme de 13775, 04 € (salaire brut de 4547, 68 € + prime de transport de 44 € x 3 mois). ****

Attendu qu'il paraît inéquitable de laisser à la charge de Mme Marie-Michèle X..., les frais irrépétibles qu'elle a exposés, tant en première instance qu'en cause d'appel, il lui sera alloué la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de celle déjà accordée sur le même fondement par le premier juge.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort :
Confirme la décision frappée d'appel, en ce qu'elle a :- prononcé l'annulation de la mise à pied de Mme Marie – Michèle X...,- condamné la Caisse Fédérale de Crédit Mutuel Antilles – Guyane à payer à celle-ci la somme de 591, 40 €, outre les primes et congés payés afférents, le tout assorti de l'intérêt légal,- ordonné la suppression de la mention de cette sanction dans le dossier de Mme Marie – Michèle X...,- dit que le directeur de la Caisse Fédérale de Crédit Mutuel Antilles – Guyane délivrera à Mme Marie – Michèle X...une attestation sur l'honneur d'avoir procédé à cette suppression dans le mois suivant la signification de la décision sous astreinte de 30 € par jour de retard,- condamné la Caisse Fédérale de Crédit Mutuel Antilles – Guyane à verser à Mme Marie – Michèle X...la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Le réforme pour le surplus, et statuant à nouveau,
Dit que la rupture du contrat de travail de Mme Marie – Michèle X...est imputable à la Caisse Fédérale de Crédit Mutuel Antilles – Guyane et dit que cette rupture produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Condamne la Caisse Fédérale de Crédit Mutuel Antilles – Guyane, prise en la personne de son représentant légal, à payer à Mme Marie – Michèle X...les sommes suivantes : 27 712, 08 € à titre d'indemnité pour licenciement cause réelle et sérieuse, 13775, 04 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

Dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;
Y ajoutant,
Condamne la Caisse Fédérale de Crédit Mutuel Antilles – Guyane à payer à Mme Marie – Michèle X...la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la Caisse Fédérale de Crédit Mutuel Antilles – Guyane aux éventuels dépens de l'instance d'appel ;

Rejette les autres demandes ;

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/01107
Date de la décision : 15/10/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2012-10-15;11.01107 ?
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