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24/09/2012 | FRANCE | N°11/001131

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale 04, 24 septembre 2012, 11/001131


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 340 DU VINGT QUATRE SEPTEMBRE DEUX MILLE DOUZE
AFFAIRE No : 11/ 00113
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de Pointe à Pitre du 15 décembre 2010.
APPELANTE
ASSOCIATION IRAFOR... 97139 LES ABYMES Représentée par Maître Johann EUGENE-ADOLPHE (Toque 90), avocat au barreau de la Guadeloupe
INTIMÉ
Monsieur René X...... 97115 SAINTE ROSE Comparant en personne

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 02 juillet 2012, en audience publique, devant la Cour co

mposée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, M. Jacques FOUASSE, conse...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 340 DU VINGT QUATRE SEPTEMBRE DEUX MILLE DOUZE
AFFAIRE No : 11/ 00113
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes de Pointe à Pitre du 15 décembre 2010.
APPELANTE
ASSOCIATION IRAFOR... 97139 LES ABYMES Représentée par Maître Johann EUGENE-ADOLPHE (Toque 90), avocat au barreau de la Guadeloupe
INTIMÉ
Monsieur René X...... 97115 SAINTE ROSE Comparant en personne

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 02 juillet 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, M. Jacques FOUASSE, conseiller, Mme Marie-Josée BOLNET, conseiller, rapporteur qui en ont délibéré.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 24 septembre 2012
GREFFIER Lors des débats Mme Juliette Y..., Adjointe Administrative Principale, faisant fonction de greffière.
ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC.

Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Valérie FRANCILLETTE, Greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE :
Mr René X... a été embauché par l'Association IRAFOR par contrat de travail à durée déterminée sous forme d'un contrat d'Accompagnement dans l'Emploi (C. A. E.) pour une période de 6 mois à compter du 1er juin 2008 en qualité d'agent d'entretien et moyennant un salaire brut de 950, 91 € pour 26 heures de travail hebdomadaire selon les termes du contrat.
Le 26 novembre 2008, l'employeur convoquait le salarié à un entretien préalable au licenciement, et le 31 décembre 2008, il lui adressait une lettre de licenciement mettant en avant de nombreuses absences injustifiées et répétées caractérisant la faute grave et rompait ainsi le contrat de travail.
Le 17 novembre 2009, Mr René X... saisissait le Conseil de prud'hommes de Pointe – à – Pitre aux fins de dire et juger que la rupture de son contrat de travail est imputable à son employeur et de voir condamner son employeur au paiement des sommes suivantes :-981, 44 € au titre de son salaire de septembre 2008,-2944, 32 € au titre de dommages et intérêts pour rupture abusive de son contrat,-582, 52 € au titre de l'indemnité de précarité,-490, 72 € au titre de l'indemnité pour congés payés,-500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens, et voir ordonner la délivrance de l'Attestation ASSEDIC portant le motif exact de la rupture sous astreint de 50 € par jour de retard et ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir.
Par jugement réputé contradictoire du 10 décembre 2010, le Conseil de prud'hommes a reçu les demandes de Mr René X... et condamné l'Association IRAFOR, prise en la personne de son représentant légal, à payer à l'intéressé lesdites sommes, à l'exception de l'indemnité de précarité, a ordonné à l'association défenderesse la remise d'une nouvelle attestation Pôle Emploi conforme à la décision, débouté le demandeur de ses autres demandes et condamné l'employeur aux entiers dépens.
Par déclaration enregistrée le 17 janvier 2011, l'Association IRAFOR interjetait appel de cette décision.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Par conclusions soutenues à l'audience du 04 juin 2012, l'Association IRAFOR, représentée, demande à la Cour de : constater la faute grave, dire et juger que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse, infirmer le jugement rendu le 15 décembre 2010 en toutes ses dispositions, condamner Mr René X... à lui payer la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.
Elle expose que le 03 novembre 2008, Mr X... ne s'est pas présenté à son poste de travail ; qu'elle lui adressé le 21 novembre suivant un courrier lui demandant de réintégrer son poste sans succès ; qu'elle a fini par constater l'abandon de poste et par procéder au licenciement du salarié en application de l'article L. 1243-1 du code du travail, celui-ci ayant failli à son obligation d'exécuter consciencieusement, par son absence non justifiée, le travail pour lequel il a été embauché et pour lequel il reçoit en contrepartie un salaire ; que se trouvant avec une main d'œ uvre réduite, elle se retrouvait dans une situation difficile pour respecter ses engagements.
Elle précise que Mr X..., réclamant le paiement de son salaire de septembre 2008 pour 981, 44 €, a été payé à ce titre à concurrence d'un salaire net de 770, 83 € par chèque tiré sur la Caisse d'Epargne, et qu'ainsi, la prise d'acte de la rupture du contrat à ses torts ne peut prospérer ; qu'en outre, la prise d'acte doit être matérialisée par écrit et adressée par lettre recommandée à l'employeur afin qu'il soit en mesure de prendre connaissance des motifs sur lesquels elle s'appuie, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; qu'enfin, celui-ci prétend avoir eu à réclamer à maintes reprises son salaire de septembre mais il ne produit aucun élément l'attestant.

Par conclusions du 5 mars 2012 et soutenues oralement, Mr René X... demande à la Cour de dire et juger que la rupture du contrat de travail est imputable à son employeur et qu'elle s'analyse alors comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse, de condamner l'Association IRAFOR à lui payer son salaire de septembre 2008, soit 981, 44 €, la somme de 2944, 32 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail en application de l'article L. 1243-4 du code du travail, de la somme de 660, 58 € à titre d'indemnité de congés payés sur le fondement de l'article L3141-26 du même code ainsi que la somme de 1500 € au titre des frais irrépétibles.
Il fait observer que l'Association IRAFOR n'apporte aucune preuve du paiement du salaire de septembre 2008 alors que la charge lui en incombe ; que la présentation du bulletin de salaire ne suffit pas à prouver le paiement du salaire correspondant ; qu'en outre, l'appelant fait état de pièces dans ses conclusions qui ne lui ont pas été adressées et qui sont inopposables ; qu'il est indiqué sur le bulletin de salaire de septembre 2008 que ce salaire lui a été versé par virement alors que l'appelant vient déclarer à l'audience que ce paiement a été fait par chèque de la Caisse d'Epargne.
Il soutient ensuite qu'il a pris acte de la rupture de son contrat de travail, n'ayant pas perçu son salaire du mois de septembre malgré de nombreuses et vaines réclamations auprès de Mr Elie Z..., représentant légal de l'Association IRAFOR en qualité de président, lequel lui a indiqué qu'il n'avait pas de chantier à lui proposer ; qu'il ne peut avoir abandonné son poste, abandon de poste constaté le 3 novembre, puisqu'il a été délivré un bulletin de salaire au titre du mois d'octobre 2008 sur lequel il ne figure aucune retenue pour absence ; qu'il est également étonné que l'employeur ait attendu 3 semaines pour lui demander de réintégrer son poste et 2 mois après les prétendus faits pour lui adresser une lettre de licenciement le 31 décembre 2008, date d'expiration du contrat de travail.
Il relève les contradictions et l'embarras de l'appelant qui invoque dans ses conclusions plusieurs motifs de licenciement, tantôt l'abandon de poste, tantôt la faute grave pour absences injustifiées sans motifs légitimes.
Il précise que la jurisprudence est constante sur le non – paiement ou le retard de paiement du salaire qui constitue un manquement à une obligation essentiel du contrat de travail et qui rend la rupture du contrat de travail imputable à l'employeur ; qu'en conséquence, les articles L. 1243-4 et L. 3141-26 du code du travail doivent s'appliquer dans son cas et l'attestation Pôle Emploi doit lui être délivrée conforme au contenu de l'arrêt de la Cour.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la Cour se réfère expressément aux conclusions écrites des parties et à la décision antérieure.
MOTIFS DE LA DECISION :
SUR LE PAIEMENT DU SALAIRE DE SEPTEMBRE 2008 :
Attendu que l'employeur, débiteur de l'obligation, doit rapporter la preuve du paiement des salaires afférents au travail effectivement accompli ; que la seule délivrance par l'employeur du bulletin de paie n'emporte pas présomption de paiement des sommes qui y sont mentionnées ;
Attendu qu'en l'espèce, l'Association IRAFOR ne rapporte pas la preuve du règlement du salaire de septembre 2008 à Mr René X..., lequel serait intervenu par virement bancaire selon la mention apparaissant sur le bulletin de salaire de septembre 2008 ;
Qu'il convient alors de confirmer le jugement entrepris de ce chef.

SUR LA RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL :
Attendu qu'aux termes de l'article L. 1243-1 du code du travail, le contrat à durée déterminée ne peut être rompu avant son échéance qu'en cas d'accord des parties, de faute grave ou de force majeure ;
Attendu que la faute grave s'analyse comme un manquement intolérable rendant impossible la poursuite des relations contractuelles ; qu'elle peut être le fait soit du salarié, soit de l'employeur ;
Attendu qu'en conséquence, le salarié peut dénoncer l'inobservation des obligations contractuelles et légales par l'employeur par une prise d'acte de la rupture du contrat, et l'employeur par un licenciement ;
Attendu que la lettre de licenciement fixe les limites du litige ;
Attendu qu'en l'espèce, Mr René X... a été embauché pour une période de 6 mois du 1er juin 2008 au 31 décembre 2008 dans le cadre d'un contrat d'accompagnement dans l'emploi qui est un contrat aidé par l'Etat ; qu'il est établi que Mr René X... n'a pas été payé pour l'unique mois de septembre 2008 ; qu'il a néanmoins travaillé durant le mois d'octobre suivant et a été payé à ce titre, ce qu'il ne conteste pas ; qu'il a également travaillé en novembre pour quelques heures comme en atteste le bulletin de paie de novembre 2008 sans pourtant porter à la connaissance de son employeur sa réclamation sur le salaire de septembre ; que de plus, alors que son employeur l'invitait, par lettre recommandée, à regagner son poste laissé vacant depuis le 3 novembre, l'intimé n'en donnait toujours aucune suite alors qu'il pouvait saisir cette occasion pour expliquer ses absences et réclamer par écrit le salaire de septembre non payé ;
Attendu que la lettre de licenciement du 31 décembre 2008 est précise quant à la cause du licenciement de Mr X... qu'elle exprime en ces termes : « En date du 26 novembre 2008, nous vous avons adressé une lettre recommandée de convocation préalable que vous avez cru bon ne pas donner suite et vous ne vous êtes pas présenté à l'entretien fixé. C'est ainsi que les griefs qui sont reprochés se rapportent à votre volonté délibérée de ne pas respecter les obligations contractuelles qui vous incombent. Effet, depuis plusieurs semaines vous cumulez des absences injustifiées sans motifs légitimes et vous ne nous avez pas davantage tenus informés des raisons justifiant à chaque fois de la non reprise de vos fonctions. A ce jour, les observations qui vous ont été faites sont restées sans effet et l'entretien préalable qui n'a pas été respecté par vous n'a apporté aucun élément nouveau. Il apparaît par conséquent que ces absences répétées et injustifiées causent des dysfonctionnements au sein de notre organisation et constituent manifestement une faute grave rendant impossible votre maintien au sein de l'entreprise. C'est pourquoi, nous vous notifions par la présente votre licenciement immédiat. Vous cesserez définitivement de faire partie du personnel de notre entreprise à première présentation de cette lettre. Nous vous informations que votre attestation Assedic et votre certificat de travail restent à votre disposition » ;
Qu'il est clairement dit dans cette lettre que le motif du licenciement est les absences répétées et continues constatées, et préalablement dénoncées par l'employeur par lettre en date du 21 novembre 2008 ;
Que tous ces éléments conduisent la Cour à considérer que le non-paiement du seul salaire de septembre n'est pas d'une gravité suffisante pour justifier d'une prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur ; que l'absence de 97, 68 heures de Mr René X... contre 15 heures de présence durant le mois de novembre 2008 comme il est indiqué sur son bulletin de paie de novembre 2008, sans explications de sa part, est constitutive d'une faute grave rendant impossible la poursuite des relations contractuelles, surtout qu'il s'est placé en situation de ne donner aucun signe de vie à son employeur et de ne rien lui réclamer jusqu'au 17 novembre 2009, date de la saisine du Conseil de prud'hommes, soit 11 mois après son licenciement ;
Que dès lors, il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris des chefs de la rupture abusive du contrat de travail et de l'indemnité fixée à ce titre par les premiers juges, et de juger fondé le licenciement de Mr René X... pour une cause réelle et sérieuse.
SUR LA REMISE D'UNE ATTESTATION PÔLE EMPLOI RECTIFIEE :
Attendu que le licenciement de Mr René X... étant fondé, il n'y a pas lieu d'ordonner la délivrance d'une attestation Pôle Emploi rectifiée ;
Que le jugement entrepris de ce chef est infirmé.
SUR L'INDEMNITE COMPENSATRICE DE CONGES PAYES :
Attendu que l'Association IRAFOR sollicite l'infirmation du jugement du 15 décembre 2010 en toutes ses dispositions sans soutenir de moyens quant à l'indemnité compensatrice de congés payés allouée à concurrence de la somme de 490, 72 € ;
Attendu que pour sa part, Mr René X... sollicite reconventionnellement la somme de 660, 58 € au titre de cette indemnité ;
Attendu que l'indemnité ne peut être inférieure à la rémunération qu'aurait eue le salarié s'il avait travaillé pendant son congé, calculée sur la base du dernier salaire et de la durée du travail dans l'établissement ;
Attendu qu'en l'espèce, compte – tenu des contradictions apparaissant sur les trois bulletins de salaire d'octobre, novembre et décembre 2008 dans la rubrique réservée aux congés, l'indemnité de congés sera calculée comme suit : 17, 50 jours x (981, 44 € salaire brut de base/ 30 jours) = 576, 01 €
Attendu qu'il convient d'infirmer la décision des premiers juges rendue à ce titre et de condamner l'Association IRAFOR à payer à Mr René X... ladite somme.

PAR CES MOTIFS :
La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort :
Déclare l'appel recevable ;
Confirme le jugement du 15 décembre 2010 en ce qu'il a condamné l'Association IRAFOR à payer à Mr René X... la somme de 981, 44 € au titre du salaire de septembre 2008 ;
Le réforme pour le surplus,
Et statuant à nouveau,
Dit que le licenciement de Mr René X... est justifié par une cause réelle et sérieuse et rejette la demande de celui-ci visant le paiement d'une indemnité pour licenciement abusif ;
Condamne l'Association IRAFOR, prise en la personne de son représentant légal, à payer à Mr René X... la somme de 576, 01 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés ;
Dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;
Rejette les autres demandes ;
Dit n'y avoir à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Laisse les éventuels dépens de la présente instance à la charge des deux parties ;
Le greffier, Le président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale 04
Numéro d'arrêt : 11/001131
Date de la décision : 24/09/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de Prud'hommes, 15 décembre 2010


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2012-09-24;11.001131 ?
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