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17/09/2012 | FRANCE | N°11/00214

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 17 septembre 2012, 11/00214


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No329 DU DIX SEPT SEPTEMBRE DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 11/ 00214
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 18 janvier 2011.
APPELANTE
SOCIETE SAGA CARAIBES SARL ZA Les Noliviers-Morne Rouge 97115 SAINTE ROSE Représentée par Me BOUTROY-XIENG substituant Me Gérard DERUSSY (TOQUE 48) avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉ

Monsieur Philippe B...... 97139 ABYMES Représenté par Me MATRONE substituant Me Pascal BICHARA-JABOUR (TOQUE 14) avocat au barreau d

e GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 04 Juin 2012, en a...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No329 DU DIX SEPT SEPTEMBRE DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 11/ 00214
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 18 janvier 2011.
APPELANTE
SOCIETE SAGA CARAIBES SARL ZA Les Noliviers-Morne Rouge 97115 SAINTE ROSE Représentée par Me BOUTROY-XIENG substituant Me Gérard DERUSSY (TOQUE 48) avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉ

Monsieur Philippe B...... 97139 ABYMES Représenté par Me MATRONE substituant Me Pascal BICHARA-JABOUR (TOQUE 14) avocat au barreau de GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 04 Juin 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, rapporteur, M. Jacques FOUASSE, conseiller, Mme Marie-Josée BOLNET, conseillère. qui en ont délibéré.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 17 septembre 2012
GREFFIER Lors des débats Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative Principale, faisant fonction de greffière, serment préalablement prêté.

ARRET :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Juliette GERAN, Adjointe Administrative Principale, faisant fonction de greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure :

Par contrat de travail à durée indéterminée à effet du 1er juin 2006, Monsieur Philippe B...était engagé par la Société SAGA CARAÏBES en qualité de " Représentant de commerce Responsable de département ", moyennant le versement d'un salaire mensuel de base fixe de 1000 euros, outre des commissions sur marge brute et une prime mensuelle sur objectifs, ainsi que 400 euros mensuels pour ses frais de déplacements. Il était stipulé qu'il exercerait ses fonctions conformément aux dispositions de la loi du 7 mars 1957 et des textes subséquents sur le statut professionnel des Voyageurs Représentants et Placiers, et qu'il aurait pour tâche principale d'assurer pour le compte de la Société SAGA CARAÏBES la commercialisation des produits du département de l'entreprise dont il était responsable, le salarié devant travailler sous l'autorité de son supérieur hiérarchique, en ayant en charge la gestion des produits de son département.
Le 23 janvier 2007, M. B...se voyait confier la " Responsabilité totale de l'ensemble de la gestion de SAGA CARAIBES (gestion de l'entreprise et partie commerciale) hormis sur la partie logistique et stockage ", son salaire brut étant fixé à 2500 euros à partir du 1er février 2007, outre 750 euros pour frais de déplacements et utilisation du véhicule personnel, et une prime annuelle de 20 % sur salaire brut, liée aux objectifs.
Après convocation du 21 novembre 2008 à un entretien préalable fixé au 28 novembre 2008, l'employeur notifiait à M. B..., par lettre recommandée avec avis de réception en date du 3 décembre 2008, son licenciement pour faute grave.
Le 20 janvier 2009, M. B...saisissait le Conseil de Prud'hommes de Pointe-à-Pitre aux fins d'obtenir paiement de dommages intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, ainsi que paiement d'indemnités de préavis et pour clause de non-concurrence.
Par jugement du 18 janvier 2011, la juridiction prud'homale condamnait la Société SAGA CARAÏBES à payer à M. B...les sommes suivantes :-7883, 16 euros à titre d'indemnité de préavis,-15 766, 32 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,-10 000 euros au titre de la contrepartie financière pour clause de non-concurrence,-1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 3 février 2011, la Société SAGA CARAÏBES interjetait appel de cette décision.
****
Par conclusions du 2 mars 2012, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, la Société SAGA CARAÏBES entend voir constater que :- la clause de non-concurrence de M. B...n'avait plus vocation à s'appliquer à compter de sa prise de fonction de directeur de la Société SAGA CARAÏBES,- les faits reprochés au salarié ne sont pas prescrits compte tenu du fait que la Société SAGA CARAÏBES n'a pu avoir une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits commis par M. B...que tardivement, en raison de la rétention d'informations pratiquée par celui-ci,

- le licenciement de M. B...procède d'une cause réelle et sérieuse en raison de ses manquements constituant une faute grave,- M. B...ne justifie pas du montant des dommages et intérêts qu'il réclame et ne fournit aucun élément d'appréciation sur sa situation professionnelle actuelle.

La Société SAGA CARAÏBES conclut à la réformation du jugement déféré et au rejet de l'intégralité des demandes de M. B....
Subsidiairement, au cas où la faute grave ne serait pas retenue, la Société SAGA CARAÏBES demande qu'il soit constaté que le licenciement de M. B...procède d'une cause réelle et sérieuse.
En tout état de cause elle sollicite le paiement de la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
****
Par conclusions du 20 janvier 2012, auxquelles il a été fait référence à l'audience des débats, M. B...sollicite la confirmation du jugement entrepris et le rejet de l'intégralité des demandes de la Société SAGA CARAÏBES. Il réclame paiement de la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il fait valoir qu'un certain nombre de moyens soutenus par l'appelante ne sont pas contenus, pour une grande partie d'entre eux, dans la lettre de licenciement. Il reproche à l'employeur de ne faire référence, dans sa lettre de licenciement, à aucun fait précis, circonstancié, ni situé dans le temps. Il invoque le délai de prescription de 2 mois, dont l'inobservation prive la sanction de toute justification.
Il conteste les griefs avancés par l'employeur, invoquant les clauses de l'avenant du 23 janvier 2007 de son contrat de travail, ses prérogatives limitées de nature purement commerciale, ainsi que les motifs du jugement entrepris.

Motifs de la décision :

Sur la rupture du contrat de travail :
Dans sa lettre de licenciement du 3 décembre 2008, l'employeur invoque trois motifs :- un manque avéré de maîtrise de la gestion des stocks et de la gestion commerciale, faisant état de pertes sèches très importantes de marchandises pour DLU (date limite d'utilisation) dépassée en 2007, 40 000 euros de produits ayant dû être jetés en 2008 pour les mêmes raisons,- une commande et une livraison de produits pour une valeur de 38 000 euros spécialement pour un client, sans engagement de celui-ci, lequel au bout de 5 mois les a retournés pour invendus-courant mai 2008, embauche de personnel sans déclaration au préalable à l'URSSAF.

L'examen des pièces versées au débat fait ressortir une estimation des pertes sèches pour D LV dépassée (date limite de vente) d'un montant de 52 183, 34 euros pour l'année 2007, l'estimation des pertes pour l'année 2008 étant évaluée à 46 013, 93 euros.

Il y a lieu de relever qu'aucune observation n'a été faite à M. B...à l'issue de l'année 2007 au sujet des produits périmés.

Par ailleurs pour conforter ces estimations, l'employeur joint des factures de transport, évacuation de marchandises périmées en décharge et enfouissement. Il y a lieu de relever que ces factures passées en comptabilité, remontent aux mois de juin et août 2008. Dès lors le gérant de la Société SAGA CARAÏBES était en mesure d'avoir connaissance de l'importance des produits périmés dès cette époque. La procédure de licenciement ayant été engagée le 21 novembre 2008, soit plus de 2 mois après que le gérant de la Société SAGA CARAÏBES ait pu avoir connaissance de ces faits, ceux-ci ne peuvent être invoqués utilement à l'appui de la mesure de licenciement.
En ce qui concerne le second motif invoqué dans la lettre de licenciement, il y a lieu de rappeler que si l'un des clients en l'occurrence, la Société A +, a retourné à la Société SAGA CARAÏBES pour 38 000 euros de marchandises, c'est parce qu'elle s'est plainte de l'arrêt de l'exclusivité qui lui avait été consentie sur certains de ces produits (FARIDA B).
Le contrat de distribution sélective et exclusive, conclu le 28 février 2008, d'une part entre la Société SAGA CARAÏBES, représentée par M. B..., et d'autre part la Société A +, portant sur la distribution locale de produits APPLE, ANTI AGE, FARIDA et VIADRINK, apparaît être un contrat type de distribution sélective et exclusive que la Société SAGA CARAÏBES consentait à des distributeurs locaux pour les produits dont elle était importateur et distributeur exclusif. Il n'apparaît pas de faute de la part de M. B...dans la conclusion de ce contrat, dont la conclusion relevait de sa compétence en sa qualité de " Responsable total de l'ensemble de la gestion de SAGA CARAÏBES ", tant en ce qui concerne la gestion de l'entreprise que la partie commerciale.
La responsabilité de M. B...peut difficilement être retenue, dans la mesure où il résulte du courrier du 8 juillet 2008 de la Société A +, que c'est le fabricant, la Société ELSE, qui a décidé de faire cesser cette exclusivité. En outre si la Société A + a pu se plaindre de n'avoir reçu aucune information au sujet d'une commande de réassort de produits VIADRINK passée le 29 avril 2008, il y a lieu de rappeler que la Société A + était cliente de M. Manuel C..., en charge des commandes de ladite société, comme cela résulte des courriels versés en pièce no14 de l'appelante. Il n'apparaît donc pas de faute personnelle de M. B..., à l'origine de la décision de la Société A + de retourner les produits qui lui avaient été livrés en exécution du contrat de distribution sélective et exclusive.
En ce qui concerne le troisième grief, certes M. B...apparaît avoir commis une faute certaine en engageant, en qualité de directeur du site, le 9 mai 2008, deux employées, en l'occurrence Mme Céline D...et Mme Marie-France E..., sans avoir procédé en temps utile à la déclaration unique d'embauche, celle-ci n'ayant été reçue par les services de l'URSSAF que le 21 mai 2008, soit après la cessation, le 16 mai 2008, du contrat de travail des deux salariées. Toutefois ces embauches ont fait l'objet d'une part d'un accusé de réception de déclaration unique d'embauche en date du 21 mai 2008, et de bulletins de salaires délivrés aux employées le 22 mai 2008. Le gérant de la Société SAGA CARAÏBES était dès lors en mesure, dès le mois de mai 2008, de constater les faits ainsi reprochés à M. B....

La procédure de licenciement ayant été engagée le 21 novembre 2008, soit plus de deux mois après que le gérant de la Société SAGA CARAÏBES ait pu avoir connaissance de ces faits, ceux-ci ne peuvent être invoqués à l'appui de la mesure de licenciement.

En conséquence aucun des fait reprochés à M. B...dans la lettre de licenciement ne peuvent valablement être invoqués à l'appui de la mesure de licenciement notifiée à ce dernier.
Il en résulte que M. B..., ayant le statut de cadre, et ayant une ancienneté de plus de 2 ans à la date de son licenciement, est fondé à réclamer à titre d'indemnité de préavis la somme de 7883, 16 euros, représentant 3 mois de salaires, ainsi que la somme de 15 766, 32 euros, représentant l'indemnité minimale équivalente à 6 mois de salaires, prévue par l'article L 1235-3 du code du travail.

Sur la clause de non-concurrence :

L'article 8 du contrat de travail à durée indéterminée par lequel la Société SAGA CARAÏBES a embauché M. B...à compter du 1er juin 2006 en qualité de représentant de commerce, prévoit une clause de non-concurrence d'une durée de 2 ans, par laquelle M. B...s'interdit formellement à l'expiration de son contrat, quel que soit le motif et les circonstances de la rupture, d'offrir ses services ou de s'engager à titre de salarié non représentant (quel que soit le poste), de représentant statutaire ou tout autre titre (agent mandataire, commercial ou autre), auprès d'une maison fabricant ou vendant les mêmes articles, ou des articles susceptibles de concurrencer ceux de la Société SAGA CARAÏBES, M. B...s'interdisant de même de s'intéresser, sous quelque forme que ce soit, directement ou indirectement ou par personnes interposées, notamment par exercice d'un commerce, achat d'actions ou de parts, etc. … à toute fabrication, négoce ou service pouvant concurrencer, si peu que ce soit, la Société SAGA CARAÏBES dans les articles objets du contrat.
Il était stipulé que pendant l'exécution des dispositions de cette clause, la Société SAGA CARAÏBES verserait à M. B...une contrepartie pécuniaire déterminée conformément aux dispositions de l'article 17 de l'Accord Interprofessionnel des VRP du 3 octobre 1975.
L'accord du 23 janvier 2007 par lequel il était attribué à M. B...la responsabilité totale de l'ensemble de la gestion de la Société SAGA CARAÏBES (gestion de l'entreprise et partie commerciale) hormis sur la partie logistique et stockage, ne constitue qu'un avenant au contrat de juin 2006, ne rendant pas caduques les dispositions de ce contrat initial, dans la mesure où elles ne sont pas contraires ou incompatibles avec celles de l'avenant, étant souligné que M. B...étant chargé de la gestion commerciale de l'entreprise, la clause de non concurrence se trouvait justifiée même après la conclusion de l'avenant. En conséquence la clause de non-concurrence devait continuer à produire ses effets même après la conclusion de l'avenant du 23 janvier 2007.
Si l'article 17 de l'Accord Interprofessionnel des VRP, du 3 octobre 1975, prévoit, à titre de contrepartie financière de la clause de non-concurrence, le versement de 2/ 3 de mois de salaire pendant 2 ans, calculés sur la moyenne des 12 derniers mois de salaire, l'employeur ne justifie pas avoir versé une telle contrepartie à M. B..., ne produisant même
pas copie des bulletins de paie délivrés à celui-ci antérieurement à l'avenant du 23 janvier 2007. En conséquence la somme de 10 000 euros allouée par les premiers juges à M. B...à titre de contrepartie financière de la clause de non-concurrence, est largement justifiée.
Comme il paraît inéquitable de laisser à la charge de M. B...les frais irrépétibles qu'il a exposés tant en première instance qu'en cause d'appel, il lui sera alloué la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de celle déjà allouée sur le même fondement par les premiers juges.

Par ces motifs,

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Et y ajoutant,
Condamne la Société SAGA CARAÏBES à payer à M. B...la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que les entiers dépens sont à la charge de la Société SAGA CARAÏBES,
Déboute les parties de toute conclusion plus ample ou contraire.
Le Greffier, Le Président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/00214
Date de la décision : 17/09/2012
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2012-09-17;11.00214 ?
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