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13/08/2012 | FRANCE | N°11/00919

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre civile, 13 août 2012, 11/00919


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRET No 313 DU TREIZE AOUT DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 11/ 00919

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 7 juin 2011.

APPELANTE

Madame Carole X...
...
97118 SAINT-FRANCOIS
Représentée par Maître Michaël SARDA (Toque 1), avocat au barreau de la Guadeloupe

INTIMÉE

SAS ANTILLES ON LINE
Habitation Sainte Marthe Les Hauts
97118 B 429667173SAINT- FRANCOIS
Représentée par la SCP COUROUX/ SILO-LAVITAL (Toque 38), avoc

ats au barreau de la Guadeloupe

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE
ARRET No 313 DU TREIZE AOUT DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 11/ 00919

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 7 juin 2011.

APPELANTE

Madame Carole X...
...
97118 SAINT-FRANCOIS
Représentée par Maître Michaël SARDA (Toque 1), avocat au barreau de la Guadeloupe

INTIMÉE

SAS ANTILLES ON LINE
Habitation Sainte Marthe Les Hauts
97118 B 429667173SAINT- FRANCOIS
Représentée par la SCP COUROUX/ SILO-LAVITAL (Toque 38), avocats au barreau de la Guadeloupe

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, L'affaire a été débattue le 30 Avril 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, rapporteur
M. Jacques FOUASSE, conseiller,
Mme Marie-Josée BOLNET, conseillère.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 16 juillet 2012 date à laquelle le prononcé du dit arrêt a été prorogé au 13 août 2012.

GREFFIER Lors des débats Mme Juliette GERAN, Adjointe administrative faisant fonction de greffière.

ARRET :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC.
Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Valérie FRANCILLETTE, Greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure :

Mme Carole X...était engagée par contrat de travail à durée indéterminée, à compter du 2 mai 2007, par la S. A. S. Antilles On Line en qualité de responsable administrative et financière, avec le statut de cadre, moyennant une rémunération mensuelle de 2800 euros pour une durée de travail de 151, 67 heures par mois.

Par courrier du 28 juillet 2008, Mme X...était convoquée à un entretien préalable fixé au 5 août 2008, en vue d'une sanction disciplinaire, une mise à pied à titre conservatoire lui était notifiée par le même courrier.

Par courrier du 7 août 2008, Mme X...se voyait notifier une mise à pied disciplinaire de 3 jours, avec retenue sur salaire, pour la période du 12 au 14 août 2008.

À compter du 8 septembre 2008 Mme X...était en arrêt travail pour syndrome dépressif réactionnel.

Au cours d'un entretien avec l'Inspecteur du travail, le 10 octobre 2008, Mme X...faisait savoir qu'elle s'était vu proposer par son employeur de signer une demande de rupture conventionnelle du contrat de travail, sans qu'un accord sur les modalités financières de la rupture ait pu être trouvé. Elle se plaignait de pressions pour la faire signer ladite rupture conventionnelle, pressions consistant en des menaces indirectes relatives à une procédure de licenciement pour faute grave.

Dans un courrier du 24 octobre 2008, le Directeur du travail et de l'emploi rappelait à l'employeur les conditions de la mise en oeuvre d'une rupture conventionnelle du contrat de travail à durée indéterminée des salariés non protégés.

Le 27 février 2009 Mme X...saisissait le Conseil de Prud'hommes de Pointe-à-Pitre aux fins d'obtenir paiement de dommages intérêts pour harcèlement moral.

Par conclusions additionnelles du 21 septembre 2009, la salariée sollicitait la résiliation judiciaire de son contrat de travail.

Le 13 novembre 2009, le médecin du travail établissait une fiche d'inaptitude précisant : « en une seule visite pour danger immédiat (article 4624-31) inapte à tous les postes de l'entreprise ».

Par lettre recommandée avec avis de réception du 26 novembre 2009, l'employeur, suite à l'avis de la médecine du travail, convoquait Madame X...à un entretien préalable fixé au 14 décembre 2009 en vue d'une mesure de licenciement.

Par courrier recommandé avec avis de réception du 17 décembre 2009, l'employeur notifiait à Mme X...son licenciement en lui faisant savoir que l'entreprise n'était pas en mesure de lui proposer un poste de reclassement compatible avec son état de santé, et que les diverses demandes présentées auprès de sociétés tiers dans le but d'assurer son reclassement étaient restées infructueuses.

Par jugement du 7 juin 2011, la juridiction prud'homale considérait qu'il n'y avait pas de harcèlement moral et disait que le licenciement était justifié par une cause réelle et sérieuse. La Société Antilles On Line était condamnée à payer à Mme X...les sommes suivantes :
-9691, 50 euros au titre du paiement des heures supplémentaires,
-1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme X...était déboutée du reste de ses demandes.

Par déclaration du 21 juin 2011, Mme X...interjetait appel de cette décision.

****

Par conclusions notifiées à la partie adverse le 13 janvier 2012, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, Mme X...entend voir juger qu'elle a été victime de harcèlement moral de la part de son employeur, qu'il n'a pas été procédé au paiement des heures supplémentaires qu'elle a réalisées, et que la sanction disciplinaire de mise à pied dont elle a fait l'objet n'était pas justifiée. Elle sollicite en conséquence l'infirmation du jugement déféré et entend voir prononcer la résiliation du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur à la date du 24 décembre 2009. Elle demande paiement de la somme de 60   000 euros à titre de dommages intérêts en réparation de la résiliation de son contrat de travail aux torts de l'employeur.

À titre subsidiaire si la résiliation du contrat de travail n'était pas prononcée, Mme X...demande que soit constatée la nullité de son licenciement, et à ce titre réclame paiement de la somme de 60   000 euros à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice subi, outre la somme de 933 euros au titre de l'irrégularité de la procédure. Elle réclame en outre paiement de la somme de 33   600 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans avoir procédé à son reclassement et ne pas avoir procédé à son licenciement dans le délai d'un mois.

Dans tous les cas elle demande paiement des sommes suivantes :
-8400 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
-4340 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,
-150   000 euros de dommages et intérêts en réparation du harcèlement moral subi,
-9691, 50 euros au titre de ses heures supplémentaires non payées,
-900 euros au titre du remboursement des 3 jours de mise à pied disciplinaire, cette sanction devant être annulée,
-790 euros au titre de son épargne salariale,
-5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

À l'appui de ses demandes Mme X...expose qu'elle faisait l'objet d'un harcèlement moral permanent et quotidien de la part du président de la Société Antilles On Line, M. François Z.... Elle aurait fait part à son employeur du fait qu'il convenait que ce traitement et ce harcèlement moral devaient cesser. En réponse le président de la Société Antilles On Line lui remettait une lettre de mise à pied conservatoire préalable à une sanction disciplinaire.

Elle indique que M. Z...n'ayant pas apprécié qu'elle lui demande de mettre un terme à ces agissements, il la poussait dans ses derniers retranchements afin qu'elle démissionne. Même pendant son arrêt maladie pour syndrome dépressif réactionnel, son employeur faisait pression sur elle afin qu'elle quitte entreprise.

****

Par conclusions du 5 mars 2012, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, la Société Antilles On Line faisant valoir que la sanction disciplinaire notifiée à Mme X...était justifiée, que le maintien de son contrat de travail n'était pas possible, et qu'en tant qu'employeur elle avait satisfait à ses obligations légales, sollicite la confirmation en toutes ses dispositions du jugement entrepris sauf en ce qu'il a alloué à Mme X...la somme de 9691, 50 euros au titre du paiement des heures supplémentaires et celle de 1500 euros au titre des frais irrépétibles.

Elle conclut au rejet de l'ensemble des prétentions de Mme X..., et réclame paiement de la somme de 1600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

À l'appui de ses prétentions, la Société Antilles On Line expose que rapidement après son engagement, les défaillances et carences de Mme X...sont apparues, l'entreprise n'ayant pas été en mesure d'honorer certaines de ses obligations et ce, à diverses reprises, en raison de la négligence de la seule Mme X.... Selon l'employeur les erreurs répétées de Mme X...auraient justifié un licenciement mais le dirigeant la société n'a pas estimé devoir rompre la relation contractuelle et a opté pour un simple avertissement, donnant ainsi à la salariée une nouvelle chance.

D'après la Société Antilles On Line ce que Mme X...énonce comme étant du harcèlement n'est en réalité que la manifestation de l'exaspération de son employeur face aux erreurs réitérées de cette dernière et aux préjudices qui étaient causés à la société. À la suite d'initiatives malencontreuses concernant la modification des fichiers comptables en cours d'audit et l'engagement de la société dans une relation contractuelle inutile et coûteuse, Mme X...devait faire l'objet d'une mise à pied à titre conservatoire suivie d'une mise à pied disciplinaire.

Critiquant les attestations produites par Mme X..., la Société Antilles On Line fait valoir que Mme X...ne cesse de vouloir faire supporter à son employeur ses propres carences allant jusqu'à prétendre être victime d'un harcèlement qui n'est que le fruit de son imagination, soutenant qu'en réalité, parfaitement consciente de son incompétence et des conséquences préjudiciables qui en découlaient pour son employeur, auxquelles s'ajoutait une situation personnelle difficile, Mme X...a peu à peu plongé dans un état de fragilité psychologique.

La Société Antilles On Line expose que Mme X...ne souhaitant pas reprendre ses fonctions tout en rejetant finalement la solution d'une rupture conventionnelle qui n'aurait pas été assez « lucrative » à ses yeux, s'est volontairement placée en situation d'arrêts de travail successifs, le harcèlement allégué étant inexistant.

Expliquant que le reclassement de Mme X..., laquelle a été déclarée inapte à tous les postes de la Société Antilles On Line, s'est avéré impossible, et que les tentatives de reclassement externe se sont avérées vaines, l'employeur a dû procéder au licenciement de la salariée.

Motifs de la décision :

Sur le harcèlement moral et la demande de résiliation judiciaire :

Dans son attestation, Mme Claudiane A..., salariée de la Société Antilles On Line, expose que le président de ladite société « avait pour habitude de passer ses nerfs sur la comptable X...... c'était des cris permanents, une gestuelle équivoque, des portes qui claquent, des objets qui fusent au point d'installer un énorme malaise au sein même du bureau … De plus, en réunion du personnel, il avait toujours des piques pour le service comptable qui ne faisait pas leur travail. Carol X...sortait après chaque réunion avec la direction en pleurs et surtout ce qui m'a choqué, en tremblant ».

M. Jean-Luc B...salarié de la même société, atteste pour sa part avoir été témoin de nombreuses poussées de colère et de hurlements au sein de l'entreprise de la part du président François Z...envers sa collègue Carole X..., responsable de la comptabilité, et d'actes coléreux répétitifs et d'intimidation. Il indiquait : " je dirais même qu'il s'agit réellement d'un harcèlement moral envers Mme X.... Je l'ai même vu, au même titre que plusieurs de mes collègues, jeter un ordinateur portable au sol et frapper une imprimante de rage ». Le témoin évoque un stress général et permanent perturbant le bon fonctionnement de l'entreprise.

Dans son attestation Mme Carine C..., également salariée de la Société Antilles On Line, décrivant le harcèlement moral du président François Z...envers sa collègue Carole X..., indique qu'elle se souvient avoir vu « M. Z...rentrer dans le bureau de Mme X...en furie en faisant des gestes manifestant sa colère " Lorsque Mme X...venait aux réunions, elle entendait hurler.

M. Rémi D..., intervenant comme prestataire de services au sein de l'entreprise pour l'entretien de la climatisation, atteste avoir été témoin de l'attitude déplacée et du comportement coléreux et injurieux de M. Z...à l'égard de sa responsable administrative et financière Carole X.... Il indique qu'il a été témoin à maintes reprises des agissements de M. Z..., ayant eu la douleur de constater que ce harcèlement régulier avait fortement porté atteinte à l'efficacité du travail de la salariée.

Mme Chantal F..., ancienne salariée de la Société Antilles On Line, indique qu'elle a vu de nombreuses fois Mme X...en total désarroi face à la surcharge de travail que lui attribuait son employeur M. François Z.... Elle explique que comme Mme X..., elle s'était investie totalement et personnellement, et qu'elle a craqué et a été mise en arrêt travail, et que suite à cela elle a préféré démissionner.

Le fait que certains auteurs de ces attestation aient engagé une rupture négociée avec leur employeur, ne saurait décrédibiliser le contenu de leur déclaration.

Dès le 14 octobre 2008, Mme X..., par l'intermédiaire de son conseil, Me G..., décrit à l'intention de son employeur, les conditions difficiles d'exercice de ses fonctions, expliquant la surcharge de travail notamment par le fait de la désorganisation du service comptable par les congés maternité et parental des deux comptables et de la démission de l'une d'elles (Mme Cristiana H...) qui n'a jamais été remplacée. Elle fait également état du congé maternité de la DRH, Mme Carine I..., dont une grande partie des fonctions, relatives à la préparation de la paye et à la gestion du personnel de 70 salariés, a été prise en charge par Mme X....

Dans ce courrier, il est relevé que Mme X...a remplacé de fait l'ancien directeur administratif et financier, M. Hugues J..., qui avait été licencié à l'arrivée de Mme X...au sein de la société, le traitement de celle-ci étant 2 fois inférieur à la rémunération du directeur administratif et financier. Il est également reproché au président M. François Z...d'adopter un comportement coléreux, avec des cris insupportables, ce harcèlement moral ne faisant qu'aggraver la situation.

Dans l'avis qu'il a rédigé le 13 octobre 2008, le docteur en psychologie Christian K..., indique que Mme X...présente un état anxio-dépressif réactionnel qui s'accompagne de nombreux symptômes psychiques, neurovégétatifs et émotionnels, son univers professionnel étant devenu anxiogène.

Dans un courrier du 18 février 2010, adressé au directeur du Pôle Emploi de Saint-François, le médecin du travail, le docteur Sylvie L..., confirme que " Mme X...est inapte à tous les postes de l'entreprise AOL, mais qu'elle est apte au même poste et à tout autres postes de toutes les entreprises ", l'intéressée étant actuellement " déclarée en maladie professionnelle ".

Il résulte suffisamment de l'ensemble de ces éléments que Mme X...a été victime de harcèlement moral au sein de la Société Antilles On Line.

Même si l'employeur a pu relever à l'encontre de Mme X...des erreurs commises dans l'exercice de ses fonctions, comme il est indiqué dans la lettre de notification de mise à pied disciplinaire en date du 7 août 2008, il n'en demeure pas moins que les réactions du président de la Société Antilles On Line étaient manifestement excessives et son comportement répété, constitutif de harcèlement moral.

Compte tenu de la situation faite à Mme X...au sein de l'entreprise, ayant conduit à de sérieux problèmes psychologiques qui ont perduré chez l'intéressée pendant de nombreux mois, celle-ci est fondée à solliciter la résiliation judiciaire de son contrat de travail, cette résiliation produisant des effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, à la date de la rupture du contrat de travail notifiée par l'employeur, à savoir le 24 décembre 2009, date de la réception de la lettre de licenciement.

La demande de résiliation judiciaire formée par Mme X..., étant antérieure à la date du licenciement, et dans la mesure ou il est fait droit à cette demande, il n'y a pas lieu d'examiner si ce licenciement est justifié ou non par une cause réelle et sérieuse.

Sur les demandes pécuniaires de Mme X...:

Mme X...ayant subi la perte de ses revenus salariaux, et ayant vu compromettre son avenir professionnel pour plusieurs années, l'indemnisation des préjudices subis à la suite de la rupture du contrat de travail doit être fixée à la somme de 30   000 euros, étant relevé que cette rupture est le résultat, pour une grande part, du fait que la Société Antilles On Line qui avait licencié son directeur administratif et financier, a cru devoir utiliser une pratique qui consiste, non pas à remplacer ce directeur, mais à recruter un cadre d'un niveau inférieur, devant assumer outre ses propres tâches celle du directeur licencié, ce qui a pour résultat un gain financier à court terme pour l'entreprise, mais a aussi pour effet une surcharge de travail insupportable pour le salarié ainsi recruté.

Mme X...ayant été par ailleurs victime d'un traumatisme psychologique grave et durable, résultant du harcèlement moral qu'elle a subi, le préjudice ainsi subi sera indemnisé par l'octroi de dommages intérêts à hauteur de 30   000 euros.

La résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, Mme X...est fondée à solliciter l'octroi d'une indemnité compensatrice de préavis, laquelle doit être fixée à la somme de 8400 euros correspondants à 3 mois de salaires. Il doit y être ajouté l'indemnité compensatrice de congés payés afférente, soit au total la somme de 9 240 euros, telle que sollicitée en page 26 des conclusions de l'intimée. L'employeur ne peut arguer de l'inaptitude de Mme X...à exécuter son préavis pour s'exonérer du paiement du préavis, puisqu'il est lui-même à l'origine de cette inaptitude.

Sur la base d'un salaire mensuel de 2800 euros, et compte tenu d'une ancienneté dans l'entreprise s'étendant du 2 mai 2007 au 24 décembre 2009, l'indemnité légale de licenciement due à Mme X...ne peut s'élever à la somme de 4340 euros comme elle le prétend. Il résulte par contre du bulletin de paie du mois de décembre 2009 faisant apparaître un montant net à payer de 3760, 60 euros, comprenant une prime de licenciement à hauteur de 1960 euros, et du reçu pour solde de tout compte signé par Mme X...le 29 décembre 2009 pour un montant de 3 760, 60 euros, que cette dernière a été remplie de ses droits au titre de l'indemnité légale de licenciement. Elle doit donc être déboutée sur ce chef de demande.

Mme X...sollicite l'indemnisation des 3 jours de mise à pied disciplinaire, qui lui ont été notifiés par courrier du 7 août 2008. Dans cette notification il lui était reproché :
- d'avoir de sa propre initiative, et sans en informer sa hiérarchie, demandé à l'équipe informatique d'intervenir pour modifier les fichiers de la comptabilité 2007 concernant le domaine de Sainte Marie et la régularisation de factures alors que le bilan 2007 était audité par le commissaire aux comptes,
- d'avoir signé sans autorisation de sa hiérarchie une commande et effectué une inscription payante dans un annuaire de voyage, engageant de ce fait la Société Antilles On Line dans des dépenses inutiles ayant généré un traitement de contentieux.

Contrairement à ce que soutient Mme X..., le président de la Société Antilles On Line, dans sa lettre datée du 30 octobre 2008, ne reconnaît nullement qu'elle n'était pas à l'origine des faits reprochés. Au contraire il fait valoir que Mme X...était toujours à l'origine de nombreuses erreurs, et que dans ce contexte il était amené à prononcer à son encontre une sanction disciplinaire, laquelle est pour lui parfaitement justifiée. Il ajoute que contrairement à ce que l'avocat de Mme X...avançait dans son courrier du 14 octobre 2008, les fichiers informatiques avaient été effectivement modifiés, et qu'il s'est avéré que Mme X...avait également outrepassé ses pouvoirs par la signature d'un bon de commande et ce à sa seule initiative.

À aucun moment, dans ses conclusions de 32 pages, Mme X...ne conteste la réalité des griefs invoqués par l'employeur à l'appui de la mise à pied disciplinaire de 3 jours. Elle reproche seulement la durée de 3 semaines de la mise à pied conservatoire. En conséquence la mise à pied disciplinaire de 3 jours étant objectivement justifiée par les erreurs relevées, et les faits reprochés paraissant être étrangers à la surcharge de travail imposée à la salariée, celle-ci sera déboutée de sa demande de paiement des 3 jours de mise à pied.

A l'appui de sa demande de paiement d'heures supplémentaires, Mme X...produit un décompte détaillé desdites heures concernant la période de septembre 2007 à juin 2008, duquel il ressort qu'elle aurait été amenée à travailler pendant 6 heures, trois mercredis par mois, alors que le mercredi était un jour de repos, et avoir accompli 2 heures supplémentaires par jour en travaillant jusqu'à 20 heures, ce qui au total représente 42 heures de travail par mois correspondant à une rémunération mensuelle de 775, 32 euros pendant 10 mois.

Il y a lieu de constater que la période pendant laquelle Mme X...fait valoir qu'elle a accompli des heures supplémentaires, correspond à celle au cours de laquelle ont été relevées les absences, soit pour congé maternité, soit pour congé parental, soit à la suite de démission, de Mmes Christiana H...et Florence M..., toutes deux comptables, et de Mme Carine I..., DRH. Ainsi le rappel d'heures supplémentaires réclamé par Mme X..., apparaît d'autant plus justifié, que l'employeur n'apporte aucun élément permettant de mettre en doute le bien-fondé de la revendication de la salariée. Il sera donc alloué à Mme X...la somme de 9691, 50 euros, correspondant à la rémunération majorée de 25 % des heures supplémentaires accomplies.

Mme X...ne faisant état d'aucun fondement conventionnel justifiant sa demande de paiement au titre de l'épargne salariale, elle sera déboutée de ce chef.

Comme il paraît inéquitable de laisser à la charge de Mme X...les frais irrépétibles qu'elle a exposés, tant en première instance qu'en cause d'appel, il lui sera alloué la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de celle déjà allouée sur le même fondement par les premiers juges.

Par ces motifs,

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a alloué à Mme X...la somme de 9691, 50 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires, et celle de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Le réforme pour le surplus,

Et statuant à nouveau,

Prononce résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme X..., aux torts exclusifs de l'employeur, avec effet au 24 décembre 2009.

Condamne la Société Antilles On Line à payer à Mme X...les sommes suivantes :

-30   000 euros à titre de dommages intérêts pour le préjudice subi à la suite de la rupture du contrat de travail,

-30   000 euros à titre d'indemnisation pour harcèlement moral,

-9240 euros à titre indemnité compensatrice de préavis et d'indemnité de congés payés y afférente,

Y ajoutant,

Condamne la Société Antilles On Line à payer à Mme X...la somme de 2000 euros à titre d'indemnité pour les frais irrépétibles exposés en cause d'appel,

Déboute les parties de toute conclusion plus ample ou contraire.

Le Greffier, Le Président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 11/00919
Date de la décision : 13/08/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2012-08-13;11.00919 ?
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