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18/06/2012 | FRANCE | N°11/01161

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 18 juin 2012, 11/01161


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 236 DU DIX HUIT JUIN DEUX MILLE DOUZE
AFFAIRE No : 11/ 01161
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 09 juin 2011- Section Industrie.
APPELANT
Monsieur Philippe X... ... 97139 LES ABYMES Représenté par Me GOUT, substituant Me Jan-Marc FERLY (TOQUE 26), avocat au barreau de la GUADELOUPE (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2011/ 001548 du 05/ 12/ 2011 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASSE-TERRE)
INTIMÉE
SARL SOCIETE DE MENUI

SERIE ET D'EBENISTERIE SADIKHOSSEN (SMES) 14 Cité Artisanale Lacroix 97139 LES A...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 236 DU DIX HUIT JUIN DEUX MILLE DOUZE
AFFAIRE No : 11/ 01161
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 09 juin 2011- Section Industrie.
APPELANT
Monsieur Philippe X... ... 97139 LES ABYMES Représenté par Me GOUT, substituant Me Jan-Marc FERLY (TOQUE 26), avocat au barreau de la GUADELOUPE (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2011/ 001548 du 05/ 12/ 2011 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BASSE-TERRE)
INTIMÉE
SARL SOCIETE DE MENUISERIE ET D'EBENISTERIE SADIKHOSSEN (SMES) 14 Cité Artisanale Lacroix 97139 LES ABYMES Non comparante, ni représentée

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 mars 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, président, rapporteur, M. Jacques FOUASSE, conseiller, Mme Marie-Josée BOLNET, conseillère.
Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 18 juin 2012
GREFFIER Lors des débats Mme Juliette GERAN, adjointe administrative, faisant fonction de greffier, serment préalablement prêté.
ARRET :
Réputé contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, président, et par Mme Juliette GERAN, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

M. X... a été embauché par la SOCIÉTÉ DE MENUISERIE ET D'EBÉNISTERIE SADIKHOSSEN, ci-après désignée SMES, en qualité de menuisier-ébéniste suivant contrat à durée déterminée du 16 mars 1999 pour une durée d'un an. Ce contrat était suivi d'un contrat à durée indéterminée à effet à compter du 17 mars 2000.
Le 7 novembre 2007 M. X... a été victime d'un accident du travail et en a gardé des séquelles au niveau de la main gauche. Après un arrêt de travail du 7 novembre 2007 au 23 septembre 2008, le médecin du travail, à la suite de la visite de reprise, indiquait dans la fiche d'aptitude et de visite établie le 25 septembre 2008 : « Conclusion : Apte avec aménagement de poste, Observation : POSTE D'ASSEMBLAGE ».
Le 22 octobre 2008, l'employeur adressait un premier avertissement à M. X... en lui reprochant, outre ses absences du 23 septembre au 1er octobre 2008, et du 20 octobre 2008, d'avoir refusé le 14 octobre de faire à la demande de son supérieur hiérarchique l'assemblage d'un escalier, et d'avoir refusé le 21 octobre de participer au montage de portes d'armoire sur un chantier.
Le 23 janvier 2009, l'employeur adressait un 2e avertissement à M. X... en lui reprochant toujours le non-respect de la hiérarchie et d'avoir refusé le 20 janvier d'assembler 4 cadres arrondis, et d'avoir refusé le 23 janvier de faire les découpes et l'assemblage d'un escalier alors que les pièces avaient déjà été préparées pour sa réalisation.
Par courriers recommandés des 18 et 23 mars 2009, M. X... se plaignait de retard de paiement de son salaire, et reprochait à son employeur de ne lui proposer que des travaux de charpente, alors qu'il est menuisier-ébéniste.
Par courrier du 3 avril 2009 l'employeur faisait savoir M. X... que depuis le 17 mars il n'avait pas repris son poste de travail et qu'il ne faisait plus partie du personnel depuis cette date car il avait abandonné son poste.
Dans une fiche d'aptitude et de visite en date du 20 avril 2009, le médecin du travail mentionne comme conclusion : « Inapte au poste de menuisier. Observation : apte à un poste ne nécessitant que l'utilisation de la main droite. Sinon, à revoir dans 15 jours au minimum ».
À la suite de l'intervention de l'inspection du travail, et après saisine d'un conciliateur de justice, l'employeur, par courrier du 23 juin 2009, notifiait à M. X... un 3e avertissement pour abandon de poste injustifié. Il faisait savoir à son salarié qu'il l'avertissait une dernière fois et que sans réponse de sa part il serait dans l'obligation d'entreprendre une procédure de licenciement pour faute grave.
Le 27 septembre 2009 M. X... saisissait le Conseil de Prud'hommes de Pointe-à-Pitre aux fins de voir juger que l'obligation de reclassement prévue à l'article L 1226-10 du code du travail n'avait pas été respectée, et voir prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur. Il sollicitait paiement de diverses indemnités ainsi que la remise sous astreinte des documents sociaux.
Par jugement du 9 juin 2011, la juridiction prud'homale condamnait la Société SMES à payer à M. X... les sommes suivantes :
-3038, 56 € d'indemnité de licenciement et pour non respect de la procédure de licenciement,,-3038, 56 € d'indemnité compensatrice de préavis correspondant à 2 mois de salaire,-303, 85 € à titre d'indemnité de congés payés sur préavis.
Il était ordonné la remise sous astreinte, au salarié, des documents de fin de contrat.
M. X... était débouté du surplus de ses demandes.
Par déclaration du 4 août 2011, M. X... interjetait appel de cette décision.

****
Par conclusions du 10 janvier 2012, auxquelles il était fait référence lors de l'audience des débats, M. X... sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a débouté de certaines demandes, et entend voir dire que l'obligation de reclassement prévue à l'article L 1226-10 du code du travail n'a pas été respectée, et voir prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur au jour de la demande introduite devant le conseil de prud'hommes. Il réclame paiement des sommes suivantes :
-18 231, 36 € au titre de l'indemnité pour non respect de l'obligation de reclassement,-3038, 56 € au titre de l'indemnité légale de licenciement,-1139, 46 € au titre de l'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement-10 674, 96 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-10 674, 96 € au titre des rappels de salaire,-2000 € au titre du préjudice spécial du fait de la non remise des documents sociaux.
Il sollicite la confirmation du jugement déféré pour le surplus et réclame paiement de la somme de 1500 € en sollicitant l'application des dispositions des articles 37 et 75 de la loi no 96-647 du 10 juillet 1991 relatif à l'aide juridique.

****
La Société SMES bien que régulièrement convoquée à l'audience du 14 novembre 2011, par lettre recommandée dont l'avis de réception a été retourné signé par son destinataire, puis régulièrement avisée, conformément aux dispositions de l'article 947 du code de procédure civile, par lettre simple, du renvoi de l'affaire tout d'abord à l'audience du 7 janvier 2012 puis à celle du 12 mars 2012, n'a pas comparu à cette dernière audience fixée pour les débats, et ne s'est pas faire représenter, ni n'a déposé de pièces ou conclusions.
L'appelant a fait signifier ses conclusions à l'intimée par acte huissier en date du 13 janvier 2012.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'article L 1226-10 du code du travail, tel qu'applicable au moment des faits, édicte que lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutif à un accident du travail, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail.
Il convient de rappeler que si pour des raisons tenant à l'aptitude physique du salarié, il apparaît à l'employeur que le reclassement proposé par le médecin du travail n'est pas possible, il lui appartient de solliciter à nouveau l'avis du médecin du travail. Il en est de même lorsque le salarié conteste la compatibilité du poste auquel il est affecté avec les recommandations du médecin du travail.
En l'espèce il résulte suffisamment des courriers adressés à l'employeur par M. X..., que celui-ci a contesté en mars 2008 la compatibilité des travaux qui lui étaient confiés avec l'avis du médecin du travail. Par ailleurs l'employeur ne justifie pas avoir, à la suite du dernier avis du médecin du travail en date du 20 avril 2009, proposé à M. X... un poste de travail respectant les prescriptions de ce médecin, se bornant seulement a adressé le 23 juin 2009, un 3e avertissement au salarié pour abandon de poste.
Ainsi l'employeur ne justifie pas avoir rempli l'obligation de reclassement mise à sa charge par l'article L 1226-10 du code de travail, suscité. Il lui appartenait le cas échéant, en application des dispositions de l'article L 1226-12, s'il était dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, de faire connaître à celui-ci par écrit les motifs qui s'opposaient au reclassement.
L'article L 1226-11 du code du travail prévoit que lorsque, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse, à l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail.
En conséquence l'employeur ne justifiant pas avoir proposé à M. X... son reclassement à un poste conforme aux prescriptions des différents avis du médecin du travail, et le salaire de l'intéressé ayant été suspendu à compter du mois de mars 2009, ce dernier est fondé à réclamer paiement des salaires depuis cette date à hauteur de 10 674, 96 €, comme sollicité dans les conclusions l'appelant.
Faute pour l'employeur de justifier avoir proposé un reclassement conforme aux prescriptions du médecin du travail, et en l'absence de procédure de licenciement de sa part, il y a lieu de confirmer la résiliation judiciaire du contrat de travail sollicitée par le salarié, et déjà admise implicitement par le Conseil de Prud'hommes qui a ordonné la remise du certificat travail, de l'attestation Pôle Emploi et du solde de tout compte.
Cette résiliation judiciaire aux torts de l'employeur, produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il sera donc fait droit aux demandes d'indemnités légales présentées par le salarié et prévues par les dispositions des articles L 1226-15 et L 1226-14 du code du travail, à savoir sur le fondement du premier texte la somme de 18 231, 36 € correspondants à 12 mois de salaire pour non-respect de l'obligation de reclassement, et sur le fondement du second texte la somme de 3038, 56 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis correspondant à 2 mois de salaire, le salarié ayant 10 ans d'ancienneté au sein de l'entreprise, et la somme de 3038, 56 € correspondants à l'indemnité de licenciement.
S'agissant d'une résiliation judiciaire, le salarié n'est pas fondé à solliciter le paiement d'une indemnité pour non respect de la procédure de licenciement.
Le salarié ne pouvant obtenir deux fois réparation du préjudice subi, ne peut à la fois solliciter l'indemnité prévue par l'article L 1226-15 du code du travail et l'indemnité prévue par l'article L 1235-3 du même code. Il sera donc débouté de sa demande de paiement d'indemnité fondée sur ce dernier texte.
L'employeur ne justifiant pas avoir remis au salarié les documents de fin de contrat, il y a lieu de faire droit à la demande du salarié de ce chef, sauf à préciser que l'employeur aura un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt pour accomplir cette remise, les premiers juges n'ayant assorti d'aucun délai l'exécution de l'obligation ordonnée sous astreinte.
La non remise des documents de fin de contrat, en particulier l'attestation Pôle Emploi, étant de nature à faire obstacle à l'octroi, pour M. X..., du bénéfice des allocations chômage, il sera alloué à celui-ci la somme de 2000 € à titre d'indemnisation.
L'équité impose de faire droit à la demande de paiement de la somme de 1500 € présentée par l'appelant, sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1990 relatif à l'aide juridique.

PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la Société SMES à payer à M. X... la somme de 3038, 56 € à titre d'indemnité de licenciement, celle de 3038, 56 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, et celle de 303, 85 € à titre d'indemnité de congés payés sur préavis,
Le réforme pour le surplus et statuant à nouveau,
Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur au jour de la demande introduite devant le conseil de prud'hommes, conformément à la demande de l'appelant,
Condamne la Société SMES à payer à M. X... les sommes suivantes :
-10 674, 96 € au titre des salaires restés impayés depuis le mois de mars 2009, en application de l'article L 1226-11 du code du travail,
-18 231, 36 € d'indemnité fondée sur les dispositions de l'article L 1226-15 du code du travail,
-2 000 € au titre du préjudice résultant de la non remise des documents de fin de contrat,
-1500 € au titre de l'article 75 de la loi numéro 96-647 du 10 juillet 1991 relatif à l'aide juridique,
Dit que conformément aux dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1990, l'avocat de M. X..., dispose d'un délai de 12 mois à compter de ce jour pour recouvrer la somme qui lui a été allouée, et rappelle que s'il recouvre cette somme, il doit renoncer à percevoir la part contributive de l'État, et s'il n'en recouvre qu'une partie, la fraction recouvrée viendra en déduction de la part contributive de l'État,
Ordonne à la Société SMES de remettre à M. X... son certificat de travail, son attestation Pôle Emploi et ses bulletins de salaire, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, chaque jour de retard étant assorti d'une astreinte de 30 €,
Condamne la Société SMES aux entiers dépens,
Déboute les parties de toute conclusion plus ample ou contraire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/01161
Date de la décision : 18/06/2012
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2012-06-18;11.01161 ?
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