La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/06/2012 | FRANCE | N°09/01972

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 18 juin 2012, 09/01972


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 228 DU DIX HUIT JUIN DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 09/ 01972
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 26 novembre 2009- Section Commerce.
APPELANT
S. A. R. L. LES HALLES DE BERGEVIN 46 rue Soukhoumi-Bergevin 97110 POINTE-A-PITRE Représentée par Me Gérard PLUMASSEAU (TOQUE 16), avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉ
Monsieur Roger Jean-Marie X... ...... 97110 POINTE-A-PITRE Représenté par Me GALAS substituant Me Ernest DANINTHE (TOQUE 45), avocat au

barreau de la GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions ...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 228 DU DIX HUIT JUIN DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 09/ 01972
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 26 novembre 2009- Section Commerce.
APPELANT
S. A. R. L. LES HALLES DE BERGEVIN 46 rue Soukhoumi-Bergevin 97110 POINTE-A-PITRE Représentée par Me Gérard PLUMASSEAU (TOQUE 16), avocat au barreau de la GUADELOUPE

INTIMÉ
Monsieur Roger Jean-Marie X... ...... 97110 POINTE-A-PITRE Représenté par Me GALAS substituant Me Ernest DANINTHE (TOQUE 45), avocat au barreau de la GUADELOUPE

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 mars 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Bernard ROUSSEAU, président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, rapporteur, M. Jacques FOUASSE, conseiller, Mme Marie-Josée BOLNET, conseillère.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 18 juin 2012
GREFFIER Lors des débats Valérie FRANCILLETTE, greffier.
ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Madame Juliette GERAN, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

M. X... a été embauché par contrat à durée indéterminée à compter du 16 août 2001 en qualité de préparateur de commandes par la Société LES HALLES DE BERGEVIN.
La Commission Technique d'Orientation et de Reclassement Professionnel (COTOREP), notifiait à M. X... le 31 mars 2003 une décision par laquelle il lui était reconnu la qualité de travailleur handicapé, classé en catégorie B, pour une période de 10 ans, du 28 février 2003 au 28 février 2013.
Par lettre recommandée en date du 19 novembre 2004, adressée avec avis de réception, l'employeur convoquait M. X... à un entretien préalable fixé au 29 novembre 2004 dans la perspective de son licenciement. Ce courrier posté le 19 novembre 2004, n'était pas retiré à la poste par son destinataire, lequel ne se présentait pas à l'entretien.
Par courrier recommandé en date du 17 décembre 2004, adressé avec avis de réception, l'employeur notifiait à M. X... son licenciement pour motif économique.
Le 13 juin 2005 M. X... saisissait le Conseil de Prud'hommes de Pointe-à-Pitre, pour contester son licenciement et obtenir diverses indemnités.
Par jugement du 26 novembre 2009, la juridiction prud'homale jugeait le licenciement irrégulier en la forme et au fond et condamnait la Société LES HALLES DE BERGEVIN à payer à M. X... les sommes suivantes :
-2591, 64 € à titre d'indemnité de préavis,-1000 € à titre d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement,-5183, 28 € à titre d'indemnité pour non respect de l'ordre des critères de licenciement,-1295, 82 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par déclaration du 22 décembre 2009 la Société LES HALLES DE BERGEVIN interjetait appel de ce jugement.
****
Par conclusions du 22 juin 2011, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, la Société LES HALLES DE BERGEVIN sollicite la réformation de la décision entreprise en ce qu'elle a dit que le licenciement était irrégulier en la forme et au fond. Elle entend voir juger que la réalité du motif économique constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement et qu'en conséquence il n'y a pas lieu à paiement d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ni à indemnité de préavis, ni au paiement d'une indemnité pour non respect de la procédure de licenciement ou pour non respect de l'ordre des critères de licenciement. Elle réclame paiement de la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Pour justifier le licenciement de M. X..., la Société LES HALLES DE BERGEVIN invoque la suppression de l'emploi de celui-ci, décidée dans le cadre de la réorganisation de l'entreprise et de la diminution
d'activité de celle-ci. Elle fait valoir que le reclassement de M. X... s'est avéré totalement impossible compte tenu de la diminution d'activité relative à ses fonctions et à sa qualification, et compte tenu de la structure de l'entreprise.
Elle expose que le préavis de 2 mois de M. X... a bien été réglé. En ce qui concerne la procédure de licenciement, elle indique qu'elle a initié la mise en oeuvre du P. A. R. E., comme le montrent les courriers produits. Elle fait valoir par ailleurs que le salarié n'a pas sollicité le bénéfice de la priorité de ré-embauchage, et que pour l'ordre des licenciements, ce ne sont pas les qualités physiques de M. X... mais bien les circonstances économiques qui ont justifié son licenciement, ce dernier ayant la fonction de préparateur de commandes, la baisse considérable des livraisons ayant engendré un défaut d'activité manifeste justifiant son licenciement, les autres salariés du service étant titulaires d'emplois plus spécialisés comme celui de cariste ou de chef de produits.
****
Par conclusions du 21 octobre 2011, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, M. X... sollicite la confirmation du jugement entrepris. Il explique que la procédure de licenciement elle-même est viciée, n'ayant jamais été rendu destinataire d'une convention de conversion ou du P. A. R. E. dont les documents auraient dû être remis avant même la lettre de licenciement au stade de l'entretien préalable. En outre la lettre de licenciement n'indique pas la priorité de ré-embauchage dont bénéficiait le salarié, et ses conditions de mise en oeuvre. Il soutient que le licenciement prononcé est abusif, son motif réel étant inhérent à la personne du salarié et non pas à une situation économique qui serait née de la grève du port de Pointe à Pitre de 2004, faisant valoir que d'éventuelles difficultés conjoncturelles passagères ne peuvent justifier son licenciement. Il entend voir constater que l'employeur n'a communiqué aucun élément ayant motivé son choix et qu'il doit être condamné pour inobservation de l'ordre des licenciements.
****

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la rupture du contrat de travail :

Dans sa lettre de licenciement datée du 17 décembre 2004, l'employeur explique que la suppression du poste de M. X... est motivée par l'importante baisse d'activité économique qu'a connue la Guadeloupe depuis l'été précédent, conséquence directe des difficultés d'approvisionnement de marchandises dans l'île, ce qui a entraîné une baisse importante d'activité de l'entreprise. Il est précisé que compte tenu de la qualification de M. X... et de la structure de la Société LES HALLES DE BERGEVIN, il n'est pas possible de lui proposer un reclassement. Il est ajouté qu'il est joint au courrier les documents concernant le P. A. R. E. pour lequel le salarié dispose d'un délai de réponse de 8 jours à compter de la date de présentation du courrier.
Il ressort de ce courrier que l'activité de l'entreprise a pu être affectée par les difficultés d'approvisionnement en marchandises au cours de l'été 2004, liées au blocage du port de Pointe-à-Pitre pour cause de grève. Il y a lieu de constater que si l'activité de l'entreprise a pu ainsi être ralentie au cours de l'été 2004, le licenciement de M. X... n'a été envisagé

qu'en novembre 2004 et décidé le 17 décembre 2004. Par ailleurs l'examen des pièces versées par la Société LES HALLES DE BERGEVIN pour justifier du ralentissement de son activité, en l'occurrence les comptes sociaux de l'entreprise, ne font nullement apparaître une baisse d'activité pour la période comprenant l'année 2004.

La Société LES HALLES DE BERGEVIN produit en particulier le compte de résultat pour l'exercice s'étendant du 1er janvier 2004 au 31 juillet 2005 (19 mois), à comparer au compte de résultat de l'exercice de l'année 2003 (12 mois) clos le 31 décembre 2003.
Il ressort de la comparaison de ces 2 exercices, que la vente de marchandises au cours de l'année 2003 s'est élevée à 3 240 675 €, alors que l'exercice suivant fait apparaître un chiffre d'affaires de 3 970 010 €. Certes le second exercice correspond à une période plus longue, mais le résultat d'exploitation enregistré pour celui-ci s'élève à 157 301 €, alors que l'exercice précédent enregistrait une perte de 13 258 €. Il apparaît ainsi que les difficultés d'approvisionnement apparues au cours de l'été 2004 ont causé des difficultés économiques ni significatives ni durables pour l'entreprise. En tout cas le licenciement de M. X... envisagé en novembre 2004 et décidé le 17 décembre 2004, n'apparaît pas lié aux difficultés d'approvisionnement de l'île, ressenties au cours de l'été 2004.
En conséquence il n'est pas démontré un motif économique justifiant le licenciement de M. X... le 17 décembre 2004.

Sur les demandes d'indemnités de M. X... :

En raison de la privation de son activité professionnelle et de la perte de ses revenus salariaux, M. X... est fondé à solliciter le paiement de la somme de 1295, 82 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
L'examen des pièces versées aux débats montre que la lettre de licenciement adressée à M. X... a été présentée à son domicile le 5 janvier 2005 ; celui-ci n'ayant pas retiré à la poste ce courrier, la notification de cette lettre, comme celle du courrier de convocation à l'entretien préalable, a été réitérée par acte huissier en date du 18 février 2005, signifié en mairie.
L'examen des bulletins de salaires de M. X... font apparaître que celui-ci a bien été payé pour la période de préavis s'étendant du 5 janvier 2005 au 5 mars 2005 ; il a notamment reconnu, en signant le 5 mars 2005 le solde de tout compte, qu'il avait reçu la somme de 2334, 38 €, laquelle correspond au montant net à payer figurant sur son dernier bulletin de paie correspondant à la période du 1er au 5 mars au 2005, ledit bulletin comportant outre le salaire des premiers jours de mars, la prime de 13e mois pour l'année 2004 et pour l'année 2005 prorata temporis, l'indemnité de licenciement et l'indemnité de congés payés. M. X... doit donc être débouté de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis.
Dans la lettre de licenciement, l'employeur a omis de mentionner la priorité de ré-embauchage dont bénéficiait le salarié, ce qui constitue une violation des dispositions de l'ancien article L 122-14-2 du code du travail, reprises par le nouvel article L 1233-16. Cette irrégularité porte nécessairement préjudice au salarié, et c'est à juste titre que les premiers juges ont pu allouer à M. X... la somme de 1000 € à titre d'indemnisation.
Pour s'opposer à l'octroi d'une indemnité pour non respect de l'ordre des critères de licenciement, l'employeur explique que M. X... exerçait la fonction de préparateur de commandes, et qu'il allait de soi que la baisse considérable des livraisons engendrèrent un défaut d'activité manifeste justifiant la rupture de son contrat de travail, précisant que les autres salariés du service étaient titulaires d'emplois plus spécialisés comme celui de cariste et de chef de produit. Toutefois l'examen du compte de résultat pour la période considérée, montre que des livraisons ont continué à être effectuées par l'entreprise ; il s'en déduit que d'autres préparateurs de commandes exerçaient alors le même emploi que M. X... au sein de l'entreprise. Dès lors l'employeur devait se référer à des critères tels que ceux mentionnés par l'article L 1233-5 du code du travail (ancien article L321-1-1) pour déterminer lequel des préparateurs de commandes allait être licencié.
Cependant dans la mesure ou il a été démontré ci-avant que la suppression du poste de préparateur de commandes occupé par M. X... n'était pas justifiée par des difficultés économiques, la non prise en compte par l'employeur de critères pour déterminer l'ordre des licenciements, n'a pu causer qu'un moindre préjudice à M. X.... Il ne pourra lui être alloué que la somme de 500 € à ce titre.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a alloué à M. X... la somme de 2591, 64 € à titre d'indemnité de préavis et celle de 5183, 28 € à titre d'indemnité pour non respect des critères sociaux,
Le réformant sur ces chefs de demandes, et statuant à nouveau,
Condamne la Société LES HALLES DE BERGEVIN à payer à M. X... la somme de 500 € à titre d'indemnité pour non respect des critères de l'ordre de licenciement,
Déboute M. X... de sa demande d'indemnité de préavis,
Dit que les dépens sont à la charge de la Société LES HALLES DE BERGEVIN.
Déboute les parties de toute conclusion plus ample ou contraire.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09/01972
Date de la décision : 18/06/2012
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2012-06-18;09.01972 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award