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23/04/2012 | FRANCE | N°11/00454

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 23 avril 2012, 11/00454


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 168 DU VINGT TROIS AVRIL DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 11/ 00454
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes BASSE-TERRE du 30 décembre 2010.

APPELANTE

SAS ORIENT BEACH CLUB CLUB ORIENT 1, Baie Orientale 97150 SAINT-MARTIN Représentée par Maître Sandrine JABOULEY-DELAHAYE (Toque 13) avocat au barreau de la Guadeloupe

INTIMÉE

Madame Hélène X... ... 97053 SAINT-MARTIN CEDEX Représentée par Maître WERTER avocat au barreau de la Guadeloupe, substituant Maître Ann

e SEBAN (Toque 12), avocat au barreau de la Guadeloupe

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 168 DU VINGT TROIS AVRIL DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 11/ 00454
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes BASSE-TERRE du 30 décembre 2010.

APPELANTE

SAS ORIENT BEACH CLUB CLUB ORIENT 1, Baie Orientale 97150 SAINT-MARTIN Représentée par Maître Sandrine JABOULEY-DELAHAYE (Toque 13) avocat au barreau de la Guadeloupe

INTIMÉE

Madame Hélène X... ... 97053 SAINT-MARTIN CEDEX Représentée par Maître WERTER avocat au barreau de la Guadeloupe, substituant Maître Anne SEBAN (Toque 12), avocat au barreau de la Guadeloupe

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 06 février 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, rapporteur, M. Jacques FOUASSE, conseiller, Mme Marie-Josée BOLNET, conseillère. qui en ont délibéré.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 23 avril 2012

GREFFIER Lors des débats Mme Juliette GERAN, Adjointe administrative faisant fonction de greffière.

ARRET :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Valérie FRANCILLETTE, Greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure :

Mme Hélène X... a été embauchée dans le cadre de contrats successifs d'intérim au sein de la Société Orient Beach Club en qualité de comptable à compter du 5 février 2007 jusqu'au 31 juillet 2007, moyennant un taux horaire de rémunération de 12 euros.

L'heure de travail était facturée par l'agence d'intérim Tempo Industrie à la Société Orient Beach Club au taux de 18, 80 euros, puis au taux de 19, 69 euros et enfin au taux de 21, 48 euros.
À l'issue de sa dernière mission d'intérim, Mme X... a adressé le 3 août 2007 à la Société Orient Beach Club, une facture établie au nom de l'Eurl Athéna, pour un montant de 1312, 50 euros, correspondant à la rémunération de 37 heures 30 au taux horaire de 35 euros pour des honoraires de juillet 2007.
Elle émettait à l'égard de la Société Orient Beach Club, une deuxième facture d'un montant total de 5790 euros, toujours sous le nom de l'Eurl Athéna, au titre d'honoraires pour le mois d'août 2007, à raison de 151 heures normales au taux horaire de 30 euros, et de 42 heures supplémentaires au taux de 30 euros.
Une troisième facture était émise dans les mêmes conditions pour un montant de 5400 euros, correspondant à 180 heures de prestations, pour le mois de septembre 2007. Sur chacune des factures il était mentionné que l'immatriculation de l'Eurl Athéna était en cours.
Par courrier du 14 novembre 2007, Mme X... réclamait à la Société Orient Beach Club des fiches de salaire pour les mois de septembre et octobre 2007 en y joignant des fiches de pointage faisant apparaître 158 heures de travail pour le mois de septembre et 188 heures 30 pour le mois d'octobre.
La Société Orient Beach Club répondait par courrier du 20 novembre 2007 remis en main propre à Mme X..., en lui faisant savoir qu'elle était en attente de ses factures des mois de septembre et octobre et en lui proposant une rencontre afin de lui « faire part des conséquences » que son action avait créées.
Dans un courrier daté du 14 janvier 2008 adressé à Mme X... par lettre recommandée avec avis de réception, la Société Orient Beach Club rappelait qu'elle avait fait appel à ses services dans le cadre de missions temporaires en qualité de comptable, et que son taux horaire brut de rémunération était de 12 euros. La Société Beach Club poursuivait en exposant que durant l'été 2007 Mme X... avait indiqué vouloir travailler en qualité de comptable indépendante, et qu'elle avait réussi à négocier un taux net de 30 euros de l'heure, ce qui engendre un coût horaire de prestations nettement plus élevé que celui facturé par l'agence d'intérim, lequel s'élevait en dernier lieu à 21, 48 euros par heure travaillée en intégrant toutes les charges. La Société Orient Beach Club faisait savoir qu'elle avait accepté les conditions posées par Mme X..., et de lui régler ses factures.
La Société Orient Beach Club expliquait qu'au cours de la réunion qu'elle avait provoquée, elle avait fait part de sa stupéfaction, Mme X... ayant confirmé n'avoir jamais été inscrite en qualité de travailleur indépendant, et revendiquant être sous statut de salarié de l'entreprise. La Société Orient Beach Club admettait avoir fait preuve de légèreté vis-à-vis de son statut en ne vérifiant pas son inscription immédiatement, et avait admis en conséquence le principe du salariat. Elle avait proposé après négociation, de rémunérer Mme X... à raison de 1800 euros nets par mois pour 151, 67 heures de travail, soit un taux horaire brut de 14, 61 euros, au lieu de 12 euros bruts pratiqués en dernier lieu par l'agence d'intérim Tempo Industrie.
La Société Orient Beach Club relevait qu'après avoir accepté cette solution, Mme X... avait soudainement exigé d'avoir un statut de cadre et exigé un taux horaire de rémunération dépassant toutes les grilles. Faisant savoir qu'elle devait mettre un terme aux négociations, la Société Orient Beach Club indiquait qu'elle avait pris la décision de régulariser la période de travailleur indépendant, sous le statut salarié de l'entreprise, selon le taux horaire négocié en dernier lieu avec Mme X..., et correspondant à la grille de salaire de l'entreprise. Déniant à Mme X... le statut de cadre, lequel ne correspondait ni à ses fonctions ni à son poste de travail, la Société Orient Beach Club lui adressait des bulletins de paie pour les mois d'août 2007 au mois de décembre 2007. Il était noté qu'au vu du " net à payer " inhérent au nouveau statut revendiqué, Mme X... restait devoir de l'argent à l'entreprise, ce montant devant être régularisé sur la paie de janvier 2008.
Dans son courrier en réponse du 28 janvier 2008, Mme X... conteste avoir remis en question la solution trouvée comme l'invoquait la Société Orient Beach Club, faisant valoir que c'était celle-ci qui lui avait imposé arbitrairement une solution qu'elle n'avait pas acceptée. Il s'ensuivait entre les parties un échange de courriers qui devait se poursuivre au cours des années 2008, 2009 et 2010 dans lesquels chacun restait sur ses positions.

Dans un courrier du 21 mai 2008, Mme X... demandait à la Société Orient Beach Club qu'elle lui transmette un contrat de travail en bonne et due forme, ainsi que le règlement de quatre mois de salaires impayés, ou bien de procéder purement et simplement à son licenciement.
Elle avait déjà saisi quelques jours plus tôt, le 15 mai 2008, le Conseil de Prud'hommes de Basse-Terre devant lequel elle devait présenter une demande de résolution judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur, pour cause de non-respect de ses obligations contractuelles, ainsi qu'une demande de paiement de rappel de salaire, de dommages et intérêts pour licenciement abusif, et de diverses indemnités.
Par jugement du 30 décembre 2010, le Conseil de Prud'hommes de Basse-Terre jugeait que le licenciement de Mme X... était sans cause réelle et sérieuse et condamnait la Société Orient Beach Club à lui payer les sommes suivantes :-18 200 euros à titre de rappel de salaire,-26 861, 90 euros à titre de complément de salaires,-3337, 50 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,

-27 300 euros à titre de dommages intérêts pour rupture abusive,-9100 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,-1820 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,-1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La Société Orient Beach Club était en outre condamnée à remettre sous astreinte à Mme X... l'ensemble des bulletins de paye rectifiés, un certificat travail et une attestation ASSEDIC, le tout conforme à la décision rendue.

Par déclaration adressée le 15 mars 2011, la Société Orient Beach Club interjetait appel de cette décision.

Par conclusions du 31 janvier 2012, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, la Société Orient Beach Club entend voir juger que le salaire de Mme X... est au dernier état de 2380, 49 euros bruts par mois, intégrant le salaire de base, la prime d'ancienneté et l'avantage en nature nourriture, soit 1869, 65 euros nets par mois, ce qui correspond à la grille de rémunération salariale de la Société Orient Beach Club, pour une comptable, qui ne peut avoir un statut de cadre.

Elle conclut au rejet de la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, et de l'ensemble des demandes de Mme X....
À titre subsidiaire, la Société Orient Beach Club demande que les créances de Madame X... soient fixées conformément au montant qu'elle invoque dans ses demandes subsidiaires.
Par conclusions du 24 janvier 2012, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, Mme X... sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de son employeur et condamné la Société Orient Beach Club à lui payer un rappel de salaire d'octobre 2007 à janvier 2008 à hauteur de 18 200 euros bruts, une indemnité compensatrice de préavis de 9100 euros bruts, les congés payés y afférents à hauteur de 910 euros mais entend voir porter les autres chefs de condamnation aux sommes suivantes :-89 329, 98 euros bruts de complément de salaires de février 2008 à janvier 2012,-54 600 euros de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-4550 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,-4895 euros bruts d'indemnité compensatrice de congés payés. Elle demande en outre paiement de la somme de 27 300 euros pour travail dissimulé.

À titre subsidiaire, au cas ou la Cour refuserait de faire droit à sa demande concernant le complément de salaire, tout en décidant de la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur, Mme X... entend voir fixer ses créances sur la base du salaire effectivement réglé soit 2578, 86 euros, 13e mois compris.

À l'appui de ses demandes Mme X... fait valoir que la Société Orient Beach Club avait décidé de façon parfaitement délibérée de la poursuite du contrat de travail en lui accordant une augmentation substantielle, tout en espérant échapper au règlement des charges sociales. Relevant que la Société Orient Beach Club lui avait réglé au taux de 35 euros de l'heure, les heures supplémentaires effectuées en juillet 2007, soit pendant la mission d'intérim, elle explique que ladite société, nonobstant la présentation d'une facture d'honoraires à ce titre, savait pertinemment que son règlement concernait une période afférente au contrat de travail effectué dans le cadre de la mission d'intérim.

Revendiquant une ancienneté remontant à la date d'embauche initiale, elle explique que la Société Orient Beach Club ne pouvait revenir sur les conditions de rémunération accordées et mises en place depuis juillet 2007, sans l'accord exprès de la salariée. Reprochant à la Société Orient Beach Club d'avoir modifié les conditions de rémunération initialement négociées, imposant unilatéralement à la salariée d'être rémunérée à hauteur de 1800 euros nets pour 151, 67 heures de travail effectif, soit un taux horaire brut de 14, 61 euros bruts, elle expose qu'elle n'a jamais accepté ces nouvelles conditions, ce qu'elle n'a cessé de souligner dans ses courriers successifs.

Elle conteste la légalité de la compensation opérée par l'employeur, lequel, sous prétexte qu'il devait payer des charges sociales et qu'il contestait le taux horaire initialement pratiqué, n'a pas hésité à se rembourser directement en s'abstenant de régler tout salaire à sa salariée entre octobre 2007 et janvier 2008, soit durant 4 mois successifs. Elle relève que contestant elle-même la compensation effectuée par l'employeur avec ses propres salaires, seule une compensation judiciairement ordonnée était possible, une telle compensation ne pouvant s'appliquer que sur la fraction saisissable du salaire.

Reprochant par ailleurs à la Société Orient Beach Club d'avoir progressivement réduit les tâches qui lui étaient confiées, dans une intention évidente de mise au placard, proche d'une situation de harcèlement, et d'avoir à compter de la mi-octobre 2007, autoritairement modifié le taux horaire convenu, elle fait valoir que l'employeur a manqué gravement à ses obligations à son égard, ce qui justifie la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de la Société Orient Beach Club. Elle demande donc un rappel de salaire au titre des 4 mois restés impayés, d'octobre 2007 à janvier 2008, ainsi qu'un complément de salaire pour la période de février 2008 à décembre 2011.
Invoquant le fait que les salaires de juillet 2007, pour les heures supplémentaires, d'août et septembre 2007, n'ont pas été déclarés par l'employeur, lequel, souhaitant régulariser la situation en délivrant des bulletins de paie, avec indication d'un taux horaire modifié à la baisse, Mme X... explique que les montants indiqués sur ces documents ne correspondent pas aux sommes réellement perçues, et réclame en conséquence une indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaire en application des dispositions de l'article L8221-5 et L8223-1 du code du travail.
Motifs de la décision :
Sur la nature des relations entre la Société Orient Beach Club Mme X... : Au vu des contrats de prestation de service et bulletins de salaire établis par l'entreprise d'intérim Tempo Industrie, et versés aux débats, il est incontestable que Mme X... a travaillé au sein de la Société Orient Beach Club en qualité de comptable dans le cadre de missions d'intérim successives pendant la période du 5 février au 31 juillet 2007.

Il ressort de la facture d'honoraires établie le 3 août 2007 par Mme X..., sous l'enseigne « l'Eurl Athéna », dont il est mentionné que l'immatriculations aurait été en cours, que cette dernière a entendu obtenir paiement d'heures supplémentaires effectuées au cours du mois de juillet 2007, non pas de la part de la société de travail temporaire au taux horaire du 15 euros comme il se devait, mais directement de la part de la Société Orient Beach Club à un taux horaire équivalent à plus du double, soit 35 euros, en se présentant comme un travailleur indépendant en cours d'immatriculation.
Mme X... ne peut être suivie dans les explications tendant à soutenir que la Société Orient Beach Club, en acceptant de la rémunérer au taux horaire de 30 euros pour les heures normales, et de 35 euros pour les heures supplémentaires au cours des mois d'août et septembre 2007, aurait cherché à échapper au règlement de charges sociales. Son argumentation est d'autant moins crédible que l'examen des factures de prestations établies par l'entreprise Tempo Industrie à l'égard de la Société Orient Beach Club, fait apparaître à la charge de celle-ci un taux horaire, charges comprises, de 18, 80 euros en avril 2007, puis de 21, 48 euros de mai à juillet 2007.
Il est bien évident dans ces conditions, que la Société Orient Beach Club ne pouvait accepter de rémunérer une comptable salariée au taux horaire de 30 euros, tout en cherchant à faire l'économie de charges sociales.
Il y a lieu par ailleurs de constater, qu'à la fin de l'exécution des missions d'intérim, il n'a été conclu aucun contrat de travail entre les parties, ni formaliser aucune promesse d'emploi de cadre, ni d'extension des tâches et responsabilités pouvant justifier une rémunération au taux de 30 euros.
L'attestation établie par M. Brice A..., ancien directeur administratif et financier de la Société Orient Beach Club, ne peut être considérée comme un élément probant corroborant les allégations de Mme X..., dans la mesure où ce cadre supérieur à été licencié pour faute grave (pièce G 5/ 1 de l'appelante) et où un contentieux s'est ouvert entre celui-ci et la Société Orient Beach Club (pièces G 4/ 1), étant relevé que ce cadre, supérieur hiérarchique de Madame X..., était rémunéré lui-même, au cours du 2e semestre de 2008, au taux horaire de 28, 75 euros (pièces G 5/ 3), soit un montant inférieur à celui facturé par Mme X... en qualité de travailleur indépendant.
Par ailleurs il n'est nullement établi qu'un lien de subordination ait lié les parties pendant les mois d'août à octobre 2007.
Si Mme X... a pu venir travailler pendant cette période dans les locaux de la Société Orient Beach Club, c'est qu'elle devait nécessairement prendre connaissance des pièces comptables, et si elle a établi des fiches de pointage pour les mois considérés, c'est parce qu'elle devait justifier des montants facturés, ces fiches ayant été jointes aux factures présentées à la Société Orient Beach Club. Il revient en principe à l'employeur de déterminer la durée du travail de ses salariés, comme le rappellent les articles D 3171-1 et suivants, et D 3171-12 et suivants du code du travail.
Il apparaît en l'espèce que Mme X... établissait elle-même l'état des heures de travail effectuées, ce qui caractérise la fourniture de prestation de service, étant relevé que le nombre d'heures mensuelles facturées par Mme X..., était sans commune mesure avec le travail salarié qu'elle effectuait auparavant puisqu'il atteignait 193 heures en août 2007 et 180 heures en septembre 2007, ce qui montre que la Société Orient Beach Club n'était pas à même d'effectuer un quelconque contrôle sur le temps de travail de Mme X..., étant observé que celle-ci ne travaillait qu'entre 140 et 153 heures par mois dans le cadre de ses missions d'intérim.
Par ailleurs le fait que Mme X... ait réussi à imposer à la Société Orient Beach Club, le paiement de son travail à un taux horaire exorbitant des pratiques en matière de travail salarié, et même un soi-disant rappel d'heures supplémentaires pour juillet 2007, hors de proportion avec ce que l'entreprise aurait dû normalement régler par le biais de l'agence d'intérim, montre que tout lien de subordination était exclu entre les parties, étant relevé qu'en ce qui concerne le mois de juillet 2007, Mme X... n'avait sollicité auprès de l'agence d'intérim que le paiement de 140 heures de travail rémunérées au taux horaire de 12 euros.
Au demeurant il ne résulte d'aucune des pièces versées au débat, que durant la période d'août 2007 à janvier 2008, la Société Orient Beach Club ait donné de quelconques ordres ou instructions à Mme X..., ni exercé aucun contrôle sur l'organisation et l'exécution de son travail.
Manifestement Mme X... a induit la Société Orient Beach Club en erreur, en utilisant l'enseigne « Eurl Athéna », et en faisant croire qu'elle était en cours d'immatriculation. Au demeurant n'ayant jamais fait procéder à cette immatriculation, elle devait se faire remettre des chèques libellés à son nom personnel, compte tenu de l'impossibilité d'ouvrir un compte bancaire au nom de l'Eurl Athéna, entité n'ayant jamais accédé à la personnalité juridique.
Sur la rémunération due à Mme X... et la demande de résolution judiciaire du contrat de travail :
Lorsque la X... a entendu revendiquer le statut de salarié au cours du mois de novembre 2007, pour la poursuite de son activité, des négociations se sont engagées avec la Société Orient Beach Club.
Si compte tenu du défaut d'immatriculation de Mme X... en tant que travailleur indépendant, et afin de régulariser la situation de celle-ci, la Société Orient Beach Club a accepté de délivrer des bulletins de salaire à compter du mois d'août 2007, il ne ressort aucun élément de la cause, que la Société Orient Beach Club ait accepté à un quelconque moment, de rémunérer Mme X... en tant que comptable salariée au taux horaire de 30 euros, lequel dépasse le taux dont bénéficiait son supérieur hiérarchique M. A..., directeur administratif et financier.
Il résulte d'ailleurs de l'attestation établie le 16 juin 2008 par M. Ruddy B..., délégué syndical CGTG, ayant assisté Mme X... lors de la réunion qui s'est tenue fin 2007 au sujet du statut de cette dernière, que celle-ci a reconnu avoir bénéficié d'un trop-perçu sur la période de l'année 2007, et qu'il avait été convenu entre les parties qu'elle percevrait un montant de 1800 euros par mois de salaire net, acceptant de rembourser le trop-perçu. À l'inverse de l'attestation fournie par

M. A..., celle de M. B... est d'autant plus crédible qu'elle émane du délégué syndical qui assistait Mme X... lors des négociations avec la Société Orient Beach Club au sujet de son statut.

Il ressort de l'examen des bulletins de paie délivrés à titre de régularisation par la Société Orient Beach Club à Mme X... à compter du mois d'août 2007, que celle-ci a été rémunérée à un taux horaire de 14, 61 euros, soit à un taux sensiblement supérieur à celui de 12 euros qui lui était versé dans le cadre du contrat d'intérim.
Il résulte de ces constatations que contrairement à ce que soutient Mme X..., le salaire de celle-ci n'a pas été fixé unilatéralement et de façon arbitraire par la Société Orient Beach Club, mais résulte d'une négociation entre les parties, pour laquelle Mme X... était assistée d'un délégué syndical. Il n'apparaît pas ainsi que la Société Orient Beach Club ait manqué à ses obligations à l'égard de Mme X..., étant relevé que les récriminations de celle-ci à l'égard de son employeur quant à la réduction de ses attributions dans un but de mise à l'écart, ne sont établies par aucun élément de la cause, sauf par l'attestation de M. A..., laquelle doit être écartée pour les raisons qui ont été exposées ci-avant.
En conséquence la résolution judiciaire du contrat de travail ne peut être prononcée aux torts de l'employeur, et Mme X... ne peut prétendre à aucun complément de salaires, elle sera donc déboutée de ces chefs de demandes.
Sur la demande de règlement des salaires d'octobre à novembre 2007 :
En ce qui concerne les sommes de 1312, 50 euros, 5790 euros et 5400 euros versées par la Société Orient Beach Club, en règlement des factures d'honoraires présentées par Mme X... au titre du travail effectué en juillet, août et septembre 2007, dans la mesure où l'employeur a entendu régulariser cette période en délivrant des bulletins de paie sur lesquels apparaît, outre le règlement d'heures supplémentaires de juillet 2007, la rémunération mensuelle d'août et septembre 2007 au taux horaire de 14, 61 euros bruts, soit compte tenu des heures supplémentaires accomplies et indemnités de nourriture, des montants bruts de 3744, 28 euros et 2407, 47 euros, ou respectivement 2940, 75 euros nets et 1890, 82 euros nets, les sommes de 1312, 50 euros, 5790 euros et 5400 euros, apparaissent constituer des avances à hauteur de 7611, 68 euros sur les heures de travail non encore effectuées au 30 septembre 2007.
Au regard des dispositions de l'article L3251-3 du code du travail, ces avances en espèces ne pouvaient faire l'objet de retenues successives qu'à hauteur du dixième du montant des salaires exigibles. Or en s'abstenant de verser à Mme X... les salaires des mois d'octobre 2007 à janvier 2008 qui lui étaient dus à hauteur d'un montant net de 7135, 42 euros, l'employeur a dépassé le montant des retenues mensuelles prévues par la loi.

Toutefois Mme X... n'est pas fondée à réclamer paiement d'une somme correspondant au montant des salaires retenus, dans la mesure où d'octobre 2007 à janvier 2008, les dispositions de l'article L 3251-3 comme toutes les autres dispositions du code du travail n'étaient pas applicables aux relations entre les parties.

Certes l'employeur a accepté de considérer que cette période ferait l'objet d'une délivrance de bulletins de paie, mais il y a lieu de rappeler que l'existence d'une relation de travail salarié ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité du travailleur.
Or, comme il a été exposé ci-avant, Mme X... a exercé son activité, à compter d'août 2007 jusqu'en janvier 2008, en tant que travailleur indépendant, et ce n'est que par la suite qu'une véritable relation de travail salarié s'est instaurée entre les parties.
Dès lors la Société Orient Beach Club pouvait retenir le trop-perçu par Mme X..., pour la période considérée, sans tenir compte des limites fixées par l'article L 3251-3 du code du travail, étant relevé que la retenue effectuée a compensé exactement la différence entre d'une part les sommes versées pendant ladite période et d'autre part la rémunération due pour cette même période.
Mme X... doit donc être déboutée de sa demande de paiement de rappel de salaires pour les mois d'octobre 2007 à janvier 2008.

Sur la demande d'indemnisation pour travail dissimulé :

Mme X... ayant négocié en août 2007, un contrat de prestataire de services en qualité de travailleur indépendant, avec effet en juillet 2007, n'est pas fondée à reprocher à la Société Orient Beach Club, de s'être intentionnellement soustraite aux obligations prévues à l'article L 8221-5 du code du travail, Mme X... ayant faussement prétendue que sa structure devait être immatriculée au registre des métiers.
Au demeurant c'est elle-même, ne demandant pas son immatriculation, ou en poursuivant son activité de travailleur indépendant malgré un refus d'immatriculation, qui a failli aux prescriptions de l'article L 8221-3 du code du travail relatif au travail dissimulé par dissimulation d'activité. Elle doit être déboutée de sa demande d'indemnisation pour travail dissimulé.
****
Compte tenu du comportement abusif de Mme X..., il ne paraît pas équitable de laisser à la charge de la Société Orient Beach Club les frais irrépétibles qu'elle a exposés, tant en première instance qu'en cause d'appel, il lui sera allouée en conséquence la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ces motifs,
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Infirme le jugement déféré,
Et statuant à nouveau,
Déboute Mme X... de l'ensemble de ces demandes,
Condamne Mme X... à payer à la Société Beach Club la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme X... aux entiers dépens.
Le Greffier, Le Président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/00454
Date de la décision : 23/04/2012
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Type d'affaire : Sociale

Références :

ARRET du 27 novembre 2013, Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 27 novembre 2013, 12-22.160, Inédit

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2012-04-23;11.00454 ?
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