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23/04/2012 | FRANCE | N°10/00659

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 23 avril 2012, 10/00659


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 163 DU VINGT TROIS AVRIL DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 10/ 00659
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes BASSE-TERRE du 23 février 2010.

APPELANTE

SOCIETE SAINT-MARTINOISE BATIMENT ET TRAVAUX PUBLICS 11 Domaine de la Baie nettle BP 446 97055 SAINT-MARTIN

Représentée par Maître Roland EZELIN, avocat au barreau de la Guadeloupe substituant Maître Cécilia DUFETEL (Toque 50), avocat au barreau de la Guadeloupe
INTIMÉ
Monsieur Sébastien Z......... 97150 SAINT-MAR

TIN

Représenté par Maître Sandrine JABOULEY-DELAHAYE (Toque 13), avocat au barreau de la Guade...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 163 DU VINGT TROIS AVRIL DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 10/ 00659
Décision déférée à la Cour : jugement du Conseil de Prud'hommes BASSE-TERRE du 23 février 2010.

APPELANTE

SOCIETE SAINT-MARTINOISE BATIMENT ET TRAVAUX PUBLICS 11 Domaine de la Baie nettle BP 446 97055 SAINT-MARTIN

Représentée par Maître Roland EZELIN, avocat au barreau de la Guadeloupe substituant Maître Cécilia DUFETEL (Toque 50), avocat au barreau de la Guadeloupe
INTIMÉ
Monsieur Sébastien Z......... 97150 SAINT-MARTIN

Représenté par Maître Sandrine JABOULEY-DELAHAYE (Toque 13), avocat au barreau de la Guadeloupe

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 06 février 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, rapporteur, M. Jacques FOUASSE, conseiller, Mme Marie-Josée BOLNET, conseillère. qui en ont délibéré.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 23 avril 2012

GREFFIER Lors des débats Mme Juliette GERAN, Adjointe administrative faisant fonction de greffière.

ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC.

Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Valérie FRANCILLETTE, Greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure :

Par contrat de travail à durée indéterminée en date du 23 juin 2005, M. Z... était engagé par la Société Saint Martinoise de Bâtiment et Travaux Publics (Société SSMBTP) en qualité d'aide conducteur de travaux, moyennant une rémunération brute mensuelle de 2469, 45 euros pour un horaire de 151, 67 heures par mois. Il était stipulé que ce contrat était soumis aux dispositions de la convention collective du bâtiment ouvriers.
Par avenant au contrat de travail en date du 28 février 2007, sa rémunération mensuelle brute était portée à 3709, 96 euros à compter du 1er mars 2007.
Par courrier recommandé avec avis de réception, en date du 30 août 2007, l'employeur adressait à M. Z... une convocation à un entretien préalable en vue d'une sanction disciplinaire, et lui notifiait une mise à pied conservatoire avec effet immédiat, en précisant que le salarié conservait la totalité de sa rémunération et l'usage de son véhicule de fonction durant la procédure.
Par courrier recommandé en date du 6 septembre 2007, reçu par l'employeur le 12 septembre, M. Z... rappelait les points qui avaient été abordés lors de l'entretien, et relatait qu'au cours de celui-ci il avait demandé qu'il lui soit précisé quelle était concrètement la faute grave qui lui était reprochée pouvant justifier une procédure disciplinaire ; il lui avait été répondu qu'il n'y avait aucune faute grave mais que le but de la mise à pied et de la réunion était d'analyser la situation, et il lui avait été indiqué qu'il n'y avait pas de problème " avec l'homme " mais que c'était " la situation " qui dérangeait. M. Z... prenait note qu'il ne lui était reproché aucune faute grave mais que l'employeur souhaitait analyser s'il était possible de continuer de travailler ensemble.
Par courrier recommandé avec avis de réception en date du 20 septembre 2007, l'employeur notifiait à M. Z... son licenciement pour faute grave.
Par requête adressée le 5 novembre 2007, M. Z... par l'intermédiaire de son conseil saisissait le Conseil de Prud'hommes de Basse-Terre aux fins d'obtenir paiement de dommages intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, et paiement de diverses indemnités, ainsi que la remise de documents de fin de contrat.
Par requête adressée le 19 décembre 2007, M. Z... sollicitait l'affectation de l'affaire à la section encadrement de la juridiction prud'homale. L'affaire était effectivement appelée à l'audience du 25 novembre 2008 de la section encadrement du Conseil de Prud'hommes de Basse-Terre.
Par jugement du 23 février 2010, la juridiction prud'homale, section encadrement, se déclarait compétente pour recevoir et juger la demande de M. Z... et constatait le bien-fondé de la demande de celui-ci aux fins de réparation du préjudice financier. La Société SSMBTP était condamnée à payer à M. Z... les sommes suivantes :-23 440 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-11 720, 19 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,-1172, 01 euros à titre d'indemnité de congés payés sur préavis,-2930 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,-3943, 72 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement,-5860 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-11 720 euros à titre de dommages intérêts pour travail dissimulé,-700, 06 euros à titre de dommages intérêts pour irrégularité de l'attestation ASSEDIC,-1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il était en outre ordonné la remise sous astreinte des bulletins de paie rectifiés, d'un nouveau certificat de travail et d'une nouvelle attestation Pôle Emploi, le tout conforme au dit jugement.
Le 30 mars 2010, la Société SSMBTP interjetait appel de cette décision.
Par arrêt du 5 décembre 2011, la Cour de céans, rejetait l'exception d'incompétence soulevée par l'appelante, et, relevant que les bulletins de salaire de M. Z... étaient différents selon qu'il étaient produits par lui ou par la Société SSMBTP, ordonnait la réouverture des débats afin que les parties puissent fournir toutes explications quant aux différences concernant les bulletins de salaire produits.
****
Par conclusions récapitulatives du 25 janvier 2012, auxquelles il a été fait référence lors de l'audience des débats, la Société SSMBTP sollicite la réformation du jugement déféré, et faisant valoir que M. Z... ne relève pas du statut de cadre, entend voir juger que la section encadrement du Conseil de Prud'hommes était incompétente pour juger le présent litige, seule la section industrie pouvant connaître de ce litige, M. Z... devant être débouté de sa demande.
À titre subsidiaire la Société SSMBTP demande que soit constaté que M. Z... a violé les directives de son employeur et a manqué à son obligation découlant du lien de subordination qui le lie.
Faisant valoir que les fautes reprochées ne sont pas prescrites puisque portées à la connaissance de l'employeur tardivement, la Société SSMBTP entend voir juger que le licenciement prononcé à l'encontre de M. Z... est bien fondé sur une faute grave, et que la procédure de licenciement est régulière en ce que la lettre de convocation à l'entretien préalable a bien été adressée au salarié 5 jours francs avant l'entretien, le salarié ne justifiant par ailleurs d'aucun préjudice à ne pas avoir reçu la lettre d'entretien préalable, 5 jours francs avant ledit entretien auquel il s'est rendu.
Elle conclut au rejet de toutes les demandes de M. Z... et réclame paiement des sommes suivantes :-3008, 13 euros au titre du paiement de l'indu correspondant à la rémunération de la période de mise à pied conservatoire,-3000 euros pour procédure abusive,-18 830, 33 euros à titre de répétition de l'indu correspondant au montant versé au salarié au titre de l'exécution provisoire du jugement déféré,-4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

****
M. Z... s'en tenait à ses conclusions récapitulatives du 6 juin 2011, auxquelles il était fait référence lors de l'audience des débats.
Faisant valoir qu'il avait bien un statut de cadre au moment de son licenciement, M. Z... sollicite le rejet de la demande de réaffectation du litige auprès de la section industrie du Conseil de Prud'hommes de Basse-Terre.
Il sollicite la confirmation du jugement entrepris, sauf pour ce qui concerne le quantum des dommages et intérêts alloués pour préjudice moral, pour travail dissimulé et pour irrégularité de l'attestation ASSEDIC, et le montant de l'indemnité octroyée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour ces chefs de demandes il réclame paiement des montants suivants :-11 720 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral, improprement dénommée « dommages et intérêt pour licenciement sans cause réelle et sérieuse " dans le dispositif du jugement,-23 440 euros de dommages intérêts pour travail dissimulé,-1400, 12 euros de dommages et intérêts pour irrégularité de l'attestation ASSEDIC,-3500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance.

M. Z... demande en outre paiement d'une nouvelle indemnité fixée à 3500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile pour l'instance d'appel.
Il relève plusieurs irrégularités affectant la convocation à l'entretien préalable, à savoir l'absence d'indication qu'un licenciement est envisagé, le non-respect du délai de 5 jours et le défaut d'indication de la possibilité pour le salarié de se faire assister par un conseiller extérieur à l'entreprise.
Il soulève la prescription des faits qui lui sont reprochés et entend voir constater l'absence d'une quelconque démonstration de la part de l'employeur des fautes graves invoquées par celui-ci, et même l'absence de cause de cause réelle et sérieuse de son licenciement.
Invoquant différentes anomalies des bulletins de salaire délivrés, quant à l'absence de numéro sous lequel les cotisations sociales ont été versées, l'absence de mention concernant les retenues en matière de retraite complémentaire ARRCO et AGIRC, la dissimulation aux organismes sociaux d'une partie de la rémunération apparue jusqu'en début 2007 sous la forme d'indemnité de transport et de remboursement de frais professionnels, M. Z... fait valoir que la délivrance de bulletins de paie irréguliers équivaut à une non délivrance de bulletin de paie et constitue du travail dissimulé.
Il reproche en outre à l'employeur d'avoir porté sur l'attestation ASSEDIC un décompte erroné du nombre de jours de congés payés restant à prendre, ce qui a eu pour effet de reporter le point de départ de l'indemnisation ASSEDIC de 51 jours.

Motifs de la décision :

Dans ses conclusions, la Société SSMBTP entend voir juger que la section encadrement du Conseil de Prud'hommes de Basse-Terre n'était pas compétente pour rendre le jugement déféré, demandant en conséquence à la Cour de renvoyer l'affaire devant la section industrie de la juridiction prud'homale.
Il y a lieu de rappeler que dans l'arrêt du 5 décembre 2011 suscité, la Cour de céans, qui a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par l'appelante, a expliqué que cette exception de procédure soulevée devant la Cour d'appel était sans objet, car la Chambre sociale de cette Cour, compte tenu de l'effet dévolutif de l'appel, connaissant de tous les litiges prud'homaux dont il est fait appel, quelle que soit la section ayant rendu la décision contestée, est compétente pour juger du fond du litige.
Sur la procédure de licenciement :
M. Z... soutient qu'en l'absence d'institutions représentatives du personnel dans l'entreprise, il devait être fait mention dans la lettre de convocation à l'entretien préalable, de la possibilité de se faire assister pendant cet entretien par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l'autorité administrative.
En l'espèce, la Société SSMBTP ne conteste pas l'absence d'institutions représentatives du personnel au sein de l'entreprise. Dans la mesure où la lettre de convocation à l'entretien préalable en date du 30 août 2007 se borne à indiquer à M. Z... qu'il peut se faire assister par toute personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise, sans faire mention de la possibilité de se faire assister par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l'autorité administrative, et sans mentionner l'adresse des services dans lesquels la liste de ces conseillers est tenue à disposition, il y a lieu de constater que la procédure de licenciement de M. Z... est irrégulière.
Au surplus la lettre de convocation, par laquelle l'employeur fait état de son intention de prendre à l'encontre de M. Z... une sanction disciplinaire, ne contient pas l'indication qu'un licenciement est envisagé.
Il sera en conséquence alloué à M. Z... une indemnité d'un montant de 3906, 73 euros correspondant à un mois de salaire, pour procédure irrégulière de licenciement.
Sur la cause du licenciement :
Dans sa lettre de licenciement pour faute grave du 20 septembre 2007, l'employeur reproche à M. Z... :
- d'avoir, concernant le marché dit « ...... » établi un devis pour travaux sur ce lotissement et avoir engagé auprès du Cabinet Blondel une dépense de 13 770 euros pour étude sans avoir pris de garanties préalables auprès du client, à savoir l'accord signé du devis et le bon pour accord, ce qui constitue une inobservation grave des procédures de l'entreprise, l'employeur n'ayant pas été informé de ce manquement et le client ayant réalisé les travaux décrits avec une entreprise concurrente, ce qui constitue un préjudice pour la Société SSMBTP,
- dans le dossier de réalisation de travaux d'enrobés pour la Région, de ne pas avoir établi de facturation intermédiaire, en relation avec les situations mensuelles et l'avancement des travaux et des charges engagées, et d'avoir pris l'initiative, en accord avec le client, et sans en informer l'employeur, de ne facturer qu'en fin de travaux, sans prendre en considération l'incidence de cette décision sur la trésorerie de l'entreprise au mépris du respect des procédures habituelles.
Il est versé aux débats le devis en date du 15 mai 2006, par lequel le Cabinet de Géomètres-Experts Blondel, propose pour un montant de 13 770 euros, des travaux de bornage sur une parcelle de terrain située sur la Commune de Saint-Martin au lieu-dit ..., cadastrée section AP no413. Il ne résulte pas de l'examen de ce document, que ce devis adressé à M. Nicolas C..., gérant de la Société SSMBTP, ait été accepté et signé par M. Z.... En effet l'examen des signatures respectives figurant notamment sur la pièce 2/ 1 de l'intimée (contrat travail du 23 juin 2005) et la pièce 19 de l'appelante (procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire du 19 décembre 2006), montre que le bon pour accord figurant sur le devis litigieux a été signé par M. Nicolas C..., alors gérant de la Société SSMBTP, et non par M. Z....
Il en résulte en premier lieu que l'employeur de M. Z..., dont le représentant légal était M. C..., a eu connaissance de ce devis accepté, dès le mois de mai 2006, soit plus de 2 mois avant l'engagement de la procédure de licenciement de M. Z..., le 30 août 2007, et qu'en conséquence ce fait était prescrit par l'effet des dispositions de l'article L 1332-4 du code du travail, et ne pouvait être invoqué valablement à l'appui de la décision de licenciement.

En second lieu, et en tout état de cause, il n'est pas rapporté la preuve que M. Z... soit à l'origine de la commande de travaux auprès du cabinet Blondel.
Par ailleurs dans la lettre de licenciement il est reproché à M. Z... de ne pas avoir établi de facturation intermédiaire en relation avec les situations mensuelles et l'avancement des travaux et des charges engagées pour la réalisation de travaux d'enrobés pour la Région, et d'avoir pris l'initiative, sans en informer la direction, de ne facturer qu'en fin de travaux.

Force est de constater que l'employeur ne produit pas ce marché de travaux, et qu'il ne justifie par des modalités contractuelles de règlement dudit marché, ni d'ailleurs des procédures habituelles qu'il invoque et qui seraient pratiquées au sein de l'entreprise en la matière. Il résulte des explications fournies par M. Z... que ce marché a été signé par M. Robert E..., nouveau gérant, qui en avait négocié les modalités, ce qui n'est pas contesté par l'employeur.

Dans la mesure où il n'est pas établi que des facturations mensuelles aient été stipulées pour ce marché inférieur à 90 000 euros, il ne peut être valablement reproché à M. Z... le défaut de telles facturations.
Les griefs invoqués à l'encontre de M. Z... dans la lettre de licenciement n'étant pas fondés, il y a lieu de constater que ce licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

Sur les demandes pécuniaires de M. Z... :

Aucun des éléments produits aux débats ne permet de déterminer l'étendue du préjudice allégué par M. Z... à la suite de son licenciement. Aucun élément n'est donné sur la période de chômage qu'il aurait subie. Il ne peut donc prétendre qu'à l'indemnité minimale équivalente aux 6 derniers mois de salaires prévue par l'article L 1235-3 du code du travail en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, soit la somme de 22 146, 25 euros.

La preuve de circonstances vexatoires et brutales entourant la rupture du contrat de travail de M. Z... n'étant pas rapportées, celui-ci n'est pas fondé à obtenir indemnisation d'un préjudice moral distinct du préjudice résultant de l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement.

En ce qui concerne la qualification de M. Z..., il y a lieu de constater que s'il a été engagé en qualité d'aide conducteur de travaux, il apparaît avoir exercé pleinement des fonctions de conducteur de travaux, puisqu'à aucun moment il n'apparaît qu'ait été interposé entre M. Z... et la gérance la Société SSMBTP un conducteur de travaux en titre.

Par ailleurs on constate que la rémunération de M. Z... depuis son embauche en juin 2005 prévoyant alors un salaire brut mensuel de 2469, 45 euros, a rapidement et considérablement évolué puisque deux ans plus tard sa rémunération brute mensuelle est passée à 3906, 73 euros.
L'employeur a d'ailleurs fait figurer dans l'attestation ASSEDIC qu'il a établie le 1er octobre 2007, le niveau de qualification " cadre " pour M. Z... (pièce 18/ 1 de l'intimé). Il résulte en outre des conclusions de l'employeur que celui-ci attribue à M. Z... la capacité d'établir des factures au nom de la Société SSMBTP, d'engager des dépenses au nom de ladite société et d'ordonner au service comptabilité des règlements. Par les mêmes conclusions il lui reconnaît la qualité de « contact » entre le la Société SSMBTP et le cabinet d'expertise-comptable, et la tâche de transmettre à ce cabinet l'ensemble des informations nécessaires pour le l'établissement des bulletins de paie du personnel, et de les vérifier. La pièce 15 de l'appelante montre d'ailleurs que c'est M. Z... lui-même qui adressait au cabinet d'expertise-comptable FIDEM, le pointage des horaires des salariés de l'entreprise. Il ressort en outre de la pièce 29 de l'appelante que M. Z... avait reçu du gérant de la Société SSMBTP, mandat général auprès de la banque populaire du 22 août 2006 au 27 décembre 2006. Au demeurant l'employeur reconnaît dans ses conclusions que pendant un temps au moins M. Z... a exercé une gérance de fait.

Il ressort en outre des attestations de M. Hilaire F..., responsable technique de France Telecom et de M. Yanick G..., ingénieur TPE, chef de mission à la DDE Guadeloupe, que M. Z... représentait la Société SSMBTP auprès des clients dans l'exécution de travaux, qu'il était coordinateur de ces travaux et qu'il en assurait le suivi, établissant lui-même, contradictoirement avec les clients, les situations de travaux.
Compte tenu des tâches, pouvoirs et responsabilités ainsi confiés M. Z..., il doit être reconnu que celui-ci assurait des fonctions de cadre.
Les bulletins de paie délivrés par l'employeur à M. Z... portaient la mention « BTP » sans autre précision, au titre de la convention collective applicable, ce qui montre que l'employeur a entendu faire application de cette convention collective.
En conséquence et compte tenu de la qualification de M. Z..., se trouvent applicables aux relations de travail entre ce salarié et son employeur, les dispositions de la convention collective nationale en date du 1er juin 2004, brochure no 3002, IDCC 2420, notamment son article 2 selon lequel, pour une ancienneté supérieure à 2 ans le délai de préavis est fixé à 3 mois, l'indemnité conventionnelle de licenciement étant fixée à 3/ 10ème de mois par année d'ancienneté à partir de 2 ans jusqu'à 10 ans d'ancienneté, plus 6/ 10 ème de mois par année au-delà de 10 ans d'ancienneté avec un maximum de 15 mois.

En conséquence l'indemnité compensatrice de préavis allouée à M. Z... doit être fixée à la somme de 11 720, 19 euros, donnant droit à une indemnité compensatrice de congés payés de 1172, 01 euros.
Le montant de l'indemnité de licenciement est porté, par la convention collective, à 3/ 10ème de mois par année d'ancienneté à partir de 2 ans jusqu'à 10 ans d'ancienneté, M. Z... ayant 2 ans et 6 mois d'ancienneté à l'expiration de son contrat de travail, soit à la fin de son préavis, il lui est dû une indemnité égale à 1/ 5ème de mois de salaire par année d'ancienneté, pour les 2 premières années, en application des dispositions de l'article R 1234-2 du code du travail, outre 1, 5/ 10ème de mois de salaire mensuel pour les 6 derniers mois en application la convention collective, soit au total la somme de 2148, 79 euros.
L'employeur devra délivrer à M. Z... des bulletins de paie correspondant à la période de préavis, soit pour les mois d'octobre, novembre et décembre 2007. Le certificat de travail devant être modifié en conséquence.
En ce qui concerne l'attestation ASSEDIC, celle-ci mentionne au titre des congés payés un nombre de jours ouvrables de 44, 49, ce qui correspond très exactement au nombre de jours ouvrables figurant sur le dernier bulletin de paie versé aux débats pour le mois d'août 2007. Toutefois ce décompte apparaît erroné puisque l'examen de l'ensemble des bulletins de paie délivrés à M. Z... montre qu'il n'a jamais été défalqué les congés payés pris par M. Z... sauf 17 jours au mois d'août 2007, alors qu'il a bénéficié de congés en décembre 2005, juillet, août et décembre 2006. Le solde des congés payés restant à prendre s'en trouve faussé, et il y a lieu en réalité de se baser sur le décompte de la Caisse Régionale de Congés Payés faisant ressortir un solde de 10 jours de congés payés restant à prendre au 1er août 2007. À la date du licenciement, au 30 septembre 2007, M. Z... avait donc acquis 15 jours ouvrables de congés payés.

Dans la mesure où l'ASSEDIC a imposé un délai de carence de 51 jours pour l'indemnisation de M. Z..., alors que ce délai n'aurait du être que de 22 jours, à savoir les 7 jours légaux outre les 15 jours de congés payés acquis par le salarié, M. Z... a été privé, en raison de l'erreur affectant les bulletins de salaire et l'attestation ASSEDIC délivrée par l'employeur, de 29 jours d'indemnisation. À raison d'un montant journalier net versé par l'ASSEDIC de 48, 28 euros, M. Z... a subi un préjudice de 1400, 12 euros, lequel doit être indemnisé par l'employeur.

M. Z... étant indemnisé pour la délivrance de l'attestation ASSEDIC erronée, il n'y a pas lieu d'ordonner à l'employeur de délivrer une nouvelle attestation modifiée.

En ce qui concerne les allégations de travail dissimulé avancées par M. Z..., il y a lieu de rappeler que l'article L8221-5 du code du travail tel qu'il était applicable à l'époque de l'exécution de son contrat de travail, prévoyait en premier lieu qu'était réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi le fait pour tout employeur de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue l'article L 1221-10 relatif à la déclaration préalable d'embauche.

Selon l'attestation figurant en pièce 1 de l'intimé, la déclaration unique d'embauche a été reçue par l'organisme social le 28 juin 2005. M. Z... ayant été embauché par contrat du 23 juin 2005, le délai de 5 jours, dont un dimanche, pris par l'employeur pour déclarer son salarié, ne caractérise pas l'intention de se soustraire à la déclaration d'embauche, et ne saurait caractériser des faits de travail dissimulé au sens de l'article suscité.

Le même texte prévoit que le travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié est constitué par le fait de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L3243-2 relative à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli. Il y a lieu de constater que l'employeur a régulièrement délivré des bulletins de paie à M. Z... et qu'il ne lui est pas fait grief d'avoir omis de mentionner des heures de travail.
Si M. Z... peut reprocher à l'employeur de ne pas avoir fait mention sur les bulletins de paie de retenues en matière de retraite complémentaire, et si partie de la rémunération de M. Z... lui a été versée pendant un temps à titre d'indemnité de transport et pour frais professionnels, soustrayant ainsi ces montants aux prélèvements sociaux, ces agissements ne peuvent tomber sous le coup de l'article L8221-5 du code du travail, étant rappelé que si le dernier alinéa de ce texte évoque le fait de ne pas accomplir auprès des organismes de recouvrement, les déclarations relatives aux salaires ou cotisations sociales assises sur ceux-ci, ces dispositions ne sont entrées en vigueur qu'à la suite de la loi no 2010-1594 du 20 décembre 2010, non applicable au contrat travail de M. Z..., lequel a pris fin le 31 décembre 2007.

En conséquence il n'est pas caractérisé à la charge de l'employeur des faits de travail dissimulé. M. Z... sera débouté sur ce chef de demande.
Comme il paraît inéquitable de laisser à la charge de M. Z... les frais irrépétibles qu'il a exposés, tant en première instance qu'en cause d'appel, il lui sera alloué la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de celle déjà allouée sur le même fondement le premier juge.

Par ces motifs,

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Vu l'arrêt du 5 décembre 2011 de la Cour de céans rejetant l'exception d'incompétence soulevée par la Société SSMBTP,
-10-

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la Société SSMBTP à payer à M. Z... la somme de 11 720, 19 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, celle de 1172, 01 euro à titre d'indemnité de congés payés sur préavis, ainsi que la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Le réforme pour le surplus,

Et statuant à nouveau,

Condamne Société SSMBTP à payer à M. Z... les sommes suivantes :-22 146, 25 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-3906, 73 euros à titre d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement,
-2148, 79 euros à titre d'indemnité de licenciement,
-1400, 12 euros à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice subi à la suite de l'erreur affectant l'attestation ASSEDIC,

Dit que la Société SSMBTP devra remettre à M. Z..., dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt, les bulletins de paie pour la période de préavis, soit les mois d'octobre, novembre et décembre 2007, ainsi qu'un certificat de travail modifié en conséquence, chaque jour de retard passé ce délai sera assorti d'une astreinte de 50 euros,

Y ajoutant,
Condamne la Société SSMBTP à payer à M. Z... la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne le Société SSMBTP aux entiers dépens tant de première instance que d'appel,

Déboute les parties de toute conclusion plus ample ou contraire.

Le Greffier, Le Président.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/00659
Date de la décision : 23/04/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2012-04-23;10.00659 ?
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