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13/02/2012 | FRANCE | N°10/02214

France | France, Cour d'appel de Basse-Terre, Chambre sociale, 13 février 2012, 10/02214


COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 81 DU TREIZE FEVRIER DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 10/ 02214
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 23 novembre 2010.
APPELANT
Monsieur Bruno X...... 97190 LE GOSIER Représenté par Me Thierry AMOURET- (TOQUE 63) avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉE

LA SOCIETE COURTAGE INTER CARAIBES 2 rue Eugène EUCHARIS DILLON STADE 97200 FORT DE FRANCE (MARTINIQUE) Représentée par Me Pascale BERTE avocat au barreau de FORT-DE-FRANCE

COMPOSITION DE LA

COUR :

L'affaire a été débattue le 07 Novembre 2011, en audience publique, devant la Cour c...

COUR D'APPEL DE BASSE-TERRE
CHAMBRE SOCIALE ARRET No 81 DU TREIZE FEVRIER DEUX MILLE DOUZE

AFFAIRE No : 10/ 02214
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes de POINTE A PITRE du 23 novembre 2010.
APPELANT
Monsieur Bruno X...... 97190 LE GOSIER Représenté par Me Thierry AMOURET- (TOQUE 63) avocat au barreau de GUADELOUPE

INTIMÉE

LA SOCIETE COURTAGE INTER CARAIBES 2 rue Eugène EUCHARIS DILLON STADE 97200 FORT DE FRANCE (MARTINIQUE) Représentée par Me Pascale BERTE avocat au barreau de FORT-DE-FRANCE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 Novembre 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, M. Philippe PRUNIER, conseiller, Mme Marie-Josée BOLNET, conseillère, rapporteur. qui en ont délibéré.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats de ce que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 30 janvier 2012 puis le délibéré a été prorogé au 13 février 2012
GREFFIER Lors des débats Mme Maryse PLOMQUITTE, Greffière.
ARRET :
Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l'article 450 al 2 du CPC. Signé par M. Bernard ROUSSEAU, Président de chambre, président, et par Mme Juliette GERAN, Adjointe administrative faisant fonction de greffière, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
M. et Mme X..., avec d'autres associés, ont cédé au groupe GENRALI leurs entreprises de courtage d'assurances en Guadeloupe (ASSUR'ANTILLES) et en Martinique (COSERFI), ainsi q'une société (GESTAN) en Guadeloupe, spécialisée dans la gestion de prestations en matière d'assurances.
Cette cession est intervenue le 1er avril 2003, date à partir de laquelle les époux X... ont négocié la poursuite d'une activité professionnelle au profit de leur acheteur.
Après une première période en qualité de prestataire informatique indépendant, M. Bruno X... est embauché par la société GENERALI Structure ANTILLES " GESTRAN SAS " par contrat à durée indéterminée prenant effet le 1er janvier 2004, en qualité de responsable informatique avec un statut de cadre.
Le 5 octobre 2004, il fait l'objet d'une mise à pied conservatoire et est licencié pour faute grave à effet le 22 octobre 2004.
M. Bruno X... saisit le conseil de prud'hommes qui, par décision du 5 décembre 2006, reconnaît l'absence de cause réelle et sérieuse et le caractère particulièrement préjudiciable du licenciement, et fixe des dommages et intérêts à concurrence de la somme de 175 000 €.
Par arrêt du 31 mars 2008, la cour d'appel de Basse-Terre a jugé le licenciement discriminatoire et l'a annulé en ordonnant la réintégration de M. X... et la régularisation par l'employeur des salaires dus à celui-ci, correspondant à l'emploi maintenu depuis le 05 octobre 2004 jusqu'à la réintégration de celui-ci en application de l'article L. 122-45-2 du code du travail.
Par arrêt du 30 juin 2010, la cour de cassation confirmait la nullité du licenciement et faisait également droit au pourvoi incident de M. X... en lui reconnaissant son droit à la rémunération variable dont il avait été privé.
Par courrier du 15 mai 2008, la société COURTAGE INTER CARAÏBES, qui a intégré la société GESTRAN, informait M. Bruno X... de sa réintégration à compter du lundi 2 juin 2008.
Le 17 septembre 2008, M. Bruno X... se voit notifier un exploit d'huissier l'informant de le mise en oeuvre d'une procédure de licenciement pour faute grave et d'une mise à pied conservatoire à effet immédiat dans l'attente de l'issue de cette procédure.
L'entretien préalable est fixé au 30 septembre 2008 et l'employeur indique qu'il entend réunir le conseil de discipline conformément à l'article 16 de la convention collective applicable.
M. Bruno X... est convoqué devant ce conseil le 26 septembre 2008. Le 23 septembre, il reçoit 52 feuilles de pièces en vue de cette réunion.
Le jour dit, il précise à son employeur qu'il n'a reçu aucune explication, conformément aux stipulations conventionnelles.
S'agissant d'une garantie de fond dont le non-respect rend le licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'employeur a renoncé à tenir le conseil de discipline le 26 septembre et en a différé la tenue au 3 octobre 2008.
Par nouvelle lettre recommandée avec avis de réception du 6 octobre 2008, M. Bruno X... est convoqué à un nouvel entretien préalable de licenciement fixé au 20 octobre 2008.
La mise à pied a effet du 18 septembre 2008 est confirmée par l'employeur. Le salarié s'est présenté à l'entretien préalable de licenciement le 20 octobre 2008.
Par lettre recommandée avec avis de réception notifiée le 29 octobre 2008 (non réclamée), l'employeur a procédé au licenciement de M. Bruno X... pour faute grave.
Considérant que son licenciement est nul, celui-ci a assigné la société COURTAGE INTER CARAÏBES devant le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre aux fins de voir, à titre principal, juger nul son licenciement pour avoir été prononcé en violation du statut protecteur applicable aux candidats aux élections prud'homales, ordonner immédiatement sa réintégration et assortir la décision à intervenir de l'exécution provisoire, et à titre subsidiaire, juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner son employeur au paiement de diverses sommes.

Par jugement du 23 novembre 2010, le conseil de prud'hommes de Pointe-à-Pitre a jugé nul le licenciement de M. Bruno X..., dit que le comportement de celui-ci rend impossible sa réintégration, condamné la société COURTAGE INTER CARAÏBES, en la personne de son représentant légal, à lui verser les sommes de 18 480 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 13 346 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement et 73 920 € au titre de l'indemnité pour rupture abusive, débouté M. Bruno X... pour le surplus de ses demandes, débouté la société COURTAGE INTER CARAÏBES de sa demande reconventionnelle et condamné la société COURTAGE INTER CARAÏBES aux entiers dépens de l'instance.

Par déclaration déposée le 14 décembre 2010, M. Bruno X... a interjeté appel de cette décision.
Par conclusions déposées le 16 mai 2011 et soutenues à l'audience du 7 novembre 2011, M. Bruno X..., représenté, demande à la cour de :- confirmer le jugement repris en ce qu'il a annulé le licenciement pour faute grave,- l'infirmer en ce qu'il a refusé sa réintégration,- ordonner sa réintégration dans l'emploi qu'il occupait initialement en Guadeloupe ou, à défaut, sur un emploi équivalent,- condamner la société COURTAGE INTER CARAÏBES à lui payer une indemnité équivalente aux salaires dont il est privé depuis sa mise à pied conservatoire le 17 septembre 2008,- condamner la même à lui payer la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- la condamner enfin aux entiers dépens.

Il soutient que :- si la nullité du licenciement n'a pas fait l'objet d'une déclaration d'appel, il importe néanmoins de rappeler que le licenciement d'un candidat aux élections prud'homales doit être autorisé par l'inspecteur du travail, les principes réaffirmés par la chambre sociale de la cour de cassation selon lesquels la période de protection spéciale des candidats aux élections de conseillers prud'hommes, prévue par l'article L. 514-2 (article L. 2411-22 nouveau) du code du travail, court à compter de la publication de la liste des candidats dans les conditions prévues par l'article R. 513-37 du même code. Son point de départ peut cependant être fixé antérieurement, soit à la date à laquelle l'employeur a eu connaissance de l'imminence de la candidature du salarié, si le salarié en apporte la preuve, soit à la date de notification, par le mandataire de la liste, de la proposition de sa candidature, dans le cas où cette formalité, prévue par l'article L. 513-4 alinéa du code du travail a été effectivement accomplie, que cette protection d'ordre public absolu est valable pendant les 6 mois qui courent à compter de la date légale de publication des listes de candidatures, soit du 15 octobre 2008 au 15 avril 2009 pour les élections prud'homales de décembre 2008,- son licenciement est intervenu pendant cette période de protection spéciale qui court à compter de la publication de la liste des candidatures, qu'il figurait sur cette liste, que l'employeur ne pouvait donc notifier son licenciement pour faute grave le 27 octobre sans solliciter l'autorisation de l'inspecteur du travail, que le point de départ de la protection pourrait être fixé au 19 juin 2008, date à laquelle il a fait part à son employeur de sa décision de se présenter en adressant un mail à la directrice des ressources humaines le 19 juin 2008 qui lui confirme son inscription ainsi que les mails suivants et qu'à cet égard, l'employeur ne pouvait pas ignorer sa candidature,- son licenciement était également irrégulier car le 17 septembre 2008, son employeur lui impose une mise à pied conservatoire et le convoque devant le conseil de discipline sans lui remettre les explications écrites que la convention collective impose,- en outre, son licenciement ne peut être justifié par une quelconque dissimulation mensongère de ressources car aucune disposition légale n'impose au salarié licencié de demeurer inactif pendant la durée de la procédure judiciaire initiée pour contester le fondement du licenciement, qu'aucune interdiction contractuelle n'a davantage été prise par l'employeur pour se préserver d'une concurrence éventuelle, qu'il est fondé à revendiquer paiement de l'intégralité de ses rémunérations compte tenu du fait que son premier licenciement a été jugé discriminatoire, comme consécutif d'une faute grave et intentionnelle de l'employeur,- il n'a jamais contesté le fait d'avoir effectivement travaillé du 1er février au 28 février 2008 comme prestataire indépendant et qu'il avait perçu à ce titre la somme de 22 500 €, qu'au 17 septembre 2008, date où l'employeur initie sa procédure de licenciement, celui-ci a su parfaitement qu'il n'existait plus aucune activité pour la société SOGAGIA depuis février 2008.

Il précise que la nullité du jugement emporte l'anéantissement rétroactif du licenciement qui est censé n'avoir jamais existé, qu'il est en droit d'exiger sa réintégration qui ne peut être écartée dans l'unique cas de l'impossibilité totale et insurmontable pour l'employeur de lui proposer un nouvel emploi, que la cour de cassation va même plus loin dans l'hypothèse d'annulation d'un licenciement prononcé pour des motifs discriminatoires, comme c'est le cas en l'espèce, pour affirmer que l'obligation de réintégration ne s'étend pas au groupe auquel appartient l'employeur, que la cour constatera que les motifs de l'hostilité des salariés invoqués tant par l'employeur que par le conseil de prud'hommes ne constituent pas un cas de force majeure susceptible de s'opposer à sa réintégration qui est de droit.

Par conclusions du 10 octobre 2011 soutenues oralement, la société COURTAGE INTER CARAÏBES, représentée, demande à la cour de :- dire et juger que M. X... ne peut se prévaloir du statut protecteur compte-tenu de sa déloyauté,- dire et juger en tout état de cause, si elle venait à prononcer la nullité du licenciement, que la réintégration est impossible en raison de la totale déloyauté de l'intéressé, eu égard du poste stratégique qu'il serait amené à occuper,- dire et juger que M. X... ne peut obtenir d'indemnisation au titre de la violation du statut protecteur du fait qu'il ait présenté cette demande hors du délai de protection,- dire et juger qu'aucune indemnité n'est due à quelque titre que ce soit, en raison de la totale déloyauté de M. X...,- condamner celui-ci au paiement de la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Au l'appui de ses demandes, Elle rappelle les conditions d'embauche de X..., la première procédure de licenciement engagée contre l'intéressé, laquelle a été annulée au motif d'un licenciement discriminatoire et a entraîné la réintégration du salarié, sa demande de communication de pièces justifiant des revenus perçus pendant du 5 octobre 2004 au 31 mai 2008, correspondant au temps écoulé de la procédure judiciaire jusqu'à la période de sa réintégration, aux fins de procéder à la reconstitution de ses revenus, laquelle est restée sans réponse alors que M. X... réintégrait son poste le 2 juin 2008, qu'elle fait observer par ailleurs qu'il n'était pas question de faire le reproche à l'intéressé d'avoir travaillé sur cette période, lequel savait pertinemment qu'il s'agissait de déduire les revenus de remplacement
Elle fait remarquer également avoir obtenu de l'intéressé le 9 juin 2008 l'information de n'avoir perçu aucun revenu au titre des années 2006 et 2007, alors qu'elle apprenait du directeur du groupe ASSINCO la confirmation de prestations réalisées entre 2005 et juillet 2008 par l'intéressé, et enfin la création concomitante le 1er juin 2008 par M. X... d'une société concurrente dont l'activité principale correspondait aux courtages d'assurance, aux conseils en gestion d'assurance, tous ces éléments caractérisant la déloyauté de celui-ci et la mise en oeuvre d'une procédure de licenciement pour faute grave à son encontre.
Elle fait valoir en outre que la procédure de licenciement a été parfaitement respectée, que M. X... a d'abord été convoqué devant le conseil de discipline, que des reports ont été décidés à la demande du salarié, estimant une première fois, devant le conseil de discipline, ne pas avoir reçu la note explicative et se prévalant une seconde fois de l'inobservation des 5 jours ouvrés entre la réception de la convocation et l'entretien, que ces reports provoquaient inéluctablement le report de la date de l'entretien préalable, que c'est dans ces conditions qu'il lui était notifié son licenciement pour faute grave.
Elle précise que la jurisprudence de la cour de cassation considère que le comportement déloyal du salarié lui interdit de se prévaloir du statut protecteur de l'article L. 2411-22 du code du travail (cass. soc. 25/ 06/ 2003), que l'impossibilité de réintégrer prévue par l'article L. 1235-11 du code du travail ne se limitent pas aux deux cas prévus par cet article, surtout que l'adverbe " notamment " permet d'infléchir la retenue des deux seuls cas envisagés, que dans sa décision no2004-509 DC du 13 janvier 2005, le conseil constitutionnel a estimé que la règle était suffisamment claire et précise et qu'il appartient au juge de la mettre en oeuvre, que le professeur

Gérard B... a expliqué que le " texte ne porte qu'une règle, celle qui exclut que la réintégration soit prononcée quand elle est impossible " " le législateur est dans son rôle lorsqu'il intervient pour infléchir une jurisprudence allant trop loin dans la voie d'une théorie de l'impossibilité absolue. Mais la règle nouvelle laisse dans tous les cas au juge une marge d'appréciation décisive qui se rattache à son rôle d'interprète légitime de la norme ", qu'en l'espèce, les exemples déloyaux, retenus par les premiers juges, sont multiples et n'ont jamais cessé de s'accumuler : le chèque de 108 146, 18 € remis à M. X... en octobre 2004 représentant une partie de l'acquisition de l'une des sociétés de celui-ci par le groupe GENERALI a été retourné impayé par la banque pour falsification du bénéficiaire, M. X... l'ayant mis au nom de sa belle-soeur-le jugement du tribunal de commerce de Paris du 11 septembre 2007 faisant état d'un mode de gestion de M. X... n'obéissant à aucune justification économique et relevant sa mauvaise foi et ses fausses déclarations-le courrier du 9 juin 2008 démontre sa totale déloyauté puisqu'il nie avoir perçu des revenus professionnels pendant sa période de chômage, alors qu'à minima, il a perçu la somme de 22 500 €, ce qu'il a reconnu par la suite lorsqu'il a été confondu-le fait d'avoir nié que son entreprise n'avait aucune activité-les bilans de 2006 à 2008 de sa société PSI ont été faussement établis en 2009 pour les besoins de la procédure en cours devant la cour d'appel de Fort-de-France-le grand livre de la société SOGAGIA révèle une prestation de 28 500 € au profit de M. X... alors que celui-ci ne déclare que 20 100 €- les déclarations de revenus ne sont pas conformes aux bilans établis-alors que l'appelant indiquait qu'il avait dissous sa société PSI, il en recréait une autre ayant exactement la même activité concurrente de celle de son employeur-le poste occupé par son épouse dans la société ASSINCO concurrente-la déloyauté de M. X... même reconnue par les salariés qui craignent le retour de celui-ci.

Elle fait enfin remarquer également qu'elle ignorait que M. X... comptait se présenter dans le collège des cadres aux élections prud'homales, que celui-ci a multiplié les manoeuvres dilatoires pour retarder la procédure de licenciement dans le seul but de rechercher le bénéfice de la protection, qu'il n'a jamais communiqué sa déclaration individuelle de candidature et son adhésion au syndicat CFE-CGC alors que sommation lui en a été faite, que durant toute la procédure de licenciement, M. X..., sachant ce qu'il encourrait, ne l'a jamais informé qu'il se portait candidat aux élections prud'homales, que le mail adressé à Mme C... relatif au dépôt de la liste des salariés de GESTAN à la mairie n'informe nullement de son intention de se présenter candidat, que son licenciement pour faute grave était amplement fondé, qu'enfin, la cour ne pourra que constater l'impossibilité de réintégrer M. X... au poste de responsable informatique en raison de sa déloyauté, qu'en outre, celui-ci bénéficiait d'une protection de 6 mois à compter de la publication des candidatures, soit à compter du 15 octobre 2008, que la fin de cette protection se situait au 15 avril 2009, qu'or, il a pour la première fois évoqué sa réintégration devant le conseil de prud'hommes le 21 mai 2009 et qu'il en sera débouté car le comportement déloyal du salarié devra être pris en compte non seulement pour faire échec à sa réintégration mais aussi dans l'estimation du montant de l'indemnisation due au titre de la violation du statut protecteur (cass. soc du 16 février 2011).
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère expressément à leurs conclusions écrites et à la décision antérieure.

MOTIFS DE LA DÉCISION

SUR LA NULLITÉ DU LICENCIEMENT
Attendu qu'aux termes de l'article L. 2411-22 du code du travail, le licenciement du conseiller prud'homme ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail ;
Attendu que cette autorisation est également requise pour le salarié candidat aux fonctions de conseiller prud'homme dès lors que le salarié fait la preuve que l'employeur a eu connaissance de l'imminence de sa candidature, et pendant une durée de 6 mois après la publication de la liste des candidatures par le préfet ;
Attendu que seul le comportement frauduleux du salarié empêchant l'employeur d'avoir connaissance de son statut ou de son projet d'être candidat peut priver celui-ci de la protection attachée à ce statut ;
Attendu que M. Bruno X... démontre que son employeur a eu connaissance de son intention de se présenter aux élections prud'homales puisque par message électronique du 7 juillet 2008, Mme Betty C..., agissant en lieu et place de la directrice des ressources humaines, informait celui-ci de son inscription sur la liste des salariés de l'entreprise déposée à la mairie de Baie-Mahault dans les termes suivants " Après vérification auprès des mairies concernées, nous vous confirmons que vous faites partie de la liste des salariés de GESTAN, déposée à la mairie de Baie-Mahault " et portait concomitamment à la connaissance de M. Serge D..., directeur général de la société GESTAN, cette information en lui adressant ce message en copie ;

qu'à cette date, aucune manoeuvre frauduleuse ne pouvait être retenue contre le salarié puisque la procédure de licenciement n'était lancée qu'au mois de septembre 2008 ;

que c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que le licenciement de M. Bruno X... est intervenu pendant la période de protection spéciale des candidats aux élections des conseillers prud'hommes ;
qu'il convient de confirmer le jugement entrepris de ce chef.
SUR LA RÉINTÉGRATION
Attendu que le licenciement d'un salarié en violation du statut protecteur est nul de plein droit et qu'en conséquence, le salarié qui demande sa réintégration, doit être réintégré dans son emploi ou, à défaut, dans un emploi équivalent ; qu'aucun délai n'est en outre imparti à celui-ci pour demander sa réintégration ;
qu'en l'espèce, M. Bruno X... sollicite sa réintégration qui est alors de droit ;
qu'il y a lieu en conséquence d'infirmer le jugement entrepris de ce chef et des chefs financiers subséquents, et d'ordonner la réintégration de l'appelant dans l'emploi qu'il occupait initialement en Guadeloupe dans la société COURTAGE INTER CARAÏBES ou, à défaut, sur un emploi équivalent, à compter de la notification de la présente décision.
SUR L'INDEMNITE EQUIVALENTE AUX SALAIRES
Attendu que le salarié qui demande sa réintégration, a droit à une indemnité égale au montant de la rémunération qu'il aurait perçue depuis la date de son éviction jusqu'à l'expiration de la période de protection ;
Attendu que la demande d'indemnisation formulée après l'expiration de cette période ne peut prospérer ;
Attendu qu'e l'espèce, la période de protection venait à expiration le 15 avril 2009 ;
Attendu que M. Bruno X... n'assigne son employeur par exploit d'huissier que le 15 mai 2009 ;
Qu'il convient en conséquence de rejeter cette demande, présentée hors délai.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :
Déclare l'appel recevable en la forme ;
Au fond,
Confirme le jugement en ce qu'il a jugé nul le licenciement de M. Bruno X... ;
Le réforme pour le surplus et statuant à nouveau,
Dit que la réintégration de M. Bruno X... dans la société COURTAGE INTER CARAÏBES est de droit ;
Ordonne en conséquence sa réintégration dans l'emploi que celui-ci occupait initialement en Guadeloupe ou, à défaut, sur un emploi équivalent, à compter de la notification de la présente décision ;
Rejette les autres demandes ;
Condamne la société COURTAGE INTER CARAÏBES aux éventuels dépens ;

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Basse-Terre
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/02214
Date de la décision : 13/02/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.basse-terre;arret;2012-02-13;10.02214 ?
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